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Chronique de Saraï et Edouardo les Juliette et Romeo de Hak el Ouet.
En ce temps là il y avait dans notre Principauté de Hak El Ouet, un jeune pécheur
de condition très modeste, il avait une petite barque amarrée au quai du
canal du marché aux poissons, vous connaissez cet endroit où les Catous sont
Bou Keurch, tellement ils savent voler les sardines qui débordent des
cageots, sur l’étalage des poissonniers.
Notre Edouardo et sa barque qui n’était pas une Balancelle, ni una Rondine,
ne ravageait pas nos côtes car elle ne traînait ni chalut, ni palangre, mais
c’était une pêche plutôt écolo, rien qu’une pêche à l’épervier,
ce filet volant lancé de main de maître qui permettait de ramener toutes les
petites bêtes bien vivantes.
Car notre Edouardo, bien qu’issu d’une longue lignée de pêcheurs, ne
pouvait pas se résigner à faire de mal ni à un poisson, ni à tout ce qui
vie dans la mer. Quel drame ! me direz vous pour un pêcheur professionnel,
mais détrompez vous ! Edouardo faisait un gros business, en revendant ses
poissons au moins dix fois le prix du marché ! Alors là je vois déjà que
vous ne comprenez plus, la rasra quoi ! L’angoisse Rex !
En fait notre cher ami, pêchait avec parcimonie car il ne vendait jamais ses
poissons, aux restaurants, mais seulement à ses concitoyens et concitoyennes
qui possédaient une piscine d’eau de mer, car à Hak El Ouet, les familles
aisées se devaient d’avoir une piscine d’eau de mer, avec des poissons
vivants dedans, vieille coutume héritée des Romains qui eux avaient des
piscines avec des murènes, histoire de faire peur aux esclaves !
La fille benjamine de notre Bey, Saraï bien heureuse soit-elle, était sa
meilleure cliente, un femme superbe en vérité, de longs cheveux noirs, des
yeux de gazelle, des hanches élancées, une poitrine délicieuse, et une peau
laiteuse… A bab ab ! Quel Style mé zailleux !
Elle venait tous les jour trouver Edouardo pour lui acheter ses rougets bien
vivants, que voulez vous les Cypinus Auratus ( poissons rouges en langue
romaine ) ne peuvent vivre dans l’eau de mer. Et sur le port tous les pêcheurs,
se rendaient bien compte qu’elle n’avait de beaux yeux que pour Edouardo,
le bien heureux. Mais le pauvre savait bien que la chance ne faisait que lui
sourire, et que sont amour pour la belle Saraï ne pouvait être que
platonique, tant était grande, la différence de leur condition sociale.
Elle vivait au palais de son père notre Bey bien aimé, et lui vivait seul
dans sa cabane de pêcheur à Goletta Vecchia ! Quelle adversité !
Alors, un jour qu’il n’y tenait plus, notre Edouardo se rendit chez El
Fenech, le rusé, le Juris Consulte de la boutique des Milles Révélation, à
cent dinars le conseil, et de lui dire :
« Ya BaBa El Fenech, mon âme s’enflamme de joie quand je la vois, et mon cœur
saigne trop chaque fois qu’elle disparaît, je ne peux lui déclarer ma
flamme, sans encourir le courroux de notre Bey bien aimé son père ! Alors ya
BaBa toi qui sait tout, indique moi par pitié pour un pauvre pêcheur, un
poison qui abrégera ses souffrances ! «
« Fils ! ça va pas la tête ? Bel ras Oueldi, tu m’as pris pour un
empoisonneur ? Fou que tu es ! Et ignorant aussi ! ton problème est très
simple à résoudre, et je me charge de l’affaire, C’est cent dinars !
paye je sais que tu peux ! Et Edouardo paya le Juris Consulte «
El Fenech alors ajouta « Tu es vraiment un ignorant des coutumes de tes ancêtres,
les Romains de Sicilia ! Ô Culture et Sagesse perdue dans la nuit des temps !
Quand Saraï viendra ce soir chercher son poisson bien vivant, tu lui parleras
ainsi :
« Ô ma Sublime Abeille,
Ya Habibi déploies donc tes ailes,
Ô amour au mien pareil,
Voles vers ma barque et le Soleil,
Je t’ y attendrai avant son levé,
Alors tu m’emporteras,
De tes ailes déployées,
Dans un sublime carroussella. »
« Pour le reste j’en fais mon affaire, notre Bey le Saint Homme ne me
refuse rien ajouta El Fenech le rusé « .
Ainsi fût-il fait, et notre Belle Saraï de Hak El Ouet, fût emportée sur
les flots dans la gondole de notre Edouardo.
Et de déclamer à celui qui l’avait enlevée :
« Comme je suis heureuse Ya Habibi, Ya Azizi, nous allons faire croire que
durant notre petite fuite, l’irréparable a été commis, et après tout
deviendra très simple, ainsi que me l’a expliqué El Fenech, qui au passage
m’a facturé cent dinars ! Quel Mzaour celui là ! «
Et lui de répondre à Saraï sa bien aimée :
« Habibi Saraï ! Azizi Saraï ! ne crains rien, je suis un homme de bien et
loyal, homme d’honneur et de probité, et tous les Cheïtans des enfers ne
pourront jamais me détourner, du respect que je dois à notre Bey, à Toi et
tous les Tiens, nous ne consommerons notre hyménée, qu’une fois unis en
juste noce par devant ton père notre Bey Le Bien Aimé, bénit soit-son nom !
«
Sans plus aucunes nouvelles de sa fille chérie, notre Bey adoré tout vêtu
de larmes se désespérait, répandant de la cendre sur sa tête, il avait
convoqué les déguaizas pour effectuer les actes qui devaient conjurer les
mauvais sorts, les amiraux qui voulaient lui faire armer une escadre de félouques,
mais le Brave et Saint Homme ne pouvant se résoudre à rien de semblable,
convoqua son Juris Consulte lui disant :
« Mon Fils El Fenech ! Toi dont la sagesse a dépassé les confins du
Royaume, guides mes actes, et éclaires moi de tes conseils, tu sera récompensé
généreusement pour cela « .
Et El Fenech de répondre :
« Mon Bey ya Amri ! ma plus belle récompense serait de revoir la joie
illuminer les traits de ton visage, voici ce que je te conseille, j’ai
apporté avec moi dans cette cage, une colombe voyageuse, qui portera un petit
message vers ton enfant bien aimée, écris sur le message que tu lui
pardonnes sa fugue, et qu’elle pourra s’unir en bonne et juste noce à
l’être de son choix, tu signeras ce message de ton Seau Beyical, ce qui
vaut Décret Royal et Serment Irrévocable, et sur mes richesses je fais le
serment, que tu verras te revenir ton Infante adorée « .
« El Fenech mon fils, tu me rends la vie, faisons vite ce que tu me
conseilles « .
Ainsi il fût fait, la blanche colombe messagère du bonheur, ramena à tire
d’aile nos deux tourtereaux, tout deux furent pardonnés, grâce à El
Fenech l’irréparable ne fût pas évoqué, et les noces furent célébrés
durant sept jours et mille et unes nuits ! L’Honneur et l’Amour étaient
saufs ! Ajeb !
Mabrouk à tous les convives goulettois , il n’en manquait pas un, ainsi
qu’à une noce de ma connaissance, magnifique et Beyicale qui fut célébrée,
il y a quatre semaines.
Vous voyez mes amis, à Hak El Ouet, il ne peut y avoir, de Roméo et
Juliette, ni de Paul et Virginie, car nous les Goulettois on est trop
sentimentaux, et pour nos Saraï et Edouardo, tout est toujours bien qui finit
bien, même si pour cela on doit se lamenter et finir par éclater de « rire
aux larmes « , ça c’est tout notre portrait.
Tu verse des larmes de Boukha comme disait l’autre!
Propos recueillis il y a gbel du « Livre de la Consolation des Glibettes « .
Berdah
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