Par
Sami A. Aldeeb Abu-Sahlieh
On trouve des interdits alimentaires
partout dans le monde, et ces interdits diffèrent d’un groupe social à
l’autre, même si parfois ils se recoupent. Rares sont les gens qui sont
omnivores.
Nous ne parlerons pas ici des spécificités
régionales des différents groupes ethniques ou nationaux, mais des interdits
qui peuvent être considérés comme communs aux trois communautés religieuses
monothéistes en vertu de considérations religieuses.
Nous signalons aux lecteurs et aux
lectrices que cet article est provisoire. Il est mis sur internet avec l'espoir
de profiter de leurs observations constructives et bienveillantes afin d'améliorer
son contenu et sa forme. On peut me contacter par email:
Chapitre I
Interdits alimentaires chez les juifs
Les interdits alimentaires chez les juifs
trouvent leurs sources dans la Bible, complétée par la Mishnah et le Talmud.
Les aliments permis sont appelés de nos jours aliments cacher, c'est-à-dire
adéquats, propres à la consommation. Le terme cacher est utilisé pour
d'autres choses que les aliments. Ainsi on dit un témoin cacher
lorsqu'il remplit les conditions légales, et un rouleau de la Torah cacher
lorsqu'il est sans faute.
La Bible parle d'animal pur (tahor) et d'animal impur (tame),
termes que nous utilisons dans ce texte. Les normes juives relatives aux
interdits alimentaires peuvent être résumées comme suit:
Les mammifères terrestres
Ne sont considérés comme purs que
les animaux ruminants ayant des sabots fourchus (Dt 14:6). La Bible en nomme dix
expressément: le bœuf, le mouton, la chèvre, le cerf, la gazelle, le daim, le
bouquetin, l'antilope, l'oryx et le mouflon. (Dt 14:4-5). Tous les autres mammifères
à qui il manque une de ces caractéristiques ou les deux sont impurs,
donc interdits. C’est le cas du chameau, du lapin et du daman qui ruminent
mais n'ont pas de sabots fourchus, et du porc qui a le sabot fourchu mais ne
rumine pas (Dt 14:7-8). La Bible nomme dans cette dernière catégorie 42
animaux impurs.
Les oiseaux
Les oiseaux sont purs à l'exception
de 24 espèces considérées impures dont la liste est compilée à
partir du Lv 11:13-19 (qui en nomme 20) et Dt 14:12-18 (qui en nomme 21), entre
autres l'aigle, l'autruche, le pélican, la cigogne, le hibou, etc. Dans la
pratique sont considérés comme purs les oiseaux domestiques (poule,
caille, canard, oie, etc.) et comme impurs les oiseaux sauvages et en
particulier les oiseaux de proie. Il n'est pas aisé aujourd'hui d'identifier
tous ces oiseaux interdits. Aussi, certains canards et pigeons sont consommés
après identification de l'espèce par un connaisseur.
Le faisan est considéré comme pur par la communauté juive allemande,
et impur par les autres. Les oeufs des oiseaux impurs sont impurs.
Le Talmud donne comme indice pour les oeufs impurs le fait qu'ils soient
ronds.
Les animaux aquatiques
Ne sont purs que les animaux
aquatiques qui ont des nageoires et des écailles (Lv 11:9-12). Tous les
poissons à qui il manque soit nageoires, soit écailles ou les deux ainsi que
tous les crustacés, les coquillages, les fruits de mer sont impurs.
L’espadon a posé problème. Les Sépharades le permettent, alors que les Ashkénazes
d'Angleterre l'interdisent
Toutes les autres espèces
Toutes les autres espèces comme les
rongeurs, les reptiles, les batraciens, les insectes et les invertébrés sont impures.
La Bible cependant excepte quatre sortes de sauterelles comestibles (Lv 11:22).
Mais il est difficile de les identifier aujourd'hui.
Et bien que l'abeille soit un animal interdit, son miel peut être mangé.
Les produits de la terre
Les produits de la terre sont purs,
à l'exception des fruits (dits orlah) d’un arbre pendant les trois
premières années (Lv 19:23) et une portion (dite halah) de pain ou de gâteau
préparé avec une de cinq céréales (blé, orge, épeautre, avoine et seigle),
portion remise alors aux prêtres. La maîtresse de maison prélève un petit
morceau de pain et de gâteau et le brûle.
Les boissons
Les jus de fruits et de légumes, tout
comme les fruits et les légumes, sont propres à la consommation. Le lait des
animaux purs, comme le lait de vache, est autorisé alors que le lait des
animaux impurs, comme le lait d’ânesse, est interdit. Le vin et les
alcools à base de vin comme le cognac est un produit pur et peut être
consommé. Mais la Torah interdit l'usage et la consommation des boissons à
base de raisin ou d'alcool de raisin, et tout produit du pressoir qui n'auraient
pas été fabriqués sous le contrôle d'un rabbin compétent, ou qui auraient
été manipulés par un non-juif. Ceci s'étend jusqu'au vinaigre, l'huile de pépins
de raisins ou le sucre de raisins.
On doit cependant signaler que le Lévitique interdit aux prêtres de consommer
le vin ou autre boisson fermentée quand ils viennent à la Tente du
Rendez-vous, quand ils séparent le sacré et le profane, l'impur et le pur, et
quand ils font connaître aux Israélites n'importe lequel des décrets que Yahvé
a édictés par l'intermédiaire de Moïse (Lv 10:9). Dans Ézéchiel il est
demandé au prêtre de ne pas boire du vin "le jour où il entrera dans le
parvis intérieur" (Ez 44:8). Il est aussi question de vœux temporaires ou
perpétuels de ne pas boire du vin (voir Nb 6:3-4; Jg 13:7 et 14 et Lc
1:15).
Si un non-juif touche certains produits purs,
ces produits deviennent impurs et donc inconsommables. Moshe Menuhin, père
du fameux violoniste Yehudi Menuhin, rapporte que la maison de son grand-père
dans la colonie juive de Bokhara en Palestine était ouverte aux Gentils lors
d'une Pâque juive. On leur a dressé une table séparée. Menuhin ajoute:
Dès que les invités étrangers furent
partis, il (grand-père) alla jusqu'à la table des invités et, avec un
sourire, prit toutes les bouteilles de vin qui avaient été ouvertes (il y en
avait un bon nombre), les emporta dehors et les vida dans le caniveau.
Quelques-unes des bouteilles étaient presque pleines et je ne comprenais pas un
tel gaspillage. Je demandai: "Quel mal les goyim ont-ils fait au vin?"
Grand-père sourit et expliqua que, selon le code des lois juives, tout vin
ouvert par un goy devenait yayin nesech,
du vin païen et par conséquent imbuvable.
Yediot Ahranot,
journal israélien en hébreu, rapporte qu'en avril 2000 le Grand rabbinat en
Israël a ordonné aux fermiers juifs, sous menace de ne pas leur livrer le certificat
de pureté, de jeter environ 2.4 millions de litres de lait dont le prix est
estimé à $2.5 millions. La raison: on avait découvert que des non-juifs
(Gentils) avaient été impliqués dans la production du lait. Ce lait a été
alors jeté dans les caniveaux. Le site Internet Sound Vision, site
musulman, qui rapporte cette information, la commente en disant qu’on aurait
souhaité que ce lait ait été donné à ceux qui sont supposés l’avoir
souillé. Jusqu’à maintenant on savait seulement que selon la loi Hindoue de
Manu Smirti la nourriture devenait souillée par le toucher d’une personne
appartenant à la caste des intouchables.
Les aliments sacrificiels aux idoles
Pour que les animaux purs et le vin
restent purs, il ne faut pas qu'ils soient dédiés aux libations d'un
culte idolâtre. La consommation d'un tel aliment sacrificiel est assimilée à
une participation à ce culte (Ex 22:19).
De ce fait, la fabrication du vin doit être contrôlée par un juif depuis le début
jusqu'à la fin.
Le sang
La consommation du sang est interdite
"car le sang c'est l'âme et tu ne dois pas manger l'âme avec la
chair" (Dt 12:23; voir aussi Gn 9:4; Lv 17:12-14). De ce fait, l'animal
doit être égorgé pour le vider de son sang, et ensuite sa viande est salée
deux fois et rincée avec de l'eau trois fois pour supprimer toute trace de
sang. On peut aussi recourir au grillage de la viande directement sur la flamme,
et le jus ne peut alors être récupéré. Le foie ne peut être vidé de son
sang que par cette méthode, comme certains autres abats. Comme conséquence de
cette norme, il est interdit de consommer un membre d’un animal vivant (Gn
9:4).
La bête morte et l'abattage
Est liée à la norme précédente
l'interdiction de manger les mammifères et les oiseaux morts de mort naturelle
ou abattus de façon non rituelle (Dt 14:21; Ex 22:30). Celui qui viole cette
interdiction doit se purifier (Lv 17:15 et 22:8; Ez 4:14). L’abattage rituel
consiste au moyen d’un couteau parfaitement aiguisé à trancher, le plus
rapidement possible et en causant le minimum de souffrances à l’animal, la
trachée-artère, l’œsophage, la veine jugulaire et la carotide. Le boucher
doit être juif. La Bible prévoit de donner la viande d'une bête morte aux
chiens (Ex 22:30) ou de la donner ou la vendre aux non-juifs (Dt 14:21). On y
reviendra. Seuls les poissons et les sauterelles n'ont pas besoin d'être
abattus rituellement.
Le boucher doit enlever le suif (graisse de
l'animal), jadis interdit à la consommation car il faisait partie des
sacrifices au Temple de Jérusalem (Lv 4:19). Il en est de même du nerf
sciatique (Gn 32:33). Et comme il est difficile d'enlever ce nerf on a décidé
de renoncer à la consommation du quartier arrière de tous les mammifères. Le
nerf sciatique des oiseaux n'est pas enlevé..
L'animal abattu doit être parfait, ni
malade, ni blessé (Ex 22:30; Lv 17:15), ni castré. L'abattage est suivi d'un
examen anatomique de la bête, et toute lésion est discutée pour savoir si
elle rend ou non l'animal impropre à la consommation. Selon les normes juives,
ne peuvent être abattus que des animaux ayant certains critères de santé, et
à ce titre l'anesthésie préalable par électrocution, ou l'étourdissement à
la masse ou au pistolet sont incompatibles avec l'abattage rituel.
Nous verrons lorsque nous parlerons des musulmans que de telles normes sont
discutables.
La chasse
N'ayant pas trouvé d'information dans les
livres sur la chasse, j'ai posé la question suivante sur Internet:
Est-ce qu'un Juif peut s'adonner à la
chasse des oiseaux ou des autres animaux terrestres (avec quels moyens?) et les
manger (lorsqu'il s'agit d'oiseaux et d'animaux permis)?
Un rabbin m'a répondu:
Un juif ne peut s'adonner à la chasse pour
deux raisons essentielles:
-
L'animal consommé doit être tué rituellement, c'est-à-dire la gorge
tranchée par une lame sans défaut.
-
Il est interdit de causer une souffrance quelque soit à un animal.
Un autre rabbin m'a donné une réponse aussi
catégorique:
Pour consommer un animal, nous devons
obligatoirement le tuer rituellement. Le
chasser pour le manger n'est donc pas autorisé.
Un troisième rabbin m'a donné des
informations plus nuancées dont je cite l'extrait suivant:
Un auteur du 17ème siècle, le "Noda
Biyehouda" résume la réponse en trois points:
Chasser pour le plaisir (et non pour se
nourrir) contrevient à trois règles:
-
L'interdiction de faire souffrir les animaux, découlant de l'obligation
de décharger un animal ployant sous sa charge (Exode 23, 5).
-
L'interdiction de détruire quoi que ce soit si ce n'est dans un but
constructif, découlant de Deutéronome 20, 19.
-
La chasse est une des particularités d'Ésaü et de Nemrod, grands
chasseurs de la Bible. Il ne sied pas aux descendants d'Abraham, Isaac et Jacob
de suivre le mode de vie de ces deux célébrités qui ayant commencé par
chasser le gibier en sont venus à chasser les femmes puis à tuer les hommes
sans aucune pitié. C'est pourquoi les Juifs n'ont jamais été connus pour être
des chasseurs.
Dans le même ordre d'idées, la pêche
n'est permise que pour s'en nourrir et non "pour le plaisir". Il est
attendu d'un juif respectant la Torah d'autres plaisirs que la chasse et la pêche:
l'étude, la pratique des Commandements, et notamment la bonté envers les
individus et la totalité des créatures de Dieu.
Et comment chasser pour manger? Il est clair
que chasser au fusil ou à l'arc, voire les pièges agressifs peuvent rendre
l'animal interdit soit en le tuant, et le rendant interdit, soit en portant des
lésions graves qui le rendent impropres à l'abattage rituel nécessaire. Il
reste les filets pour attraper les animaux permis à la consommation.
Le mélange de viande et de lait
Il est interdit de mélanger la viande (et
ses dérivés) et le lait (et ses dérivés comme le fromage et le beurre) en
raison du verset répété trois fois: «Tu ne feras pas cuire un chevreau dans
le lait de sa mère » (Ex 23:19 et 34:26, et Dt 14:21). Il est
interdit de cuire, de consommer ou profiter d’une nourriture qui comporte un
tel mélange. Pour cela le juif qui veut observer les normes alimentaires doit
avoir deux vaisselles: une vaisselle pour les plats carnés et une autre pour
les plats lactés. Cette vaisselle, préférablement de différente couleur, est
lavée et gardée séparément. La volaille est assimilée à la viande, mais
les poissons peuvent être cuits dans le lait et mangés dans les deux
vaisselles. Une troisième vaisselle dite parve (neutre) sert à des
aliments qui ne sont ni carnés ni lactés.
Après avoir consommé des laitages on attend une demi-heure à une heure pour
consommer des viandes, parfois six heures après la consommation de certains
fromages à pâte dure, ou cuite. Après la viande on attend six heures pour
consommer du lait, le temps de digestion étant estimé plus long. On peut
cependant réduire ces délais pour des malades ou des nourrissons en cas de
besoin.
Le lait et la viande et leurs dérivés
entrent, séparément ou conjointement dans différents produits. Si les normes
juives concernant ces deux produits ne sont pas respectées, l'aliment devient
interdit. C'est le cas par exemple du pain dans lequel on ajoute de la graisse
animale ou lactique, et qui plus est, les levures de panification sont fabriquées
à partir d'un alcool vinique qui les rend interdit. C'est le cas aussi des
produits pour enfants.
Les aliments du sabbat et de Pâque
Un aliment consommé lors du sabbat doit être
cuit dans le respect des normes du sabbat. Ce jour-là,
il est interdit de faire 39 sortes de travail, dont allumer du feu (Ex 35:3).
Pour ne pas violer cette norme, on allume le feu une heure avant le début du
sabbat et on le laisse allumé tout le sabbat jusqu’au lendemain. On peut
consommer la nourriture mise sur le feu avant le sabbat.
De même, il est interdit de consommer du levain pendant les huit jours de Pâque
(Ex 12:15, 19 et 20). Il existe aussi une vaisselle particulière pour Pâque
afin qu'il n'y ait aucune trace de levain.
Les aliments des non-juifs
Plusieurs normes juives excluent le
non-juif de la préparation des aliments purs. Nous tirons les citations
suivantes d'un texte d'un rabbin publié sur Internet:
- "La Torah a interdit l'usage et la
consommation de ... tous produits du pressoir qui n'auraient pas été fabriqués
sous le contrôle d'un rabbin compétent, ou qui auraient été manipulés par
un non juif ".
- "Il est d'usage que l'allumage du
four ou des plaques soit fait par un juif, juif conscient de l'importance de la Mitzvah
(commandement religieux) en guise de participation à la préparation des
mets".
- "On ne consomme que des laitages
traits ou préparés en présence d'un juif. Cet usage remonte à l'époque où
se vendait du lait d'ânesse, de truie ou de chamelle. Il est resté de règle
dans de nombreuses communautés. Les fromages doivent également être élaborés
sous surveillant rabbinique pour exclure l'usage de présure d'origine
interdite".
- "Les ustensiles de cuisine et les
services de table doivent être immergés dans un Mikvé (bain rituel)
lorsqu'ils ont été fabriqués ou vendus par des non juifs. Et ce même s'ils
n'ont jamais été utilisés"
- "Nos sages ont recommandé de ne pas
donner un nourrisson à une nourrice non juive".
- Est interdite "la consommation ou
toute autre utilisation au bénéfice du vin des non juifs, même lorsque
celui-ci est produit ou utilisé à d'autres fins qu'un rite religieux païen.
Pourquoi? Les raisons sont simples, l'une d'elles est que tout en gardant des
relations de respect mutuel dans nos relations de travail ou de vie sociale dans
l'État avec nos voisins non-juifs, nous devons nous préserver d'amitié trop
proche qui risquerait, Dieu nous en préserve, de nous conduire à des mariages
mixtes ou à une assimilation avec des adeptes d'une autre foi. Cette
interdiction s'étend également sur le vin produit ou manipulé par des non
juifs ou par des juifs qui ont renié ou se sont écartés de la Torah et des Mitsvot
(commandements religieux)". Le vin pur "doit être produit,
depuis les toutes premières étapes de la mise du raisin en cuve jusqu'à sa
mise en bouteille, par un juif observant, et n'être, à aucun moment, manipulé
par un non-juif".
La nécessité fait loi
En cas de nécessité, notamment en cas de
maladie mortelle, et dont le seul traitement serait l'absorption de nourritures
ou de médicaments à base d'ingrédients impurs, les lois alimentaires
s'effacent totalement. Devant une maladie moins grave, et lorsqu'on a le choix
thérapeutique, on s'efforcera de choisir des médicaments aux composants
permis. Les voies autres qu'orales, injections, suppositoires, pommades, spray
ne posent par contre aucun problème.
Les raisons des interdits alimentaires
La seule justification avancée par la
Bible concernant les animaux est "de séparer le pur de l'impur" (Lv
11:47). Une preuve parmi tant d'autres que la Bible, livre sacré chez les
juifs, les chrétiens et les musulmans, véhicule une conception raciste.
Ce concept de la pureté est clair dans les deux versets suivants:
Vous serez pour moi des hommes saints. Vous
ne mangerez pas la viande d’une bête déchiquetée par un fauve dans la
campagne, vous la jetterez aux chiens (Ex 22:30).
Vous ne pourrez manger aucune bête crevée.
Tu la donneras à l'étranger qui réside chez toi pour qu'il la mange, ou bien
vends-la à un étranger du dehors. Tu es en effet un peuple consacré à Yahvé
ton Dieu (Dt 14:21).
Sur Internet, un rabbin écrit à propos
des interdits alimentaires: "L'éviction des animaux impurs doit
donner à l'homme une pureté de l'esprit, sensible dans ses pensées, ses
paroles et ses actions". Ce document ajoute: "La définition des
animaux impurs émane de la seule volonté du Créateur. Elle ne se préoccupe
ni avec des critères sanitaires, ni des qualités nutritionnelles".
Cela n'a pas empêché certains d'avancer
au cours des siècles, des explications, notamment pseudo-médicales, aussi
nombreuses que peu vraisemblables, à but apologétique: Dieu sait ce qui est
bon pour nous et la meilleure preuve de cette bonté est que les aliments
interdits sont mauvais pour la santé. Ainsi Maïmonide écrit que "tous
les aliments que la Loi nous a défendus forment une nourriture malsaine".
Il explique que le porc est interdit parce qu'il "est malpropre et qu'il se
nourrit de choses malpropres... Si l'on se nourrissait de la chair des porcs,
les rues et même les maisons seraient plus malpropres que les latrines, comme
on le voit maintenant dans le pays des Francs". Quant aux graisses des
entrailles, elles "sont trop nourrissantes, nuisent à la digestion et
produisent du sang froid très épais; c'est pourquoi il convient plutôt de les
brûler". En ce qui concerne la distinction faite entre les animaux
ruminants à sabots fourchus et les autres animaux, et entre les poissons ayant
des nageoires et des écailles et les autres poissons, il estime que ces différences
sont des signes "qui servent à faire reconnaître la bonne espèce et la
distinguer de la mauvaise".
Certains pensent que les nombreuses règles
visaient à encourager le végétarisme. On fait remarquer que deux rébellions
contre Moïse sont liées directement au désir de consommer de la viande (Ex
16:3 ; Nb 11:20). Dieu n’a permis la consommation de la viande qu’en
raison de la faiblesse humaine. On estime aussi que le végétarisme empêche
les êtres humains de s’attaquer les uns les autres comme les animaux.
Philon d'Alexandrie estime que l'interdiction de manger des animaux féroces
vise à ce que les hommes ne se comportent pas comme eux.
On a aussi cherché des raisons
historiques. Ainsi l'interdiction du porc aurait été édictée par le fait
qu'il s'agissait d'un animal sacrificiel (voir Is 65:3-5, 66:3 et 17), qu'il était
un animal sacré, l’incarnation du Dieu Attis en Asie mineure, et identifié
à Osiris et Seth chez les Égyptiens, ou qu'il était l'emblème de la légion
romaine en Palestine. Ces hypothèses prouvent que l'interdiction du porc était
en réaction aux rites païens ou pour des raisons politiques.
Après avoir expliqué la raison hygiénique de l'interdiction de manger de la
viande cuite dans du lait, Maïmonide avance l'argument que cette interdiction
pourrait aussi être liée au fait qu'on en mangeait dans une certaine cérémonie
idolâtre, ou à l'une des fêtes des païens. Il invoque ici le fait que cette
interdiction figure à côté du précepte relatif au pèlerinage (Ex 23:17-19).
Les interdits alimentaires entre loi et pratique
Il ne semble pas que les interdits
alimentaires aient toujours été observés par le passé. Mais les milieux
religieux juifs ont toujours insisté sur ces interdits. Isaïe fulmine
d'ailleurs contre ceux qui violent ces interdits: "Ceux... qui mangent de
la chair de porc, des choses abominables et du rat, d'un même coup finiront,
oracle de Yahvé, leurs actions et leurs pensées" (Is 66:17). Ézéchiel
dit que "depuis mon enfance jusqu'à présent, jamais je n'ai mangé de bête
crevée ou déchirée, et aucune viande avariée ne m'est entrée dans la
bouche" (Ez 4:14). Le premier livre des Maccabées dit que du temps du roi
grec de Syrie Antiochus Épiphane il y avait un mouvement juif qui voulait s'intégrer
aux autres nations et abandonner les lois religieuses. Ce qui provoqua la colère
des milieux juifs. Un des aspects de cette assimilation est l'abandon de la
circoncision et des interdits alimentaires. Mais "plusieurs en Israël se
montrèrent fermes et furent assez forts pour ne pas manger des mets impurs.
Ils acceptèrent de mourir plutôt que de se contaminer par la nourriture"
(I M 62. Voir aussi II M chap. 6 et 7). On lit dans le livre de Tobie:
"Lors de la déportation en Assyrie, quand je fus emmené, je vins à
Ninive. Tous mes frères, et ceux de ma race, mangeaient les mets des païens;
pour moi, je me gardais de manger les mets des païens" (Tb 1:10-11).
Dans les temps modernes, les juifs réformés
n'insistent pas sur les interdits alimentaires. Lors du congrès de Pittsburgh
(nov. 1885) les juifs réformés ont déclaré: « Les lois alimentaires
viennent d’époques et d’idées totalement étrangères à notre état
mental et spirituel… Les observer de nos jours contribuera à diminuer plutôt
qu’à encourager une élévation spirituelle moderne».
Mais les juifs orthodoxes et conservateurs
continuent toujours à prêcher et à appliquer ces normes. Chaque fois qu'elles
le peuvent, leurs autorités religieuses n'hésitant pas à recourir à des
moyens coercitifs usant de leur privilège de délivrer des certificats de
pureté. Ce que nous avons vu à propos des 2.4 millions de litres de lait,
que les fermiers israéliens ont dû jeter parce que manipulés par des
non-juifs, se produit dans tous les domaines de l'alimentation, de la
restauration et de l'hôtellerie. Dans certains pays, ces autorités ont le
monopole, reconnu par l'État, de la certification de pureté, sur
laquelle elles perçoivent une taxe.
Chapitre II
Interdits alimentaires chez les chrétiens
L'abolition presque totale des interdits
Les interdits religieux juifs ont été
pour la plus part abolis par les chrétiens. On trouve une ébauche de cette
abolition chez Jésus qui déclara: « Il n'est rien d'extérieur à
l'homme qui, pénétrant en lui, puisse le souiller, mais ce qui sort de
l'homme, voilà ce qui souille l'homme", à savoir "les desseins
pervers". Et Marc de commenter: "ainsi il déclarait purs tous les
aliments" (Mc 7:15, 19-22).
La communauté chrétienne s'est heurtée dès
ses débuts aux interdits alimentaires juifs. Ainsi, des chrétiens d'origine
juive ont reproché à Pierre d'avoir accepté l'invitation de Corneille, un
centurion romain: "Pourquoi, lui demandèrent-ils, es-tu entré chez des
incirconcis et as-tu mangé avec eux?" (Ac 11:3). Pierre connaissait une
telle interdiction, et l'a rappelée à son hôte: "Vous le savez, il est
absolument interdit à un juif de frayer avec un étranger ou d'entrer chez lui.
Mais Dieu vient de me montrer, à moi, qu'il ne faut appeler aucun homme souillé
ou impur" (Ac 10:28). Paul nous apprend que Pierre, "avant l'arrivée
de certaines gens de l'entourage de Jacques, ... prenait ses repas avec les païens;
mais quand ces gens arrivèrent, on le vit se dérober et se tenir à l'écart,
par peur des circoncis" (Ga 2:12).
Si les chrétiens d’origine juive ont
continué à observer les interdits alimentaires bibliques, la conversion des païens
au christianisme a amené les apôtres à limiter ces interdits. Ainsi le livre
des Actes des apôtres nous rapporte une vision de Pierre:
Il voit le ciel ouvert et un objet,
semblable à une grande nappe nouée aux quatre coins, en descendre vers la
terre. Et dedans il y avait tous les quadrupèdes et les reptiles, et tous les
oiseaux du ciel. Une voix lui dit alors: "Allons, Pierre, immole et
mange". Mais Pierre répondit: "Oh non! Seigneur, car je n'ai jamais
rien mangé de souillé ni d'impur!" De nouveau, une seconde fois, la voix
lui parle: "Ce que Dieu a purifié, toi, ne le dis pas souillé". Cela
se répéta par trois fois, et aussitôt l'objet fut remporté au ciel (Ac
10:11-16).
Lors du premier concile tenu à Jérusalem
par les Apôtres, il fut décidé de limiter ces interdits au minimum. Ils
adressèrent aux convertis non-juifs ce qui suit:
L'Esprit Saint et nous-mêmes avons décidé
de ne pas vous imposer d'autres charges que celles-ci, qui sont indispensables:
vous abstenir des viandes immolées aux idoles, du sang, des chairs étouffées
et des unions illégitimes. Vous ferez bien de vous en garder (Ac 15:28-29).
On remarquera ici que ce concile a aboli
aussi l'obligation de la circoncision. Pour les juifs, les non circoncis étaient
considérés comme impurs et par conséquent ils ne devaient pas les fréquenter.
Désormais, on peut être chrétien et aspirer au salut sans devoir être
circoncis ou observer les interdits alimentaires juifs.
La question de ces interdits revient dans
les épîtres de St. Paul. Celui-ci établit une règle large en matière de
nourriture dans sa première épître aux Corinthiens, tout en évitant de faire
scandale. Il écrit:
Tout ce qui se vend au marché, mangez-le
sans poser de question par motif de conscience; car la terre est au Seigneur, et
tout ce qui la remplit (Ps 24:1). Si quelque infidèle vous invite et que vous
acceptiez d'y aller, mangez tout ce qu'on vous sert, sans poser de question par
motif de conscience. Mais si quelqu'un vous dit: "Ceci a été immolé en
sacrifice", n'en mangez pas, à cause de celui qui vous a prévenus, et par
motif de conscience. Par conscience j'entends non la vôtre, mais celle
d'autrui; car pourquoi ma liberté relèverait-elle du jugement d'une conscience
étrangère? Si je prends quelque chose en rendant grâce, pourquoi serais-je blâmé
pour ce dont je rends grâce (I Co 10:25:30).
La Bible de Jérusalem commente
l'avant-dernière phrase comme suit: "Il faut agir ainsi pour respecter la
conscience erronée de l'autre, non pour se soumettre à son jugement faux".
Dans cette même épître, Paul permet même
de manger de la viande immolée aux idoles parce que "nous savons qu'une
idole n'est rien dans le monde et qu'il n'est de Dieu que le Dieu unique".
Mais il demande de s'en abstenir devant une personne faible qui croit qu'il est
interdit de manger de la viande immolée aux idoles afin de ne pas le
scandaliser et de ne pas le pousser à enfreindre sa propre conscience. Pour
Paul, la science en soi ne suffit pas: "la science enfle", alors que
"la charité édifie". "C'est pourquoi, si un aliment doit causer
la chute de mon frère, je me passerai de viande à tout jamais, afin de ne pas
causer la chute de mon frère" (I Co chap. 8)
Dans son épître aux Romains, il écrit:
Tel croit pouvoir manger de tout, tandis que
le faible ne mange que des légumes: que celui qui mange ne méprise pas
l'abstinent et que l'abstinent ne juge pas celui qui mange; Dieu l'a bien
accueilli. Toi, qui es-tu pour juger un serviteur d'autrui?... Je le sais, j'en
suis certain dans le Seigneur Jésus, rien n'est impur en soi, mais seulement
pour celui qui estime un aliment impur; en ce cas il l'est pour lui... Le règne
de Dieu n'est pas affaire de nourriture ou de boisson, il est justice, paix et
joie dans l'Esprit Saint (Rm 14:2-4, 14 et 17).
L'interdiction de consommer du sang,
aujourd'hui tombée en désuétude, était respectée par les chrétiens.
Tertullien (d. 222?) en parle dans ses écrits.
Aussi tard qu'en 692, le Concile in Trullo (Constantinople) interdit la
consommation de toute nourriture contenant du sang, sous peine d'excommunication
pour les peuples et de destitution pour les prêtres.
L'interdiction du cheval
On trouve des interdits alimentaires
religieux chez les chrétiens à travers les siècles. Ainsi à l'époque mérovingienne
(8ème siècle) le pape Grégoire III et son successeur Zacharie 1er
jettent l'anathème sur la viande de cheval. Cette position visait en fait à écarter
les Germains païens des banquets chevalins impies immolés au culte d'Odin.
Toutes les fois qu'un scandinave, même converti, mange de l'équidé, il fait
allégeance à son ancienne croyance et donc renie la foi chrétienne. Le
sacrifice païen est la vraie raison de l'interdit alimentaire. Pour détruire
la mémoire, le clergé fait regarder cette viande comme impure et ceux qui en
usent comme immondes. Plus tard, l'évangélisation ancrée, l'effet survit à
la cause tombée progressivement dans l'oubli. La viande n'est plus impure,
abominable au point de vue religieux, cependant elle reste dans l'esprit des
gens, un aliment malsain ou tout au moins hors du commun. Elle ne fut réintroduite
qu'à la retraite de Russie où il fallait l'avaler. Et aujourd'hui les
boucheries chevalines ferment les unes après les autres à la suite des
campagnes de protection des animaux.
L'abstinence
Les chrétiens sont censés observer une
abstinence de la viande les jours de vendredi et du carême, norme de moins en
moins respectée, alors que jadis la violation de cette norme était sévèrement
punie. Et aujourd'hui on constate un glissement de l'interdit religieux aux
normes diététiques: on s'abstient de certains aliments pour garder sa ligne au
lieu de sauver son âme.
Les groupes chrétiens observant des interdits alimentaires
Certains groupes religieux chrétiens
continuent à observer des interdits alimentaires bibliques.
C'est notamment le cas des Adventistes qui
recommandent une nourriture ovo-lacto-végétarienne et le respect des interdits
bibliques sur les animaux. Ils estiment en effet que "la distinction entre
les animaux purs et impurs date de l'époque de Noé, longtemps avant
l'existence d'Israël. En tant que principes de santé, ces lois diététiques
sont toujours valables". De plus, ils recommandent de s'abstenir de fumer
(fumer c'est se suicider lentement, et donc contre le commandement: "Tu ne
tueras point" (Ex 20:13)) et de consommer des aliments contenant de la théine,
de la caféine et de l'alcool. Pour la sainte scène ils utilisent le jus de
raisin au lieu du vin. Bien qu'ils s'abstiennent de manger du sang (boudin,
etc.), ils ne s'opposent pas à la transfusion sanguine comme le font les Témoins
de Jéhovah.
Les Mormons n'observent pas les interdits
bibliques sur les animaux mais recommandent de ne pas consommer du sang (boudin,
etc.). Par contre, ils s'abstiennent de fumer et de consommer des aliments
contenant de la théine, de la caféine et de l'alcool.
Les Témoins de Jéhovah n'observent pas
les interdits bibliques sur les animaux et boivent du vin, mais ils interdisent
la consommation du sang et la transfusion sanguine, tout comme ils interdisent
de fumer invoquant St. Paul: "Bien-aimés, purifions-nous de toute
souillure de la chair et de l'esprit" (I Co 7:1).
Bien que tous ces trois groupes soient
opposés à la consommation du sang à des degrés divers, ils n'exigent pas
l'abattage rituel tel que pratiqué par les juifs. De même, ils ignorent la
norme biblique qui interdit de mêler la viande au lait.
Il y a aussi des ordres religieux comme les
Chartreux qui font de la privation constante de toute viande un point
fondamental de leur règle. On lit dans le chapitre 7 des Statuts de l'Ordre des
Chartreux:
Selon une observance introduite par nos
premiers pères et toujours gardée avec un soin particulier, nous avons renoncé
à l'usage de la viande. C'est en effet un trait caractéristique de l'Ordre et
un signe de l'austérité érémitique en laquelle, Dieu aidant, nous voulons
demeurer.
On peut donc conclure que les chrétiens,
si l'on excepte des groupes mineurs, ne connaissent pas d'interdits alimentaires
religieux. Et si aujourd'hui les chrétiens occidentaux ne mangent pas de rats
ou de chiens, ceci relève plus des coutumes culinaires que d'interdits
religieux.
Chapitre III
Interdits alimentaires chez les musulmans
La position des musulmans constitue un
retour presque complet aux interdits juifs, interdits énoncés dans le Coran,
les récits de Mahomet et les ouvrages des légistes. Nous exposons ici ces
interdits en nous basant notamment sur les ouvrages arabes modernes sunnites.
Ces auteurs ne se réfèrent pratiquement jamais aux écrits chiites. Pour les
compléter, nous nous sommes référés aussi à des ouvrages chiites lorsque
leurs normes diffèrent de celles des sunnites.
Signalons ici que les auteurs musulmans
classiques classifient les aliments principalement en différentes catégories:
-
halal (licite: aliment qu'on peut consommer).
-
haram (illicite: interdit de le consommer).
-
mubah (permis: sa consommation est laissée au choix de la
personne).
-
makruh (réprouvable, répugnant: bien que non interdit, il est préférable
de ne pas en consommer).
On trouve sur Internet des listes de
produits classifiés en halal, haram et mashbuh (suspect).
Ces listes disent qu'il faudrait s'abstenir de consommer les produits suspects.
Le principe est la licéité, sans gaspillage
Dieu a mis à la disposition des êtres
humains tous les animaux et tous les fruits de la terre pour qu'il puisse s'en
servir. Mais il doit éviter le gaspillage.
2:60: Mangez et buvez de ce que vous a
attribué Allah.
2:168: Hommes! Mangez ce qui est licite et
bon parmi ce qui est sur la terre!
2:172: O vous qui croyez! Mangez ces
excellentes nourritures que Nous vous avons attribuées!
6:142: C'est Lui qui a fait croître des
jardins, en treilles et non en treilles, les palmiers, les céréales donnant
une nourriture variée, les oliviers et les grenadiers semblables ou
dissemblables. Mangez de leurs fruits, quand ils produisent! Donnez le droit les
frappant, au jour de la récolte, et ne soyez point gaspilleurs, car Allah
n'aime point les gaspilleurs!
7:160: Mangez des excellentes nourritures
que Nous vous avons attribuées!
20:81: Mangez des nourritures exquises dont
Nous vous avons gratifiés! Toutefois ne faites point d'excès en cela, sinon Ma
colère s'abattra sur vous!
Il est interdit de tuer un animal licite
pour un autre but que de le manger.
La chasse pour s'amuser et non pas pour se nourrir est condamnée par les légistes
musulmans.
L'interdit est décidé par Dieu
Le Coran insiste sur le fait que l'homme
n'a pas le droit de déclarer un aliment illicite. Seul Dieu peut le faire:
5:87: O vous qui croyez! Ne déclarez pas
illicites les excellentes nourritures qu'Allah a déclarées licites pour vous.
16:116: Ne dites donc point, à propos de ce
que vos bouches profèrent mensongèrement: "Ceci est licite et ceci est
illicite", dans le but de forger le mensonge contre Allah. Ceux qui forgent
le mensonge contre Allah ne seront pas les Bienheureux.
Ce que Dieu déclare comme illicite est
immonde, et ce qu'il déclare comme licite est bon:
7:157: Il leur ordonne le Convenable et leur
interdit le Blâmable, qui déclare licites pour eux les excellentes
nourritures, et illicites les immondes.
Dieu est libre dans sa décision et il
n'est pas comptable de sa décision:
5:1: Licite est pour vous la bête de
troupeaux, sauf celles dont énumération vous est communiquée. Ne considérez
point comme licite le gibier tué alors que vous êtes sacralisés! Allah décide
ce qu'Il veut.
21:23: Il ne Lui est pas demandé compte de
ce qu'Il fait alors qu'il leur est demandé compte de ce qu'ils font.
Les interdits des juifs ne s'appliquent pas aux musulmans
Le Coran parle de certains interdits
alimentaires en vigueur chez les Arabes avant l'islam, interdits qu'il abroge
parce qu'il les considère comme inspirés par le démon:
2:168-169: Hommes! Mangez ce qui est licite
et bon parmi ce qui sur la terre! Ne suivez point les pas du Démon! C'est pour
vous un ennemi déclaré; il vous ordonne seulement le Mal, la Turpitude et de
dire, contre Allah, ce que vous ne savez pas.
6:138-139: Les Impies ont dit: "Voici
des troupeaux et une récolte qui sont tabous. Ne s'en nourriront", prétendent-ils,
"que ceux que nous voudrons." Ce sont des chameaux qu'il est illicite
de monter et des bêtes de troupeaux sur lesquelles n'est point proféré le nom
d'Allah, en forgerie contre Lui. Allah les "récompensera" de ce
qu'ils ont forgé. Les Impies ont dit: "Ce qui est dans le ventre de ces bêtes
de troupeaux est pur pour nos mâles et illicites pour nos épouses. Si c'est
une bête morte, ils se la partagent."Allah les "récompensera"
de ce qu'ils débitent. (voir aussi 5:103; 6:143-144).
Le Coran ne dit rien des interdits
alimentaires chez les chrétiens. Mais l'interdiction de la chair d'une bête
morte, du sang, et de ce qui a été consacré à un autre qu'Allah dans les
versets 2:173, 5:3, 6:145, 16:115 (cités plus loin) est sans doute inspirée du
livre des Actes des apôtres (voir Ac 15:28-29 susmentionnés). Une telle
formulation ne se trouve pas dans l'Ancien Testament. Le Coran n'a fait qu'y
ajouter l'interdiction du porc, soit dans le but de gagner les juifs à sa
cause, soit parce que certains chrétiens d'Arabie d'origine juive observaient
une telle interdiction.
L'interdiction du porc a certainement facilité la conversion de juifs à
l'islam, tout comme l'abolition de l'interdiction de manger du porc et
l'abolition de l'obligation de la circoncision ont facilité la conversion des
païens au christianisme à ses débuts. Ainsi les interdits religieux ont fait
l'objet de marchandage subtil.
Le Coran, par contre, s'attarde longuement
sur les interdits alimentaires chez les juifs. Il estime qu'avant la révélation
de la Torah, tout aliment était licite. Israël (Jacob?) s'est ensuite interdit
certains de ces aliments:
3:93: Tout aliment était licite pour les
Fils d'Israël, sauf ce qu'Israël s'est déclaré illicite à soi-même avant
qu'on fît descendre la Torah
Dieu est aussi intervenu pour interdire aux
juifs des aliments pour les punir:
4:160-161: Nous avons déclaré illicites,
pour ceux qui pratiquent le Judaïsme, des nourritures excellentes déclarées
licites, à l'origine, pour eux, et cela en prix d'avoir été iniques, de s'être
tant écartés du Chemin d'Allah, d'avoir pratiqué l'usure qui leur a été
interdite, d'avoir mangé le bien des gens au nom du Faux.
6:146: A ceux qui pratiquent le Judaïsme,
Nous avons déclaré illicite toute bête à ongles. Des bovins et des ovins,
Nous avons pour eux, déclaré illicites les graisses, sauf celle que porte leur
dos et leurs entrailles ou ce qui est mêlé aux os. Cette interdiction est la
"récompense" de leur rébellion.
On remarquera à cet égard que la Bible ne
comporte pas une telle norme. Ailleurs le Coran dit que Dieu n'avait interdit
aux juifs que ce qu'il a interdit aux musulmans. S'ils ont ajouté à ces
interdits d'autres aliments, c'est par leur propre décision:
16:118: A ceux qui pratiquent le Judaïsme,
Nous avons interdit ce que Nous t'avons énuméré tout à l'heure. Nous ne les
avons point lésés: ce sont eux qui se sont lésés eux-mêmes.
Les musulmans ne doivent donc pas suivre
les interdictions des juifs, mais celles que Dieu leur indique.
Malgré cela, on peut constater que les
juifs et les musulmans ont des interdits alimentaires communs, comme c'est le
cas pour le porc, la bête morte, le sang et les aliments sacrificiels offerts
aux idoles. Certains aliments cependant sont interdits pour les juifs, alors
qu'ils sont permis pour les musulmans, comme c'est le cas du lapin et du
chameau. Le contraire est aussi vrai, comme c'est le cas du vin permis aux juifs
et interdit aux musulmans. D'autre part, les musulmans ne connaissent pas
l'interdiction de mélanger la viande au lait. Enfin, les juifs n'admettent pas
de manger de la viande d'un animal égorgé par un non-juif, alors que les
musulmans, au moins les sunnites, permettent de manger de la viande d'un animal
égorgé par un non-musulman à condition qu'il appartienne aux gens du livre.
Pourquoi le Coran rejette-t-il certains
interdits juifs alors qu'il en conserve d'autres? Probablement pour ne pas se
heurter à des coutumes culinaires arabes. On peut en effet mal imaginer le
Coran interdire la consommation de la viande du chameau. La volonté de se démarquer
des juifs après avoir échoué dans sa tentative de s'y approcher pourrait
aussi avoir joué un rôle. On signalera à cet égard l'interdiction faite au
musulman de ressembler au non-musulman. On cite ici un récit de Mahomet qui
dit: "Celui qui ressemble à un groupe en fait partie".
On cite aussi les deux versets coraniques suivants:
6:153: Tel est, en toute droiture, mon
chemin; suivez-le donc! Ne suivez pas les chemins qui vous éloigneraient du
chemin de Dieu.
59:19: Ne ressemblez pas à ceux qui
oublient Dieu; Dieu fait qu'ils s'oublient eux-mêmes. Ceux-là sont les
pervers.
Certains juristes classiques vont jusqu'à
prévoir la peine de mort contre ceux qui ressemblent aux mécréants et
refusent de se rétracter.
Le système des interdits alimentaires
coraniques pose les juifs comme de mauvais fidèles contrairement aux musulmans
qui se rattachent à la religion authentique.
Comme nous l'avons fait pour les juifs,
nous donnons ici les catégories des aliments interdits et permis chez les
musulmans.
Les bêtes terrestres
Les musulmans ne connaissent pas la
distinction juive entre animaux mammifères ruminants à sabots fourchus, considérés
comme purs, et les autres animaux mammifères jugés impurs. De ce fait, les
interdits sont moins structurés. Nous commençons par les bêtes terrestres.
Le porc
Il est interdit expressément par le Coran
dans différents versets qui constituent la base des interdits alimentaires chez
les musulmans, versets que nous citons ici intégralement une fois pour toutes:
2:173: Allah a seulement déclaré illicite
pour vous la chair d'une bête morte, le sang, la chair de porc et ce qui a été
consacré à un autre qu'Allah. Mais quiconque est contraint à en manger sans
intention d'être rebelle ou transgresseur, nul péché ne sera sur lui.
5:3: Illicites ont été déclarés pour
vous la chair de la bête morte, le sang, la chair du porc et de ce qui a été
consacré à un autre qu'Allah, la chair de la bête étouffée, de la bête
tombée sous des coups, de la bête morte d'une chute ou d'un coup de corne, la
chair de ce que les fauves ont dévoré - sauf si vous l'avez purifiée -, la
chair de ce qui est égorgé devant les pierres dressées.
6:145: Dans ce qui m'est révélé, je ne
trouve rien d'illicite pour qui se nourrit d'une nourriture, à moins que cette
nourriture soit une bête morte, ou un sang répandu, ou de la viande de porc,
car c'est une souillure, ou ce qui a été consacré à un autre qu'à Allah.
Mais quiconque est contraint à en manger sans intention d'être rebelle ou
transgresseur, ton Seigneur est seul absoluteur envers lui et miséricordieux.
16:115: Allah a seulement déclaré illicite
pour vous la chair d'une bête morte, le sang, la chair du porc et ce qui a été
consacré à un autre qu'Allah. Mais quiconque est contraint à en manger sans
intention d'être rebelle ou transgresseur, Allah sera absoluteur envers lui et
miséricordieux.
Les légistes estiment généralement que
tout ce qui fait partie du porc est interdit: sa viande, sa graisse, ses os, sa
peau, et ses poils. Pour eux, le porc est en soi une souillure selon le
verset 6:145. Mais Ibn-Hazm dit que le Coran n'interdit que la viande du porc;
le reste doit donc être permis.
Les malikites considèrent les poils du porc comme purs, à condition de ne pas
être arrachés, mais il faut les laver. Les hanbalites permettent d'en faire un
tamis à condition qu'elle soit utilisée pour tamiser des produits secs.
Les bêtes de troupeau
Si nous partons des quatre versets
coraniques susmentionnés, on peut dire que le Coran n'interdit que quatre
aliments: le porc, le sang, la bête morte et les aliments offerts aux idoles.
Par conséquent, hors ces quatre interdits, il n'y a pas d'autres interdits.
Mais en fait les légistes, à travers une interprétation de certains versets
coraniques et en invoquant des récits de Mahomet souvent contradictoires, ont
tenté d'élargir la liste des interdits et de préciser ce qui est licite, sans
toutefois se mettre d'accord entre eux.
Parmi les animaux licites, les légistes
ont considéré comme licites les bêtes qui entrent dans la catégorie d'an'am,
bêtes de troupeaux, à savoir les ovins, les bovins et les chameaux. Le Coran
dit:
6:143: Il a mis pour vous, en vos troupeaux,
portage et vêture. Mangez de ce qu'Allah vous a attribué!
36:71-73: Eh quoi! N'ont-ils pas vu que Nous
avons créé pour eux, parmi ce que Nos mains façonnèrent, des troupeaux dont
ils sont les possesseurs? Nous leur avons soumis ces animaux dont ils font leurs
montures et d'où ils tirent leur nourriture. Pour eux sont là utilités et
breuvages. Eh quoi! Ne seront-ils pas reconnaissants?
16:5: Les chameaux ont, par Lui, été créés
pour vous. Pour vous s'y trouvent vêture et utilités et nourriture dont vous
mangez.
Les équins
Les équins comprennent le cheval, le mulet
et l'âne. Le Coran dit de ces trois animaux:
16:8: Il a créé le cheval, le mulet, l'âne
pour que vous les montiez et comme apparat.
Or ce verset, contrairement au verset sur
les bêtes de troupeaux, ne dit pas que ces trois animaux servent pour s'en
nourrir. D'autre part, on cite des récits de Mahomet selon lesquels il aurait
interdit d'en manger. C'est la position de certains juristes, dont Abu-Hanifah.
Mais l'opinion dominante considère la viande du cheval et de l'âne sauvage
comme licite du fait que Mahomet et ses compagnons en auraient mangé.
Par contre, l'âne domestique et le mulet sont interdits sauf pour les malikites
qui les considèrent soit comme licites, soit comme réprouvables.
Les animaux prédateurs à canines
Selon l'opinion dominante, la viande de
tout animal ayant des canines dont il se sert pour attaquer d'autres animaux
comme le lion, le tigre ou le loup est illicite. On cite ici des récits de
Mahomet qui interdisent d'en manger. Certains Malikites cependant le permettent
du fait que le Coran n'en fait pas mention parmi les aliments interdits. Malik
est cependant d'avis qu'il est réprouvable d'en manger.
Les légistes sont partagés concernant la
viande de certains animaux qui ont des canines, comme l'hyène,
le renard, l'ours,
le chat domestique et sauvage,
l'éléphant
et le singe.
Des juristes disent qu'il est permis d'en manger, d'autres y sont opposés, et
d'autres enfin permettent avec répugnance.
Les rongeurs
Les légistes font des distinctions selon
les animaux. Ainsi le rat est interdit alors que le hérisson et le porc-épic
sont permis selon l'opinion dominante.
Le lapin, animal interdit chez les juifs, est licite chez la majorité des légistes
musulmans. Ils se basent sur des récits selon lesquels Mahomet aurait accepté
et mangé de la viande de lapin.
Certains compagnons, invoquant des récits de Mahomet, ont considéré qu'il est
réprouvable de manger du lapin. Mahomet aurait dit que le lapin a des règles
et de ce fait il ne le mange pas mais il ne l'interdit pas non plus.
Les insectes et les vers
Les légistes permettent de manger les
sauterelles ainsi que les vers dans les fruits.
Les oiseaux
Les oiseaux sont en principe licites.
L'opinion dominante interdit cependant de manger les oiseaux rapaces ayant des
griffes, mais certains permettent de les manger du fait qu'ils ne figurent pas
dans les aliments interdits mentionnés par le Coran. L'opinion dominante
interdit aussi de manger la chauve-souris, mammifère volant, mais certains
juristes permettent de la manger avec répugnance.
Les animaux aquatiques
Le Coran permet de manger des animaux qui
vivent dans l'eau:
5:96: Licites ont été déclarés pour vous
le gibier (sic) de la mer et la nourriture qui s'y trouve: jouissance
pour vous et pour les voyageurs.
16:14: C'est Lui qui a assujetti la mer pour
que vous mangiez une chair fraîche issue d'elle.
35:12: Les deux mers ne sont point
identiques. L'eau de celle-ci est potable, douce, agréable à boire, alors que
l'eau de celle-là est saumâtre, non potable. De chacune vous pêchez une chair
fraîche que vous mangez.
L'opinion dominante chez les chiites suit
la classification biblique, ne permettant que les animaux qui ont des écailles.
Les chiites ne parlent pas de nageoires comme la Bible probablement du fait que
tout poisson à écailles a des nageoires.
Les légistes sunnites ont divergé sur les
animaux aquatiques licites et ceux illicites. On peut résumer leur position
comme suit:
- Tous les juristes sont d'accord sur le
fait que le poisson mort pour une raison apparente (en se battant, à cause
d'une forte vague, a reçu un coup de bâton, ou a été jeté par l'eau sur la
plage) est licite.
- Si le poisson est mort sans raison
apparente, la majorité le considère comme licite sauf les hanafites qui le
considèrent comme illicite.
- Si l'animal aquatique n'est pas un
poisson ou ne ressemble pas à un poisson, les hanafites le considèrent comme
illicite et les autres comme licite sauf si exclu expressément (comme la
grenouille), ou exclu à cause de sa nature venimeuse (comme l'anguille), de son
agressivité (comme le crocodile), ou de son immondice (comme la tortue de mer).
Et si un animal vit en partie dans l'eau et une partie sur terre, il doit être
égorgé pour qu'il devienne licite.
- Certains légistes estiment qu'un animal
aquatique ressemblant à un animal terrestre interdit est aussi interdit de le
manger. C'est le cas du dauphin (appelé porc de mer), le requin (appelé
chien de mer), l'anguille (appelé serpent de mer). Certains
estiment que le dauphin est interdit pour les gens qui le nomment porc de mer,
et permis pour ceux qui le nomment par un autre nom.
Les animaux se nourrissant de détritus
Si un animal licite se nourrit de détritus,
l'opinion dominante dit qu'on ne peut le manger qu'après une période de
quarantaine dans laquelle on le nourrit d'aliments propres pour que sa viande ne
soit plus contaminée par ce qu'il mange. Cette période varie entre trois et
quarante jours.
Les gibiers dans le pèlerinage
Bien que la chasse soit permise, le Coran
interdit de chasser du gibier pendant la période de pèlerinage.
5:2: Une fois désacralisés, vous êtes
libres de chasser.... Quand vous êtes désacralisés, livrez-vous à la chasse!
5:95: O vous qui croyez! Ne tuez pas de
gibier alors que vous êtes sacralisés! Quiconque parmi vous en tuera
intentionnellement devra ou bien une compensation égale à la bête de troupeau
qu'il tue en offrande consacrée à la Kaaba - deux hommes intègres parmi vous
en jugeront -, ou bien son rachat sera la nourriture d'un pauvre, ou bien, à défaut,
un jeûne équivalent à cela. Tout cela est fait pour que le pécheur goûte le
châtiment de son geste.
5:96: Illicite a été déclaré pour vous
le gibier de la terre ferme, aussi longtemps que vous êtes sacralisés. Soyez
pieux envers Allah vers qui vous serez rassemblés!
Cette interdiction s'applique aussi aux
oeufs du gibier.
Les animaux à tuer ou interdit de tuer
Mahomet a ordonné de tuer certains animaux
comme le serpent, le corbeau, le rat, le chien qui agresse et le dab (sorte
de lézard), et il a interdit de tuer certains autres comme la grenouille, la
fourmi, l'abeille, la huppe, la pie grièche, la perdrix et la
chauve-souris. Ces deux catégories ne peuvent pas être mangées.
Mais certains juristes disent que ce qui peut être tué devrait être
comestible.
Les animaux morts et l'abattage
Le Coran interdit de manger la chair d'une
bête morte dans les versets 2:173; 6:145; 16:115 et 5:3 susmentionnés. Ce
dernier y ajoute "la chair de la bête étouffée, de la bête tombée sous
des coups, de la bête morte d'une chute ou d'un coup de corne, la chair de ce
que les fauves ont dévoré - sauf si vous l'avez purifiée".
Un animal mort est celui qui est décédé
sans cause humaine, ou par un moyen jugé illicite comme par exemple en le
battant jusqu'à la mort. Le gibier mort par la chasse est licite même s'il n'a
pas été égorgé, sauf s'il y a eu possibilité de l'égorger mais ne l'a pas
été.
S'il est nécessaire d'immoler l'animal
avant de le manger, une exception est faite pour les animaux aquatiques en vertu
d'un récit de Mahomet qui dit: "Dieu a immolé ce qui est dans la mer pour
les fils d'Adam". Des légistes cependant exigent que des animaux
aquatiques qui vivent aussi hors de l'eau et qui ont du sang comme le crocodile
soient égorgés. Il en est autrement du crabe qui n'a pas de sang. Les légistes
considèrent que le sang du poisson n'est pas véritablement du sang puisqu'il
devient blanc une fois séché, alors que le sang des autres bêtes devient
noir. La même exception est faite pour les sauterelles qu'on peut manger si on
les trouve mortes.
L'abattage de l'animal est réglementé en
droit musulman:
- Il faut
prononcer le nom de Dieu sur l'animal vivant qu'on veut abattre pour le manger.
Le Coran dit:
6:121: Ne mangez point de ce sur quoi n'a
pas été proféré le nom d'Allah! En vérité, c'est là perversité.
22:36: Pour vous, Nous avons placé les
animaux sacrifiés, parmi les choses sacrées d'Allah. Un bien s'y trouve pour
vous. Invoquez donc sur eux le nom d'Allah, quand ils ont eu la patte attachée.
Puis, lorsqu'ils gisent sur le flanc, mangez-en et nourrissez-en l'impécunieux
et le démuni.
Cette règle s'applique aussi au gibier:
5:4: Mangez aussi de ce que prennent pour
vous ceux des oiseaux de proie que vous dressez, tels des chiens, selon les procédés
qu'Allah vous a enseignés! Proférez toutefois le nom d'Allah, sur leur prise.
Si on ne prononce pas le nom de Dieu par
oubli, la viande est licite, mais si c'est volontairement, la viande est
illicite. Certains légistes cependant considèrent la viande illicite dans les
deux cas.
Le nom de Dieu est prononcé lorsqu'on
passe le couteau sur le cou de la bête, et pour les gibiers chassés par des
chiens, lorsqu'on envoie les chiens derrière la bête.
La raison pour laquelle on prononce le nom
de Dieu sur la bête est de rendre sa viande meilleure et de chasser le diable
de la bête et de celui qui l'abat.
- Le boucher
doit être soit musulman, soit quelqu'un des gens du livre (chrétien, juif,
samaritain ou sabéen). Il doit être majeur et capable de discernement, quel
que soit son sexe. L'abattage effectué par un enfant ou un fou n'est pas
valable. L'opinion dominante chez les chiites cependant n'accepte pas l'abattage
par quelqu'un des gens du livre.
- L'abattage
peut être en égorgeant l'animal (dhabh) dont le cou est court comme
c'est le cas avec la vache, le mouton et l'oiseau, en portant le couteau à la
clavicule au bas du cou de l'animal (nahr) lorsque ce dernier a un long
cou comme le chameau, ou en blessant l'animal (aqara) qu'on ne peut pas
saisir comme c'est le cas du gibier ou d'un bœuf agité. Égorger un animal
consiste à couper la trachée-artère (tube respiratoire), l’œsophage (tube
digestif) et les deux veines jugulaires intérieures et extérieures (conduites
du sang).
- L'outil
pour abattre l'animal peut être un couteau, une épée ou une lame pour les
animaux qu'on égorge. Pour les gibiers et les animaux insaisissables, il peut
être un outil blessant comme une lance ou un projectile. Dans les deux cas
l'outil doit faire couler le sang. Si par contre on étrangle un animal, ou on
le tue par un choc ou en le battant, sa viande est illicite. Si un animal est tué
par un coup de fusil et que le projectile transperce l'animal, sa viande est
licite. Un tel animal n'a pas besoin d'être égorgé. Mais s'il meurt à cause
du choc d'un caillou, d'un projectif ou du son de ce dernier, sa viande est
illicite à moins qu'on ne puisse atteindre l'animal encore en vie pour l'égorger.
Pour que l'abattage de l'animal soit légal, il faut donc qu'il intervienne sur
un animal vivant et non pas mort.
- L'abattage de l'animal se fait préférablement
avec le visage du boucher et de l'animal tournés vers la Mecque.
Le but est de faire le contraire de ce que font les polythéistes qui abattent
leurs animaux en se tournant vers leurs idoles.
- Les musulmans, tout comme les juifs, se
posent la question de savoir s'il est permis d'étourdir les animaux avant de
les abattre pour réduire leur souffrance. Cette question, qui soulève beaucoup
de passions, se pose notamment dans les pays qui interdisent l'abattage rituel
comme c'est le cas de la Suisse. En fait, les textes sacrés juifs et musulmans
recommandent de faire souffrir l'animal le moins possible. D'autre part, ces
textes n'abordent pas la question de l'étourdissement de l'animal. En revanche,
ils interdisent de manger la viande d'un animal mort et exigent que cet animal
soit vidé de son sang. A tort, on a déduit de ces deux normes l'interdiction
d'étourdir l'animal avant de le saigner en prétextant que l'animal meurt en l'étourdissant
et que son sang n'est pas vidé. Or ces deux prétextes ne sont pas valables.
Invitée à se prononcer concernant l'importation de viandes d'animaux étourdis
avant d'être saignés, la Commission égyptienne de fatwa a décidé déjà
en 1978 qu'il est licite de manger de telles viandes. Elle a invoqué le verset
7:143: "Quand le Seigneur se manifesta à la Montagne, Il la mit en miettes
et Moïse tomba foudroyé". Or, dit la commission, Moïse est tombé évanoui
sous le choc, sans pour autant perdre la vie.
D'autre part, la viande d'un animal vidé de son sang et préalablement étourdi
contient autant de sang que celle d'un animal égorgé sans étourdissement préalable.
On peut donc dire qu'on est en face d'un faux problème, créé probablement
pour des raisons économiques. Un auteur signale que l'Association
consistoire israélite de Paris a un budget annuel de l'ordre de 150
millions francs français. Environ la moitié provient du "droit de
couteau".
On multiplie les normes pour multiplier les leviers de commande et les taxes.
Le sang
Le Coran interdit de manger du sang dans
les versets 2:173; 5:3; 16:115 et 6:145 susmentionnés. Le dernier verset précise
"sang répandu". Ceci signifie que le sang coulant d'un animal vivant
ou mort est interdit, sauf le sang qui reste dans la viande d'un animal égorgé
parce qu'on ne peut pas éviter ce sang. Les musulmans n'exigent donc pas de
rincer et de saler la viande ou de la griller pour la vider du sang comme font
les juifs. Un récit de Mahomet excepte de l'interdiction du sang le poisson, la
sauterelle (dont nous avons parlé plus haut), le foie et la rate. Ces deux
organes sont considérés comme imbibés de sang et devaient donc être
interdits, mais Mahomet a permis de les manger.
L'animal doit cependant être vidé de son sang autant que possible. Un auteur
égyptien estime que certains abattoirs occidentaux ne vident pas l'animal de
son sang pour augmenter son poids et gagner plus.
Les parties des animaux autres que leur viande
Les os et la peau des animaux sont purs si
l'animal est pur et a été abattu selon les règles religieuses. Ceux des
animaux impurs ou qui n'ont pas été mis à mort selon les règles religieuses
sont considérés comme impurs.
Toutefois, les légistes estiment que si la
peau d'un animal pur mais mort d'une façon non conforme est tannée, cette peau
devient pure. Mahomet aurait dit à cet égard que ce qui est interdit est de
manger de ces animaux morts, mais non pas d'utiliser leur peau. Quant à la peau
des animaux impurs, les légistes sont partagés. Ainsi les hanafites permettent
l'usage de la peau tannée du lion, du loup ou du chien. Mais on excepte la peau
du rat et du porc. Nous avons parlé plus haut du poil du porc dont
l'utilisation est permise par certains légistes.
Il est par contre interdit de manger de la
graisse prise à un animal vivant pur (comme celle prise de la bosse d'un
chameau ou de la queue grasse de certaines espèces de moutons). Une telle
partie est considérée comme provenant d'un animal mort.
Sont aussi interdites des parties de
l’animal comme les organes génitaux, les glandes, la vésicule (partie dans
laquelle s’accumule l’urine), la cholécystite, l’urine et les selles.
Mais l’urine du chameau est permise comme médicament.
Les fruits de la terre
Tous les fruits de la terre et des arbres
sont licites. Le Coran dit:
16:69: Mangez en outre de tous les fruits
et, dociles, empruntez les chemins de votre Seigneur! Du ventre des Abeilles
sort une liqueur de différents aspects où se trouve une guérison pour les
Hommes.
36:33: Un signe pour les Humains est la
terre morte que Nous avons fait revivre, dont Nous avons fait sortir du grain
dont ils mangent.
36:34-35: Nous y avons placé des jardins
avec des palmiers et des vignes et y avons fait jaillir des sources, tout cela
afin qu'ils mangent des fruits du Seigneur et de ce qu'ont fait leurs mains.
Sont par contre interdits les produits qui
portent préjudice à la santé:
2:195: Ne vous exposez point à votre perte,
de vos mains!
7:157: Il déclare licites pour eux les
excellentes nourritures, et illicites les immondes.
Ainsi il est interdit de manger un fruit
venimeux. Il en est de même de la drogue et du tabac comme on le verra dans le
point suivant.
Les boissons, la drogue et le tabac
Sont licites les boissons ainsi que le lait
des animaux qui sont considérés comme purs. Par contre, le lait des animaux
impurs n'est pas licite, comme par exemple le lait des ânesses. Fait exception
le vin et les boissons alcoolisées qui en découlent. L'interdiction du vin est
passée par trois étapes.
2:219: Les Croyants t'interrogent sur les
boissons fermentées et le jeu de hasard. Réponds-leur: "Dans les deux,
sont pour les Hommes un grand péché et des utilités, mais le péché qui est
en eux est plus grand que leur utilité".
4:43: O vous qui croyez! N'approchez point
de la Prière, alors que vous êtes ivres, avant de savoir ce que vous dites!
5:90: O vous qui croyez! Les boissons
fermentées, le jeu de hasard, les pierres dressées et les flèches
divinatoires sont seulement une souillure procédant de l'œuvre du Démon. Évitez-la!
Peut-être serez-vous bienheureux.
L'interdiction du vin est pratiquement le
seul interdit qui a des conséquences pénales en cas de sa violation, quelle
que soit la quantité consommée et même s'il n'y a pas eu ivresse. Un récit
de Mahomet dit: "Ce dont beaucoup enivre son peu est interdit". Pour
justifier cette interdiction du vin les légistes disent que le vin est interdit
non seulement parce qu'il peut enivrer, mais parce qu'il est un aliment impur en
soi. De même est interdit toute boisson enivrante, quel que soit le fruit
utilisé: raisin, datte ou autres. Mais Ayshah dit que Mahomet buvait du nabith
(vin légèrement fermenté) fait de dattes, orge ou autres grains macérés
dans l’eau jusqu’à la fermentation.
Omar aurait aussi permis de couper le vin par l'eau et de le boire.
Certains légistes, dont Abu-Hanifah, ont aussi dit que le vin provenant
d'autres fruits que le raisin et la datte comme l'orge et le maïs est interdit
seulement dans la quantité qui enivre. Et selon Abu-Yusuf on ne punit le
musulman que s’il est pris en flagrant délit. Des musulmans au premier siècle
ont cru que le vin était permis à ceux qui font oeuvres pies, invoquant le
verset 5:93 qui dit:
Il n'est pas de grief à faire à ceux qui
croient et qui accomplissent des oeuvres pies pour ce qui touche ce qu'ils
mangent, quand ils sont pieux, croient et accomplissent des oeuvres pies.
Mais cette position est restée minoritaire.
L'interdiction faite de consommer de
l'alcool s'étend aussi à la drogue dans la mesure où elle a le même effet,
voire un effet plus dangereux que l'alcool. On y joint aussi la consommation du
tabac du fait qu'elle crée la dépendance, mène au gaspillage inutile, porte
atteinte à la santé et a mauvaise odeur. Le tabac tomberait ici sous le coup
des versets 2:195 et 7:157 susmentionnés.
Les aliments sacrificiels pour une idole
Le Coran interdit de manger un aliment
"qui a été consacré à un autre qu'Allah" dans les versets 2:173;
6:145; 16:115 et 5:3 susmentionnés. Ce dernier verset ajoute à cette
interdiction "la chair de ce qui est égorgé devant les pierres dressées".
La nécessité fait loi
Tous les aliments interdits deviennent
licites en cas de nécessité pour sauvegarder la santé et la vie. Le Coran
dit:
2:173: Allah a seulement déclaré illicite
pour vous la chair d'une bête morte, le sang, la chair de porc et ce qui a été
consacré à un autre qu'Allah. Mais quiconque est contraint à en manger sans
intention d'être rebelle ou transgresseur, nul péché ne sera sur lui.
On retrouve cette règle aussi dans les
versets 6:145. La nécessité dispense ici de l’application de la loi. On
parle alors de dispense légale (ibahah), norme qu’on trouve dans
pratiquement toutes les législations. Mais le musulman doit en consommer dans
les limites de la nécessité et non pas pour s’en régaler et s’engouffrer.
Le Coran permet de consommer et de boire
des aliments interdits en cas de nécessité 5:3 afin de sauvegarder sa vie.
Certains permettent une telle consommation si le musulman a passé une nuit et
un jour sans manger. On s’est aussi posé la question combien il peut
consommer: jusqu’à conjurer le danger ou jusqu’à ne plus avoir faim et
soif.
On a aussi établi des priorités: faut-il
voler un aliment licite au lieu de consommer un aliment interdit? La réponse
est non.
Peut-on manger de la chair humaine ?
La réponse est oui si c’est un mort, et non si c’est un vivant même si ce
dernier est passible de la peine de mort comme l’apostat ou le polythéiste.
Selon la doctrine dominante, il est
interdit de consommer du vin en cas de soif et défaut d'eau car le vin ne met
pas fin à la soif et peut même l'augmenter. Mais il est permis d’user du vin
comme médicament s’il n’y pas d’autres moyens pour sauver la vie à
condition que la prescription du médicament soit faite par un médecin musulman
adl (dont le témoignage est acceptable).
La transformation de l'aliment et sa contamination
Un aliment licite peut devenir un aliment
illicite, et le contraire est vrai. Ainsi le jus de fruit une fois fermenté
devient illicite. Le vin à son tour peut se transformer en vinaigre qui est un
aliment licite, mais certains estiment que cette transformation doit être faite
sans manipulation.
Le cadavre est impur, mais quand il se décompose, il devient de la cendre pure.
L'eau, aliment licite, devient de l'urine qui est un aliment interdit. De même
le lait est licite bien qu'il soit issu de deux aliments illicites, à savoir le
sang et la nourriture décomposée dans le ventre:
16:66: En vérité, vous avez certes un
enseignement dans vos troupeaux! Nous vous abreuvons d'un lait pur, exquis pour
les buveurs, venant de ce qui, dans leurs ventres, est entre un aliment digéré
et du sang.
Nous avons aussi vu qu'un animal qui se
nourrit de détritus devient pur après avoir observé une quarantaine.
Pour juger si un aliment est devenu licite
ou illicite, des légistes se réfèrent au nom de l'aliment en question. Le
vin, illicite, en devenant du vinaigre change de nom. Or le vinaigre ne figure
pas dans la liste des aliments interdits. Il est donc licite. De même le chien,
animal impur, en tombant dans un marais salant se décompose et devient du sel
pur. L'excrément, matière impure, est mis dans un jardin et devient avec le
temps de la terre qui est une matière pure servant à se purifier en l'absence
d'eau.
Si quelqu'un a eu des relations sexuelles
avec un animal, cet animal devient impropre à la consommation et doit être tué
et brûlé, et selon certains récits la personne en question doit aussi être
tuée.
Si la viande licite entre en contact avec
la viande illicite comme celle du porc, la viande licite devient contaminée et
donc inconsommable. De même si on utilise pour égorger ou dépecer l’agneau
un couteau qui a servi à égorger ou à dépecer un porc.
Si un rat tombe dans un vase d’huile,
l’huile devient impure. Mais s’il tombe sur du beurre solide, seule la
partie touchée doit être enlevée. L’eau qui a été léchée par un chien
doit être jetée et le vase doit être lavé, sauf pour les malikites qui
considèrent le chien comme membre de la maison.
Les produits composés de plusieurs ingrédients
Tout produit qui contient un ingrédient
interdit devient entièrement interdit. Ceci s’applique aux aliments, aux
additifs alimentaires et aux produits pharmaceutiques comme les vitamines. Il
existe des listes indicatives sur Internet qui répertorient les produits sur la
base de leurs composantes, classifiés en halal (licite), haram
(illicite) et mashbuh (suspect, et donc interdit). Ces listes indiquent
parfois les composantes de ces produits et demandent au consommateur en cas de
doute de prendre contact avec le producteur. En règle générale, tout produit
qui contient du porc ou de l’alcool est interdit. Ainsi la gélatine est
considérée comme illicite si elle est produite du porc, et licite si elle est
produite d’un autre animal licite égorgé selon la méthode islamique. La
vanille et son sous-produit la vanilline sont considérés comme illicites parce
qu’elles sont produites avec de l’alcool. La vitamine E, si elle est
produite d’un animal, elle est suspecte, mais elle est halal si elle est issue
d’huile végétale. Le cholestérol, la glycéride, les hormones et le petit
lait sont considérés comme suspects.
On signale cependant que de telles listes ne jouent pas toujours du fait que les
producteurs peuvent en tout temps changer les ingrédients.
Les aliments des non-musulmans
Le Coran dit:
5:5: Aujourd'hui, licites sont pour vous les
excellentes nourritures. La nourriture de ceux à qui a été donnée l'écriture
est licite pour vous et votre nourriture est licite pour eux. Vous sont permises
les femmes vertueuses d'entre les croyantes, et les femmes vertueuses d'entre
les gens qui ont reçu le Livre avant vous, si vous leur donnez leurs douaires,
avec contrat de mariage, non en débauchés ni en preneurs d'amantes.
6:118: Mangez donc de ce sur quoi a été
proféré le nom d'Allah.
On remarquera du premier verset qu'il
associe explicitement commensalité et intermariage.
L'échange matrimonial, sous une forme restreinte il est vrai (un musulman peut
épouser une non-musulmane scripturaire, mais un non-musulman scripturaire ne
peut pas épouser une musulmane), est permis avec ceux avec lesquels l'échange
alimentaire est également permis.
L'opinion dominante chez les chiites
n'accepte pas l'abattage par quelqu'un des gens du livre en se basant sur des récits
de leurs imams. Certains estiment en effet que le verset 5:5 concerne la
nourriture autre que la viande.
Les chiites sont aussi plus réticents que les sunnites quant au mariage entre
un musulman et une scripturaire non-musulmane.
Les sunnites permettent de manger de la
viande d'un animal égorgé par un non-musulman, à condition qu'il soit
scripturaire, à savoir chrétien, juif, samaritain ou sabéen. Il faut
cependant que le scripturaire n'ait pas prononcé sur l'animal le nom d'une
autre divinité que Dieu. S'il prononce le nom de Jésus ou d'Abraham au lieu du
nom de Dieu, la viande devient inconsommable.
Par contre, il est interdit de manger la viande d'un animal abattu par un
apostat.
Ibn-Abbas aussi interdit de manger la viande d'un animal abattu par un musulman
non circoncis, mais les juristes classiques ont estimé que si on permet de
manger la viande d'un animal égorgé par un chrétien, à plus forte raison il
faudrait permettre de manger la viande d'un animal égorgé par un musulman
incirconcis.
Il faut dans ces cas que l'abattage soit
fait selon les normes islamiques, à savoir que l'animal doit être égorgé
vivant et vidé de son sang. Pour s'assurer que ces deux normes soient respectées,
un auteur égyptien propose la création d'abattoirs musulmans dans les pays qui
exportent la viande vers les pays musulmans, et que les bouchers y employés
soient des musulmans car ils sont préférables aux non-musulmans même s'il est
permis de manger de la viande d'animal abattu par eux.
La question suivante est posée sur
Internet:
Est-ce que la viande des gens du livre (chrétiens
et juifs) est permise à manger, en sachant que, d’après mes connaissances
limitées, ils ne sont pas les vrais gens du livre comme ceux mentionnés par
Allah (certains de leurs dogmes, comme celui de la Trinité par exemple, sont en
contradiction avec l’Unicité d’Allah) ?
La réponse dit qu’il y a consensus de la
Oummah sur le fait qu’il est autorisé aux musulmans de consommer de la viande
égorgée par les gens du livre. Elle cite à ce propos le verset 5:5
susmentionné. Quant à savoir si les chrétiens et les juifs peuvent être
considérés comme gens du livre malgré le fait que certaines de leurs
croyances sont en totale incompatibilité avec l’Unicité de Dieu, la réponse
ne nie pas une telle incompatibilité mais elle ajoute que le Coran savait ce
fait (5:17 ; 5:13 ; 2:79) et malgré cela il les qualifie de gens du
livre et a rendu licite la viande qu’ils égorgent. Ce qui montre bien que
tant que ces gens n’abandonnent pas complètement leur religion pour devenir
des athées, ils sont encore considérés comme des gens du livre. La réponse
ajoute:
Celui qui égorge l’animal doit avoir la
foi en Dieu (…). Celui qui se dit chrétien ou juif, mais ne croit ni en Dieu,
ni en un livre sacré, ni ne croit réellement en la religion qu’il prétend
suivre, est en réalité un athée, et l’animal qu’il égorge ne sera donc
pas permis au musulman. Il est à noter que c’est le cas de beaucoup de
personnes actuellement, qui ne sont plus chrétiens ou juifs que de nom, et qui
au fond ne croient plus en rien, et se moquent totalement de toute appartenance
religieuse.
En plus des restrictions en matière de
viande, il est interdit à un musulman de s'asseoir à table avec quelqu'un qui
boit du vin. Les chiites vont jusqu'à interdire de manger de la nourriture préparée
par des non-musulmans lorsque cette nourriture a été touchée par un mécréant
(kafir) et que ce dernier lui a transmis l'humidité de son corps.
Il va de soi que ces normes islamiques,
comme les normes juives indiquées plus haut, sont contraires au principe de la
non-discrimination, principe que les communautés juive et musulmane pourtant
invoquent chaque fois qu'elles se sentent discriminées.
Consommation d'un aliment douteux et viande importée
Nous avons vu que seul Dieu peut déclarer
un aliment comme illicite. Mais qu'en est-il si le musulman doute d'un aliment,
ne sachant pas si ce qu'il mange est licite ou illicite? Cette question se pose
notamment en ce qui concerne la viande importée de l'Occident par les pays
arabes et qui ne sont pas toujours abattus selon les normes islamiques.
Des savants religieux musulmans estiment
que ces viandes d'animaux dont on ne sait pas comment ils ont été égorgés
doivent être considérées comme licites en vertu du verset 5:5: "La
nourriture de ceux à qui a été donnée l'écriture est licite pour
vous". Cette affirmation ne peut être écartée qu'en cas de preuve
formelle que c'est illicite. Le doute en soi ne suffit pas. On invoque ici le
fait que Mahomet avait mangé de la viande d'une chèvre qu'une juive lui avait
offerte sans demander comment la chèvre a été égorgée. Le musulman n'est
pas obligé de demander comment chaque animal a été égorgé. Il est par
contre tenu de demander si le boucher est un musulman ou faisant partie des gens
du livre du fait que Mahomet a mangé de la viande de la chèvre en sachant
qu'elle venait de la part d'une juive. On invoque aussi un récit de Ayshah
selon laquelle on apportait aux musulmans dans leur début de la viande sans
savoir si le nom de Dieu était prononcé sur cette viande ou pas. Questionné,
Mahomet a dit: "Prononcez vous-mêmes le nom de Dieu sur la viande et
mangez".
Un ouvrage chiite adressé aux musulmans
vivant à l'étranger écrit:
Beaucoup de nourritures des mécréants
contiennent des aliments interdits comme le vin, la viande de bête morte et de
porc, et des poissons sans écaille. De ce fait, le musulman doit veiller à ce
que sa nourriture ne contienne pas de tels aliments interdits.
Le musulman ne doit pas demander le contenu
de la nourriture s'il l'ignore, à moins que cela ne soit de la viande. Il ne
peut en effet manger de la viande que si elle a été égorgée selon les règles
islamiques... Il peut par contre manger tout autre aliment sans poser de
question, même si un tel aliment a été cuit avec la graisse de porc ou du
vin. Mais il serait préférable de poser des questions et y enquêter pour éviter
les dangers de ces aliments pour l'esprit et le corps alors que l'apparence
inspire qu'il s'agit d'aliment licite
Si le musulman apprend que la viande n'a pas
été égorgée selon les normes islamiques, il doit la considérer comme impure
(najis) et illicite, et tout ce qui est cuit avec cette viande devient
aussi illicite même si la viande est écartée parce que la nourriture devient
impure du fait que la viande était mise dedans. En cas de doute sur la viande,
on peut l'écarter et manger le reste de la nourriture.
Le Ramadan
Les musulmans observent le jeûne du mois
de Ramadan. Ils doivent s'abstenir de tout aliment du lever du soleil jusqu'au
coucher du soleil. A côté de ce jeûne obligatoire il y a des jeûnes
facultatifs, parfois un jour par semaine.
La consommation dans des ustensiles en or ou argent
L'opinion dominante est qu'il est interdit
de manger ou de boire dans des ustensiles en or ou argent. Plusieurs récits de
Mahomet sont cités dans ce sens. Le but de cette interdiction serait d'éviter
la ressemblance avec les mécréants et l'orgueil. On signalera ici qu'il est
interdit aux hommes de porter des bagues ou des bijoux en or, chose permise aux
femmes.
Les raisons des interdits alimentaires
On trouve chez les auteurs aussi bien
classiques que modernes des explications visant à justifier ces interdits.
Certes, la première raison est que Dieu les a prescrits soit à travers le
Coran, soit à travers Mahomet. Or, comme Dieu est omniscient et Mahomet est
infaillible, le croyant doit s'y soumettre. Et comme Dieu et Mahomet ne peuvent
dicter des normes que pour le bien de l'homme, il ne fait pas de doute pour le
musulman que ces normes sont bénéfiques pour la santé et les comportements
sociaux. Pour être qualifiée de bonne sur le plan culinaire, voire même sur
le seul plan physiologique, elle doit être religieusement licite. Une
nourriture à la fois bonne et illicite est une contradiction
que le religieux ne saurait digérer car cela mettrait en cause l'omniscience de
Dieu. Ainsi on lit dans Wasa'il al-shi'ah que la bête tuée affaiblit le
corps, procure la stérilité et provoque la mort par infarctus. Quant au sang,
il accumule l'eau jaune dans le ventre, donne une mauvaise odeur, cause la
cruauté au point que celui qui le mange peut tuer son fils et ses parents.
Quant au vin, il provoque le tremblement, affaiblit la force et pousse à
l'adultère et à faire couler le sang.
On avance aussi des arguments liés aux
croyances colportées par le Coran selon lesquelles Dieu a métamorphosé des
humains en animaux pour les punir. Le fait que Dieu ait porté son choix sur ces
animaux indique que ces derniers sont impurs et par conséquent ils ne peuvent
pas être consommés. Consommer de tels animaux signifie en tirer profit et
banaliser la sanction divine. Cette possibilité de métamorphoser les humains
est invoquée par le verset 36:67. Trois versets indiquent que Dieu en a fait
usage en changeant des êtres humains en singes et en porcs:
2:65: Certes vous connaissez ceux qui, parmi
vous, ont transgressé le sabbat; nous leur avons dit: "Soyez des singes
abjects!"
5:60: Dis: "Vous donnerai-je avis de
ceux dont la récompense sera pire que cela, auprès d'Allah? Ceux qu'Allah a
maudits, contre qui Il s'est courroucé, dont Il a fait des singes et des porcs,
qui ont adoré les Taghout, ceux-là ont la pire place et sont les plus égarés
hors du Chemin Uni."
7:166: Quand en effet ils eurent désobéi
à ce qui leur avait été interdit, Nous leur dîmes: "Soyez des singes
abjects!"
Les récits de Mahomet nous offrent
d'autres exemples de métamorphose. Ceci est développé notamment dans les écrits
chiites, mais aussi sunnites.
Parmi les animaux dans lesquels des humains ont été métamorphosés selon les
chiites nous citons le porc et le singe (un groupe d'israélites qui ne
respectait pas le sabbat; selon un autre récit des chrétiens qui n'ont pas cru
à la table garnie descendue du ciel pour Jésus ont été métamorphosés en
porc), l'éléphant: (un roi ou tyran qui a commis l'adultère), le lapin (une
femme qui trahissait son mari et ne lavait pas ses menstrues), le loup (un bédouin
qui ne veillait pas sur la pudeur de ses femmes), la chauve-souris (un voleur
qui volait les dattes des gens), la guêpe (un boucher qui volait la viande en
trichant dans la mesure), le rat et le scorpion (un calomniateur), l'araignée
(une femme qui avait ensorcelé son mari), le pou (un homme qui se moquait des
prophètes et les insultait). Selon un récit attribué à Mahomet, Dieu aurait
métamorphosé sept cents groupes humains qui avaient désobéi aux prophètes;
quatre cents de ces groupes ont pris la forme d'animaux terrestres, et trois
cents la forme d'animaux aquatiques. Il aurait alors récité le verset 34:19
qui dit: "Nous les fîmes passer en légendes et les déchirâmes en mille
lambeaux. En vérité, en cela sont certes des signes pour tout homme très
constant et très reconnaissant".
Signalons ici que l'argument de la métamorphose
n'est pas mentionné dans les ouvrages modernes sur la nourriture, probablement
en raison de son caractère irrationnel choquant.
Nous avons vu que Mahomet a ordonné de
tuer certains animaux, comme le serpent, le corbeau, le rat, le chien qui
agresse et le lézard.
L'ordre de les tuer est dû probablement au fait qu'ils sont nocifs.
Ces animaux ne peuvent pas être mangés. Il a aussi interdit de tuer
certains animaux que Mahomet a interdit de tuer, animaux qui, par conséquent,
ne peuvent pas être mangés. Parmi ces animaux les sunnites citent la fourmi,
l'abeille, la huppe, la pie grièche et la grenouille.
La raison de l'interdiction est d'ordre religieux. Ainsi l'interdiction de tuer
la fourmi, l'abeille et la huppe proviendrait du fait que le Coran en parle en
bien. Un récit chiite dit que sur l'aile de chaque huppe il est écrit en
langue syriaque: "La famille de Mahomet est la meilleure de la création".
La pie grièche, selon la tradition, serait la première à avoir observé le jeûne
par dévotion envers Dieu. La voix de la grenouille est considérée par Mahomet
comme une prière, ou parce qu'elle contiendrait du venin.
La chauve-souris aurait essayé d'étendre le feu du Temple de Salomon lors de
sa destruction.
La perdrix selon les sources chiites rend louange à Dieu et termine sa prière
en disant: "Dieu a maudit ceux qui détestent la famille de Mahomet".
Les interdits alimentaires entre loi et pratique
Comme nous venons de voir, les aliments
interdits ne sont pas traités avec la même rigueur. Ainsi, il est permis
d'acheter et de vendre un âne puisqu'il s'agit d'un animal utile pour le
transport des humains et des biens, mais il est interdit de manger sa viande. Si
malgré tout le musulman mange sa viande, les légistes ne prévoient pas de
sanction contre ce musulman.
En ce qui concerne le porc, il est interdit
aussi bien de manger sa viande que de le posséder et, par conséquent, de faire
une transaction le concernant (vente, achat, donation, etc.). Il en est de même
du vin. Si un musulman tue ou vole un porc ou une bouteille de vin d'un autre
musulman, il n'est pas tenu d'indemniser son propriétaire. Mais il est permis
aux non-musulmans de posséder et de consommer du porc ou du vin, et si un
musulman tue le porc d'un chrétien ou verse son vin, il doit l'indemniser.
Si un musulman consomme la viande de porc,
de chien ou d'âne, il viole un interdit religieux, mais les légistes ne prévoient
aucune sanction pénale contre lui.
Par contre celui qui consomme du vin est punissable selon les légistes, mais
pas tous les pays musulmans prévoient une sanction pénale contre la violation
d'un tel interdit. La fabrication et la vente du vin sont confiées dans ces
pays surtout à des chrétiens, mais les musulmans sont ceux qui en consomment
le plus. Il arrive cependant que des groupes musulmans interviennent pour châtier
ceux qui consomment du vin et pour attaquer les magasins et les hôtels qui le
vendent.
Bien que l'interdiction de consommer de la
viande de porc ne soit pas sanctionnée sur le plan pénal, contrairement au
vin, on peut dire que les musulmans sont plus respectueux de l'interdiction de
consommer du porc que de l'interdiction de consommer du vin. Le porc est en fait
considéré comme un animal impur et répugnant. On m'a cependant signalé que
des musulmans dans certains quartiers du Caire élèvent le porc et le vendent
aux chrétiens. La non-consommation de la viande du porc par les musulmans fait
que cette viande est nettement moins chère que la viande des autres animaux.
Si les légistes musulmans classiques sont
unanimes sur certains interdits alimentaires, tels que le porc ou le vin, ces légistes
divergent en ce qui concerne d’autres aliments. Cette divergence est due au
manque de clarté du texte coranique et à la contradiction des récits attribués
à Mahomet, à moins que ces récits n'aient été inventés pour accommoder des
coutumes locales. Ainsi, certains légistes interdisent la consommation de la
viande de tortue ou de cheval. Mais les malikites vont jusqu'à permettre la
consommation de toute viande qui n'est pas expressément interdite. Et même en
ce qui concerne la consommation du vin, certains légistes ont essayé, en vain,
de réduire la portée de l'interdiction.
A côté de ces attitudes conciliantes, on
signale une tentative de la part des Qarmates pour qui il n'existe aucun
interdit alimentaire. Ce groupe, aujourd'hui disparu, permettait aux bouchers
d’exposer de la viande de toutes sortes d’animaux, dont des porcs et des
chiens, à condition d’y laisser la tête pour que les gens puissent en
consommer en connaissance de cause, en toute liberté, chacun selon sa propre
conscience.
En ce qui concerne le respect du jeûne de
Ramadan, un des cinq piliers de la croyance islamique, il est assuré sur le
plan de la famille, de la société et de l'État. Le père de famille peut
imposer à sa femme et à ses enfants à partir d'un certain âge de jeûner.
D'autre part, l'État interdit toute violation publique du jeûne. Certes les
non-musulmans ne sont pas tenus de jeûner, mais ils ne peuvent consommer en
public. Des lois punissent une telle consommation. Mais certains États se
montrent moins exigeants, voire hostiles à l'observation du Ramadan pour des
raisons de santé et d'économie. En effet si le jeûne peut parfois s'avérer bénéfique
pour la santé, le jeûne pendant un mois sans manger et sans boire affecte la
santé et occasionne une fatigue et une faiblesse physique qui peut causer des
accidents. D'autre part, lors de la rupture du jeûne le soir on relève des excès
de nourriture néfastes pour la santé. On relève à cet égard que les hôpitaux
connaissent pendant la période de Ramadan un afflux de malades à cause du jeûne
et de la rupture du jeûne. Sur le plan économique, le jeûne affecte les
activités privées et publiques, et les horaires du travail et de l'école sont
généralement réduits. D'autre part, les musulmans dépensent pendant cette période
plus que dans d'autres mois de l'année, notamment en nourriture alors que le
mois de Ramadan est censé être un mois d'abstinence. Pour ces raisons le Président
Bourguiba de la Tunisie incitait son peuple à ne pas observer le Ramadan et ne
manquait pas à se montrer à la télévision en train de manger et de boire.
Mais si l'État parfois peut se montrer en faveur de l'abolition du jeûne, la
société peut se montrer sévère envers ceux qui enfreignent le jeûne de
Ramadan. Il arrive que des groupes religieux effectuent des tournées dans les
restaurants et les bars pour châtier ceux qui consomment en public pendant le
mois de Ramadan.
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