Il etait une fois des Juifs et des Musulmans amis qui habitaient a Mahdia, en Tunisie, Les deux communautes vivaient en parfaite harmonie tres proche l'une de l'autre, sans compter les Catholiques de diverses nationalites mais de souche Tunisienne depuis plusieurs generations et qui etaient chaleureusement adoptes par les deux camps principaux. Les mauvais etaient les Francais de France qui arrivaient avec des titres pompeux et qu'entre nous nous appelions...... les....... pecquenots. De vrais campagnards qui ne savaient meme pas se tenir convenablement a table.

Je reviens donc a cette harmonie qui regnait entre Juifs et Musulmans et qui nous a rapproches a une amitie aveugle, voir inconditionnelle. Mahdia etait, et est toujours une ville riche de par ses produits saisonniers tels que sardines, maquereaux, mulets, boutargue de mulets, oliveraies, orangeraies, amandiers, palmiers a dattes, qui s'etendaient a perte de vue. On pouvait voir donc s'aligner, huileries, distillerie de Boukha Uzzan, fabriques de conserves telle que la SARDAL, usine a sulfure, salines, eponges, etc...et chacune de ces usines fonctionnait a un moment precis de l'annee, suivant les recoltes ou les besoins. Tout le monde les empruntait. Mahdia est aussi une ville paisible de villegiature, qui embaume le Jasmin des lieues a la ronde. En effet tout le monde avait un jardin ou tout au moins un arbuste de ce delicieux parfum. C'etait un paradis terrestre ou tout le monde y vivait KALB CHABAANE (coeur rassasie) et ce.....jusqu'a l'occupation allemande........J'aurais d'autres recits a ce sujet, mais aujourd'hui, a l'occasion de L'AID EL KEBIR, je veux me limiter a ce geste sans qualificatif de la part des Musulmans de Mahdia. Tout le monde sait comment les allemands, la kommandatur, le gestapo, ont fait fortune sur le dos des Juifs. A Mahdia tout au moins ils auraient eu "LA COURTOISIE" de nous laisser 24 heures de reflexion. Voici Comment ils procedaient: Exactement un jour sur deux, ils faisaient venir le chef de la Communaute Israelite (mon pere en l'occurence) pour l'informer, qu'il detenaient le jeune Juif untel, jusqu'a demain telle heure, et qu'il devait leur apporter telle somme d'argent, un bon moment avant l'heure designee. Tous les Juifs y participaient. Ils etaient taxes selon leurs possibilites et l'argent etait toujours remis a l'heure dite. Tout y est passe. Bijoux, meubles, argenterie, tapis, etc. Seulement voila, un beau jour arriva ou il n'y avait plus un centime parmi les Juifs. La nouvelle s'etait vite repandue dans la ville. Au moment meme ou mon pere etait litteralement desespere, son MEILLEUR AMI MUSULMAN, vint le voir avec une envelope contenant toute la somme requise et lui dit: VOUS, NOUS, QUELLE DIFFERENCE? NE SOMMES-NOUS PAS TOUS PLUS OU MOINS FRERES OU COUSINS.........Depuis, ca a ete ce groupe de Musulmans riches, membres du "NADI" cercle musulman voisin de la station d'essence Standard de mon pere, qui a paye toutes les somme demandees, pour sauver a chaque fois, la vie d'un tout jeune homme Juif, et ce pendant deux a trois mois, jusqu'a la liberation. Ils ne s'en sont jamais vantes, ils n'ont jamais demande a etre rembourses. Ils etaient tous des hommes eduques et erudits, des sages aussi... Je ne veux nommer personne dans la crainte d'oublier un nom. A l'epoque je n'avais pas onze ans. Depuis, tous les acteurs sont morts. Cette histoire m'a poursuivie toute ma vie. Les rares fois ou je l'ai racontee, personne ne m'a crue. Mais aujourd'hui grace a Jaco Halfon et son site, notre site d'harissa.com, je me sens le devoir, l'obligation de la publier avec de tres tendres souvenirs que j'ai vecus. Je ne pretends a rien, mais ce sera un peu ma Schindler's List a moi. Ce site a rapproche tous les Tunisiens de quelque origine, comme ils ne l'ont jamais ete depuis tres, tres longtemps.

Puisse un miracle se produire et voir la paix s'installer parmi ces deu peuples, en hommage et toujours.......pour la memoire des disparus.

Annie Boukris