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L'ETHNOCIDE

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Il aura fallu la guerre de sécession de Yougoslavie, et notamment le calvaire du peuple Bosniaque, pour que soit projeté sous les feux de la rampe le concept d’épuration ou de purification ethnique” que de nombreuses voix présentent, à juste titre, comme une démarche d’essence criminelle. Les Musulmans de Bosnie ont, sur le sol européen et sous nos yeux, subit ce que les lois internationales qualifient de crime contre l’humanité: l’ethnocide. N’est-il pas remarquablement étrange qu’une autre épuration ethnique, celle des Judaïsmes arabes, soit passée inaperçue tout au long de l’après seconde guerre mondiale, et ce notamment en France, pays fortement impliqué dans les dernières phases de l’histoire du Judaïsme, aussi bien que du monde Arabe? On peut voir là la conjonction de divers aveuglements et intérêts qu’il serait bon de mettre au clair pour que les nouvelles étapes de la négociation israélo-arabe puissent se développer de façon saine.

A l’origine, il y a deux mille et quelques années: la première diaspora juive, qui fait du judaïsme, prosélyte à l’époque (par les mariages probablement), une des grandes religions de l’antiquité romaine, c’est à dire du monde occidental antique (de 5 à 10% de la population totale, ce qui ramené au monde d’aujourd’hui ferait de 300 à 600 millions de personnes !). De cette diaspora prospère (Rome, Alexandrie, Babylone, et de nombreuses communautés disséminées autour de la Méditerranée), naîtront des souches culturelles juives présentes dans tout l’espace que l’invasion arabo-musulmane va conquérir au septième et huitième siècle après J-C. L’exemple connu du royaume berbère juif d’Afrique du Nord, et de sa reine, la Kahéna, est souvent cité. On peut d’ailleurs noter que le dynamisme prosélyte du judaïsme s’est affirmé jusque très tard (puisque c’est à cette même époque que le Khan des Khazars convertit son royaume des steppes à la religion de Moïse, ce qui représente une souche possible des askhenazes), dynamisme qui confirme le caractère rivalitaire pluriséculaire qui lie le judaïsme aux autres religion abrahamiques: et pour ce qui est de l’Islam, les conséquences seront de taille.

En faisant un saut dans le temps, on voit, au milieu du XXième siècle, un ensemble de communautés juives du monde Arabe disparaître, et ce sans qu’aucune voix ne s’élève pour simplement remarquer l’“anomalie”: plus de 100.000 juifs tunisiens expulsés de chez eux en une dizaine d’années, x juifs algériens, m juifs irakiens, n juifs égyptiens, z juifs syriens. Il n’y a guère que le Maroc qui fasse figure de pays non atteint par la “maladie” criminelle de l’épuration ethnique. Le “solde” total de ces sordides “transferts” de matière humaine s’élève à près d’un million de personnes. De plus, la perte des cultures, de ces joyaux irremplaçables qui sont la nourriture de chaque être humain, est irrémédiable. Pour prendre l’exemple de ma communauté d’origine, la communauté tunisienne, plus de deux mille ans d’histoire ont été effacés sans qu’aucune bonne à âme, ni de droite, ni de gauche, ni même d'extrême gauche, n’aie appelé à une quelconque révolte ou protestation: tout ça a gentiment été noyé dans “la décolonisation” française (remarquons le paradoxe, puisque les juifs étaient à l’origine les autochtones et les arabes les colons), voire dans “le conflit israélo-arabe”.

L’attitude des autorités d’Israël, et des autres autorités juives, fait d’ailleurs pendant au silence des “médiatiseurs” en France. En effet, deux facteurs se sont conjoints pour que ce silence soit entériné: d’une part la domination des élites Ashkénazes, véhiculant un mépris très “européen” vis à vis des juifs arabes, enfermant l’Histoire juive officielle dans des limites strictement compatibles avec cette seule vision ashkénaze; d’autre part un intérêt proprement stratégique: une fois admis que le seul mode de survie du peuple juif ne pouvait être que l’Aliah (la montée) en Israël, il devenait logique d’un point de vue nationaliste que toutes les populations juives devaient partir en un grand exode vers la Terre Promise, ce qui ne pouvait qu’empêcher de nommer, de dénoncer et de combattre les “épurations ethniques” en cours dans le monde Arabe sous couvert de “libérations nationales”.

On doit bien sûr adjoindre à ce tableau comme facteur principal, la propagande des nationalistes arabes, prolongée aujourd’hui par celle des fondamentalistes islamistes: non seulement le négationnisme a porté sur l’ethnocide lui-même, mais aussi, et c’était inévitable dans un souci de cohérence du discours de référence, l’Histoire de ces pays a soigneusement expurgé toute trace pertinente de ces peuples-souches qui avaient deux mille ans d’âge “dans les os”.

Le scandale négationniste montre ici un autre de ses prolongements. Il est en fait bien plus profond, et bien plus grave, qu’on imagine. On peut par exemple l’approcher en lisant l’introduction du texte de Jacques Lacan célébrant l’apposition d’une plaque commémorative sur la maison de Freud, dans l’Autriche non-dénazifiée (ce qu’elle n’est toujours pas d’ailleurs, ayant joué, à la manière de la France, la victime du nazisme): Lacan ose y dire textuellement que Freud “n’avait été en Autriche, DE PAR SA TRADITION, que de passage”.

C’est bien là de quoi il s’agit: nos bonnes âmes promptes à sermonner, voire à condamner Israël, sont en fait immergées, noyées dans un océan de négationnisme permanent. On a pas vu que des peuples entiers ont été rayés de la carte; ou si on l’a vu, on retrouvera ses petits en s’imaginant que c’est là “la tradition juive”; et un jour, comme ça ne pourra plus tenir devant les jeunes générations, on en reviendra au bon vieux “de toute façon, c’est les juifs qui ont manipulé tout ça”. Exit la mémoire, exit la justice. Bonjour la guerre.

La guerre car les juifs ne se laisseront plus jamais faire: UN GENOCIDE au Nord de la Méditerranée (qui a en fait débordé dans un pays arabe, en Tunisie); ET DES ETHNOCIDES au Sud: ça suffit.

Il y en a peut-être qui s’arrangent de la guerre, mais ce n’est certainement pas le cas des peuples concernés. Je pense que ces peuples, Juif ou Arabes, en ont au fond “ras le bol” de la guerre. Et que de plus ils se rendent compte confusément que ceux qui s'entre battent tuent leurs chance de s’en tirer économiquement au XXI ième siècle, alors que le centre de gravité du monde se déplace vers l'extrême Orient. Et qu’il n’y aura pas de deuxième chance pour les retardataires.

Donc je crois qu’il est temps de dire cette vérité: la paix se gagne dans un donnant-donnant ; et si les palestiniens ont été spoliés à une certaine époque de certaines terres, les juifs arabes ont été et amputés de leurs biens, et annihilés dans leur culture bimillénaire, définitivement morte. Le nombre d’enfants fous “fabriqués” par cet anéantissement de tous ces “dits”, de tout ce tissus du parler humain, de ces langages Judéo-arabes, que parlaient mes pères, langages qui sont morts au monde sous les yeux indifférents des maîtres-es-bonne conscience de l’Occident, personne ne l’a évalué; le psychiatre ne peut que l’estimer énorme. Peut-être moi-même en suis-je fou: mais au moins, je n’en demande réparation à personne en assassinant aucun des Tunisiens d’aujourd’hui (qui commencent à nous oublier, puisqu’un certain crime paie).

Je ne demande aucune vie d’être humain: je demande le légitime partage de la Palestine, en compensation. Et qu’ainsi la part de légitimité d’Israël soit reconnue au nom de ma culture assassinée. Sinon, ne serais-ce pas dire que la seule vraie légitimité reconnue serait justement celle du terrorisme que j’ai refusé de pratiquer? Et que je n’ai que ce que je mérite, n’ayant pas tué dans mon pays d’origine?

Comme je suis Juif, je ne le crois pas. La paix, basée sur l’échange équitable, l’emportera.

Bien sûr, il faut avoir la force suffisante pour pouvoir pratiquer l’échange équitable. C’est la fonction même de l’existence d’Israël dans le concert des nations modernes.

Sarfati Jean Simon.


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