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La maman qui chauffe le lac |
Un riche citadin aimait constamment se marrer des personnes dépourvues de
biens ou de travail. Il faisait des blagues à leur compte, même si celle-ci
lui coûtaient parfois une fortune. Un jour il appela devant tous les vieux du
village un pauvre malheureux et lui dit:
- "Veux-tu être riche en une nuit?" Le pauvre bonhomme se précipita
pour se faire volontaire et lui dit:
- "Que dois-je faire pour gagner une fortune comme tu le dis?" Le
riche avec un sourire nonchalant et moqueur lui répondit:
- "Si tu es prêt à passer une nuit nu dans le Lac de Galilée dans
l'eau froide trempé jusqu'au cou, depuis le coucher jusqu'au lever du soleil
et si tu réussis, je te paierai une somme honorable, mille pièces en
or." Le pauvre bonhomme en entendant la somme fabuleuse, accepta immédiatement
le pari sans hésiter. Puis devant tous les témoins du village et à l'heure
convenue le bonhomme se présenta. C'était avant le coucher du soleil, il se
déshabilla et juste lorsque le soleil commençait à s'enfoncer derrière la
colline, à l'horizon, il entra dans l'eau jusqu'au cou et attenda patiemment
le matin, tout comme il a été prévu par le riche. La nuit était très
froide, le pauvre bonhomme tremblait d'abord, mais la somme était tellement
grande pour un homme comme lui, qu'il préférait risquer sa vie pour avoir la
chance d'être riche et pouvoir mettre fin à toutes les misères qu'il avait
enduré toute sa vie . Avec cette somme il pourrait acheter une maison et
vivre toute sa vie avec sa mère, sans effort.
Durant la journée la maman avait appris la nouvelle du pari que son fils
avait fait avec le riche. Elle pris avec elle quelques bûches et se précipita
vers la plage où tous le monde était habillé bien chaudement pour assister
au spectacle de la nuit. La plupart était couverts avec des capes en laine,
d'autres avaient apporté des couvertures et certains avaient préparé un feu
de camps afin de pouvoir passer la nuit au bord du lac.
La pauvre maman, voyant son fils rentrer dans l'eau dans ce froid, alluma un
petit feu et soufflait toute la nuit à pleins poumons en espérant pouvoir
chauffer l‘eau froide du lac. A la vue de la maman avec ses petites bûches,
le riche se réjouissait et se moquait d'elle.
La maman ne cessa pas ses efforts et jusqu'au matin elle ne faisait
qu'apporter des bûches qu'elle trouvait sur la plage et continuer à
alimenter le petit feu. Elle se débattait, elle soufflait et à chaque fois
que le feu rougissait elle se frottait les deux mains de joie. Les passants la
prenaient pour une folle. De temps en temps le riche s'approchait d'elle pour
lui dire:
- "Madame, l'eau doit être bien chaude, faites attention, votre fils
perdra le pari." La nuit passa et finalement les premiers rayons du
soleil apparaissèrent, les témoins déclarèrent la fin de la nuit et la fin
du pari. Le pauvre bonhomme sortit aisément de l'eau et réclama son dû. Le
riche le voyant sortir de l'eau doucement était sûr que la maman avait
effectivement chauffé l'eau. Il réfléchit un moment puis il lui dit:
- "Mais votre maman avait chauffé le lac et ceci n'était pas prévu
dans notre pari." Les témoins que cette aventure amusaient se joignirent
aux arguments du riche. Finalemnent le pauvre malheureux n'avait plus de
secours. La seule possibilité qui lui restait était de faire recours à la
justice et de porter plainte auprès du roi David.
Un mois passa depuis le pari, les soldats du roi vinrent lui annoncer que le
jugement attendu sera le troisième jour de la pleine lune du mois et il se
tiendra au palais du roi à Jérusalem.
Le jour du jugement tout le monde était présent. Le roi David écouta
patiemment les arguments de l'un puis de l'autre et après un moment, le roi
rendit son verdict et il déclara que le riche avait raison et que la maman
avait effectivement chauffé l'eau du lac et que par conséquence elle avait
violé les termes du pari. Le pauvre bonhomme se voyant perdre le dernier
espoir qu'il avait encore et n'ayant aucun autre recours pris sa maman par la
main et lui dit:
- " Maman, je n'ai pas de chance, c'est injuste, mais que peut-on faire
devant le jugement du roi David?"
Salomon, le fils du roi David, qui avait à peine sept ans, avait assité à
ce jugemment et comme il était mêlé au public il avait aussi entendu les
dires du plaignant à sa maman. Il lança un regard au pauvre bonhomme, puis
souria et s'en alla au palais. Le soir Salomon dit à son père le roi:
- "Papa, je voudrais cuisiner demain et je te prie d'inviter au dîner
les sages de notre ville.qui avaient assité au jugement" Le roi David était
content de la nouvelle et de la générosité de son fils, il accepta
l'invitation sans connaître la raison, mais il attribua cela à la
satisfaction de tous les sages qui étaient présents et avaient suivi le
jugement. Le lendemain matin le roi ordonna d'inviter les sages de la ville
comme son fils lui avait demandé.
Le lendemain les sages étaient tous présents et bavardaient entre eux. Le
roi David les rejoigna un peu plus tard et participa aussi à la conversation.
Quand l'heure du dîner arriva, Salomon n'était pas prêt avec sa soupe. Le
prince entra dans la salle et s'excusa du retard et pria les invités de
patienter encore un peu.
Le roi David accepta les excuses de son fils et attribua ce contre-temps à
son manque d'expérience et comme il ne voulait pas le décevoir il fit
patienter les invités. Ainsi passa presque toute la soirée et Salomon fit
plusieurs apparitions avec ces mêmes excuses. En finale la patience du roi
David s'approcha de ses limites et croyant faire plaisir aux invités, pensant
maintenent que la soupe devait être prête, il pria les invités de le
joindre afin de rendre visite à son fils pour voir comment la soupe faisait
sa cuisson.
Arrivé à la cuisine et à son grand étonnement il vit le prince Salomon
assis par terre en train de souffler sur le feu et la marmite suspendue à la
poutre du plafond sans contact avec le feu. En voyant cela le roi s'exclama:
- "Mais mon fils! comment veux-tu que la marmite se chauffe, si le feu
est en bas et la marmite est suspendue en haut à une si grande distance du
feu?" Le prince qui par sa façon de faire cuir la soupe voulait en effet
provoqué la réaction du roi, et avec un désespéré il fit:
- " Papa, et comment veux-tu que le lac se chauffe avec un petit feu de
quelques bûches que la maman avait fait sur la plage à une distance beaucoup
plus grande que ma marmitte et du feu?" Le roi David écouta calmement
les arguments de son fils et comprit l'allusion qu' il faisait , lança un
regard furtif et il fit un doux sourir et répondit calmement:
- " Mon fils, je te félicite de l'esprit de justice et de compassion que
tu témoignes envers ce pauvre malheureux et puisque tu a du doute sur mon
jugement, je serais prêt à donner la chance à ce pauvre et refaire le
jugement. Puis le roi se tourna vers les sages et leur dit:
- "L'argument de mon fils est valable et il mérite cette considération
de refaire le jugement. Les sages qui trouvaient l'argument du prince très
astucieux firent un signe d'accord. En attendant tous les présents n'avaient
pas eu la soupe de Salomon mais par précaution le roi David avait prévu un
autre mets à la place.
Le jour suivant le roi avait refait le jugement devant tous les sages de la
ville et obligea le riche à payer la somme qu'il devait au pauvre. Le roi
David s'excusa auprès de la mère et du pauvre.
Après que le public avait quitté la court, le roi pria les sages, la maman
du pauvre et son fils de rester, car il voulait s'entretenir avec eux. Quand
ils étaient seuls, le roi les assembla autour de lui et posa la question
suivante au pauvre:
- "Dites-moi la vérité! Est-ce que l'eau du lac était chaude ou
froide.?" Le pauvre, qui ne savait pas mentir répondit:
- "Mon roi, l'eau était chaude comme dans un bain à vapeur." Le
roi s'adressa à son fils et lui dit:
- "Mon fils, je t'ai fait ton plaisir de refaire le jugement, et comme tu
viens de l'entendre mon premier jugement était quand-même juste." Puis
il ajouta:
- "Mon fils, la foi de la maman, de croire qu'elle pouvait chauffer le
lac avec un petit feu de bûches était bien suffisante pour chauffer tout le
lac".
Emile Tubiana
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