Le Cinema Octobre 2004, par Roger Chemouni

LE CINEMA OCTOBRE 2004

Premier volet d’un triptyque ambitieux concernant le genre humain, Claude Lelouch s’envole vers une épopée qu’il veut studieuse. Ils nous fait suivre comme à l’accoutumée aux destinées de quelques individus censés représentés la faune parisienne ; ce groupuscule qu’il fantasme, le tout mêlé de pensées critiques, spirituelles et philosophiques. Voilà pour le synopsis ; là où le bat blesse c’est que le scénario au fil tenu ne nous convaincs point tout comme l’interprétation et le récit hasardeux. Cette forme narratrice spécifique à son réalisateur , beaucoup mieux menée dans ses films précédents ; nous pensons à « Toute une vie » et « Les uns et les autres » nuit fortement à cette œuvre qui se veut originale – nous assistons au film dans le film- et n’est qu’un e resucée de son travail. Nous n’entrerons point dans la polémique du cinéaste maudit qui refuse de donner une projection de presse et offre une séance gratuite aux spectateurs. Ce comportement est la continuité de son brouillon de film .

Viktor Navorski ( Tom Hanks ) est un simple touriste débarquant dans l’aéroport JFK de New York. A son arrivée il apprend que son pays ( Une république d’Europe Centrale) est en état de guerre. Voilà notre héros dans l’impossibilité d’entrer dans la fameuse mégapole américaine. Viktor est repoussé d’un côté où il ne peut sortir et d’un autre où il ne peut rentrer, le mettant en rupture et le désignant comme apatride. L’exilé va prendre en main son destin en faisant de sa prison , son école. Effectivement il va s’insérer dans ce no man’s land , apprendre à survivre et découvrira dans cet univers secret et insolite ; amour, suspicion , amitié , fraternité.

Spielberg nous peint une Amérique solidaire, empli d’êtres ambitieux et charitables dans cette histoire intimiste calquée sur les œuvres de Franck Capra avec autant d’amertume que d’admiration. Mais le film ne se veut point politique d’abord, il joue sur le registre de la comédie - registre qu’avaient déjà choisi deux réalisateurs sur un synopsis identique- (1) ce qui est un drame ; celui d’un apatride qui n’a pas de pays d’accueil. Le regard optimiste du réalisateur contient néanmoins un message sous jacent : l’Amérique n’est pas un pays pour cet émigré involontaire , la femme américaine n’est ni accessible, ni exportable , seule la culture –musicale ici l’est- et le melting - pot le sont par leur enrichissement. Reste une comédie qui joue habilement de ses ficelles sans s’entremêler , jouant sur l’émotion lacrymal, une interprétation extraordinaire de Tom Hanks qui mériterait de nouveau un oscar et sur la présence d’un personnage extraordinaire Gupta un autre exilé qui a besoin d’aide comme tous les autres protagonistes et Viktor Navorski est le seul à leur en apporter . Si Lelouch a parfois du savoir faire, Spielberg a souvent du talent.

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