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AMAR BEN
BELGACEM sur Harissa
Esclave de la passion, seule susceptible d'enfanter
les grands hommes, l'artiste défunt entretenait l'espoir de connaître un
jour l'amour, le vrai, celui qui sauvera le monde. Il est parti sans l'avoir
vécu
Le 7 septembre dernier, l'annonce de la tragique disparition de l'artiste
peintre de talent, Amar Ben Belgacem, mort à 31 ans, alors qu'il était dans
la plénitude de ses possibilités physiques et de ses facultés
intellectuelles, a plongé le monde des Beaux-Arts et de la peinture dans un
profond désarroi.
De son vivant, l'objectif que s'était fixé Amar Ben Belgacem était d'apaiser
l'autre, d'alléger le poids des contraintes et des tensions auxquelles il
était soumis et de le séduire par la magie des couleurs et de lui renvoyer
ainsi l'image d'un monde paradisiaque dans lequel il prétendait vivre en
permanence. Hélas, il n'en était rien. Cette mort prématurée est venue nous
rappeler brutalement et cruellement qu'on a été le jouet d'une illusion qui
nous a fait prendre des vessies pour des lanternes et croire grossièrement
que la beauté qu'il avait l'habitude de peindre n'était que chimère parce
que éphémère.
Sa sensibilité excessive et quasi maladive était à la base d'un talent
unanimement apprécié et reconnu. Ses premiers pas dans la peinture étaient,
dès le départ, encouragés par les médias qui avaient soigneusement suivi sa
carrière dans les différents stades de son évolution. Cette émotivité,
poussée jusqu'aux limites de l'exaspération, a joué un rôle majeur dans le
drame absurde perçu comme un nouvel avatar dans le parcours artistique de ce
génie dont l'idéal a été étouffé dans l'oeuf.
Représentées dans les collections publiques et privées de plus de vingt
pays, les peintures heureuses de Amar Ben Belgacem se sont promenées aux
quatre coins de la planète. Elles nous révèlent le talent d'un artiste doué,
d'une rare précocité, un peintre capable d'images insolites, bariolées mais
harmonieuses, qui a toujours cherché à obtenir le maximum d'intensité et de
vibrations chromatiques dans une peinture vouée à la nature foisonnante et
généreuse où l'on devine la flore et la faune réduites à des bulles
d'oxygène, de formes rondes et ovales.
Cette tragique disparition vient nous rappeler que même les génies, ces
êtres dotés d'aptitudes naturelles à créer des choses d'une qualité
exceptionnelle, ne sont pas pour autant à l'abri des remous et des
tourbillons de la vie, à cause d'une fragilité et d'une vulnérabilité
typiques à cette catégorie d'individus.
Mirage fugitif et passager aura été le court trajet sur terre de Amar dont
l'oeuvre considérable témoigne en sa faveur.
Ame tourmentée, aujourd'hui apaisée, repose en paix!
Voilà une épitaphe qu'il aurait peut-être aimé voir gravée sur son tombeau.
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