| Accueil | Annonces | Arts | Calendar | Cartes | Chat | Commentaires | Communautés | Coutumes | Culture | Délires | | |
| Enregistrement | e-Souks | Forum | Fun | Galerie Photo | Genealogie | Harissatheque | Histoire | JRencontre | | |
| Kandil | KesTuCherch | La bouffe | Links | Loterie | Medias | Musique | Objectif | Paracha | Plan du site | Portail | | |
| Recherche | Religion | Sommaire | Sondages | Souvenirs | Telecom | Tunes Célèbres | Voyages | | |
|
LA VIE A LA GOULETTE PART X (PART 10)
Beaucoup me demandent quelle langue on parlait a la Goulette: A la Goulette c'etait un
"mix". Je vais essayer d'expliquer. A la maison on parlait deux langues : avec
mes parents et ma famille on parlait en francais, avec les bonnes, on parlait
en arabe. Au marche, on parlait du franco-arabe. Il y avait des Goulettois(ses) qui
connaissaient ou un peu de francais et beaucoup d'arabe, ou beaucoup d'arabe et un peu de
francais. Alors les conversations avaient des mots en francais melanges
avec des mots en arabe au milieu s'ils n'avaient pas en tete la traduction francaise. Vice
versa, certaines conversations en arabe etaient colorees de mots francais s'ils n'avaient
pas la traduction de certains mots en arabe.
C'etait un peu amusant a ecouter. C'est dommage qu'on n'ait pas pu enregistrer ca sur
cassette. Tous les Goulettois etaient donc plus ou moins bilingues, certains plus forts en
francais, d'autres plus forts en arabe et d'autres moitie-moitie ou bons aux deux.
Pour etre commercant, il fallait bien comprendre et parler les deux. Par exemple, on
rentrait a la mercerie pour acheter des boutons, fil ou des
fermetures eclairs et le marchand parlait avec une cliente en arabe puis avec nous en
francais si on s'adressait a lui en francais. Il devait changer de langue a chaque fois.
Un commercant a la Goulette prenait le temps de conseiller et guider ses clientes:
il sortait tous les boutons de son inventaire qui correspondaient a la couleur que la
cliente cherchait et commencait a discutter pourquoi tel bouton, ou tel autre, serait
meilleur pour ce que la cliente voulait faire avec (robe, manteau ou jupe)
Personne n'etait presse et tout le monde
etait amis et discutait tout en faisant leurs achats. Meme chez le cordonnier, on
pouvait s'assoir en face de lui sur une sorte de tabouret et lui parler comme un ami
pendant qu'il reparait nos chaussures. Si c'etaient des ressemellages, on laissait
les chaussures pendant quelques heures ou pour la journee. Je parlais en francais au
cordonnier.
Chez le marchand de tissus, le nom de certains tissus etaient "unilangue" c'est
a dire le meme mot pour les deux langues.
On allait chez le marchand de souliers a Paque et a Kippour. On etait tout content d'etre
le centre d'attention de nos parents et de la vendeuse car elle nous montrait des modeles
et on etait libre de choisir ce que l'on voulait. Chez les enfants, c'est
extremement rejouissant parce que toute la journee c'etaient nos parents qui prenaient
toutes les autres decisions. Alors j'adorais aller acheter des chaussures. Je choisissais
les plus extravagants, couleur dore par exemple, et mon pere me laissait prendre ce que je
voulais. Je me sentais comme une reine en commande.
Quand on etait un peu plus age, on allait aussi a la rentree d'ecole acheter des
chaussures d'hiver. Chez le marchand de chaussures on parlait en francais.
Les epiciers comprenaient plus ou moins bien le francais d'apres qui etait derriere le
comptoir et les marchands de fruits et legumes comprenaient bien le nom des fruits et
legumes en francais. Certains se debrouillaient aussi tres bien en conversation mais les
meres goulettoises parlaient surtout en arabe avec eux.
Chez le boucher, les femmes parlaient en francais avec un tres fort accent arabe et plein
de mots en arabe pour decrire les morceaux de viande qu'elles voulaient. Je ne me souviens
que du boucher Claude mais il y en avait d'autres dont j'ai oublie les noms. Bien sur,
c'etait des boucheries"Cacher" car les juifs n'achetaient pas la viande au
marche.
A la poste, qui se trouvait a la Goulette Vieille, on parlait francais mais je suis sure
qu'ils comprenaient aussi l'arabe. Les formes a remplir pour envoyer un colis etaient
imprimees en deux langues. On les remplissait en francais. Si quelqu'un ne savait
pas lire ou ecrire, il demandait a quelqu'un de l'aider. Il y avait les cabines
telephoniques et l'on payait a l'avance pour 3 minutes je crois et en plus pour
chaque minute apres. Les appels telephoniques a la poste etaient en general pour les
urgences et les choses importantes. Les facteurs savaient lire les deux langues sur les
enveloppes ou colis qu'ils delivraient.
A Tunis, tout ce qui etait administratif etait en francais : banques, hopitaux, cabinets
de comptabilite, d'avocats, et tout autre business communiquaient par ecrit en francais et
toutes les secretaires devaient bien connaitre le francais. Les machines a ecrire etaient
manuelles en Francais. La marque la plus connue etait "Olivetti", une marque
italienne qui a disparu apres l'apparition des ordinateurs.
A l'Universite de Tunis, il fallait connaitre le francais pour faire ses etudes
superieures, comme docteur, avocat ou autre, car les livres etaient en francais et
n'etaient pas traduits en arabe. (Je parle des annees 50 et 60). Je ne sais pas si ces
livres ont ete traduits en arabe depuis. Pour certaines etudes comme ingenieur il fallait
aller en France.
Tous les juifs tunisiens adultes, arrives en France, roulaient les "r" puis
petit a petit, ils ont perdu ce fort accent Goulettois/tunisien, les adultes ages plus
lentement que les jeunes gens et les enfants.
Les plus petits ont carrement adopte l'accent parisien ou francais a l'ecole. Que nous
reste-t-il de ce dialecte qui n'est pas vraiment de l'Arabe pur mais du
"Tunisien", et bien, certains juifs ages le parlent encore en France, entre
amis. Les plus jeunes qui sont maintenant adultes, le comprennent en l'entendant mais ne
le parle plus et les beaucoup plus jeunes ne comprennent que certaines phrases qu'ils ont
entendues de leurs parents a la maison.
Quand je retourne en France et que j'entends ma mere parler en arabe avec ses amies
tunisiennes, je comprends tout, mais ne l'ayant pas pratique depuis des annees, je ne le
parle plus. Je suis sure que si j'allais en Tunisie pendant quelque temps et que je
m'immersais a nouveau, ca me reviendra sans probleme.
J'aime toujours ecouter la musique arabe avec laquelle j'ai grandi mais etant loin de la
Tunisie je l'ecoute de moins en moins.
J'ecoute aussi de moins en moins la musique francaise car je suis aussi loin de la France.
Il ne me reste plus que des souvenirs lointains des deux.
ALINE GUETTA DINOIA
| Accueil | Annonces | Arts | Calendar | Cartes | Chat | Commentaires | Communautés | Coutumes | Culture | Délires | |
| Enregistrement | e-Souks | Forum | Fun | Galerie Photo | Genealogie | Harissatheque | Histoire | JRencontre | |
| Kandil | KesTuCherch | La bouffe | Links | Loterie | Medias | Musique | Objectif | Paracha | Plan du site | Portail | |
| Recherche | Religion | Sommaire | Sondages | Souvenirs | Telecom | Tunes Célèbres | Voyages | |
Pour toutes informations, critiques et commentaires, envoyez un email a : jhalfon@mediaone.net