Laissez-moi vivre encore un peu

afin de voir éclore la dernière rose de l'été.

Laissez-moi vivre encore un peu

afin que mes yeux, lavés par tant de pleurs

contemplent l'océan perfide qui s'étire vers l'infini

pour rejoindre ce ciel si pur, si bleu.

Laissez-moi vivre encore un peu

pour embrasser la vie avec mon coeur solitaire

cette nature si belle et si forte faite pour me plaire,

contempler aussi les étoiles qui scintillent dans le firmament,

cette nature odorante d'une incontestable beauté,

que personne, hélas ! ne peut retenir.

Laissez-moi vivre encore un peu

pour entendre le clapotis des vagues fatiguées

venues s’étaler sur la berge pour mourir

dans un rythme incessant comme un coeur qui attend,

une mélopée étrange venue des fonds marins

le chant des sirènes... peut être, qui sait?

Laissez-moi vivre encore un peu

pour saluer l’aurore qui s’élève dans le firmament,

savourer encore et encore cette offrande

que Dieu m’envoie avant de rejoindre les ténèbres,

vous dire aussi sur ce papier qui m'écoute

que je vous aimerai jusqu’à la fin des temps.

Frida Gozlan

10 août - 1997

(extrait de son livre "La Goulette les pieds dans l’eau")

Avec grand regret et peine, le Comité de l’Association des Enfants de Béja vous annonce le départ innattendu, a l’age de 82 ans, de notre chère compatriote Frida Gozlan, auteur de trois livres, qui reflètent la nostalgie et l’amour qu’elle avait pour son pays natal, la Tunisie et pour tout le peuple qui l’habitait. Elle a écrit et publié ses livres: "Le dernier regard", "La Goulette les pieds dans l’eau" et "La mendiante d’amour" à un âge bien avancé - 79 à 81 ans et un quatrième livre "L’hôpital" reste, hélas, inachevé.

Née à Bizerte, elle a passé une grande partie de sa vie à Béja. Nous avons connu Frida Gozlan pendant la guerre, quand elle a montré un dévouement sans pareil pour apporter le soin aux enfants dépourvus.

Il est à noter que lorsque les Juifs avaient reçu le ravitaillement de l’Agence Juive Américaine (le Joint), destiné pour les jeunes enfants juifs, Frida Gozlan avait insisté à ce que nous incluons dans la distribution, les enfants italiens et musulmans. Elle l’avait fait ouvertement et avec courage, sans tenir compte des rapports qu’elle devait soumettre aux Américains.

Frida a laissé derrière elle une fille et deux fils et leurs enfants.

Plusieures familles italiennes et musulmanes se joignent à nous pour exprimer leurs condoléances.

Emile Tubiana pour l’Association des Enfants de Béja

Le docteur et Mme Kaouel

Marinette Cavallaro