HOMMAGE A AIME CESARE.
Le chantre de la négritude est mort à un âge avancé paisiblement et modestement parmi les siens. Enterré dans sa terre natale, là où il n'y avait d'yeux que pour elle, celle pour qui il a œuvre toute sa vie.
Les poètes et les gens de lettres en générale, portent au dessus de leur tête cette auréole illuminée pareille à celle des prophètes.
La mémoire et le souvenir de tous visionnaires humanistes sont immortels.
Parce qu’en chacun d’eux endure en son for intérieur la souffrance et le martyr de ces congénères qui n’osent hurler le mal qu’ils subissent envers leurs maîtres.
Avec le temps, voilà qu’ils deviennent humbles héros malgré eux en apportant quelque chose de précieux à l’humanité. LA LIBERTE. L’EMANCIPATION. LE DROIT D ETRE AUSSI DES HOMMES ET DES FEMMES A PART ENTIERE.
La révolution par les mots sont leurs faits d’armes les plus nobles surtout lorsqu’il s’agit d’éveiller des consciences souvent endormies, apathiques, sclérosées, d’une certaine société qui, pourtant n’était pas avares de bons mots et de morale. Une société qui à fermé les yeux sur ce qui paraissait évident. La liberté et le respect de l’autre.
La morale n’étant bonne que pour elle alors au diable la morale pour les autres.
Nous, les anciens hébreux, savons pertinemment ce que cela signifiait que de vivre sous l’occupant égyptien comme esclaves. La semaine de Paque est là pour venir nous le rappeler.
Monsieur Aime Césaire était justement l’apôtre des droits civiques de la négritude.
Son combat contre les injustices fait de lui le simple messager de tout un peuple et par ricoche de tous les peuples qui ont souffert du joug colonialiste aberrant des blancs.
Monsieur Aimé Césaire, fut aimé et respecté par son peuple et au-delà de son île.
Il rejoint tous ces hommes et femmes qui ont durant toute leur vie se sont levés pauvrement et pacifiquement pour dire, par leur voix juste et logique, la vérité aux malentendants, aux aveugles et combien leur face était hypocrite et hideuse.
Monsieur Aimé Césaire, le chantre de la négritude est mort tout simplement.
Sans chicaner.
Quand il est mort, le poète,
Quand il est mort, le poète,
Tous ses amis,
Tous ses amis,
Tous ses amis pleuraient.
Quand il est mort le poète,
Quand il est mort le poète,
Le monde entier,
Le monde entier,
Le monde entier pleurait.
On enterra son étoile,
On enterra son étoile,
Dans un grand champ,
Dans un grand champ,
Dans un grand champ de blé.
Et c'est pour ça que l'on trouve,
Et c'est pour ça que l'on trouve,
Dans ce grand champ,
Dans ce grand champ,
Dans ce grand champ, des bleuets.
La, la, la...
Prophétie
Là
où l'aventure garde les yeux clairs
là où les femmes rayonnent de langage
là où la mort est belle dans la main comme un oiseau
saison de lait
là où le souterrain cueille de sa propre génuflexion un luxe
de prunelles plus violent que des chenilles
là où la merveille agile fait flèche et feu de tout bois
là où la nuit vigoureuse saigne une vitesse de purs végétaux
là où les abeilles des étoiles piquent le ciel d'une ruche
plus ardente que la nuit
là où le bruit de mes talons remplit l'espace et lève
à rebours la face du temps
là où l'arc-en-ciel de ma parole est chargé d'unir demain
à l'espoir et l'infant à la reine,
d'avoir injurié mes maîtres mordu les soldats du sultan
d'avoir gémi dans le désert
d'avoir crié vers mes gardiens
d'avoir supplié les chacals et les hyènes pasteurs de caravanes
je regarde
la fumée se précipite en cheval sauvage sur le devant
de la scène ourle un instant la lave
de sa fragile queue de paon puis se déchirant
la chemise s'ouvre d'un coup la poitrine et
je la regarde en îles britanniques en îlots
en rochers déchiquetés se fondre
peu à peu dans la mer lucide de l'air
où baignent prophétiques
ma gueule
ma révolte
mon nom.
Aimé Césaire
