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SOUVENIRS DE TUNIS LA BLANCHE


   

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PAR

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VICTOR SAMUEL MEMMI


"C'est la nostalgie du passe qui m'a pousse a prendre la plume, celui de la jeunesse d'avant-guerre, epoque inoubliable de liberte et d'insouciance quasi totale............"

Voici, en exclusivite pour harissa.com, le premier chapitre de son livre!!


    Tunis 1931 ! La vie etait belle et sans histoires. Mais pour les Juifs du pays, amateurs de sport, l'annee avait ete particulierement faste. En football, notre equipe preferee, l'U.S.T., avait remporte le championnat de Tunisie; en natation, le C.N.T. avait domine toutes les equipes nord-africaines et en battant l'Americain Frankie Gezaro a Paris par knock-out au deuxieme round, Young Perez devenait le champion du monde des poids mouche. Sur toute la longueur du bateau Le Chauzy qui l'emmenait a Tunis, une enorme banderole avait ete apposee : "Gloire a notre champion du monde Young Perez". Dix mille personnes I'attendaient au port de Tunis et plus de cent mille l'acclamerent tout le long de l'Avenue Jules Ferry. A Tunis, les spectacles et les conferences attiraient beaucoup de monde : une piece de theatre presentee par les galas Karsenty au Theatre municipal, Maurice Chevalier au Palmarium et Georges Raft dans "Bolero" avaient emballe le public Tunisois. Conference de Colette le mardi au Mondial et le dimanche matin, Jouhaux parlera de Jean Jaures, le pacifiste, le dreyfusard, assassine quelques jours avant la guerre de 1914. Au printemps, le cycle des grands galas debutait par celui de la presse et les responsables ne faisaient jamais les choses a moitie. La soiree s'etait deroule au bas du Colisee, a la rotonde et au dancing toutes les portes donnant sur l'Avenue Jules Ferry, l'Avenue de Paris et la rue de Marseille etaient fermees. Le public avait sa disposition deux excellents orchestres et de nombreuses attractions internationales, les dames rivalisaient de beaute et d'elegance, et frac ou smoking etaient de rigueur pour les hommes. Le corps diplomatique au grand complet etait la et la soiree s'etait achevee au lever du jour. Le Gala de la Geographie avait eu lieu au Majestic Hotel et celui de Dante Alighieri au Tunisia Palace - meme monde, meme classe, meme succes.

    Au printemps, l'Avenue Jules Ferry retrouvait son ambiance des grands jours. A l'abri du soleil, grace aux nombreux arbres plantes sur toute sa longueur, l'Avenue Jules Ferry etait l'endroit ideal pour la promenade. Face au theatre municipal les cochers etaient la sur toute la longueur du trottoir et a deux pas, les superbes etalages des fleuristes. Les cireurs et les vendeurs de journaux completaient le decor. La station principale du TGM se trouvait face au cafe de Paris et des le lever du soleil, l'ambiance etait creee par le va-et-vient continuel des voyageurs. Tous les grands cafes se trouvaient la : le cafe Casino, le cafe de Paris, la Rotonde, Le Baghdad, Le Capitole, la Patisserie Royale, Chez Max, Le Novelty, Le Paris Bar et autres. Au printemps, les terrasses des cafes, dehors, changeaient le visage de notre belle Avenue. A douze heures, c'etait la sortie des lycees Francais et Italien et cette jeunesse si belle, si vivante, se retrouvait la tous les matins et le spectacle etait alors dans la rue.

    A l'heure du cafe, chaque groupe d'amis se retrouvait a la Rotonde, au Casino ou ailleurs et c'etait l'heure des conversations animees. Le soir, a la sortie des bureaux c'etait la promenade, le soleil et les jolies filles, mais la nuit c'etait un autre monde !

    Mais l'importance de notre Avenue n'etait pas due uniquement a son animation quotidienne, elle etait bien reelle et elle demeurait le centre de la capitale. La Residence generale de France et en face La grande Cathedrale de Tunis, la Banque de Tunisie, le Credit Lyonnais, la Compagnie Algerienne et le Comptoir national d'Escompte de Paris, les hotels Carlton, le Claridge, le Tunisia Palace, le Theatre Municipal, le Palmarium, les cinemas Le Colisee, Le Capitol, Le Mondial, I'ABC, MidiMinuit, Le Parnasse et la majorite de nos avocats, des hommes d'affaires, des Compagnies d'Assurances, des Compagnies Maritimes se trouvaient sur notre avenue nationals ou, juste a cote, la Depeche Tunisienne, le plus important des quotidiens francais communiquait au public sur un tableau noir les dernieres nouvelles internationales au fur et a mesure de leur reception si bien que, longtemps, cet endroit a ete le plus frquente de Tunis.

    En ete, changement total de decor ! A Tunis les nuits sont douces et merveilleuses et on dansait partout. Grace a son orchestre et a ses attractions internationales, le Pavillon du Belvedere etait le plus frequente. A la Marsa, on dansait aux "Dunes" et au souffle du Zephyr en haut de la Corniche. A Amilcar, sur une petite colline, au "Petit Mousse" se retrouvaient tous les soirs plusieurs groupes d'amis qui dinaient et dansaient au son d'un excellent orchestre. Au Dar Zarouk, a Sidi Bou Said, il etait difficile de quitter l'endroit, l'atmosphere etait si agreable. Mais aucun etablissement n'a obtenu autant de succes que la Jetee de La Goulette grace a un excellent orchestre etranger, des attractions internationales et une ambiance incroyable creee par la jeunesse qui se retrouvait la tous les soirs. Mais le nom de la Goulette reveille en moi des souvenirs inoubliables. La Goulette de mon enfance, la Goulette de mes reves!

    J'ai dix ans a peine et je decouvre le soleil, la plage, la mer et les souvenirs remontent a la surface. C'est l’ecole des garcons ou, des fenetres de ma classe, je voyais le TGM. en marche. C'est la Picola Sicilia ou tous les pecheurs dansaient entre eux la tarantella au son d'un piano mecanique, c'est la retraite aux flambeaux que nous offrait tous les samedis soirs l'armee francaise. C'etait la Madona di Tapani qu'on promenait a bout de bras, Juifs et Arabes nombreux suivaient le cortege et le cure, Padre Saliba criait d'une voix de stentor: "Viva la Madona di Tapani" et nous repondions a notre tour: "E Viva !"

    C'etait l'eglise de La Goulette qui dominait tout le quartier des siciliens, les pecheurs qu'on voyait tous les jours a la meme heure et a la meme place, et les remparts datant de l'epoque de Charles Quint transformes en centre penitencier, d'ou son nom arabe "La Karaka", et le Bloc, la fameuse jetee de la Goulette ou nous nous asseyions sous le phare, le phare qui guidait les bateaux a leur entree dans le canal de Tunis et la, la brise de mer nous fouettait le visage et cette mer si immense et si mysterieuse qui nous fascinait tant. Le Bac et la cheminee de la Centrale electrique qui nous paraissait plus haute que la Tour Eiffel... et le TGM (le petit train Tunis - Goulette - Marsa). Ceux de la premiere classe pouvaient rester impassibles l'un en face de I'autre sans se parler, un journal a la main, s'essuyant de temps en temps les lunettes mais en seconde classe, I'ambiance etait tres differente, le voyage ne durait que douze minutes mais c'etait suffisant pour s'apercevoir de mille maneges de la part des autres voyageurs : le vis-a-vis qui nous detaillait sans aucune gene, celui qui tenait a sa place pres de la fenetre, celui qui etait toujours a la recherche d'une ame soeur, le specialiste de la politique qui tenait absolument a se manifester, quand aux confidences elles ne se disaient qu’a haute voix.

    J'ai vingt ans et tout a change, nous ne cherchons qu'une seule chose : Vivre! mais vivre a pleins poumons. A l'epoque, la musique Cubaine faisait fureur et le patron de la jetee n'a pas hesite a engager un des meilleurs orchestres de la Havane et tous les soirs, a neuf heures pile, nous etions a notre table que nous avions reservee pour toute la saison et certains samedis soirs, Pietro venait avec son canot automobile pour un tour en pleine mer et, a minuit nos amies chantaient aussi bien Saint Louis Blues et Stormy Weather que les dernieres chansons (Oum Khalsoum, nuits inoubliables, et a deux heures du matin, nous etions a la maison, heureux en pensant a la grasse matinee a laquelle nous avions droit, mais peut-on dormir un dimanche matin a La Goulette, une journee qui tient du Carnaval et du 14 Juillet. A six heures du matin reveil en fanfare du Consul d'Italie, le Docteur Errera par les musicians de la Savofa, de quoi faire sauter toute la Goulette, ensuite c'etait l'orgue de barbarie qui faisait le tour de la ville au son de Manarota ! Manarota ! et Ramona ! puis c'etait le tour du cirque Zavata au grand complet, musique en tete, ensuite les journaux publicitaires du demier film de Zorro et tous les badauds qui suivaient, et pour terminer c'etait I'apparition d'un jeune homme appele le fils de la Garouja qui etait charge par la police d'attraper les chiens sans museliere et personne ne voulait rater le spectacle et tous de le suivre derriere la fourgonnette... alors les grasses matinees, on pouvait les oublier.

    Mais debut septembre tout changeait et si les lampions n'etaient pas tout a fait eteints, nous sentions pourtant que l'ete tirait a sa fin et cela nous attristait, meme la mer changeait de couleur et l'eau n'etait plus aussi bleue, elle aussi etait triste et fin septembre on pouvait chanter les sanglots longs des violons de I'automne. Il m'arrivait d'aller en solitaire au quartier arabe a Bab Souika. Tot le matin, la place etait deja noire de monde, les tramways pris d'assaut et dans les cafes, on jouait deja aux cartes, aux dominos et aux echecs. Le cafe etait servi avec une goutte d'eau de fleurs d'oranger et le the selon le gout du client, a la menthe ou aux pignons ; quant au conteur arabe, le journal a la main, il tenait son auditoire en haleine. Au Grand Cafe de la place, tous les grands de la boxe etaient la, entoures de leurs managers et entraineurs, soigneurs et amis. Les admirateurs etaient tenus a 1'ecart. On se preparait pour le gala de boxe du lendemain ou Ben Tahar devait rencontrer l’Italien Leopardi et l'animation dans le quartier ne cessait qu’a la fin de la soiree. Quant aux dernieres nouvelles et aux confidences, on les entendait au Hammam ou chez le coiffeur.

    Nous etions jeunes, mais nous ne voulions rien rater et nous tenions a assister aux courses d'automobiles qui se deroulaient sur le circuit de Carthage ou du Bardo avec la participation d'authentiques champions internationaux : Dreyfus, Chiron, Maserati, Nuvolari et autres champions italiens. Le mercredi etait le jour de I'arrivee du courrier italien et le jeudi matin nous allions au port de Tunis pour admirer de plus pres et meme toucher ces bolides que nous applaudirions dimanche et nous prenions les choses au serieux et allions a Carthage avec jumelles et chronometre pour controler exactement la position de chaque coureur.

A suivre...

Si vous voulez correspondre avec Victor Samuel Memmi, envoyez lui un email a :
sandhaus@netvision.net.il


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