LES MEMOIRES D’UN GOULETTOIS

L’ENFANT DE LA GOULETTE

PAR ALBERT SIMEONI (BEBERT)

Dans la série reconnaissance …

                                                                                                18/06/89

                                               ‘HOMMAGE A MA MERE’

Un étudiant de 22 ans, en pleurs,  est assis sur un banc public anonyme, pas très loin de sa fac. Il vient d’apprendre son exclusion après 4 ans d’études de toutes les facultés de France et de Navarre. Plus de cartouche ni de session de rattrapage. 

-Allô… !  maman… ? ‘

Sa mère attendait d’un moment à l’autre ses résultats , à quelques km de là, à la Goulette.

-‘Allô.. ! c’est Sauveur…. ?’

Une voix très faible dans le combiné..

-‘Non…maman…c’est Richard…. !’

-Comment se fait t’il que Sauveur ton frère... ?’

-Il n’est pas bien….. !’

-Quoi… ? comment  ça….. ? qu’est -ce qu’il a… ?’

-‘On l’a exclu… !’

Le lendemain matin vers les 11 heures,  une dame pensive et inquiète, foulait le tarmac de l’aéroport de Marignane avec un visage décomposé, à la surprise de ses enfants.

-‘Pourquoi.. ? t’ont t’ils exclu…. ?

Question embarrassante, sans réponse logique. L’étudiant était sûr d’avoir très bien fait ses travaux pratiques et le reste en cette fin et dernière session de septembre.

Ma mère, une dame au caractère sans équivoque, ne croit pas à  la fatalité. Prenant son mal en patience et sa baguette de pèlerine, traînant son fils par la main, elle se transforma en Sherlock Holmes. Enquêtant auprès des compagnons d’armes de sa progéniture exclue. Elle s’informait. Recueillant par ci par là quelques indices appréciables et surtout….

-‘Madame Simèoni…votre fils lors d’un TP a fait rire le cours….prononçant un mot en arabe qui a été rapporté au prof ….’

Un corse. Déduction logique, le maître de céans a tenu rancune. Premier assesseur dans le jury, il mit son veto au passage de classe de ‘l’individu’. Monsieur le Doyen de la faculté de Marseille est un homme qui reçoit rarement les doléances des parents….il ne reçoit même pas D.ieu dans son bureau hermétiquement clos…Il est au-dessus de D.ieu. Un nazi ferait pâle figure devant Monsieur le Doyen qui perche au 5 ième étage de la fac de Marseille quelque part installé dans une rue du 141  iéme R.I.A..

-‘Bonjour madame….je suis madame Simèoni…je voudrais rencontrer monsieur le Doy…’

-‘Monsieur le Doyen ne reçoit pas…revenez plus tard…’

‘Des plus tard’, ma chère mère, on a ingurgité des pleins la tête. Elle s’en allait décourager, réconforter mon frère à n’en plus finir. Usant toutes les astuces, elle fit intervenir l’ancien Doyen afin qu’il intervienne auprès de l’autre pour assouplir sa position. Peine perdue. Le coeur  de Monsieur  le Doyen ‘D.ieu j’ connais pas..  est inflexible. Ma mère ulcérée et rèvoltée par  cette indifférence et le mépris décida d’en finir…

A la secrétaire…

-‘Ecoutez… !  Madame.. !  si le Doyen ne me reçoit pas, je défonce la porte…. !’

Devant ce verbe haut et fort, et voulant éviter une esclandre …

-‘Madame…le Doyen va vous recevoir…  patientez… !’

Voici donc une maman, qui n’avait rien à perdre, sinon la vie, franchissant après de multiples tentatives sans succès, l’antre de ‘L’avant D.ieu’, la porte de Monsieur le Doyen .

Elle vit pour la première fois de son existence, un doyen,  un visage bien jeune, une quarantaine d’années, père de famille,  assis derrière son bureau qui se leva pour   serrer la main de cette étrangère venue quémander ‘l’aumône’.

Lui……..’Bonjour madame Simèoni… !’

Elle…….’Bonjour monsieur le Doyen,….vous savez quel est le but de ma démarche… ?’

Lui……..’En effet madame…c’est très  regrettable ce qui arrive à votre fils…je ne peux rien faire…c’est une décision du jury irrévocable….…’

Ma mère d’une voix assurée…

               ‘Monsieur …. ! j’ai laissé mon mari et mes trois enfants à Tunis depuis deux semaines….Sauveur et toute la famille ne dormons plus…croyez-vous que je vais naïvement me taire et balayer 4 années de sacrifice et surtout laissez-passer une injustice commise à l’encontre de mon fils… ?’

Lui…….’Une injustice…. ? madame…comment ça…. ?’

Ma mère..

              ‘En effet monsieur le doyen….une rancune tenue par son prof de TP qui n’a pu supporter une plaisanterie de jeunesse dite pendant le cours… !

Ma mère se leva et tira de son sac une petite  bouteille d’Evian remplie d’essence. L’odeur du carburant titilla le nez du ‘Seigneur’.

-‘Regardez monsieur le doyen… ! je vous jure de ce que j’ai le plus cher au monde …mes enfants…que si je ne sors pas d’ici avec un accord verbal autorisant mon fils a être repêché exceptionnellement…je m’asperge de ce liquide et m’immole devant vos yeux….et surtout faites attention a m’en empêcher… !

Le visage du doyen se transforma en masque de cire…

-‘Mais madame….?…vous n’allez pas…. ?’

-‘Oui…monsieur je le peux.. contre l’injustice…les journaux le seront…’

Un chantage …mes amis… ?  du bluff… ?  Oh… ! que non…messieurs … ! une foi et une conviction d’aller jusqu’au bout . Maman, telle que je la connais, aurai mis à exécution son funeste projet, pour son fils.  Après quelques palabres d’usage….

-‘Madame…..Croyez-vous en la parole d’un doyen… ?

-‘Oui…monsieur…’

-‘Je réunis ce soir le conseil pour l’informer …je vous appellerai ce soir avant 17 heures ..’

Avant 17 heures, la décision fût prise de redonner une nouvelle chance à mon frère pour  le début du mois d’octobre. Il réussit cette passation faite exceptionnellement pour lui. On n’a jamais vu ça dans les annales de la fac.

Sauveur réintégra ses cours et sortit chirurgien-dentiste  4 ans plus tard.

‘Maman….tu m’a demandé à plusieurs reprises d’écrire le roman de ta vie…Le reste de mes jours ne suffirait pas . On t’a rapporté ‘que tu me téléphonais 20 fois par jour…’ Nos  sketchs ensemble et à ton insu, ont fait le tour de la planète….Même en Papouasie, ton parler si sympa est connu. Madame Miller des State en ri. Les autres lisent en sourdine nos péripéties. De t’avoir mis en valeur de cette façon ..comme ça …c’est comme jouer sur des planches de théâtre devant 100 000 personnes invisibles,  avides de rire. Je ne t’apprends rien en  disant que, quelques soit tes conneries, ‘ton trâlouid’ ( cafouillage), ton incompréhension légitime, tu resteras notre plus belle fleur. Et quand le jour ou  D.ieu s’emmerdera et te rappellera, on ne t’accompagnera pas sur l’instant, on restera sur terre un moment à mourir d’ennui…sans toi..’ Je t’embrasse….Ton aîné.

REPRISE DE LA SUITE ‘ AU NOM DE TOUS……’ la semaine prochaine avec photos durant dix semaines.

"albertsimeoni" <albertsimeoni@wanadoo.fr> 

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