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L’histoire de Pourim est plus ancienne que celle de Hanouka. Alors que Hanouka
se situe à l’époque du Second Temple de Jérusalem ; Pourim remonte à l’exil
babylonien, qui a duré depuis la destruction du Premier Temple de Jérusalem
jusqu’à la construction du Second.
Trop souvent, le public francophone se fait de l’histoire de Pourim une idée
plus ou moins fondée sur la lecture d’Esther de Racine, ou, au mieux, de celle
de la traduction française de la Meguila d’Esther. Or, comme dans tous les
domaines des textes bibliques, une compréhension correcte dépend de la
connaissance des commentaires, de la transmission orale. En ce qui concerne
Pourim, il y a tout un volume de la guemara qui concerne la Meguila, et qui
s’appelle Masseheth Meguila. Il y a de nombreux commentaires sur la meguila,
citons notamment le targoum chéni, qui offre des commentaires très détaillés.
Si Hanouka est le dernier miracle qui est arrivé à l’époque du Beth Hamikdach,
et qui est en relation avec la spiritualité du Beth Hamikdach, Pourim a été le
premier grand miracle que Hakadoch Barouh Hou a accompli en-dehors d’Eretz
Israël. Ce miracle porte les signes d’un événement exilique.
L’histoire du miracle de Pourime se présente comme un enchaînement d’événements,
qui, analysés chacun à part, n’offrent aucun signe de miracle. C’est une suite
de situations, comme il s’en présente couramment dans cette région du monde
qu’est la Perse, pour ne pas l’appeler le Pays des Mille et Une nuits. Alors que
la victoire militaire des Hasmonéens était visiblement miraculeuse, ainsi que
l’était la durée de la combustion de la seule fiole d’huile d’olives pure, dans
toute l’histoire de Pourim, rien ne va contre les lois de la nature ; rien de
physiquement miraculeux.
Et pourtant, on a bien raison de parler d’un miracle. C’est que Pourim nous
enseigne la différence que nous trouverons entre les miracles en Eretz Israël
d’une part, et ceux que Hakadoch Barouh Hou accomplit pour nous en-dehors
d’Eretz Israël. Alors en quoi consiste le miracle de Pourime ?
Lorsque les Juifs de Suze se sont rendus à l’invitation d’Ahachvéroch au festin,
auquel Mordehay leur avait interdit d’aller, personne ne se doutait que cette
désobéissance serait la cause d’un danger qui planerait sur tous les Juifs du
monde (à l’époque, on disait sur toutes les cent vingt sept provinces de la
Perse, mais c’est la même chose)
Personne ne se doutait que la nomination au poste de premier vizir (premier
ministre, si vous préférez) de l’antisémite notoire qu’était Haman, était une
étape, qui enfilerait le châtiment qu’enverrait Hakadoch Barouh Hou.
Personne ne se doutait non plus que la disparition de Vachti, pour faire place à
Esther au palais d’Ahachvéroch, enfilait la possibilité éventuelle d’une
délivrance.
Personne ne se doutait non plus que l’intervention de Mordechay pour étouffer
dans l’œuf le projet d’assassinat d’Ahachvéroch par Bigtan et Téréch, articulait
un autre élément de cette perspective de la délivrance.
Je n’ai pas consulté les journaux de l’époque ; mais je peux vous dire que de
tous les médias de l’époque, aucun n’a vu dans ces faits autre chose que des
faits divers isolés, sans aucun lien entre eux.
Par conséquent, lorsque la délivrance est arrivée, tous les médias de l’époque
n’ont pas du tout vu en elle autre chose qu’un fait divers supplémentaire, sans
lien avec ceux qui l’avait précédée.
Et il est vrai que la Main de Hachem était complètement déguisée. Il envoyait
des événements apparemment naturels, dus au hasard, sans plus.
Mais chez les Juifs, chez nous, on sait que l’histoire est un enchaînement
ininterrompu d’interventions de Hachem, comme suite au comportement de Son
peuple. Tant que les Juifs fléchissent dans leur fidélité à Hachem et aux
Mitsvoth, Hachem envoie des événements qui composent une adversité dramatique.
Ensuite, lorsque les Juifs se réveillent enfin, acceptent d’écouter Mordechay,
et de faire techouva, Hachem envoie le dénouement miraculeux. Miraculeux,
certes, mais non apparemment miraculeux. Aucune loi de la nature ne s’efface
devant le miracle de Pourim.(contrairement au miracle de Hanouka, qui a eu lieu
en Eretz Israël).Pourim se passe très loin d’Eretz Israël.
D’autre part, si le miracle a apporté une délivrance totale par rapport au
danger qui l’avait précédée, toutefois les circonstances qui entourent le
miracle, ne sont pas très dignes. En effet, qu’une fille juive comme Esther soit
acculée à se donner à un non-juif, est le signe que cette génération n’était pas
très digne dans sa vie juive.
Arrivés là dans notre réflexion, disons que deux leçons doivent être tirées de
cette approche. Pour qui vit en Eretz Israël, Pourim vient rappeler que les
miracles que Hachem accomplit pour nous portent la marque de notre niveau
spirituel.
Pour qui vit (encore) en-dehors d’Eretz Israël, Pourim nous apprend que Hachem
accomplit des miracles en n’importe quelle partie du monde, en faveur de ceux
qui par leurs actes et leurs pensées Lui sont fidèles. Toutefois, pour discerner
ces miracles, il faut déchirer le voile naturel qui les enveloppe, il faut
percer l’apparence de faits divers que prennent les miracles de Hachem en-dehors
d’Eretz Israël.
D’ailleurs, l’usage populaire de se déguiser à Pourim, doit être bien compris
comme notre affirmation que quelle que soit la manière dont Hachem déguise Ses
miracles, sous l’aspect de faits naturels, nous nous sentons indéfectiblement
capables d’y voir de vrais miracles. Nous décodons les faits apparemment
naturels qui cachent de vraies interventions de Sa main.
Nos Sages nous enseignent que la délivrance qu’a été le miracle de Pourim, s’est
accompagnée d’un renouvellement de l’engagement des Juifs de se conformer aux
Mitsvoth. Si, au Sinaï, Israël s’est engagé à vivre une existence de Tora et de
Mitsvot, du fait de la crainte que leur a inspirée Hachem par les miracles de la
Sortie d’Egypte et de la Révélation au Sinaï, la fête de Pourim a suscité une
nouvelle acceptation de la Tora et des Mitsvoth, dans la joie d’avoir été
délivrés par ce grand miracle.
De même que chaque année, la fête de Chavouoth nous incite à renouveler notre
engagement envers Hachem, du fait de la crainte que nous inspire Mattan Tora (le
Don de la Tora), ainsi, chaque année, la fête de Pourim est l’occasion de
renouveler et de renforcer notre fidélité à Hachem et à Ses Mitsvoth, grâce à la
joie qui emplit nos cœurs.
A tous et à toutes, je souhaite une bonne fête de Pourim.
Rav Hayim Yacov Schlammé
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