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Par Menahem Milson, professeur de littérature arabe à l'Université hébraïque
de Jérusalem et conseiller de Memri - http://www.memri.org
- paru dans le Jerusalem Post du 30 mars 2003.
Traduit par Albert Soued, écrivain – www.chez.com/soued
La nouvelle résurgence antisémite notamment en France contient des éléments
nouveaux. Elle est présentée comme une réponse au conflit israélo-palestinien
et les médias arabes sont à l'origine de cette haineuse propagande
antijuive.
L'antisémitisme arabe en tant que phénomène politique, idéologique et médiatique
moderne n'est pas nouveau. Il est né avec le sionisme et avec Israël comme
nation souveraine. Et il est faux de le faire dériver du conflit israélo-arabe.
Que pouvons-nous faire? Il faut d'abord analyser ce phénomène et diffuser
les conclusions comme nous le faisons ici. On peut espérer que des pressions
internationales sur les gouvernements arabes pourront juguler ces incitations
à la haine. Jusqu'à ce jour, avec des exceptions, les universitaires israéliens
ont évité d'en parler. Cette réticence est due à une combinaison de
raisons d'ordre psychologique et politique. Car après tout, l'aventure
sioniste toute entière avait pour but d'enrayer ou de résoudre ce problème
de l'antisémitisme. Par conséquent cette résurgence de ce fléau au Moyen
Orient est quelque chose que les gens préfèrent taire ou nier. Mais il y a
peut-être d'autres facteurs d'ordre politique expliquant la répugnance à
affronter ces attitudes arabes antijuives. La peur que l'étalage de ces
sentiments antijuifs ne renforcent l'intransigeance politique et ne deviennent
un argument contre toute concession territoriale. Et c'est un argument
recevable.
Mais pour ceux qui comme moi sont en faveur d'une politique d'ouverture, nous
devons reconnaître que fermer les yeux sur ce phénomène d'antisémitisme
arabe n'est pas seulement une erreur intellectuelle, mais aussi contre
productif sur le plan politique.
Il faut reconnaître que depuis les années 30, ce phénomène apparaît
aujourd'hui comme la forme de haine la plus dangereuse à l'égard des Juifs.
Car elle résulte de la symbiose entre un antisémitisme arabe et sa
contrepartie occidentale. Qu'est-ce qui caractérise cet antisémitisme arabe?
Nos conclusions résultent des forums de Memri et de l'analyse des médias
arabes.
La composante islamique
L'insulte la plus commune contre les Juifs est proférée non seulement dans
les sermons du vendredi, mais aussi dans les articles politiques: "les
Juifs descendent des singes et des porcs", insulte tirée de plusieurs
versets du Coran, traitant ainsi les Juifs qui violent le Shabat.
Cette image a imprégné la conscience des gens, même les enfants. En mai
2002, Iqraa, la chaîne de télévision saoudienne par satellite interviewe
une "vraie jeune musulmane" de 3 ans à propos des Juifs dans l'émission
"le magazine de la femme musulmane".
L'enfant dit qu'elle n'aimait pas les Juifs. Quand on lui demande pourquoi,
elle répond que "ce sont des singes et des porcs". Le modérateur
lui demande: "Qui a dit cela?". La fille répond "Allah!".
"Où?". " Dans le Coran". À la fin de l'interview le modérateur
la félicite "Aucun parent ne peut espérer avoir une fille aussi
croyante que celle-ci…, qu'Allah la bénisse, ainsi que son père et sa mère!"
Il ne faut pas croire que cette insulte soit une simple invective ou que cette
transfiguration animale soit un simple signe d'une pensée magique ou
primitive. Répétée, cette image assimilant les Juifs à des bêtes, les déshumanise
et peut apporter une justification à leur destruction (1).
Une autre image très populaire contre les Juifs provient du
"h'adith", ou tradition coranique musulmane et concerne "La
promesse de la pierre et de l'arbre"; la veille du jour du Jugement
dernier, les Musulmans combattront les Juifs et les tueront. Cherchant un
refuge, les Juifs se cacheront derrière des arbres et des rochers, et ceux-ci
les dénonceront et crieront "ô musulman! Ô serviteur d'Allah! un Juif
se cache derrière moi; viens et tue-le!". Il n'y a pas très longtemps,
un prêcheur dans la plus grande mosquée de Bagdad invoqua ce
"hadith" à la télévision, brandissant un long sabre. Son
hurlement "Nous leur couperons la tête!" extasia son auditoire (2).
Les composantes occidentales
L'antisémitisme arabe a adopté les mythes européens, même après que les
antisémites occidentaux les aient abandonnés parce que surannés. Les
exemples les plus évidents concernent "les protocoles des sages de
Sion" et l'accusation que "les Juifs ont tué Jésus", aussi étonnant
que cela puisse paraître pour un Musulman.
La diffamation relative "au pain azyme imprégné de sang chrétien"
est très couramment reproduite dans les médias arabes, à l'occasion de
critiques des actions d'Israël contre les Palestiniens. La Cour Suprême à
Paris a condamné en août 2002 l'éditeur du journal égyptien Al Ahram,
Ibrahim Naafi, pour incitation à l'antisémitisme et à la haine raciale. Il
avait autorisé la publication d'un article ayant pour titre "La matsa
juive est faite de sang arabe", en relation avec la sinistre diffamation
de Damas de 1840!
"Les protocoles des Sages de Sion", le faux tsariste du début du 20ème
siècle est devenu un thème habituel de discussion dans les médias arabes,
depuis la diffusion mondiale de la série égyptienne "Un cavalier sans
monture" lors de la fête du ramadan. Son authenticité n'est pas mise en
question dans les médias. Pourtant l'auteur de cette série télévisée sait
pertinemment qu'il s'agit d'un faux. Mais il dit "peu importe que cela
soit la réalité ou une fiction, de toute manière, leur contenu s'est révélé
comme vrai depuis ce temps…!"…
"Les Juifs ont tué Jésus"
La vieille accusation chrétienne est devenue un cliché commun dans le
discours antisémite arabe. Un exemple: le conseiller d'Arafat, Bassam Abou
Sharif, se référant à la statue de la Vierge Marie endommagée lors du siège
de l'Eglise de la Nativité à Bethlehem, écrit dans le quotidien saoudien
"Al sharq al awsat" paraissant à Londres le 20 mars 2002: "le
triste sourire de la Vierge Marie protégeant son fils, le Messie, n'a pas empêché
les soldats de l'occupant israélien de prendre position et viser le visage de
cet ange palestinien (c'est à dire Jésus) et assassiner ce sourire….à
Bethlehem un nouveau crime a été commis. Mais bien sûr cette tentative de
tuer la paix, l'amour et la tolérance a échoué, tout autant que celle de
leurs ancêtres qui ont essayé de tuer le message prophétique, quand ils ont
crucifié le corps du Messie sur la croix en y enfonçant les chevilles et les
pitons de fer".
Autres poncifs
La tendance la plus commune aujourd'hui dans le monde arabe est d'identifier
le sionisme au nazisme. Les articles et les discussions publiques ne cessent
d'assimiler les idéologies des deux mouvements.
Une autre accusation concerne la soit-disant collaboration entre "les
sionistes et les nazis" pour détruire le peuple juif! Cette accusation
est au centre d'une thèse de doctorat présentée au Collège oriental de
l'Université de Moscou en 1982 par un responsable de l'OLP, connu sous le nom
de Abou Mazen, aujourd'hui premier ministre d'Arafat. La version arabe de
cette dissertation a été publiée en 1984.
Le sens politique de telles diffamations est clair, la négation de
l'Holocauste, et la déculpabilisation des Allemands vis à vis des Juifs. De
même s'il n'y a pas holocauste, les Européens ont alors une dette vis à vis
des Palestiniens…
Si les Juifs font subir aux Palestiniens ce que les Nazis ont fait subir aux
Juifs, alors les Allemands n'ont pas besoin d'avoir honte. Là est le lien
entre l'antisémitisme arabe et l'antisémitisme européen, créant "un
nouvel axe stratégique".
L'histoire récente montre néanmoins que les gouvernements arabes et leurs
intellectuels ne sont insensibles aux protestations et aux pressions extérieures.
Les articles d'Osama el Baz de décembre 2002, où il dénonçait l'antisémitisme,
sont un premier pas bienvenu.
Il en est de même de la recommandation de l'Institut d'études islamiques de
l'Université d'el Azhar du Caire aux prêcheurs de s'abstenir de
"comparer les Juifs aux singes et aux porcs" (voir al watan du 14
mars 2003).
Il est improbable que ces premiers pas eussent été pris sans les
protestations et les critiques récentes du Congrès et des médias américains.
Notes du traducteur
(1) avant l'holocauste, les nazis comparaient les juifs à des insectes
nuisibles…
(2) deux autres diffamations sont courantes en Islam: un juif converti Saba
ibnal Sawda serait responsable du schisme entre sunnites et shii'tes; l'antéchrist
devant précéder la réapparition du Mahdi en Islam Shii'te, appelé Dajjal,
le borgne, serait également Juif…
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