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LES MARIAGES ET LES BAINS TURCS 


   

 

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Interieur de Hammam




Quand j'avais cinq ans, j'accompagnais ma grand-mère paternelle Nouna, qui était la maquilleuse de Béja, notre ville. Elle maquillait surtout les jeunes filles candidates pour les fiançailles ou le mariage. Les semaines précédant les mariages elle était invitée à la maison et au bain turc pour maquiller la mariée et les femmes de la famille. Ainsi j'avais le privilège d'aller avec elle à plusieurs mariages musulmans et juifs.

"Il faut rester tranquille!" me disait-elle. Quand j'avais l'envie d'aller au petit coin, je devais me patienter et attendre qu'elle finisse son travail. Pour ne pas que je m'ennuie, ma grand-mère prenait le soin de me demander de temps à autre:
- "Mir, qu'en penses-tu de la mariée?" ou bien:
- "Elle est belle la mariée n'est-ce pas?" Les jeunes filles, amies de la mariée défilaient l'une après l'autre pour voir le progrès du maquillage que ma grand-mère venait de faire. De temps en temps la maîtresse de la maison faisait une apparition, et pour se donner de l'importance celle-ci claquait ses mains et faisait signe aux serveuses d'offrir un verre de thé ou une friandise à ma grand-mère. Puis elle se penchait vers moi et me donnait un gâteau et une pièce de monnaie. Quand ma grand-mère voyait la pièce de monnaie elle fronçait ses sourcils et me lançait un regard comme signe de me tenir correctement. La monnaie donnait automatiquement un meilleur degré de respect à la maitresse de la maison, puis ma grand-mère d'une voix douce, elle ajoutait:
- "Dis à madame: ‘Y KATER KHEREK!'" (Merci) puis d'une haute voix, elle ajoutait:
- "Elle te plaît la mariée n'est pas?"
La maîtresse de la maison entendait ces propos et comme signe de reconnaissance envers ma grand-mère, elle disait d'une voix ferme:
- "ZGHIRTA LEL HARQASSA!" (Faites des yous-yous à la Maquilleuse)
Alors les sons de yous-yous venant de toutes directions remplissaient la salle. Ma grand-mère rougissait et m'embrassait, puis, comme pour détourner l'attention vers moi elle disait aux femmes qui l'entouraient:
- "ZGHIRTA ALA MIR!" (Faites des yous-yous à mon petit fils), en signe d'affection. Les yous-yous rebondissaient, cette fois-ci, ils étaient à mon égard, je ne saisissait pas ce qui me parvenait de toutes parts.
Ensuite les serveuses passaient avec des plateaux de friandises qu'elles distribuaient à tout le monde. Ces scènes se répétaient aussi longtemps que ma grand-mère faisait son travail. Quant à moi, elles me paraissaient drôles, surtout que je n'avais aucun mérite d'être acclamé sauf d'avoir été le petit-fils de ma grand-mère . Ou peut-être ma grand-mère voulait me recompenser pour avoir été sage? Mais que peut dire le mort devant ses laveurs, "Ech Yqoul el Myet qbalet Hassalou" Tout celà m'étaient étrange, et avait duré jusqu'au jour où la tolérance qu'on accordait aux enfants de moins de dix ans, d'être parmi les femmes, cessait.

Quand ma grand-mère m'adressait la parole, je n'avais ni choix ni avis à lui donner, mais par politesse ou par honte je faisais toujours signe avec ma tête que j'étais d'accord avec elle, malgré que je ne voyais pas la raison pour ce maquillage et celui-ci me paraissait même bien drôle et futile.

Lorsque ma grand-mère terminait une phase du maquillage elle s'exclamait:
- "Choufou Ezein!" (Regardez la beauté!) et me lançait un regard, qui avait l'air de demander mon avis. Je faisais signe avec ma tête que j'étais aussi d'accord pour ce qu'elle disait. En réalité ces questions me signalaient l'approche de la fin de la journée de travail que j'attendais patiemment. J'avais hâte qu'elle finisse, car, retourner enfin à la maison me paraissait plus attractif que la mariée et son entourage. C'était mon avis d'alors.

Nous allions de temps à autre au bain turc. Certaines familles de la mariée nous invitaient au Hammam Sayala (le bain turc alimenté par une source naturelle d'eau chaude). Ce jour là, celui-ci était loué par la famille de la mariée pour tout un après-midi. J'allais avec ma grand-mère et assistais à toutes les cérémonies. Je n'aimais pas le Hammam, car j'étouffais et je glissais souvent sur le sol mouillé et une fois je m'étais bléssé au front. Pour arrêter le sang on me mit du "bon"café moulu sur la plaie. Ma grand-mère me demandait là aussi:
- "Mir, regarde la mariée et dis-moi comment elle est belle ?"
Elle voulait me faire oublier le mal. Puis elle se penchait vers les femmes qui étaient là et elle faisait:
- "Vous voyez elle plaît bien même à mon petit-fils!." Puis elle répétait ces paroles:
- "Vous avez entendu ce qu'il a dit, 'La mariée est très belle'."
Alors que je n'avais rien dit. J'avais honte mais que faire à cet âge?

Je comprenais que ce genre de questions étaient simplement pour plaire à la mariée ou à sa famille, ces compliments faisait partie de son travail. Certaines questions étaient embarrassantes, surtout lorsqu'elle enlevait les poils à une jeune fille toute nue. En signe d'accord je baissais les yeux et la tête pour lui faire plaisir, mais je rougissais de honte ou de timidité, et je n'avais surement aucune opinion à cet âge-là.
Les femmes, baissaient elles aussi les yeux et faisaient un sourire qui reflétait la comédie. C'était le jeux de tout le monde, il fallait flatter la mariée. Quant à moi je trouvais toutes ces femmes, y compris la mariée, vilaines à voir, car elles ne portaient aucun habit, mais je ne devais pas le dire à haute voix.

Après le maquillage et le bain turc, venaient les jours festifs avec le Tabal et la Zokra (le tambour et le binioux). Là, ma grand-mère venait bien habillée de ses belles toilettes et occupait une place d'honneur.
Des remerciements et des compliments pour la Harqassa (la maquilleuse) venaient de toute part, moi, je restais sur les genoux de ma grand-mère et je finissais toujours par m'endormir.

D'après les dires de ma grand-mère ces jours-là, elle faisait les meilleures recettes, car il était de coutume que les invités qui voulaient se distinguer donnent à la vue de tous les présents des billets de grande valeur à la maquilleuse. (ORCHOQ A'L HARQASSA). Ensuite les femmes présentes venaient l'une après l'autre me dire quelque chose, je ne me souviens pas des paroles mais je me rappele bien des pièces de monnaie qu'elles me donnaient. A la fin de la journée mes poches étaient remplies de pièces et de billets de toutes sortes.

Quand j'avais neuf ans ces belles excursions avec ma grand-mère cessèrent. Alors je devais aller au bain turc avec mon père. C'est là où commença mon éducation. L'atmosphère au bain était plus sévère et bien disciplinée. Les cris et le brouhaha des femmes et des enfants disparaissaient pour laisser la place au silence et à l'ordre. Les hommes portaient tout le temps une "Fouta"(c'est une jupe qui couvre toute la partie basse du corp et qui resemble à une jupe écossaise). En fait c'est un rectangle en tissu avec lequel on enveloppe le corps et que l'on attache d'un coté avec un noeud. Les hommes circulaient de place en place avec ces foutas, seule la partie haute du corps restant nue. Papa occupait une chambre pour nous deux, ainsi nous avions notre confort. Cette chambre nous servait pour le repos après le bain, en plus papa commandait un café pour lui et un thé pour moi. Puis nous restions allongés et couverts de plusieurs serviettes de bain. Cette visite au bain turc avait lieu tous les fins de semaine. Le fait de me trouver avec les grandes personnes me donnait l'impréssion que j'étais moi aussi un adulte.


Emile Tubiana
(Extrait du prochain livre: "Les trésors cachés")

  

 

 

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