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LES MEMOIRES D ' UN GOULETTOIS
ALBERT SIMEONI
Dans la série de nos fêtes religieuses…Aujourd'hui…
LETTRE A DAVID
( Chyadou TITROU )
En tant qu'aîné d'une fratrie de cinq frères, mon père m'honorait par une
'sinèa' ( pièce montée) depuis ma naissance, à mon nom.
(Peux être est ce de là que j'aime faire des pièces…
).
Il avait un pâtissier attitré du côté de la rue de Londres, chez Nathan.
Ce dernier lui fabriquait spécialement une bien remplie de crème dans les
'kyabar ( petites boules). Tout comme à Pourim, il se chargeait d'acheter
aussi des petites sucreries ( sujets comme le dit Hajkloufet) en forme de coq,
de poule, de chameaux transparents de diffèrents coloris et autres qu'il
disposait entre les assiettes de salades et autres fruits secs. Un chandelier
relevait le tout avec comme compagne' 'La samba' ( statue ), cette pyramide
composée de petits gâteaux superposés soudés par du caramel marron coulé
et refroidi, surmontée par une plaquette ' kalb louze' comme fronton portant
mon prénom '( voir photo passée le 19/1/03).
David Ayouche honorait toutes les fêtes et traditions. Avec un goût bien
particulier pour 'le dressement de la table .Lui qui fut orphelin à 11 ans,
et chargé de famille en bas âge( trois frères dont une sœur) avec une
grand mère paralytique , lui qui ne savait même pas lire et écrire le voilà
respecter sa religion à sa façon , avec les moyens qu'on ne lui a pas
inculqués. Oui, il fumait le samedi et travaillait aussi, n'empêche que sa
foi résidait dans son cœur et il n'était pas avare de mitsvoths.
Ytro était l'occasion de 'rameuter' les cousins et tantes de Tunis. Une fois
la fête finie tard dans la nuit, ma mère leur disposait, d'entre les tables
et les chaises, des couvertures à même le sol avec comme oreillers d'autres
couvertures pliées en quatre. Un grand kif. La nuit, on enjambait leurs corps
pour aller aux toilettes. Un grand kif, surtout que nous disposions d'un seul
water. On se retrouvait à trois devant la porte entrain de soutenir nos
ventres. La grande GHASSRA. Film en noir et blanc.
Un grand kif ces coïncidences. Un grand kif aussi quand trois bébés
pleuraient ensemble, ce qui faisait dire à mon père, plein de boukha, ' In
yad'in radèm..'
La nuit devenait blanche ( aujourd'hui noire avec ma clientèle et noire quand
je dors
). Chikkhè...Ma grand-mère, la pauvre, impotente comme elle était, avait
son pot en plastic, caché sous son lit alors quand arrivait le pipi au milieu
de la nuit elle réclamait sa 'poterie' doucement….
' Mè chef' touch kass'riti…? ( Vous n'avez pas vu mon pot..???) Ce qui
faisait dire à mon père envers ma mère….
'Barra choufflè kassriet mtà omok oullè tboul fèl ka'ya..!'
'Va lui donner le pot de ta mère sinon elle va pisser par terre )
…
Un grand kif , je vous dis cette époque où l'on s'essuyait le c… avec du
papier journal 'La Presse ', aujourd'hui on se toilette avec de la lavande
ambrée…Un grand kif de se sentir bien à Paris.
'Ya baba oukken tèkra'fiè kolli oukèn ka'yad mnih…!'
'Cher père, si tu me lis, dis moi si tu es bien là-bas..!'
NB. J'ai beaucoup de respect pour les amis de mon père dont quelqu'un sont
encore vivants. Et en particulier à mon ami Henri Fitoussi, anciennement ici.
Merci Henri de me le rappeler temps à autre Ayouch.
Albert l'Enfant de la Goulette.
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