38 a l'ombre, par Jacqueline Bismuth

27 Octobre 1999, 38° à l'ombre ! !

El car y karrkarr !

Cette fin d'après-midi était vraiment incroyable. Des lumières magiques comme seule la Tunisie sait les fabriquer !

Je râlais d'être enfermée dans mon bureau, en pleine zone industrielle. Pourtant, et sans doute pour se donner du coeur à l'ouvrage, le laveur de voiture de la station service juste sous mes fenêtres, avait branché à tue-tête l'autoradio grésillant du "4x4 bâché" auquel il essayait mollement de rendre un vague aspect de voiture. Entre une macro et un tableau croisé dynamique, entre l'appel d'un emmerdeur et le montage d'une promotion sur un produit qui dort, je faisais un kif en écoutant une vieille chanson d'Abdelwaheb. Et tout à coup, va savoir pourquoi, ce crétin de laveur de voiture a basculé sur Radio Tunis Chaîne Internationale qui diffusait le programme en langue allemande pour faire de la lèche aux touristes qui n'en n'ont rien à cirer, vu qu'à cette même heure, ils sont en essscursion à Sidi Bou Saïd :

Le car ramasse le troupeau à l'hôtel à Hamamet ou à Sousse, roule à toute allure sous un soleil de plomb, se fait coincer au péage de l'autoroute. Mais les allemands, ils aiment. Ils rigolent bien dans le car parce qu'ils chantent et mangent des sandwichs au fromage Riki à 3 dinars pièce, (mais en D.M., ça fait pas cher!). Et aussi, ils boivent de l'eau minérale, celle qui est tellement mauvaise que personne d'autre ne veut l'acheter. Mais comme elle a bien chauffé pendant le transport, ils pensent que c'est un problème de température. Ils sont sûrs que quand elle est fraîche, elle est délicieuse.

Finalement, le car arrive à Sidi Bou et se gare n'importe comment dans le parking, (mais qu'essse ça peut faire pour le temps qu'il va rester, et pouis en plus, les autres, on s'en fout !). Vite, vite, dépêchez ! Ça y est, vous avez bu le thé ? Non, non, les beignets on n'a plus le temps. (Nous, on dit les bombolonis !). Allez, tout le monde dans le car. Il faut rentrer à l'hôtel, sinon vous allez rater le dîner. Et les allemands, ils aiment pas trop rater le dîner qui est compris dans la pension complète ! Alors, Trrace la Rrroute, el car y karrkarr !

Et cette fin d'après-midi était toujours aussi incroyable. Avec encore ces lumières magiques que seule la Tunisie sait fabriquer !

Alors j'allais pas tomber dans la déprime ! J'ai pris mes cliques, mes claques, ma petite auto, direction La Marsa pour m'équiper de mes claquettes, (Schlèkas), et de mon maillot de bain, (celui de la fin de saison, qui est si confortable et qu'on ne met que quand on est sûr qu'il n'y a personne sur la plage pour remarquer qu'il est très fatigué et même un peu troué ! C'est sûr, vous avez le même !).

Je n'ai plus eu qu'à faire les 3m50 qui me séparent de la plage pour plonger dans cette étendue douce et accueillante. Une mer "huileuse", comme on dit ici. Moi, je trouvais que cela ressemblait à un lac de mercure, une sorte de miroir parfaitement transparent et absolument immobile qui accrochait toutes les lumières du soleil qui commençait à descendre derrière la colline de Gammarth.

Et de retour à la maison après cette heure de boulot buissonier, j'ai eu très envie de partager ce grand moment de Kif avec vous tous. Je recommence demain. Vous venez ?

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