Maassia d'Abraham Toubiana,

passé ce jour, il y a 24 ans - le 5 février 1976

écrite en son honneur par son fils, Emile Tubiana

Il était une fois un jeune homme qui s’appelait Gagou. Celui-ci venait de perdre son cher papa Bichi. Ce dernier avait fréquenté un grand ami d’enfance qui s’appelait Hayem. Les deux pères (Bichi et Hayem) étaient comme des frères et ne se séparaient jamais. Après l’enterrement de Bichi, Gagou observa toutes les règles religieuses et fit de tout pour honorer son papa défunt. Avant sa mort, les deux pères, Bichi et Hayem, avaient fait en la présence de Gagou et de Choua, le fils d'Hayem, un accord, qui disait, que si l’un d’eux devait mourir, le survivant serait responsable pour l’enfant de l’autre et devrait faire de son mieux pour le marier avec une fille serieuse et de bonne famille. Cet accord disait aussi que l'héritage passerait automatiquement au survivant qui le donnera plus tard à l'enfant de l'autre, mais seulement après le mariage et après qu'il ne soit assuré que la mariée choisie était digne du garçon et de l'héritage.

Hayem était très peiné de la perte de son ami Bichi, mais il n'oubliait pas son devoir de veiller sur Gagou jusqu'après le mariage de celui-ci. L'année de la mort de Bichi, Gagou n'avait que dix-sept ans, Hayem n'osait encore pas parler de mariage. En plus, la perte était si pénible, qu'Hayem faisait de tout pour combler le vide que son ami avait laissé. Quand Gagou avait atteint ses dix-huit ans, Hayem organisa une fête pour le jeune homme et profita de cette occasion pour inviter quelques jolies demoiselles de bonnes familles. Gagou ne semblait pas être interessé encore aux femmes. Hayem n'insista pas du tout et préferait attendre le moment propice pour intervenir. Ainsi plusieures années passèrent sans que Gagou s'interesse aux demoiselles. Mais les grands amis avaient promis l'un à l'autre que l'enfant de l'autre devait absolument se marier au plus tard à l'age de vingt-cinq ans.

Hayem se voyait obligé d'intervenir car il n'avait pas le droit de garder l'héritage après que Gagou aurait atteint l'age prescrit. Cette fois-ci Hayem invita Gagou et s'entretint avec lui sur son sort et son futur. Gagou n'avait pas l'air de s'interesser. Ce n'est qu'alors que Hayem lui dit qu'il devait enfin choisir une femme, sinon il n'aurait pas le choix que de lui en imposer une. Gagou qui respectait Hayem comme son père lui répondit:

-"Hayem, je compte sur toi pour que tu me choisisses une femme. A celà Hayem lui mentionna le nom d'une bonne jeune fille. Gagou avait l'air de l'aimer et répondit:

-"Va-s-y, je te suis. Le jour des fiançailles, alors que Gagou et sa fiancée se trouvaient seuls dans une chambre, Hayem apparut soudain accompagné de deux gaillards portant une grande malle. Il donna un pourboire aux deux bonshommes et les renvoya. Gagou qui était surpris, accueilla aimablement Hayem. Celui-ci ne voulant pas tarder dit à Gagou:

-"Mon fils, j'aimerais que dès que vous auriez un moment de libre, vous preniez cette malle et la mettiez sur l'armoire."

Le soir après les fiançailles, alors que Gagou se trouvait seul, Hayem apparut brièvement. Celui-ci constata que la malle n'avait pas été bougée de sa place et s'entretint avec Gagou pour lui dire que ce n'était pas la fiancée qu'il mérite, et les fiançailles devaient être annulés.

Quelque mois plus tard Gagou fit la connaissance d'une jeune fille et crut tomber amoureux d'elle. Les fiançailles étaient annoncés à nouveau et comme la dernière fois Hayem se pointa également avec deux bonshommes portant la même malle. Avant de repartir Hayem dit à Gagou:

"Je vous en prie, si vous auriez un moment de temps, prenez cette malle et levez la sur l'armoire.

A nouveau la nouvelle fiancée dit à Gagou:

-"Il est drôle ton bonhomme, il peut attendre, pas le jour de nos fiançailles." Et encore une fois la malle n'avait pas bougé de sa place. Ainsi Hayem fit annuler les fiançailles comme la dernière fois.

Après que quelques mois étaient passés, Gagou fit encore une fois la connaissance d'une nouvelle jeune fille. Encore une fois, les fiançailles étaient annoncés.

Hayem, comme d'habitude, se presenta le jour des fiançailles avec ses deux gaillards, qui portaient la même malle et la posèrent encore une fois, cette fois-ci a l'entrée même de la chambre.

Avant de partir, Hayem répéta à nouveau à Gagou, que dès qu'ils auraient un moment de libre, s'ils pouvaient ensemble prendre la malle et la mettre sur l'armoire. Dès que Hayem quitta la chambre, la nouvelle fiancée dit à Gagou:

-"Si tu dis que ce Monsieur est comme ton père, faisons-lui ce plaisir. A nous deux, celà ne prendra même pas une minute. Gagou sourit et dit:

-"Tu as raison". Et comme la jeune fille l'avait dit, celà ne dura pas une minute, et la malle se trouva sur l'armoire.

Le soir, lorsque Hayem apparut dans la chambre, il constata à son plaisir, que la malle était sur l'armoire.

Le lendemain, il s'adressa à Gagou et lui dit:

-"Nous devons fixer le jour du mariage, le plus tôt possible".

Après le mariage, Gagou, alors qu'il s'entretenait avec Hayem, lui posa la question:

-"Dis-moi, je t'en prie, pourquoi m'as-tu fait annuler les deux premiers fiançailles?" A celà Hayem répondit:

-"Je voulais que tu trouves une vraie compagne pour la vie, une qui saura porter les fardeaux de la vie avec toi. Cette dernière était la seule à accepter de lever la malle avec toi. Donc, c'est la seule qui te mérite."

Le garçon comprit le sens moral des propos d'Hayem et le remercia.