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Les Français face au conflit israélo-palestinien
L'Express du 08/11/2001

Lassitude, équilibre et lucidité
_____________________________

par Elie Barnavi

L'ambassadeur d'Israël à Paris, Elie Barnavi, tire les enseignements d'un sondage réalisé par la Sofres.
-Que pensent les Français d'Israël, des Palestiniens, du conflit israélo-palestinien? Comment évaluent-ils les responsabilités des uns et des autres dans la crise actuelle, et quelle idée se font-ils des chances d'un règlement? Sur toutes ces questions et bien d'autres encore, nous avions jusqu'ici une vue plutôt impressionniste, au gré des lectures, des
intuitions et des sentiments de tout un chacun. Nous avons voulu en savoir plus.

Du 10 au 14 septembre 2001, la Sofres a effectué pour le compte de l'ambassade d'Israël à Paris un sondage d'opinion auprès d'un «échantillon
national de 1 000 personnes représentatif de l'ensemble de la population [française] âgée de 18 ans et plus, interrogées en face-à-face à leur
domicile par le réseau de [ses] enquêteurs.» Il s'agissait pour nous de nous doter d'un outil d'analyse et d'information. (Voir le sondage)

Le tableau d'ensemble met en scène une opinion publique française assez lasse d'un conflit proche-oriental qui s'éternise au-delà du raisonnable et fort sceptique sur les chances d'un dénouement heureux. Une opinion publique, aussi, qui «ne s'en laisse pas conter», et donc plutôt équilibrée, lucide et critique.

Une opinion publique, enfin, qui, au terme d'une année de violences durant laquelle Israël a été plus qu'à son tour mis sur le banc des accusés, se
montre dans l'ensemble bien plus favorable à l'Etat hébreu qu'on n'osait l'espérer ou qu'on pouvait le craindre, c'est selon. Ainsi, les sympathies de 26% des sondés vont plutôt à Israël (19% aux Palestiniens, 11% aux deux, 35% à aucun des deux). Et, si l'image d'Israël aux yeux des Français n'est sans doute plus ce qu'elle était dans les années 50 et 60, elle reste globalement positive, puisque 44% des Français nous conservent leur sympathie. C'est moins que les Etats-Unis, avec 77% (il y aurait d'ailleurs
des choses à dire sur l'antiaméricanisme supposé des Français), l'Egypte(64%), le Maroc (64%) et la Russie (50%), mais plus que la Jordanie (36%),
le Liban (34%), la Palestine (32%), la Syrie (21%) et l'Iran (14%). L'étude par catégories d'âge et de sexe, de niveau d'éducation et d'appartenance socio-professionnelle, partisane et confessionnelle aide à brosser un portrait-robot du Français sympathique à Israël: adulte, de sexe masculin, catholique non pratiquant (il est vrai que la catégorie «autre religion» - 35% d'opinions favorables - risque d'être fortement influencée à la baisse par la disproportion entre l'islam, deuxième religion en France, et toutes
les autres, judaïsme compris), issu des classes moyennes et plutôt cultivé.

Sur les principaux chapitres du contentieux israélo-palestinien, l'opinion française se montre très partagée, avec d'ailleurs une forte proportion d'indécis. Sur le statut de Jérusalem, un quart des Français contre 17% sont plutôt favorables à la position d'Israël. La propagande arabe ne semble pas avoir réussi à convaincre les Français que, comme l'a affirmé brutalement un
des négociateurs palestiniens à Camp David, «les Juifs n'ont rien à faire sur le Haram el-Sharif [le mont du Temple]». En revanche, la présence
israélienne en Cisjordanie et dans la bande de Gaza n'enthousiasme guère les Français: s'il se trouve tout de même 15% de Français pour se dire plutôt favorables à la position d'Israël sur la question des implantations, 36% sont plutôt favorables aux thèses palestiniennes (remarquons tout de même que près de la moitié - 49% - sont sans opinion sur ce sujet, pourtant abondamment présenté par la presse comme crucial dans la crise actuelle).
Enfin, 27% sont plutôt favorables à la position des Palestiniens sur la question essentielle du retour des réfugiés contre 18% et 55% sans opinion.
Il nous faudra expliquer sans relâche à l'opinion française notre opposition absolue et unanime, tous partis et courants de pensée confondus, à ce
«droit» aux allures benoîtes et compatissantes. Car ce n'est pas d'idéologie qu'il s'agit: l'acceptation du «principe» du retour signifierait la négation de la légitimité de l'Etat d'Israël; sa réalisation passerait nécessairement par la disparition pure et simple de l'Etat juif.

Curieusement, c'est dans un domaine où nous attendions une quasi-unanimité, tellement il semble relever de l'évidence, du bon sens, que surgit la surprise la plus désagréable: la démocratie. En effet, seuls 34% des Français estiment que le vocable «démocratique» s'applique davantage aux Israéliens qu'aux Palestiniens. Certes, 8% seulement pensent le contraire;
mais ils sont 21% pour juger qu'il s'applique autant à l'un qu'à l'autre, et à peine plus (22%) pour estimer qu'il ne s'applique ni à l'un ni à l'autre.
Au total, donc, la démocratie israélienne trouve grâce aux yeux de 55% des Français, ce qui est peu. C'est là qu'on mesure le mieux les ravages de
l'Intifada sur une opinion publique abreuvée d'images guerrières qui collent mal avec l'image irénique que l'Occident se fait de la démocratie.

Pour autant, et sans doute pour les mêmes raisons, l'Intifada a une image déplorable: 24% des Français l'approuvent tout à fait (3%!) ou l'approuvent plutôt, alors qu'ils sont 56% à la désapprouver tout à fait (28%) ou à la désapprouver plutôt. Manifestement, les porte-parole palestiniens et leurs relais français n'ont pas réussi à convaincre l'opinion publique que la violence palestinienne s'apparentait à une forme de résistance légitime à l'occupation israélienne.

Plus généralement, la violence provoque une réaction de rejet, et ce d'autant plus que des négociations prometteuses paraissaient devoir y mettre un terme. En effet, à la question: «Quand vous voyez sur une photo ou à la télévision des civils israéliens blessés ou tués dans un attentat commis par un Palestinien, laquelle de ces deux phrases correspond le mieux à votre
réaction?», 39% répondent qu'il «est honteux que les Palestiniens tuent des civils innocents», 34% préfèrent l'affirmation que «les Israéliens tuent
également beaucoup de civils palestiniens innocents», et 27% se disent «sans opinion», ce qui en l'occurrence me semble plutôt une manière de ne pas prendre position. Pis, nous n'avons apparemment pas réussi à persuader l'opinion française du bien-fondé de la politique d'attaques ciblées, puisque seuls 27% des Français pensent qu'«Israël ne fait qu'éliminer des terroristes», alors qu'ils sont 43% à les assimiler à des «assassinats» et 30% à ne pas se prononcer.

En revanche, et comme on pouvait s'y attendre, la forme de violence la plus odieuse aux yeux de l'opinion française est l'attentat-suicide: faisant justice de la thèse du «désespoir» (11%), qui rendrait compte (et, au passage, légitimerait) ces actes de barbarie, les Français y voient massivement «une preuve de fanatisme» (83%). Mais ils n'aiment pas non plus le rôle des enfants dans l'Intifada. A la question: «Quand vous voyez sur une photo ou à la télévision un enfant palestinien blessé ou tué par les soldats israéliens, laquelle de ces deux phrases correspond le mieux à votre propre réaction?», 34% rejettent la faute sur Israël («C'est honteux que les soldats israéliens tirent sur des enfants»), mais 46% trouvent «honteux que les Palestiniens envoient des enfants se battre contre les soldats israéliens».

Mais qui est responsable de l'impasse actuelle? Le verdict est sans appel: Israéliens, Palestiniens, Américains, pays arabes, tous coupables, à parts à peu près égales (respectivement 83%, 80%, 76% et 77%). Viennent ensuite des vilains plus inattendus: les grandes organisations juives dans le monde (sans doute à cause de la puissance prêtée au lobby juif américain), la Grande-Bretagne (vieux souvenir du mandat britannique?), l'Union européenne (trop passive?) et la Russie (pourquoi pas?). Et à qui faut-il imputer l'échec des négociations de paix? Peut-être parce que pendant longtemps la seule version des faits publiée a été palestinienne - parce que le gouvernement Barak, amer et déçu, a tourné le dos à Camp David; et que celui de Sharon n'avait nulle raison de le défendre - les Français renvoient dos à dos Israéliens et Palestiniens: si 8% pensent que la responsabilité en incombe aux Israéliens et autant aux Palestiniens, ils sont 75% à estimer qu'elle est partagée.

Et l'avenir? Sans surprise, les Français pensent que la solution du problème passe par la coexistence de deux Etats dans la région (83%). Seuls 3% jugent qu'il ne devrait y avoir qu'un Etat israélien, et à peine 1% pour penser
qu'un Etat palestinien suffirait. Mais ils sont terriblement pessimistes: peu (16% contre 68%) croient à la volonté sincère d'Israël d'accepter
l'existence d'un Etat palestinien (en fait, tous les sondages israéliens disent exactement le contraire), encore moins font confiance aux
Palestiniens pour accepter sincèrement l'existence d'Israël (14 contre 70), et guère nombreux sont ceux qui en jugent capable le monde arabe dans son ensemble (16 contre 62). Enfin, à la question de savoir si, à leur avis, il
y aura un jour une paix durable entre Israël et les Palestiniens, seuls 25% des Français se prononcent par l'affirmative, alors que 63% répondent «non» et 12% haussent les épaules. On comprend que, par les temps qui courent, l'optimisme se porte mal. Mais je veux rassurer les Français: il n'est pas de conflit éternel - après tout, même la guerre de Cent Ans n'a duré que cent seize ans... Ce conflit s'achèvera donc bien un jour, comme les autres, et d'ailleurs, nous y étions presque. Aussi bien, je ne doute pas que la raison finira par reprendre le dessus, même si, à en croire un grand diplomate qui s'y entendait, les nations ne se résignent aux solutions de sagesse qu'après avoir essayé toutes les autres.

 


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