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De Tunis à Auschwitz ALFRED VALENSI: NAISSANCE DU SIONISME TUNISIEN |
par Elia Boccara (Milan)
En Juin 1906 paraissait sur la Revue Politique et Parlementaire de Paris un long essai ayant pour titre Le Sionisme, écrit par Alfred Valensi, un jeune avocat juif de Tunis. Valensi faisait partie de la Communauté Juive Portugaise, dont d’autres Valensi, ses parents, furent présidents pendant un siècle environ. Né en 1878, Alfred Valensi était citoyen autrichien, car son père était un haut fonctionnaire du Consulat d’Autriche-Hongrie à Tunis, tandis que les autres Valensi auxquels j’ai fait allusion étaient devenus français et fonctionnaires, au XVIIIème et XIXème siècle, du Consulat de France. Grace à une loi du Protectorat Français Alfred devint français en 1909. L’interêt précoce pour le sionisme s’explique si l’on pense que dans son jeune âge Valensi et le viennois Théodore Herzl étaient compatriotes. L’article qui nous occupe, qui fut distribué à Tunis, sous forme d’extrait, marque le début de la diffusion des idéaux de Herzl dans la capitale maghrebine. «Le Sionisme est un mouvement nationaliste [...], c’est à dire un mouvement d’émamcipation nationale. C’est un de ces nombreux mouvements nationalistes nés au siècle dernier et qui ont conduit à l’autonomie tant de peuples grands et petits [...], qui aspirent à la liberté et à l’indépendance» : c’est là le début de l’article, qui fait allusion à l’éclosion des nationalités en Europe. Impossible de taire le fait que Vladimir Jabotinsky sera un des grands admirateurs du Risorgimento italien et de ses principaux acteurs, mais en 1906 toute influence de Jabotinsky sur Valensi est exclue : leur rencontre aura lieu beaucoup plus tard. Pour le jeune Alfred il est clair que «le territoire que le Sionisme veut donner au peuple juif est la Palestine. Pourquoi la Palestine ? Parce que c’est pour les juifs la terre ancestrale, cette patrie perdue, dont le souvenir, objet d’un amour profond et tendre, a été fidèlement maintenu par les fils d’Israél au cours de leur martyre pluriséculaire». Reparcourant l’histoire du peuple juif à partir de 70 e.v. , Valensi rappelle que la foi d’Israél s’exprimait dans le passé à travers l’attente «naïve et émouvante d’un Messie libérateur qui aurait ramené un jour les fils dispersés d’Israél dans leur ancienne patrie [...]. Pendant tout le Moyen Age et une bonne partie des temps modernes le patriotisme juif demeura lié à la religion». Toutefois avec l’émancipation des juifs dans l’Occident et la diffusion de la libre pensée, pour eux «le dogme messianique devient purement symbolique. Il ne faut plus croire en un retour réel d’Israél en Palestine : la promesse de ce retour a une signification uniquement spirituelle et sera le triomphe du monotéisme hébraique et de l’éthique juive dans le monde». C’est là une évidente allusion à la Science du Judaïsme et aux positions initiales du judaïsme réformé (cf. La plateforme de Pittsburgh de 1885 et, un siècle avant, la déclaration des juifs de Francfort, inspirée par Moïse Mendelssohn). En contraste avec le judaïsme de l’Europe occidentale, dans l’Erope orientale, chez les élites intellectuelles «le sentiment national juif se dépouille de plus en plus de son caractère religieux [...] et le retour d’Israél en Palestine apparaît desormais comme le résultats nécessaire des efforts personnels du peuple juif». A la mémoire historique et au réveil des nationalités Valensi ajoute, comme facteur catalysateur pour la naissance du Sionisme, la diffusion de l’Antisémitisme. Il parcourt les différentes phases du pré-sionisme du XIXème siècle et il rappelle les réalisations des premiers pionniers, qui reçoivent une forte impulsion de la part des pogroms russes : «Nous nous trouvons déjà en présence d’un vèritable mouvement national. Mais ce mouvement manque d’ampleur et de cohésion [...]. Il manquait au Sionisme le grand apôtre qui, en précisant les idées de ses précurseurs, devait proposer un programme d’action, créer l’organisation même du mouvement et lui donner une vigoureuse impulsion. Le Sionisme attendait l’homme qui devait être en même temps son Marx et son Lassalle. Cet homme fut Théodore Herzl». Après avoir illustré le programme de Herzl, tel qu’il l’expose dans son Der Judenstaat, Valensi rapporte les enthousiasmes, mais aussi les hostilités, que cette publication éveilla dans le monde juif. Selon lui, au début du XXème siècle on pouvait considérer comme des ennemis du Sionisme : 1) «Les juifs occidentaux et, sauf de rares exceptions, les riches», qui craignaient d’être considérés comme étrangers dans leur pays natal, ces pays qui leur avaient accordé de jure, mais pas toujours de facto les droits civils. 2) «Les rabbins orthodoxes d’Orient avant tout, croyants naïfs, qui attendaient et attendent toujours pour retourner à Sion l’intervention miraculeuse du Messie, et considèrent donc le Sionisme, oeuvre purement humaine, comme un sacrilège abominable ; puis les rabbins réformés, disciples plutôt sceptiques du philosophe populaire Mendelssohn, lesquels, de plus en plus indifférents vis-à-vis du destin du peuple juif, avaient effacé de leurs livres de prières le nom même de Sion». Herzl répondit par le 1er Congrès sioniste de Bâle qui affirma que «le Sionisme a pour but la création en Palestine pour le peuple juif d’une patrie garantie par le droit public». D’autres congrès suivirent, parmi lesquels le 5ème vit la création du Keren Kayemet, alimenté par les dons, dont les entrées étaient destinées par moitié à l’acquisition de terres en Israél, tandis que l’autre moitié devait être investie de manière différente. Entre temps Herzl déployait une action diplomatique de grande envergure, sollicitant successivement l’empereur allemand, le sultan turc et le cabinet anglais, qui proposa d’accorder aux juifs une partie de l’Ouganda, solution qui provoqua de violentes réactions pendant le 6ème Congrès et qui fut définitivement abandonnée pendant le 7ème. Jusqu’en 1904, année de sa mort, Herzl poursuivit son action diplomatique, réussissant à obtenir un document officiel russe (naturellement intéressé) favorable à la création d’un état juif en Palestine, et à se faire recevoir en Italie par Victor Emmanuel III et par le pape Pie X : l’existence du Sionisme était donc officiellement reconnue. Même s’il n’avait pas encore réussi à faire démarrer son oeuvre de colonisation sur vaste échelle, il était déjà présent en Palestine à travers son action capillaire et sa présence dans différents organismes économiques et culturels. Le credo politique de notre jeune avocat avait alors une couleur nettement socialiste et progressiste : «Le Sionisme est aussi un mouveent économique et social. La nationalisation du sol, l’organisation coopérative de la production, l’égalité des droits civils de la femme font partie du programme économique et social du Sionisme». L’auteur se présente par ailleurs comme un supporter du parti prolétaire sioniste Poalé Tsion, né en Russie, qui «adopte le programme du parti socialiste international, qui a pour but l’abolition de la société capitaliste et l’établissement d’un état socialiste». Il est clair que le Sionisme d’Alfred Valensi concerne en particulier les 8 millions de Juifs de l’Europe de l’Est, où vivaient les quatre cinquièmes de la population juive de l’époque, plutôt que les Juifs occidentaux, qui étaient désormais intégrés. , c’est à dire ces Juifs «qui diffèrent des peuples au sein desquels ils vivent par leur religion, par leurs coutumes, leurs traditions, leur langue (le jiddish), leur littérature, leurs tendances spirituelles [...] ; solidaires à travers leur triste présent, au milieu de ces souffrances indicibles et imméritées qui ont renforcé leurs aspirations populaires et fortifié les mêmes rêves parmi ces parias, les Juifs de l’Europe de l’Est forment bien un peuple dont la caractéristique est une des plus nettes et des plus vigoureuses». Alfred Valensi appartenait personnellement au monde séfarade, donc à l’Occident. Il cultivait donc un Sionisme éminemment altruiste. Mais quand nous apprenons qu’une fois établi à Paris il fut déporté à Auschwitz en 1944, nous comprenons qu’il s’était trompé dans ses calculs : le Sionisme concernait aussi les Juifs occidentaux, comme Herzl l’avait prévu après avoir assisté au lynchage moral du capitaine Dreyfus de la part d’une foule houleuse qui passa rapidement du cri «mort au traître !» au plus menaçant «mort aux Juifs !». Si Valensi avait écrit quelques années plus tard son article il se serait aperçu qu’un rabbin de Tunis, et non des moindres puisqu’il était Grand Rabbin des Juifs livournais, Jacob Boccara, avait embrassé avec enthousiasme la cause sioniste : il fut le premier représentant du judaïsme tunisien au 10ème Congrès sioniste de Bâle en 1911. À Bâle le rabbin Boccara polémiqua avec les ashkenazes qui voulaient faire du jiddish la langue nationale juive et plaida la cause de l’hébreu, langue dans laquelle il prononça entièrement son discours. Par ailleurs au siècle dernier, même le judaïsme réformé effaça l’ancien renoncement au retour dans la Terre Promise (Columbus Platform de 1937), alors que la majorité du judaïsme orthodoxe embrassait la cause du Sionisme. Remarquons que Valensi évitait toute allusion à la population arabe de Palestine : le problème israélo-palestinien était encore loin. J’ai connu à Paris Raphaël Valensi, le fils d’Alfred, qui est pour moi un cousin lointain. C’est Raphaël qui m’a informé sur l’évolution politique de son père. Dans son âge mûr Alfred connut Jabotinsky et il rejoignit les rangs révisionnistes. Il paraît que la raison principale de son abandon de la gauche sioniste était l’acceptation de la part de cette dernière d’une situation de subordination vis-à-vis du protecteur anglais : Valensi craignait que l’on mette de côté l’idéal d’un État d’Israël indépendant. J’ai pu lire une lettre de Jabotinsky à Alfred Valensi, dans laquelle il l’assurait de son estime et le remerciait pour le travail précieux qu’il effectuait en France. Par ailleurs la parenté que Jabotinsky décelait entre le Sionisme et les mouvements irrédentistes européens du XIXème siècle coincidait avec les thèses que Valensi avait soutenu une quinzaine d’années auparavant. Raphaël m’a raconté que pendant l’occupation allemande de Paris, où sa famille habitait, son père l’envoya tout de suite avec sa mère à Marseille, où ils purent éviter la déportation, tandis qu’Alfred ne voulut pas bouger de la capitale parce qu’il avait ancore une tâche à remplir et parce qu’un capitaine n’abandonne jamais un navire en danger : il affronta courageusement le destin que le sort lui avait reservé |
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