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MA BOUEE |
Un montage, du film imaginaire ‘...Sur l’Île de la Sensation... !’ fait par mon amie, m’a rappelé ma bouée, celle que j’avais à la Goulette vers l’âge de 12 13 ans. Une vieille chambre à air toute rapiécée et souvent dégonflée toutes les fois que je montais la récupérer à la buanderie, située à la terrasse. Je la descendais en cachette de mes parents et là faisait remonter toujours avec cette crainte dans le ventre d’être surpris par mon père qui craignait qu’elle ne m’emporte au large. Un jour. J’étais à cette époque très bon nageur, rares d’ailleurs étaient les jeunes ou vieux goulettois qui ne savaient pas barboter dans une eau dont la profondeur au rivage était de 10 cm. Il fallait rentrer à plus de 60 mètres de la plage pour prétendre flotter. Il est vrai aussi que le mauvais vent fort qui soufflait parfois, de la cote vers la mer, pouvait emporter les moins avertis au large. ‘Ces joujoux en caoutchouc’ si l’on n’y prenait pas garde étaient dangereux et non sans risques. Des enfants, laissés en errance par leurs parents, plus enclins à papoter qu’à surveiller leur progéniture ont été quitte par une grande frayeur. A défaut d’une bouée comme celle qui fleurissent aujourd’hui en plastic avec de jolies motifs et faciles à gonfler, la mienne était grosse et surtout lourde à manier. Souvent dégonflée comme je le dis plus haut, je l’enfilais comme une écharpe tricolore de Maire ou de députés. Sauf que la mienne était noire et plate avec une valve en érection. Mise en bandoulière, j’allais donc la gonfler, chez mon ami Rzouga, dont le père Hamouda, était propriétaire de la station d’essence AGIP. Gonflée à bloc, la vessie reprenait en un clin d’œil sa forme primitive pour la modique somme de 10 millimes. Une grande dépense pour moi, par contre le Habib, un fainéant de premier ordre et adepte de la divine bouteille, le réparateur de mobylettes, m’épargnait cette charge financière. Il me la gonflait gracieusement et pour cause. Je louais chez lui les engins casse cous, les GINO BARTALI, que nos parents nommaient engins de mort. Malheureusement, notre mécanicien qui tenait boutique à deux pâtées de maison de chez moi, était le plus souvent fermé. L’opération gonflage terminée, je faisais rouler ma bouée, comme un vulgaire squelette d’une roue de vélo, sur un macadam chaud à faire griller les plantes des pieds les plus coriaces, vers sa destination finale, la plage. Tous mes amis en avaient une et rares sont ceux qui pouvaient se targuer d’en avoir de modernes. D’ailleurs même les plus nantis, ne l’utilisaient pas, préférant user de ces pneumatiques et chambres à air usagés, chers aux enfants indigents. Que nous étions. Une fois mise à l’eau, je sautais sur elle comme sur un édredon moelleux. Je me calais bien au centre, évitant la valve pour ne pas me blesser. Une fois installé, je commençais à battre des pieds pour naviguer, comme le ferait une hélice d’un paquebot pour avancer. Pour reculer mes bras prenaient le relais. Ils servaient aussi bien de rames que de gouvernails au cas où mes jambes ne répondaient plus par la fatigue. Lorsque je sentais que je m’éloignais trop du rivage, les paroles de mon père résonnaient comme un feu clignotant rouge me rappelant le danger que j’encourais. Je kiffais donc de tout mon soul, ce plaisir de navigation assez loin de l’endroit préféré de mon père. Goulette Casino. J’avais toujours cette hantise qu’il me surprenne allongé sur ce rafiot de fortune et d’en subir plus tard l’admonestation. Je n’étais pas seul à naviguer dans cette grande marre bleue, mes copains logeaient à la même enseigne. Aussi craintifs que moi, évitant toujours d’être surpris par papa ou maman ou par le grand frère, , nous concourrions ensemble dans des joutes où, le premier arrivé aux abords du canal, ce qui était quand même assez loin de notre point de départ, gagner la seule récompense honorifique admise, celui le premier arrivé à la force de ses poignets et mollets, à la hauteur du piquet planté dans l’eau sur lequel flottait un fanion rouge qui interdisait d’aller au-delà, c'est-à-dire la traversée de ce fameux canal de Kherredine. Je pouvais voir une fois arrivé à la hauteur de ce panneau, le fameux mur de Kherredine, sur lequel tants de dos célèbres se sont posés pour une ‘friture’ corporel. La buvette de Hassan n’existait pas encore. Il y avait cependant de nombreux parasols et surtout une foule de jeunes juifs qui se trémoussaient dans l’eau. Cette célèbre plage n’était pas large. Une quinzaine de mètres de long sur vingt mètres de large. Mais on s’y bousculait quand même lors des fortes chaleurs. La notre par contre était beaucoup plus longue mais pas très large. Elle commençait à Goulette Casino pour finir bien loin, du coté de ce que nous surnommions les blocs. Il ne m’était pas permis, à cette époque, comme on le disait en arabe, de fouler ‘EL KONTRA’ le pont, la frontière nord EL HOUDOUD, de mon pays du soleil et de la sérénité, et aussi de dépasser, celle que m’imposait mes parents, la plage dite TAKET’S. Ils nous arrivaient aussi mes amis et moi, de braver l’interdit lorsque le mauvais vent n’était pas au rendez-vous, de rentrer un plus vers le large. Mais là aussi, les paroles de mes parents me dissuadaient de franchir le rubicon. Je revenais donc sur mes pas, laissant les autres braver le danger. Par moment, un emmerdeur désœuvré et sans bouée, en mal d’amusements, venait par surprise tel un sous marin, plonger sous ma bouée pour me faire capoter et mordre ainsi la poussière. Un jeu comme un d’autre. De ma bouée, j’ai gardé le souvenir d’un adolescent de 12, 13 ans gonflé à bloc. Aujourd’hui, je ne rame plus, je me laisse emporter par mon matelas posé sur un plan d’eau de piscine, rêvant par moment à ma bouée qui me noircissait les aisselles. Et voici donc l’ambiance d’une journée passée sur la plage croqué par notre ami HENRI BELLICHA z’al artiste peintre. Vous remarquerez les bouées flottants sur la mer. ALBERT SIMEONI
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