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HISTOIRE DE LA TUNISIE


   Population de la Tunisie: 9,8 millions.

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L'histoire de la TUNISIE remonte a huit mille ans avant Jésus Christ . De multiples civilisations se sont succédées, donnant lieu à un vaste brassage culturel qui a façonné la personnalité tunisienne.

La TUNISIE a toujours été à la croisée des anciennes civilisations: capsienne, berbère, vandales, punique, romaine, byzantine, arabe, espagnole et turque. Elle a connu toutes les phases de la préhistoire maghrébine, de l'époque de la pierre taillée à celle des pierres polies. Des dolmens et des mégalithes, appartenant au Néolitique ont été trouvés au Cap-Bon et des vestiges du Paléothique dans la région de Gafsa.


LA PREHISTOIRE

Au IVe millénaire avant J.C débute en Tunisie le néolithique dit de tradition Capsienne (vient de Capsa, antique Gafsa): polissage de haches, taille bi-faciale des pointes de flèches, céramique grossière, élevage, agriculture. Des invasions en provenance du sud (Sahara) en s'intégrant aux Capsiens constituèrent une nouvelle ethnie appelée "protolybiens" et dont les berbères sont les descendants directs. C'était une tribu nomade pratiquant le culte des morts.

LA VILLE DE CARTHAGE

Selon la tradition, la ville de Kart Hadasht, la "Ville Neuve" aurait été fondée vers 814 par Elissa, soeur du roi de Tyr, Pygmalion, accompagnée de notables tyriens et de Chypriotes. Aux VIIIè et VIIè, la cité se tourne ver la mer et se développe grâce au cabotage.

Le dieu tutélaire de la cité est Baal Hammon, le El phénicien auquel on voue des sacrifices d'enfants en son sanctuaire de Salammbô. Vers 660 avant J.C., les Carthaginois s'installent à Ibiza, dans les Baléares. La ville antique est située au fond du golfe de Tunis, sur une presqu'île. Des collines disposées en arc de cercle la dominent à l'ouest. La plus haute porte la citadelle de Byrsa, sur les autres s'étend la nécropole. Au delà, vers Sidi bou Said et La Marsa, s'étend la banlieue de Mégara. La ville, gouvernée par des rois de la famille des Magonides, s'allie aux Etrusques, domine la Sicile du sud ouest, prend pied en Sardaigne, repousse les Grecs Phocéens en Corse, s'installe à Gadir (Cadix) après avoir aidé la cité à chasser les Ibères. Enfin, elle élimine les colons spartiates de Tripolitaine.

Vers -470, le marin carthaginois Hannon effectue un voyage d'exploration le long des côtes de l'Afrique Occidentale jusqu'au golfe de Guinée. Une seconde expédition mène les Carthaginois vers le nord, probablement jusqu'aux côtes d'Angleterre. Carthage étend ainsi son empire colonial et maritime sur tout l'ouest de la Méditerranée.

DIDON ET LA LEGENDE

Elissa, sœur de Pygmalion, roi de Tyr, avait épousé son oncle Sicharbas. Le tyran Pygmalion fait assassiner Sicharbas. Se sentant menacée, Elissa s'enfuit de Tyr avec plusieurs citoyens phéniciens, emmenant ses richesses.

Après un séjour à Chypre, l'exilée s'en vient sur les côtes d'Afrique près du site de la future Carthage. Elle demande à Iarbas, roi des indigènes Gétules une concession de terrain ne couvrant que la peau d'un bœuf, ce qui est royalement accordé. Elle fait alors découper la peau en très fines lanières et le fait mettre bout à bout, délimitant ainsi un territoire assez vaste pour y établir une cité sur une colline, Byrsa (" Peau de bœuf " en grec). Plus tard, refusant sa main au roi Iarbas par fidélité à la mémoire de son époux, Elissa se suicide en se jetant dans un bûcher. Telle est la légende grecque

Virgile associa à cette Elissa le personnage de Didon dans l'Enéide. Reine de Carthage, elle accueille Enée en sa cité et en tombe follement amoureuse. Ne pouvant retenir le prince troyen partant vers l'Italie y fonder Rome, elle se poignarde sur un bûcher.

LES GUERRES CONTRE LES GRECS

En -480, les marins phéniciens forment en grande partie la marine Perse. Ils sont écrasés par les Grecs à Salamine. De son côté, le Grec Gélon, tyran de Syracuse, bat les Carthaginois à Himère, en Sicile. Les Magonides évacuent la Sicile, se replient en Afrique du Nord et mettent leur territoire en valeur.

A la fin du Vè, un nouveau conflit éclate entre les Carthaginois et les Grecs. Le roi magonide Himilcon débarque en Sicile, prend Sélinonte, Géla, Agrigente, mais échoue devant Syracuse bien défendue par Denys l'Ancien (Vers -390). Cet échec marque la fin des Magonides. La noblesse punique, qui veut la paix, installe vers -380 au pouvoir le Tribunal des Cent-Quatre, chargé de surveiller les généraux qui ont remplacé les rois. Au panthéon carthaginois, Baal Hammon est évincé par Tanit Pene Baal, et le culte de Demêter est introduit dans la cité. La lutte contre les Grecs continue, mais avec moins d'intensité, surtout après les mort de Denys en -367. Carthage signe alliance avec Rome en -348.

La guerre avec les Grecs en Sicile reprend avec intensité: en -339. les Carthaginois sont vaincus par Timoléon et chassés de Sicile. Le Tyran de Syracuse Agathocle débarque même en Afrique en -310. S'alliant au grec, le roi de Carthage Bomilcar tente alors de renverser l'oligarchie punique, mais il échoue en -307. Cette date marque le début de la puissance de l'oligarchie carthaginoise. Après la mort d'Alexandre le Grand, la cité punique s'allie avec la dynastie Lagide qui succède à Alexandre en Egypte, Phénicie et Palestine. Carthage s'ouvre largement aux influences hellénistiques de Sicile, d'Italie et d'Egypte. l'Etat punique domine économiquement la Méditerranée Occidentale et entretient d'excellentes relations avec le monde Oriental. En -268, une nouvelle alliance avec Rome permet d'éliminer Pyrrhus d'Epire, qui tentait de créer une empire hellénistique en Occident.

LA PREMIERE GUERRE PUNIQUE: 264-241

Il était inévitable que Rome et Carthage en viennent à l'affrontement: Rome vient d'unifier l'Italie; au Sénat les grandes familles ont un esprit de domination et d'expansion vers la mer. De son côté Carthage domine toute la Méditerranée Occidentale et n'a pas renoncé à la Sicile. Le conflit entre les deux cités va revêtir une importance capitale pour tout le bassin méditerranéen, et pour plus de huit siècles. Il dure de -264 à -146 et connaît trois grandes phases: la première aura comme enjeu la Sicile.

Rome intervient en Sicile pour protéger ses alliés, les Mamertins et prend Agrigente aux Carthaginois. En réponse, ceux-ci ravagent les ports romains de Sicile et de la côte Italienne. Alliée aux Etrusques, Rome créé une flotte puissante et détruit une escadre punique à Mylea en -260. L'équilibre naval est rétabli. La consul Régulus débarque en -256 au Cap Bon, portant la guerre en Afrique. Après avoir infligé de grosses pertes à Carthage (Ruines de Kerkouane, la "Pompei punique"), il est battu et fait prisonnier en -255. Libéré sur parole pour négocier un échange de prisonniers, il dissuade le Sénat d'accepter les conditions de Carthage et fidèle à sa parole, retourne en Afrique ou il est supplicié (-250).

En -254 les Carthaginois perdent Palerme, mais la victoire navale de Drepanum (Trapani) sur les Romains en -249 leur permet de maintenir quelques garnisons en Sicile (Eryx, Lilybée). Elles y mènent une rude guerre de commandos avec leur chef, Hamilcar Barca. Le pourrissement de la situation amène la paix. Un convoi carthaginois ayant été détruit en -241, le gouvernement Punique demande la trêve. La paix est honorable. Carthage perd la Sicile mais conserve ses autres possessions extérieures, y compris Corse et Sardaigne.

LES MERCENAIRES

La demi-défaite de Carthage lors de la première guerre punique du régime oligarchique au pouvoir. Contre la classe dirigeante se dressent les paysans libyens asservis, les innombrables mercenaires non payés, les classes moyennes menacées dans leurs intérêts économiques et enfin les militaires "nationalistes", dont le chef, le général Hamilcar Barca (290-229), prend la tête. En -240, les Mercenaires, conduits par le Libyen Mathô se révoltent et assiègent Utique. Il faudra 2 ans à Hamilcar Barca et Hannon le Grand pour les vaincre et les exterminer. (Gustave Flaubert en tirera un célèbre roman en 1862, "Salammbô"). L'écrasement de cette révolte permet à Hamilcar Barca de prendre le pouvoir. Rome, inquiète, annexe aussitôt la Sardaigne.

Hamilcar n'a qu'un but: préparer sa revanche sur Rome. Pour être totalement indépendant et échapper au contrôle du gouvernement carthaginois, il créé en Espagne un véritable royaume personnel avec une armée de redoutables soldats Ibères entièrement dévoués à sa personne et à sa famille (237-229). Son gendre Hasdrubal "le Beau" poursuit sa politique de "réarmement" et fonde Carthagène (Carthago Nova, -227) avant d'être assassiné en -221.

LA SECONDE GUERRE PUNIQUE : 219-202

A Hasdrubal succède le fils de Hamilcar, Hannibal. Il adopte immédiatement une attitude intransigeante, veut diviser son ennemi et utiliser ses adversaires pour le mettre à genoux. Il déclenche le conflit en prenant en -219 la ville de Sagonte, alliée de Rome. Pensant s'allier les Celtes de Gaule, il marche contre Rome par la Provence. Malgré la défection des Gaulois Cisalpins, il traverse les Alpes en -218, véritable exploit (d'autant plus qu'il possède des éléphants), s'allie aux Celtes du Pô et écrase les légions romaines sur le Tessin, à la Trébie (-218) puis à Trasimène (-217). Evitant Rome, il marche vers le sud de l'Italie où il compte sur les Apuliens et les Lucaniens. Le 2 août -216, les légions des Consuls Varro et Paul Emile sont écrasées à Cannes, laissant sur le terrain 46 000 légionnaires à l'issue d'une des plus grandes batailles de l'Antiquité. La voie vers Rome est libre. Hannibal n'en profite pas et s'installe dans le sud de la Péninsule.

Les difficultés commencent alors: sur mer, la maîtrise reste romaine. Rome reconstitue ses légions et mène une guerre d'usure. Les défections se font nombreuses du coté des Carthaginois... Pire: le royaume punique d'Espagne s'effondre face aux légions romaines, et en -215 il ne reste aux Carthaginois que la Bétique (Andalousie) et quelques ports du sud-est de l'Espagne. En -208, Asdrubal II, frère cadet d'Hannibal, part secourir son frère en passant à son tour en Italie par les Alpes. Mais il est battu et tué sur le Métaure. Hannibal tente alors de s'allier Philippe V de Macédoine, en révolte contre Rome. Mais ce dernier ne le soutient que mollement.

Aussi, Rome reconquiert peu à peu le sud de l'Italie. Hannibal perd pied dans le Bruttium alors que Scipion "l'Africain" achève la conquête de l'Espagne puis débarque en Afrique où il offre le royaume de Numidie au prince Berbère Massinissa en échange de son alliance; l'autre grand prince berbère, Syphax, reste fidèle à Carthage. Hasdrubal et Syphax sont défaits. Hannibal, en -202 s'échappe d'Italie et débarque, non à Carthage pratiquement bloquée, mais à Hadrumète (l'actuelle Sousse) et marche sur la capitale orientale des Numides, Zama. La rencontre décisive à lieu non loin de Zama. Hannibal y est vaincu malgré les ressources de son génie militaire. La paix dictée par Scipion réduit Carthage à un état vassal, mais lui maintient ses possessions en Afrique du Nord. Revenu à Carthage, Hannibal réussit à se faire élire suffète en -195. Mais Rome exige son élimination. Réfugié en Syrie, il assiste à la victoire de Rome en Asie Mineure et est à nouveau obligé de fuir en Bithynie. Rome exige du roi de Bithynie, Prusias, de lui livrer son hôte. Le roi accepte. Hannibal n'a d'autre issue que le suicide à Libyssa (Brousse) en -183. Hannibal mort, Carthage perd toute influence politique.

LA TROISIEME GUERRE PUNIQUE : 149-146

A Rome, vers -155, alors que tout danger est écarté de voir se relever la puissance punique, une campagne de propagande bien orchestrée crée une véritable haine du Punique. A sa tête, Caton l'Ancien et sa célèbre formule "Delenda quoque Carthago". Les agrariens romains redoutent en effet la concurrence de l'agriculture carthaginoise. Vers la même période, le monde romain est agité par d'importants troubles, particulièrement en Grèce et à Carthage où des radicaux se soulèvent contre les Numides, alliés de Rome. Celle-ci décide d'en finir. Les Romains chargent Massinissa de la tâche. Le vieux chef Numide soumet les carthaginois... mais réclame des Romains la livraison de la ville. Sommés d'abandonner leur cité, les carthaginois se révoltent. Massinissa est écarté, et en -148, les légions romaines assiègent la ville, provoquant une révolte générale, à laquelle ne participent cependant pas Hadrumète (Sousse) ni Utique, qui restent fidèles à Rome. L'intérieur du territoire lève les armes et les soldats romains sont mis à mal. Au bout de deux années de déboires, Rome fait appel à Scipion Emilien: au printemps -146, ses légions réussissent à ouvrir une brèche dans les fortifications de la ville. Une terrible bataille de rue s'achève par l'incendie du temple d'Eshmoun.


LA PERIODE ROMAINE

La destruction de Carthage par Rome met fin à une obsession séculaire: la crainte de voir aux frontières de l'Italie une puissance maritime et militaire redoutable. Dans un premier temps les Romains encouragent l'expansion d'un royaume berbère Numide, celui de Massinissa et de ses fils qui s'étend sur le Constantinois Algérien, l'Ouest et le Sud de la future Tunisie. En même temps, se méfiant de leur turbulent voisin, Rome annexe le territoire de Carthage et matérialise la frontière avec la Numidie par un fossé, la Fossa Régia partant de l'actuelle Tabarka et allant pratiquement en ligne droite jusqu'à Thenae, au sud de Sfax. Le territoire propre de Carthage devient "ager publicis", "domaine du peuple romain", mais les villes puniques qui s'étaient alliées aux romains dans la lutte contre Carthage en -146 restent indépendantes tout en signant un traité avec Rome: Utique, Thapsus, Leptis Minor, Thysdrus...

La première vague de colonisation sérieuse débute en -123, par l'installation de 6 000 colons Italiens dans la basse vallée de la Medjerda, sur l'initiative des Gracques. Ces colons deviennent assez puissants pour influencer la politique de Rome vis-à-vis du royaume Numide. Le royaume de Massinissa échoit à Jughurta, un bâtard légitimé, qui entre en conflit avec Rome en - 112 quand Jughurta massacre les négociants Romains installées à Cirta (Constantine). Très intelligent, Jughurta tient en échec les légions romaines en corrompant leurs chefs. Vaincu par Metellus à Vaga en -109, il continue la lutte et il faudra la trahison de son beau père Bocchus, acheté par Caius Marius, pour le vaincre: livré en -105, il est jeté en prison à Rome pour y mourir de faim. Le trône de Numidie passe aux mains de Bocchus, et la politique d'alliance de Rome avec ses voisins Numides et Libyens permet d'étendre la colonisation.

La guerre entre Pompée et César (50-46) met la région en émoi lorsque le roi de Numidie, Juba I prend position contre César. Ils est vaincu avec Pompée à Thapsus (Sud de Monastir) en -46 et se suicide. César annexe alors la Tunisie ainsi que le Constantinois. La conquête de tout le Maghreb est chose faite par Octave en -33.

César reprend l'idée de fonder une colonie à Carthage. Après son assassinat, en exécution de ses volontés, les triumvirs installent en -44 une colonie, un peu au nord ouest de l'antique cité. En 29, Octave Auguste y envoie 3 000 familles et fait cadastrer le sol maudit pour édifier dans un carré de 1 400 m de côté maisons et édifices publics. La colonie est dotée de terres s'étendant jusqu'à Dougga, à plus de 100 km de distance.

Cette " Colonia Julia Karthago " retrouve rapidement sa prospérité au point de devenir une des plus grandes villes romaines de l'Occident. Elle aurait compté plus de 300 000 habitants au IIè. La ville se dote de magnifiques ensembles monumentaux: les Thermes d'Antonin (145-162), le théâtre, l'Odéon, l'Amphithéâtre..., de riches demeures (Colline du Théâtre, Mégara) et de magnifiques lieux de culte (dont on n'a malheureusement pas retrouvé de vestiges).

Cette période de prospérité ne sera troublée en 70 par la guerre civile consécutive à la mort de Néron et en 180 par des agitateurs religieux protestant contre la romanisation du culte. En 238, Carthage prend partie avec les villes romaines d'Afrique pour Gordien qui se proclame empereur contre Maximin le Thrace. La Légion III Augusta, commandée par Capellien, fidèle de Maximin, écrase les milices carthaginoises et ravage la ville. En 311, la ville, dans l'obédience de Maxence, entre en rébellion contre lui. Elle tente de faire sécession avec Domitius Alexander qui se proclame empereur. Maxence envoie une expédition punitive qui anéantit en grande partie la cité. Carthage, sauvée par la victoire de Constantin sur Maxence en 312, sera magnifiquement reconstruite.

L'essor le plus important de ces premiers siècles de la Pax romana est celui de l'urbanisation: sans doute les Romains trouvent un "noyau" de cités puniques (Carthage, Utique, Hadrumète...) ou de cités lybico-numido-puniques (Maktar, Bulla Regia...). Mais ils font beaucoup plus: pour eux, la ville est le symbole même de la romanisation, car elle est le centre où s'administre la vie de la province: elle accueille les cadres administratifs, sociaux et politiques, les grands et moyens propriétaires, les cadres militaires. Elle s'ordonne autour du capitole et de ses temples, du forum ; elle comprend des marchés, la basilique, siège de la vie civique et judiciaire, les thermes, la palestre, l'amphithéâtre. Ces villes fleurissent au Ier, et surtout au IIIè sous les Sévères. La ville est le plus puissant facteur de romanisation, et l'Etat lui reconnaît un statut de plus en plus intégré: simple cité, puis municipe de droit latin, enfin cité romaine de plein droit sous le nom de "colonie" Ainsi, en Tunisie, Carthage, Hadrumète (Sousse), Taparura (Sfax), Thenae, Utique, Tabarka, Bulla Regia (Hammam Derradji), Vaga (Béja), Aquae Callidae Carpitanae (Korbous), Thuburbo Majus, Mactaris (Maktar), Thugga (Dougga), Clupea (Kelibia), Curubis (Korba), Thysdrus (El Djem), Capsa (Gafsa), Cillium (Kasserine), Sufetula (Sbeitla), Tusoros (Tozeur), Zama... Ces cités reflètent la richesse du pays, de sa vie artistique et culturelle dont témoignent particulièrement les magnifiques mosaïques des monuments et villas tunisiennes (Musée du Bardo).

Vers 250, Carthage a pour évêque un éminent théologien, Cécilius Cyprien, berbère romanisé et riche rétheur carthaginois, victime de la persécution de Valérien en 258. Entre les périodes de persécution les conversions sont multiples. De même que le sont les apostasies lors des persécutions et les problèmes posés par ces "lapsi" provoquent un véritable schisme, doublé d'une opposition entre paysans et bourgeois, lorsqu'un certain Donat, s'appuyant sur la population rurale berbère, se sépare de l'Eglise à laquelle il reproche son attitude de bienveillance vis-à-vis des lapsi. Les troubles menacent la prospérité du pays: domaines et Eglises sont saccagés. C'est dans ce contexte que naît à Thagaste (Près d'Annaba) en 358 celui qui allait devenir Saint Augustin. Il fait ses études à Carthage. Devenu évêque d'Hippone, il consacre son énergie à combattre le donatisme et réussi à faire proclamer l'Eglise catholique comme seule Eglise véritable en juin 411 lors d'un synode à Carthage.

La Carthage chrétienne compte au moins 12 églises, toutes détruites par les Vandales. Parmi elles, la cathédrale, basilique à 11 nefs avec baptistère, thermes et une vaste rotonde; une basilique à 7 nefs (entre La Malga et La Marsa) dédiée peut-être aux Saintes Perpétue et Félicité, la basilique dite de Saint Cyprien (Falaise de Saïda), le groupe d'églises du quartier de Dermech, le monastère de Saint Etienne...


LES VANDALES

Au IVè la décadence générale de l'Empire romain atteint l'Afrique: le pays est secoué par la grande crise sociale et religieuse du Donatisme: la moitié des terres sont abandonnées. Personne ne put arrêter la décomposition de l'empire.

Après une tentative infructueuse des Goths d'Alaric en 410 et des Wisigoths d'Espagne contre Gabès quelques années plus tard, les Vandales Ariens de Genséric passent les colonnes d'Hercule (détroit de Gibraltar) en 429 et se répandent dans le Maghreb. Devant le danger, les rivalités romaines entre donatistes et orthodoxes cessent, ce qui n'empêche pas Genséric de battre le comte Boniface et de mettre le siège devant Hippone (Bône) où Saint Augustin meurt pendant le siège en 430. Aetius, maître de l'empire, traite avec Genséric, laissant le Vandale faire main basse sur le pays: en 439, il s'empare de Carthage dont il fait sa capitale, et en 442 il est maître de la Zeugitane, de la Byzacène et d'une partie de la Tripolitaine. Genséric alterne vis à vis de catholiques une politique tantôt tolérante, tantôt rigide, au gré de intérêts du moment. En 455, il jette son armée sur Rome qu'il pille pendant 15 jours, ramenant à Carthage un énorme butin. il s'empare de la Corse, de la Sicile, de la Sardaigne puis annexe les deux Maurétanies. Maître de la Méditerranée il detruit en 468 une flotte de l'empire d'Orient au Cap Bon. A sa mort, son royaume est le plus puissant du monde méditrerranéen. Ses successeurs n'ont pas son envergure: son fils Hunéric (477-484) n'a de cesse que de persécuter durement les catholiques. Gunthamund (484-496) et Thrasamund (496-523) sont plus tolérants. Hildéric enfin (523-530) ne peut empêcher les Maures des chotts de Gafsa de défaire l'armée Vandale. Cette dernière le dépose en 530 au profit de Gélimer. C'est l'occasion attendue par Justinien, empereur d'Orient.

LES BYZANTINS

En 533 Justinien décide de reconquérir le pays. En quelques mois, son général Bélisaire réduit à néant l'état Vandale (Batailles de Ad Decimum et Tricamarum) et refoule les Berbères sans toutefois arriver à les vaincres. Pour les contenir, il fait construire d'imposantes forteresses (Sbeitla, Thelepta Béja, Justiniapolis-Sousse...). La prospérité revient, Carthage est reconstruite, l'Eglise catholique, restaurée, retrouve son prestige. Mais elle est entraînée dans les hérésies orientales. La fiscalité édrasante, l'accaparement des terres par les militaires et les nobles entretiennent un esprit de révolte permanent. Les menaces Berbères sont perpétuelles. En 610, La province aide Héraclius à monter sur le trône de Byzance... La propspérité semble vouloir revenir...

LA CONQUÊTE MUSULMANE

Date de 670 aprés des raids antérieurs sans lendemain. Elle fut opérée par le général Oqba ibn Nafii qui fonda à cette occasion la ville de Kairouan qui servit de base d'opérations à la fois contre les byzantins et contre les berbères. Il fallut attendre 702 pour que le pays soit entièrement soumis et gouverné par un représentant de calife omeyyade de Damas.
Les berbères et autres tribus se convertirent à l'Islam et ce furent eux principalement qui conquirent en 711 l'Espagne et s'avancérent jusqu'à Poitiers en 733. Malgé cela, ils demeurérent toujours des vaincus aux yeux des arabes. En reaction, ils adoptérent l'héresie Kjaréjite qui proclamait l'égalité de tous les mulsumans. En 745, ils prirent Kairouan.
Le califat passa aux mains des Abbasides vers 750 donc passa de Damas à Bagdad. Il fallu attendre 800 et le gouverneur Ibrahim ibn el Aghlab pour rétablir la paix dite Aghlabide. Le gouverneur devint emir. Sa dynastie dura un siècle jusqu'en 909.
Son successeur Ziyadet Allah conquit en 831 Palerme et Taormina en 902. Leur siècle de régne fut considéré comme un siècle d'or : organisation d'un gouvernement régulier ouvert à toutes les classes de la population, travaux d'utilité publique et notemment le bassin des Aghlabides à Kairouan ou encore construction de forts appelés "Ribats" tel celui de Sousse ou de Monastir.
Siècle de foi egalement, avec les dévôts qui font retraite dans les ribats et les contreverses théologiques. Les chrétiens et les juifs etaient libres d'exercer leur religion et leurs activités. En 909, chute des Aghlabides et remplacement par les Fatimides venant d'egypte.

Le mahdi Obaid Allah prit le pouvoir grâce aux berbères et s'installa en 910 à Kairouan, en attendant de poursuivre sa conquête du califat. Deux expéditions contre l'Egypte fatimides echouèrent en 913 et 920. Il s'installa, pour faciliter ses opérations maritimes à Mahdia, ancien port phénicien et romain.
Son fils dut subir une insurrection sous les murs de la ville. Insurrection qu'il réprima grâce aux canhaja (tribu du sud d'Alger). Les successeurs fatimides s'établirent dans les environs de Kairouan et fondérent une capitale nouvelle: Mancouriya.
En 969, El Moezz réussit à conquérir l'Egypte et fonda le Caire où il s'installa en 973. Il laissa le gouvernement du pays devenu province au chef des Canhaja qui appartenait à la famille des Ziri. Ces derniers favorisérent une certaine prospérité aussi bien sur le plan de l'agriculture, de l'industrie que sur le plan intellectuel et artistique.
En 1048, les Zirides rejettent la tutelle des fatimides et reconnaissent comme souverain le calife abbaside de Bagdad. En réaction, le calife du Caire envoit des tribus arabes nomades qui saccagent et pillent l'Ifrîqiya(tunisie) pendant des années. A cela s'ajoute les invasions des Pisans et des Génoîs à la fin du 11e siècle et des Normans au début du 12e.
En 1148, le dernier Ziride s'enfuit de Mahdia et en 1159, les Almohades s'installent en provenance du Maroc sous la conduite d'Abd el Moussin qui conquit l'ensemble de l'Afrique du Nord.
Tunis devient la capitale du pays. Mais de nouveaux désordres apparaissent avec l'arrivée et l'alliance entre des tribus arabes hostiles et des membres du clan Almoravide venant des Baléares. Désordres qui se prolongérent jusqu'au début du 13e. Le calife Almohade envoya Abou Hafc pour rétablir l'ordre. Son fils prit en 1230 le titre d'émir et quelques années plus tard naquit la dynastie Hafcide.
Il reconstitua le royaume Ziride et reçut des ambassades d'Italie et des pays de la Mediterranée. Son autorité fut reconnu jusqu'en Egypte. Le pays connut un demi-siècle de prospérité avec un gouvernement et une armée bien organisée et une agriculture et une industrie en essor. Tunis se développa et devint la première place de commerce du Maghreb.
Pendant plus de trois siècles, la dynastie déclina lentement avec de multiples crises politiques et des soubresauts jusqu'au début du 16e siecle où le pays fut en proie aux pirates et aux nouveaux maîtres de la méditérranée à savoir les Turcs, les Italiens, les Greques et les Espagnols.

LES TURCS (1574-1881)

Prise de la Tunisie à partir de 1534 par Kheir ed din, un des frères Barberousse, au nom du sultan de Constantinople. L'Occident se sentant menaçé, Charles Quint envoya une armée de 30000 hommes pour reprendre Tunis, qui tomba le 14 juillet 1535.
Le dernier hafçide Moulay Hassan retrouva ses prérogatives mais il échoua contre les turcs en 1550 du fait de la trahison de son fils Ahmed soltan. Le sultan Soliman installa en 1556 Dragut en tant que gouverneur de Tripoli. Dragut conquit Jerba et kairouan entre autres et dut affronter en vainqueur les chevaliers de l'ordre de Malte et le vice roi de Naples .
Seule Tunis continua à être un enjeu entre les turcs et les espagnols. Tunis fut prise en 1569 par le Pacha d'Alger et reprise en 1573 par Don juan d'Autriche, aprés Lépante en 1571. Reprise par les turcs en 1574, elle fut ainsi que le reste de la Tunisie soumise pendant 3 siècles à l'empire Ottoman.
Un pacha fut nommé par le Sultan pour trois ans, un Agha (commandant de la milice) egalemment avec ses officiers supérieurs. Cela constituait le "Divan" ou conseil de gouvernement. En 1590 éclata une révolte de la milice qui aboutit à la création d'un conseil de 40 Deys à la place du divan accusé d'abus de pouvoir. Les Deys étaient des officiers de moindre importance. Ils élirent l'un deux pour partager le pouvoir de la milice avec l'Agha
Le Dey pris en fait la place la plus importante et devint le chef du gouvernement. En 1594, Othman Dey s'empara du pouvoir effectif au détriment du Pacha et du divan. Parallèlement, le commandant des troupes chargé aussi de la levée des impôts, le Bey, augmenta sa puissance et en 1612, Mourad reçut le titre de Pacha avec le droit de transmettre ce titre à ses héritiers.
La "Course" avec ses "Raïs", patrons corsaires, fut une institution qui sous couvert de la guerre sainte ne fut en fait que de la piraterie. Les marchandises pillées se retrouvèrent dans les souks et les esclaves dans les bagnes. La course se ralentit au milieu du 17e siècle du fait de la présence de la marine française et anglaise notemment en méditérannée. Cela eut pour effet de développer le commerce au niveau des comptoirs génoîs et français de Tabarka et du Cap Négre.
En 1702, un complot renversa la dynastie Mouradide. Husain ben ali, Agha, s'empara du pouvoir en 1705 et supprima le titre de Dey mais conserva ceux de Bey et de Pacha. Il instaura egalement une monarchie héréditaire. Du fait des querelles succéssorales, il y eut des guerres civiles entretenues par le Dey d'Alger qui s'empara de Tunis en 1756 et investit un nouveau Bey, Mohammed le fils d'Ali Pacha, l'instigateur de la révolte. Ses successeurs furent Ali pacha (1759-1782) et Hammoûda Bey(1782-1814) qui consolidérent le pouvoir beylical.
Hammoûda Bey réussit à se défaire de la tutelle d'Alger et rétablit le Pacha de Tripoli. La Tunisie, malgé cela perdit peu à peu son indépendance economique au profit de commerçants étrangers. Avec les rentrées d'argent issues des concessions accordées, les Beys succéssifs construisirent des écoles, des forts, des palais dont celui du Bardo.


Le peuple tunisien n'a pas fait que subir les influences berbère, Pheniciennes, Andalouse, Turque, arabe, africaine et européenne. Il a su, à chaque fois, en soustraire le substrat nécessaire et l'intégrer à son mode de vie, dans une dialectique particulière de la dépendance et de l'insoumission.

Perméables à tous les souffles civilisationnels depuis trois mille ans, la TUNISIE est parvenue, au terme d'audacieuses synthèses, à se forger une identité existentielle, marquée au plan socio-idéologique, à la fois, du sceau de l' OUVERTURE et de la TOLERANCE et d'une forme de pragmatisme résolument moderne.

Les différentes civilisations et formations étatiques qui ont dominé la Tunisie à travers les âges ont contribué à asseoir une tradition d'ouverture, de dialogue et de tolérance caractéristique de la Tunisie actuelle. L'ouverture est d'abord culturelle.

En hommage à un pays riche d'une civilisation ouverte depuis trois millénaires sur le dialogue interculturel, l'Organisation des Nations Unies pour l'Education, la Science et la Culture (UNESCO) a désigné TUNIS comme capitale culturelle régionale pour l'année 1997. Une consécration méritée pour une civilisation qui a produit, depuis Carthage, des hommes illustres, tels le navigateur Himilcon, le père de la Science agronomique Magon, le grand stratège militaire Hannibal que Napoléon qualifia de "plus grand capitaine du monde", ou les poètes et philosophes latins tels Tertullien, Apulée, Saint Augustin.

La Tunisie s'illustre comme le pays le plus occidentalisé du Maghreb. Le Tunisien n'est, certes, pas un extraverti ou un déraciné, mais plutôt un homme à la fois fidèle à son passé et ouvert sur le monde. Témoignage d'une ouverture culturelle fécondante, le nombre et la variété de festivals internationaux organisés dans le pays. Outre ceux, célèbres, de Carthage, de Dougga et de Hammamet qui accueillent les artistes internationaux les plus renommés, il y a aussi le Festival international d'El Jem, spécialisé dans la musique symphonique ou celui de Testour dans la musique andalouse. Le dialogue interculturel est ainsi permanent, ce qui contribue à enraciner dans les mœurs, la culture de la tolérance nécessaire à la cohésion sociale.

En Tunisie, vivent, de longue date, des communautés arabes, juives, chrétiennes et berbères dans une harmonie rarement perceptible, ailleurs dans le Maghreb et le monde arabe. Les habitudes vestimentaires, l'architecture urbaine et le mode de vie sont en constante mutation et portés vers la modernité. Le pays a ainsi conservé l'empreinte profonde de l'Orient et de la civilisation musulmane, tout en s'ouvrant à la modernité occidentale. Mais d'un côté comme de l'autre, le phénomène de l'appropriation et de la transformation a joué, contribuant à la création et à l'enracinement du particularisme tunisien.

Certains auteurs situent la naissance de la construction étatique tunisienne au dix-septième siècle. Pour Michel Camau "l'instauration, à partir du XVIIe siècle, du pouvoir héréditaire des beys dans le cadre de la Régence (turque) de Tunis a jeté les fondations de l'Etat tunisien. Elle a délimité une entité au sein de l'Empire ottoman et l'a dissociée de celui-ci en dépit de l'allégeance formelle du bey au sultan d'Istambul".

La proclamation, en juillet 1957, de la République Tunisienne n'est en fait, que l'aboutissement d'une construction étatique vieille de plusieurs siècles.

Pinacolada


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