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Ethiopiens juifs en Israel

Envoyé par lapid 
Ethiopiens juifs en Israel
18 mars 2009, 10:45
"L'incroyable histoire de l'exode des Juifs Ethiopiens

L' ""Operation Moise"" fut l'une des aventures humaines les plus extraordinaires que le XXe siecle ait connu. Des milliers de Juifs ethiopiens, les Falachas, furent sauves et emmenes en Israel lors d'un gigantesque pont aerien. L' ""Operation Moise"" fut organisee en cachette par le Mossad et le Departement d'Etat Americain. Avec l'appui de nombreuses organisations non-gouvernementales et l'accord officieux des gouvernements soudanais, francais, belge, allemand et suisse. On fit venir les "" Falachas "" (Juifs Ethiopiens) a raison de 180 personnes par avion, environ 47 vols entre le 21 novembre 1984 et mars 1985, tous clandestins. Jusque-la, le monde "" civilise "" avait deplace en masse des Africains pour les rendre esclaves, jamais pour les sauver. Cet incroyable exode et sa complexe preparation etaient demeures jusqu'a ce jour quasi inconnus du grand public. Ce documentaire retrace cette incroyable aventure humaine dans toute sa complexite.


Operation Moise
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Re: Ethiopiens juifs en Israel
18 mars 2009, 12:13
Ethiopiens juifs en Israel
18 mars 2009, 13:05
"L'incroyable histoire de l'exode des Juifs Ethiopiens"

La vie en Israël : les Juifs d’Ethiopie - Beta Israel ou Falashas - Par Antoinette Bremond - 6 juillet 2006,


Opération Salomon

Dans la presse israélienne du 9 juin 2006, des photos bouleversantes de Juifs éthiopiens arrivant en Israël grâce à l’Agence Juive, à l’aéroport Ben Gourion, après avoir attendu et espéré ce jour pendant huit ans dans les camps de réfugiés de la ville de Gondar, dans le nord.

Encore une fois, de la famille était là pour les accueillir en pleurant d’émotion. Encore une fois, ils sont descendus de l’avion, ont embrassé la terre et sont entrés silencieux dans un autre monde.

Des Ethiopiens israéliens ou, comme le dit la presse israélienne, des Juifs sortis d’Ethiopie, on en croise partout dans ce pays, aux postes de contrôle et de sécurité en particulier, mais aussi parmi les soldats, dans les gares ou lors des fêtes, dans les écoles, les hôpitaux, etc. Ils sont actuellement 105 000 en Israël, dont 30 000 sont nés dans le pays. On les reconnaît, bien sûr. Mais connaît-on leur histoire, leur communauté, leurs coutumes, leurs souffrances, leurs joies et leurs échecs ?

Leurs origines

Les Juifs d’Ethiopie qui se nomment eux-mêmes Beta Israel [la maison d’Israël] sont plus connus sous le nom de Falashas, nom signifiant immigrants ou étrangers. Mais d’où viennent-ils ? Quelle est leur origine ? Difficile à savoir exactement, leur histoire ayant été transmise oralement de génération en génération.

On parle de quatre origines possibles :

1. Ils sont les descendants de la tribu perdue de Dan

2. Ils sont les descendants de Menelik I, le fils du roi Salomon et de la reine de Saba

3. Ils sont les descendants d’Ethiopiens païens et chrétiens, convertis au judaïsme depuis des siècles

4. Ils sont les descendants de Juifs qui ont fui Israël pour l’Egypte après la destruction du premier Temple en 586 avant JC et se seraient installés en Ethiopie.

Quoi qu’il en soit, le judaïsme était largement propagé en Arabie du sud depuis la période royale et les relations entre l’Arabie et l’Ethiopie peuvent expliquer cette présence juive. En effet, le judaïsme s’était étendu dans le pays bien avant la conversion au christianisme de la dynastie Axum au 4e siècle. A cette époque, ceux des Juifs qui résistèrent au prosélytisme chrétien en Ethiopie furent contraints à se retirer des régions côtières et à se réfugier dans la zone montagneuse, au nord du lac Tana. Ils s’y constituèrent en royaume indépendant, en Etat juif autonome. A cette époque, ils parlaient l’agaw, une langue non écrite.

C’est à partir de 1270 qu’avec l’établissement de la dynastie solomonide on commence à entendre parler des Beta Israel. Ils sont décrits comme l’un des nombreux groupes du pays, désirant garder leur autonomie. Leur royaume est dirigé par un roi ou une reine, les plus célèbres étant le roi Gédéon et la reine Judith. Malgré de fréquents conflits, protégés par les montagnes, ils se maintiennent forts.

De 1529 à 1542, les Falashas prennent parti pour les Musulmans de Somalie et, avec eux, luttent pour détruire l’Ethiopie. Celle-ci sera sauvée grâce à l’intervention des Portugais. Mais, de 1605 à 1632, l’empereur Susenyos, converti au catholicisme, décide de faire disparaître le royaume des Falashas et encourage les missionnaires à les convertir. Ils doivent alors se réfugier dans la région de Gondar. Beaucoup se convertissent au christianisme.

L’empereur recrute des Falashas à son service. Ceux-ci s’assimilent de plus en plus, adoptant l’amharique, une langue sémitique parlée par les Ethiopiens.

En 1624, le royaume des Beta Israel est vaincu dans une bataille tragique les opposant aux Ethiopiens et aux Portugais. "Des hommes et des femmes falashas se battent jusqu’à la mort. Du haut de leur forteresse, ils se jettent dans le précipice et s’entretuent pour ne pas devenir prisonniers. C’est le Massada des Falashas. C’est à cette époque que furent brûlés tous les documents relatant l’histoire des Falashas, leurs livres religieux, pour détruire à jamais la mémoire du judaïsme en Ethiopie." (Righteous Jews Honored by Falasha Supporters, AAEJ Press Release, 1981). Le roi Gédéon, refusant de se convertir, fut tué.

Les Juifs capturés vivants devinrent les esclaves des Ethiopiens et furent baptisés de force. On leur refusa le droit à un pays. L’indépendance des Beta Israel fut abolie. Sur le demi million qu’ils étaient, il n’en resta plus que 100 000, vivant en groupes clandestins dans les hautes montagnes.

Cette période de conflits entre juifs et chrétiens permit des contacts entre ces deux religions. Leurs textes liturgiques étaient dès lors écrits dans la même langue, le guez, et le monachisme entra dans la pratique religieuse des Beta Israel.

En 1830, des missionnaires anglicans prospectant les régions montagneuses de Gondar, les découvrent dans un état de dénuement matériel et spirituel total. Mais ce n’est qu’en 1867 que l’Alliance Israélite Universelle prend contact avec eux, grâce à Joseph Halevy, juif français et, en 1904, à Jacques Faitlovitch qui dédiera sa vie à la reconnaissance des Falashas comme juifs. Orientaliste juif français d’origine polonaise, il forma un comité international pro-Falashas pour la création d’écoles dans leurs villages et, grâce à des subsides, réussit à améliorer leurs conditions de vie. Il publia son livre, Notes de voyage chez les Falashas et s’établit en Israël après la seconde guerre mondiale. L’Agence Juive, en collaboration avec le Congrès Juif Mondial et le Joint poursuivront son œuvre. Pourront-ils un jour réaliser le rêve millénaire de rejoindre la terre de leurs ancêtres ?

Même si le sort des Beta Israel suscita un grand intérêt en Israël, il ne fut pas question d’envisager tout de suite leur immigration et leur intégration, des doutes subsistant quant à leur judaïté. Et pourtant, déjà en 1921, le Rav Kook n’hésitait pas, quant à lui, à reconnaître les Falashas comme partie intégrante du peuple juif.

En 1973, le grand rabbin sépharade Ovadia Yosef, d’origine yéménite, ayant servi dans l’armée britannique pendant la seconde guerre mondiale en Ethiopie et épousé une Beta Israel, reconnaît officiellement la judaïté des Falashas, en citant une décision rabbinique égyptienne du 17e siècle. Il les déclare descendants de la tribu de Dan ayant le droit d’émigrer en Israël : "Nous sommes obligés d’accélérer leur émigration en Israël et de les former dans l’esprit de la Tora, les aidant à devenir des partenaires de la construction de la Terre Sainte." En 1975, le grand rabbin ashkénaze Shlomo Goren fit la même déclaration : "Vous êtes nos frères, vous êtes notre sang et notre chair. Vous êtes de vrais Juifs." Peu après, le premier gouvernement d’Itzhak Rabin les accepta comme juifs et leur accorda le droit de retour. La porte était ouverte.

Mais pourquoi ces difficultés à les reconnaître comme juifs ?

Coutumes et traditions

En fait, les Beta Israel sont des juifs observant les traditions pré-talmudiques basées sur la Tora (le Pentateuque). Les autres livres de la Bible ne sont pas considérés comme inspirés. Pourtant les livres de Néhémie, d’Esdras, d’Hénoch, des Jubilés et de Baruch font partie avec d’autres écrits de leur héritage religieux. Par contre, ils ne connaissent pas le Talmud. Les Falashas ne pratiquent que les fêtes juives dont il est fait mention dans la Tora. Il ont également une autre fête nommée « Seged » (se prosterner) qui se célèbre le 29 du mois de Heshvan (après les fêtes d’automne). C’est la fête du don de la Tora et du retour de l’Exil de Babylone à Jérusalem au temps d’Esdras et de Néhémie. Occasion de fortifier la vision du « retour au pays ».

Le texte biblique est rédigé en guez, aucun texte en hébreu n’étant connu jusqu’au 20e siècle. Leur lieu de culte est appelé "masgid" et, contrairement aux synagogues, on ne peut qu’y prier. Aucune autre réunion n’y est autorisée. C’est un lieu saint divisé en deux parties : le saint des saints où on lit la Bible dans un livre écrit à la main (il n’y a pas de rouleau) et l’autre partie où l’on procède au sacrifice de l’agneau pascal, sur une pierre. Le chef religieux, appelé Kes, est respecté comme un grand rabbin, ayant autorité et responsabilité sur sa communauté. Le Kes [prêtre en amharique] est considéré comme un descendant d’Aaron.

Les Beta Israel observent les lois bibliques de la pureté, de la casherout et de l’abattage rituel. Ils disent les bénédictions avant et après les repas. Ils pratiquent la circoncision le huitième jour. L’éducation religieuse des jeunes est primordiale, en particulier l’enseignement des psaumes en guez. Le défunt est considéré comme impur et le deuil dure sept jours, avec une cérémonie spéciale le septième jour et une année après l’enterrement.

Chaque jour, il y a sept temps de prière, dans le masgid, mais les fidèles n’en suivent qu’un ou deux. La sainteté du shabbat est scrupuleusement respectée et la journée est consacrée aux prières et aux chants en amharique. Les Beta Israel ne connaissent ni l’étoile de David, ni le shofar.

Le Kes le plus vénéré du 15e siècle fut Abba Zabia. Il était si populaire et charismatique qu’il convertissait les chrétiens au judaïsme. Le Négus essaya de le tuer, mais la légende dit qu’il disparut comme Hénoch.
Tous ces détails vont nous aider à comprendre, dans la deuxième partie de cette étude, l’enjeu de l’intégration en Israël, les rabbins essayant de réformer la religion juive des Falashas pour les faire entrer dans un judaïsme orthodoxe.

Les Aliyas

Dès 1965 et jusqu’en 1975, des Beta Israel commencèrent à venir en Israël, tout d’abord en touristes. Certains purent rester grâce à l’aide d’Israéliens. D’autres se convertirent au judaïsme orthodoxe et firent venir leur famille. Il y eut également ceux qui, après quelques mois en Israël, ayant appris l’hébreu, retournèrent à Gondar pour y créer des oulpans. Le rêve millénaire de venir "au pays" commençait à se préciser.

Le renversement du régime de l’empereur Sélassié en 1975 par le colonel Mengistu Haile Mariam, dictateur marxiste pro-soviétique, fut un arrêt de mort pour la communauté Beta Israel. 2500 Juifs furent tués et 7000 chassés de leurs maisons. Mariam envahit la région du nord et y installa des paysans éthiopiens souvent antisémites. L’émigration vers Israël fut alors interdite, de 1975 à 1991. Malgré cela et grâce à l’Agence Juive, qui avait déjà commencé dès 1955 à construire des écoles et à améliorer la situation des Falashas, 300 Beta Israel émigrent en Israël en 1977. Auparavant, il y avait eu un accord secret du gouvernement éthiopien avec Israël.

De 1982 à 1984, chassés par la famine et la guerre civile, des milliers d’Ethiopiens du nord, parmi lesquels des Beta Israel, se réfugient au sud du Soudan. 6000 gagnent Israël par des voies détournées, le gouvernement du Soudan refusant leur départ.

Récemment, à la radio, un Juif d’Ethiopie, travailleur social à Jérusalem, arrivé en Israël dans ces années-là, témoignait : "J’habitais dans un petit village du nord, fondé par mon grand-père. Nous étions onze enfants et attendions le jour où nous partirions vers le nord pour arriver "au pays". Même avant que mes grands parents sachent que l’Etat d’Israël existait, qu’ils n’étaient pas les seuls Juifs au monde, le rêve sioniste transmis de génération en génération nourrissait notre espérance. A 12 ans, j’ai demandé à tous mes camarades de prier pour que je puisse partir, traverser le Soudan et arriver à Jérusalem. Pour m’y préparer, je suis allé étudier à Gondar, la ville principale de notre région, à 40 km de chez moi. Chaque fin de semaine, je rentrais à la maison pour vivre le shabbat en famille. A 13 ans, je suis parti avec un groupe d’adultes. Un de mes frères était déjà parti mais avait disparu. Malgré le danger des révolutionnaires éthiopiens, nous avons réussi à franchir la frontière. Arrivés au Soudan, nous nous sommes installés dans un camp de réfugiés. J’y suis resté deux ans et demi, faisant des petits travaux pour survivre. Il ne fallait pas se faire reconnaître comme juif, les autres réfugiés éthiopiens et soudanais nous auraient tués. De là, un groupe de soixante a pu partir (grâce à une aide israélienne) en jeep pour la mer, puis en bateau pour la Grèce et, de là, un avion israélien est venu nous chercher."

En 1984, la situation des milliers de Juifs éthiopiens ayant fui au Soudan devient tragique. La famine règne. Cette marche de milliers d’entre eux vers le nord, d’un camp à l’autre, reste encore un traumatisme inguérissable dans la vie de beaucoup d’Israéliens éthiopiens ayant perdu souvent une partie de leur famille dans le désert du Soudan. On estime à 4000 ceux qui sont morts en cours de route.

Pour eux, depuis quelques années, la communauté juive éthiopienne a institué un Jour du Souvenir. Le premier eut lieu à Jérusalem, au kibboutz Ramat Rachel, en présence d’Ariel Sharon. Les "rescapés", même vivants, se disent inguérissables de ce qui fut pour eux une "shoa". Dans le dernier numéro des Yediot Aharonot consacré à la communauté éthiopienne, écrit moitié en hébreu et moitié en amharique et paraissant tous les deux mois, des hommes, des femmes témoignent. Après des années où personne n’a parlé, le journal appelle à parler, à se souvenir. Des parents qui ont perdu leurs enfants dans la marche se sentent coupables de ne pas les avoir sauvés et amenés au pays, et n’osent pas en parler, même en famille. Traumatisme aussi d’avoir dû enterrer les leurs en cachette, la nuit, pour ne pas dévoiler leur judaïté. Ils se souviennent des guides payés qui les abandonnaient en plein désert, en particulier lorsqu’ils respectaient le shabbat.

Alerté, Israël (l’armée et le Mossad), en collaboration avec l’ambassade des USA à Khartoum et des forces de sécurité soudanaises, lance l’opération Moïse : du 20 novembre 1984 au 4 janvier 1985, transportant 8000 Juifs éthiopiens du Soudan en Israël. Un accord secret entre le Soudan et Israël avait rendu la chose possible. Les fonctionnaires de l’Agence Juive, dans le plus grand secret, ont transporté ces "morts vivants" des camps jusqu’à Khartoum, à 450 km de là. Puis, on les a dirigés vers le Boeing 707 de la compagnie belge de charters Trans-European-Airways, compagnie en bonnes relations avec le Soudan. Pendant deux mois, un véritable pont aérien va être établi entre Khartoum et Tel Aviv, via Bruxelles, Rome ou Bâle : 160 avions, environ 8000 rescapés. Couverts de chiffons, un maigre baluchon sur le dos, ils se mettaient à genoux sur la piste pour baiser la terre d’Israël en murmurant des prières.

Cette opération fut rendue possible par le financement d’Israël, des USA et de l’Agence Juive. La visite d’Ariel Sharon à Khartoum en 1981 dans le plus grand secret n’est pas étrangère à cette mise en place d’une filière soudanaise pour faciliter la sortie des Juifs éthiopiens des hauts plateaux d’Ethiopie.

Des "fuites" dans les médias arrêtèrent brusquement cette opération, les pays arabes ordonnant au Soudan d’interdire le départ des avions. "Nous estimons que 4000 juifs sont encore dans quelques camps de transit au Soudan et qu’entre 8000 et 10 000 sont toujours en Ethiopie", indiquait le porte parole de l’Agence Juive, Zvi Eyal. Et ceux qui restent sont en danger de mort. "Ni les difficultés économiques, ni les distances géographiques, ni les obstacles politiques n’empêcheront la poursuite de l’émigration des Falashas. Le gouvernement israélien poursuivra l’opération Moïse jusqu’à ce que le dernier des Juifs ait rejoint sa patrie", affirmait Shimon Pérès le 8 janvier 1985 à la Knesset.

L’opération Josué en 1985 permit à 800 autres Beta Israel d’être ramenés du Soudan en Israël. Mais la dictature de Mariam empêcha ensuite toute autre émigration jusqu’en 1991. Inutile de dire combien de familles ont été séparées, les uns partant, les autres restant. Souvent les femmes, les jeunes enfants, les malades, les vieillards restaient en Ethiopie, le voyage au Soudan étant trop risqué.

De 1990 à 1991, l’Ethiopie, perdant son soutien militaire soviétique, décide de laisser partir 6000 Beta Israel vers Israël par petits groupes, en espérant gagner le soutien des USA. Ils quittent leurs villages et s’installent dans des camps à Addis Abeba, espérant échapper à la guerre civile qui ravage le nord du pays, et partir pour Israël. La priorité était donnée à la politique de regroupement des familles.

En 1991, la dictature Mengistu fut renversée par les rebelles Erythréens et Tigréens. Mariam s’enfuit, les rebelles prennent le contrôle de la capitale. Israël lance l’opération Salomon pour délivrer tous les Beta Israel. Le gouvernement d’Itzhak Shamir donne à la compagnie El Al l’autorisation de voler le shabbat. Le vendredi 25 mai commence un vol de 36 heures dans trente quatre avions dont on avait relevé les sièges pour augmenter leur capacité. Ils transportent 14 324 Juifs éthiopiens. Des hôtels avaient été réservés à Jérusalem pour l’accueil. Le samedi soir, les Israéliens voyaient sur leur petit écran l’arrivée, l’exode moderne de leurs frères et sœurs noirs. L’émotion fut vive, tant le secret avait été gardé. Les gens ont commencé à apporter des habits, des jouets et même des fleurs. Des femmes de Jérusalem étaient à l’hôtel pour allumer les bougies de ce premier shabbat en Israël et des Juifs éthiopiens israéliens s’étaient portés volontaires.

De 1991 à 1994, les derniers Beta Israel émigrent en Israël. Mais, dès cette date, d’autres Ethiopiens des montagnes, se déclarant également juifs, viennent à Addis Abeba demander à Israël de les "faire monter". Ce sont les Falash Muras.

Les Falash Muras, n’appartenant pas directement aux communautés Beta Israel constituées, n’ont tout d’abord pas été reconnus comme Juifs par Israël. La plupart sont chrétiens et ne peuvent pas toujours prouver leurs origines juives. Mais tous désirent émigrer. Un débat assez vif eut lieu en Israël même, au sein des Beta Israel, entre partisans et opposants à leur émigration. Le gouvernement autorise finalement la plupart des réfugiés à Addis Abeba à émigrer en Israël au titre du regroupement des familles. "Un parent non juif d’un Juif israélien a le droit d’émigrer." Mais plus Israël ouvrait ses portes, plus la vague des réfugiés grandissait. En 2003, il y avait encore 20000 Falash Muras à Addis Abeba qui attendaient depuis des années de venir en Israël, et autant qui vivaient dans le nord, espérant émigrer. Des conversions officielles au judaïsme sont alors organisées, avec l’accord du gouvernement israélien, pour leur permettre d’émigrer en tant que Juifs. Mais l’émigration reste lente, environ 300 par mois. En 2005, le gouvernement d’Ariel Sharon déclare vouloir ramener tous les Falash Muras d’origine juive en Israël, à la cadence de 600 par mois, à partir de juin 2005. Le chiffre sera remis en question par le gouvernement Olmert en juin 2006 et l’on revient au chiffre précédent : 300 par mois. Une enquête récente établit que des dizaines de milliers de Falash Muras sont également groupés dans le nord de l’Ethiopie, attendant leur émigration. Oui, comme ce groupe qui, après huit ans d’attente, vient de débarquer à l’aéroport Ben Gourion.
Ethiopiens juifs en Israel
18 mars 2009, 13:17
La vie en Israël : l’intégration des Juifs d’Éthiopie- Par Antoinette Bremond - 14 septembre 2006,

La communauté éthiopienne grandit. Elle commence à faire vraiment partie du paysage israélien. Comme le disait le responsable du centre d’intégration de Mevasseret (Jérusalem) que nous interrogions : « C’est comme partout. Il y a des difficultés, des drames même, mais aussi des réussites, des joies. Du bien et du mal. » En écoutant les uns et les autres, en lisant la presse éthiopienne écrite en hébreu et en amharique, on se rend compte de l’effort énorme fourni par la communauté éthiopienne, par le ministère de l’Intégration et l’Agence Juive, pour que l’arrivée de ces milliers de Juifs venus d’Éthiopie et leur intégration ne soient pas une "honte" pour Israël, mais au contraire un succès, un "plus" dans la vie du pays. Comme le disait Shula Mola, arrivée en Israël à l’âge de douze ans et directrice de l’association israélienne pour les Juifs éthiopiens : « Au lieu d’être montré du doigt comme un pays menant une politique d’apartheid par la presse internationale, devenir un exemple d’accueil et d’intégration de l’immigrant. »

Propos pleins d’espoir, tournés vers l’avenir, qui tranchent avec l’exclamation d’une Israélienne de Jérusalem : « L’intégration des Juifs d’Éthiopie est un échec complet. Nous les avons parqués et isolés des autres. Ils ont gardé leurs coutumes primitives et ne se sont pas fondus dans la société israélienne. Et leur misère en dit long. » Cela rappelle les propos de Yehuda Dorminitz, directeur général du Département d’immigration et d’intégration de l’Agence Juive en 1980 : « Ne les faites pas venir. Ce sera impossible de les intégrer. C’est comme si vous vouliez faire sortir les poissons de l’eau. »



Difficile, oui très difficile. Pour les Juifs venant d’Éthiopie, venir en Israël c’était réaliser leur désir le plus profond, leur rêve sioniste millénaire. Pouvoir enfin poser leurs pieds sur la Terre Promise, et y trouver "l’eau" à laquelle ils aspiraient en tant que Juifs : Israël, Jérusalem. Difficile aussi pour l’État d’Israël qui prit un risque énorme. Mais rien ne put l’arrêter dans sa détermination à faire revenir au pays tous les Juifs qui le désirent. 400 millions de dollars furent consacrés à cette immigration. Risque énorme si l’on en croit le président du Conseil des Municipalités de Galilée : « Comment s’en sortiront les derniers arrivés alors que les anciens ont déjà du mal à trouver du travail. »

Les différentes étapes de l’intégration

Reçus avec émotion et enthousiasme par les Israéliens comme des frères et soeurs juifs, ils sont tout d’abord logés dans des centres d’accueil provisoires, en 1991, dans des hôtels de Jérusalem. Le choc culturel est énorme pour cette population africaine rurale à des années lumière de la société technologique et de consommation. Là-bas ils n’avaient pas besoin d’aide, vivant des champs, de la rivière et du bétail. Ici, les voilà entièrement dépendants, pouvant difficilement continuer à respecter leurs coutumes de pureté, d’abattage rituel, de deuils, etc., leur judaïsme n’étant pas exactement le même que le judaïsme rabbinique. Comme me le disait une employée du bureau d’intégration à Rehovot : « Nous, les Juifs d’Éthiopie, nous étions tous pratiquants, religieux. Une de nos premières surprises en arrivant au pays, "chez nous", ici, fut de rencontrer beaucoup de Juifs non pratiquants. »

Après plus d’un an dans les hôtels, ils sont installés dans des villages de caravanes construits spécialement pour eux, souvent isolés de la ville. Vivant entre eux, ils peuvent reprendre certaines de leurs coutumes, et surtout recommencer à cuisiner à l’éthiopienne, une nourriture à base de "endjara", une crêpe préparée avec de la bière, toute la nourriture étant très épicée. La femme est à la cuisine, l’homme à l’abattage rituel et à la préparation de la viande. Ils retrouvent peu à peu leurs repères, en particulier le respect des anciens.

Après quelques années, l’État leur donne une subvention importante, 90 000 dollars, leur permettant, avec l’aide d’un système d’emprunt, l’achat d’un appartement en ville. Par exemple, à Rehovot, (ville de 114 000 habitants), un quartier, avec des maisons à quatre étages genre HLM, avait été construit pour recevoir les immigrants de Russie en particulier. C’est là que s’installent également les Juifs d’Éthiopie. Sur les 9 000 vivant à Rehovot actuellement, 4 500 sont dans ce quartier de Kyriat Moshe. Une habitante d’origine roumaine vivant dans ce quartier, rencontrée dans l’autobus, nous raconte que, à l’arrivée des Juifs d’Ethiopie, les Juifs de Russie ont peu à peu tous déménagé : la nourriture éthiopienne, en particulier l’endjara, ayant une odeur forte. Elle-même ferme ses fenêtres pour ne pas sentir l’odeur de la crêpe de ses voisins.

La vie normale commence : les écoles, la recherche de travail, les immigrants devant se prendre en charge. C’est à ce moment là que la misère à tous les niveaux s’installe souvent dans cette population.

Les villages de caravanes n’existent plus aujourd’hui. Ils sont remplacés par des centres d’intégration. Il y en a à Mevasseret, Naharya, Safed, Be’er Sheva... Un ensemble de maisons à deux étages où peuvent vivre plusieurs familles. Certains sont là depuis cinq ans, d’autres deux ans, d’autres huit mois ou même une semaine : les familles se regroupent. Ils quittent le centre dès qu’ils ont pu acheter un appartement dans l’une ou l’autre ville avec les dons ou prêts de l’État et l’argent qu’ils ont pu gagner. Le responsable du centre de Mevasseret est un Israélien d’origine éthiopienne, fonctionnaire de l’Agence Juive. Nous sommes reçues dans deux familles par la maman et une jeune pour nous traduire. Dans chaque salon, une télévision et souvent un magnétoscope permettant d’écouter des chanteurs éthiopiens ou de voir des danses et des théâtres à Addis-Abeba. Deux fois par jour, la radio israélienne propose un programme en amharique : bulletin d’information, .interviews, récits, messages des auditeurs et annonces. Beaucoup achètent des cassettes ou des vidéos en amharique dans des magasins spécialisés à Tel Aviv ou à Jérusalem. A cette musique éthiopienne s’ajoutent également des expressions de culture noire américaine. Dans ces centres, malgré de nombreux oulpans, les adultes parlent mal l’hébreu. En revanche les jeunes font très israéliens. Ils sont contents d’être en Israël.

Un échec ?

Plusieurs émissions de télévision ces derniers mois ont donné au public israélien une image catastrophique sinon désespérée de la situation actuelle de cette communauté : des jeunes sans travail ayant quitté l’école, de la délinquance, des suicides, des gens semblant perdus, du racisme. Pourtant les cas de réussite sont également nombreux. Le speaker de conclure : « Quand nous, les Juifs blancs, allons nous accueillir les Juifs noirs et leur donner leur place dans la société ? »

N’oublions pas pourtant que la pauvreté, la misère, la délinquance, la criminalité existent en Israël. On a simplement constaté que la proportion de cette misère est plus forte chez les Juifs d’Éthiopie. Par exemple, 25% des femmes tuées par leur mari sont éthiopiennes. Ceci n’existait pas en Éthiopie. Le chômage ? L’humiliation ? Le désespoir ?

L’intégration des Juifs d’Ethiopie serait-elle un échec ? Pourquoi cette méthode d’intégration rodée depuis tant d’années avec d’autres groupes d’immigrants d’Afrique du Nord, d’Europe, de Russie, semble-t-elle avoir échoué. Et si cet effort énorme de part et d’autre se solde par un échec, que faire ?


manifestation pour demander que les familles restées en Ethopie immigrent

La première réalité incontournable est que les Juifs de là-bas sont des Juifs noirs. Eux-mêmes ne s’en sont rendu compte qu’en arrivant et en découvrant des Juifs blancs. Ils ont une culture, des traditions, une ethnie très forte basée sur la religion juive de chez eux. Tout est différent et semble étrange. Ce ne sont pourtant pas des "primitifs", mais des "autres". Une autre manière d’interpréter et de vivre la Tora. Depuis leurs noms, leur nourriture, leur notion de pur et d’impur, leur système de valeurs, la vie sociale, les honneurs à rendre aux anciens, le rôle de l’homme et de la femme. Tout est très construit, très précis et influence tous les détails de la vie sociale. Sans parler de la langue amharique et de la nourriture à base de produits qu’il faut parfois faire venir d’Éthiopie.

Malgré toute la bonne volonté du ministère de l’Intégration, il a fallu constater un échec. Les plans préparés sérieusement pour les vagues d’immigration des années 1985 et 1991 comprenaient des projets précis au niveau de l’habitat, de l’éducation, du travail. Basés sur les expériences antérieures réussies ayant permis aux nouveaux immigrants d’entrer dans la société israélienne existante, ils n’ont pas pris en compte le côté unique de cette ethnie juive éthiopienne. D’où un échec apparent.
Actuellement, la situation se redresse lentement, grâce aux efforts d’une élite éthiopienne.

Les enfants et les jeunes

La moitié de la population éthiopienne en Israël a moins de 19 ans. Dans les écoles, ces enfants ont souvent un niveau inférieur à celui des autres élèves, et cela en particulier en mathématiques, en sciences, en anglais et en hébreu. Seul un tiers d’entre eux ont obtenu le bachot l’année dernière, alors que la moyenne est de 60%. Beaucoup abandonnent l’école. Certains sont placés dans des internats ou dans des écoles spécialisées à cause de leur incapacité à suivre des programmes normaux.

De plus en plus de chercheurs s’interrogent : Les Éthiopiens sont-ils "inférieurs" aux autres élèves juifs ? C’est ce qu’ils finissent par penser eux-mêmes, ces enfants noirs, étant également souvent humiliés par leurs camarades les traitant de noirs ou de nègres. Cette impression d’échec scolaire crée en eux un désespoir les poussant parfois au suicide. On a constaté dix fois plus de suicides chez les jeunes d’origine éthiopienne que chez les autres. - La délinquance s’installe, l’alcool et la drogue. Cette situation n’a fait qu’empirer jusqu’en 2004.

Pour essayer de comprendre les raisons profondes de cette situation, plusieurs organismes se sont mis en place. Citons en particulier l’Association Israélienne des Juifs d’Éthiopie.

Tout d’abord analyser les erreurs commises. La première est la désintégration de la famille éthiopienne.

Arnon Edelstein ayant étudié ce problème écrit : « Les erreurs commises dans les années cinquante pour l’intégration des Juifs marocains ont été répétées pour celle des Éthiopiens. Tout d’abord on a parqué cette population dans des tentes ou des caravanes. Puis on s’est concentré sur l’éducation et l’enseignement des enfants en négligeant les parents et grands-parents. Un fossé s’est alors établi entre les générations ». L’autorité n’était plus le père, mais le maître d’école. En effet le père, ne pouvant accéder à l’hébreu et restant étranger à la vie sociale israélienne avait perdu toute responsabilité et même toute valeur aux yeux des enfants. Ceux-ci avaient tendance à rejeter ce qui leur semblait "honteux", comme l’amharique ou les coutumes traditionnelles même culinaires... préférant les sandwichs. La deuxième erreur est d’avoir essayé d’abolir "l’éthiopanisme" considéré comme négatif au profit de "l’israélisme sioniste". Chose impossible menant à la mort lente de cette communauté. Casser cette ethnie c’était aussi appauvrir Israël d’une richesse humaine qu’ils possèdent et sont seuls à pouvoir transmettre.

Une nouvelle chance

En tenant compte de ces nouvelles données, de nombreuses associations éthiopiennes en collaboration avec des organismes gouvernementaux ont lancé depuis quelques années de nouveaux programmes permettant à cette population de surmonter ses difficultés et d’être partie prenante de la vie du pays.

Au niveau scolaire on s’est aperçu que l’échec scolaire provenait parfois d’une manière différente de percevoir certains sons. Par exemple, difficulté pour ces enfants de distinguer le "ts" du "z". Ce qui pouvait faire croire qu’ils étaient sourds ou retardés.

A côté des programmes de scolarité spécialisée ayant l’inconvénient d’isoler ces enfants, on essaye de mettre actuellement sur pied un programme d’heures supplémentaires avec un personnel qualifié donnant à ces enfants une aide adaptée à leur ethnie. Faut-il encore que le budget alloué à cet effet soit utilisé convenablement et non dévié.

Les résultats scolaires de cette communauté s’améliorent d’année en année. Beaucoup de ces jeunes sont dans des collèges ou institutions et obtiennent des diplômes leur permettant d’entrer dans le monde du travail professionnel. Ceci grâce également à un projet de l’E.N.P. (Ethiopian National Project) en collaboration avec le gouvernement. Un budget de 600 millions de dollars est prévu sur neuf ans. Dix associations éthiopiennes soutiennent ce projet.

L’opinion publique disant que les Éthiopiens ne réussissent pas à l’école est dépassée. Actuellement des centaines d’élèves éthiopiens sont parmi les meilleurs de leur classe. Certains jeunes essayent de se prendre en charge et de se stimuler mutuellement. Citons Eli, (18), ce jeune d’Ashdod qui fonda avec quinze autres jeunes éthiopiens l’association Noar Tesfa (l’espoir des jeunes). Tous viennent de familles pauvres et se battent contre l’opinion publique : « Vous êtes pauvres parce que vous n’avez pas réussi à l’école ». Shula Mola les soutient : « Des gens comme Eli sont peut-être rares, mais ce sont eux qui vont changer non les statistiques, mais la vie. Les jeunes éthiopiens sont pleins de capacité, d’espoir, de potentiel, comme les autres. Dire le contraire est injuste. Il ne suffit pas de blâmer la jeune génération ou les erreurs du système d’éducation. Il faut ensemble réparer et redresser ce qui a été abîmé. »

Cette année, 1 800 étudiants sont à l’université. Quelques uns sont déjà entrés dans le monde du travail comme professeurs, médecins, chirurgiens, avocats. D’autres travaillent dans les services publics, l’administration, les professions paramédicales et la sécurité. Une loi passée en juillet 2005 encourage les services publics à embaucher d’avantage de Juifs éthiopiens. Faut-il encore que la population soit à l’unisson de ce projet.

Les enfants doivent-ils choisir entre "l’éthiopanisme" et "l’israélisme" ? De plus en plus de voix se font entendre pour dire : non. L’un et l’autre font partie de leur identité, de leur vie, de leur valeur.

Pour cela le centre Bet Nehemia, à Jérusalem, a été créé pour permettre aux jeunes scolarisés de suivre des cours en amharique et d’apprendre à mieux connaître et honorer la culture et la civilisation éthiopiennes. Cela permet à ces jeunes de se valoriser, d’être fiers de leurs racines, de leur couleur même et, du coup, d’avoir davantage confiance en eux-mêmes. D’où une revalorisation des adultes de leurs familles, des parents, des anciens, du kes (prêtre éthiopien). Ce qui favorise, en fait, leur intégration dans le milieu israélien.

L’habitat

Sur les 105 000 Juifs éthiopiens, 30 000 sont nés dans le pays. Parce qu’ils ont les mêmes habitudes, la même vie sociale et qu’ils ont créé entre les familles tout un réseau d’entraide et d’associations humanitaires, ils préfèrent être groupés, même si dans l’immeuble, vivent aussi des familles "blanches". A Jérusalem, les Éthiopiens se retrouvent surtout dans les quartiers les moins chers.

L’aide gouvernementale pour le logement de la communauté éthiopienne a varié. En 1992 après l’opération Salomon, le gouvernement attribua une subvention variant entre 90 000 et 110 000$ par famille. 10% de cette somme était un prêt remboursable en plusieurs années. Cette somme permit aux familles de s’installer dans des villes où l’habitat n’était pas trop coûteux. En mars 2003, la politique du gouvernement changea. Il versa pour l’année un million de shekels pour l’ensemble des nouveaux immigrants d’Ethiopie. Puis en novembre, une nouvelle décision du gouvernement n’octroya plus que des prêts à rembourser chaque mois. Beaucoup furent obligés de rester au centre d’intégration. En fin 2004, l’Etat accorda de nouveau une somme importante pour l’achat d’un appartement, mais uniquement aux plus nécessiteux, par exemple aux couples avec enfants. J’ai vérifié cela lorsqu’en rencontrant un gardien de sécurité d’une banque et lui demandant pourquoi il était toujours au centre de Mevasseret après cinq ans, il m’a répondu : « Je suis divorcé. Seuls les couples avec enfants ont droit à cette aide. »

En décembre 2004 on comptait 13 000 Juifs d’Éthiopie à Natanya, 10 000 à Ashdod, 5 800 à Rehovot (actuellement 9 000), 7 900 à Be’er Sheva, 4 586 à Ashkelon, 5 000 à Hadera, 2 289 à Haïfa, 2 500 à Jérusalem. Malgré une nette amélioration de la situation, les problèmes économiques de chaque famille sont loin d’être résolus : chômage, salaires dérisoires, emprunts à rembourser, familles très nombreuses (13 personnes) dans des logements petits (3 pièces).

Le travail

L’emploi demeure l’une des questions les plus préoccupantes pour les Juifs éthiopiens, en raison souvent de l’insuffisance de leurs qualifications professionnelles et de leur hébreu limité. La plupart des adultes occupe encore des emplois sous-qualifiés et peu rémunérés dans des secteurs d’activité diversifiés : industrie, gardiennage, nettoyage, service pénitentiaires, exploitations forestières, bâtiment. En plus de cela, le taux de chômage est important, surtout chez les hommes de plus de quarante ans. De nombreuses familles restent toutefois en situation de dépendance institutionnelle et vivent de prestations familiales, d’indemnités de chômage et de retraite comme tous les autres citoyens.

Les Éthiopiens acceptent d’être embauchés à n’importe quel prix par des agences intérimaires qui profitent souvent d’eux, les payant à des prix dérisoires et sous évaluant souvent leurs heures de travail. Pour aider cette communauté à faire valoir ses droits, un bureau a été créé dans la zone industrielle de Rehovot : « Tebeka ». Là, un avocat éthiopien, Yitzhak Dessir, aide les ouvriers temporaires éthiopiens à défendre leurs droits. Même s’ils sont toujours souriants, gentils et obéissants, ils souffrent de cette situation : « Nous nous attendions à être mieux traités par nos frères. Nous ne sommes pas des ouvriers étrangers que l’on exploite. Nous sommes des Juifs israéliens. »

Comme nous l’avons déjà dit, de plus en plus d’Éthiopiens entrent dans le monde du travail spécialisé, indépendant. Par exemple des chauffeurs d’autobus, des agents de sécurité spécialisés. Des magasins éthiopiens s’ouvrent, vendant les produits du pays apportés par des "voyageurs", qui vont là-bas et reviennent : des vêtements, divers objets, de la nourriture de base, des cassettes et vidéocassettes. Trois restaurants éthiopiens au centre ville à Jérusalem où l’on mange éthiopien, servis par des patrons éthiopiens avec des Éthiopiens. Il y a aussi un salon de coiffure et cosmétique, et au marché une échoppede produits alimentaires éthiopiens.

En quittant la rue, on découvre des théâtres éthiopiens, une troupe qui se déplace de ville en ville. Il y a aussi une conteuse qui fait des spectacles monologues pour parler de femme à femme. Là s’exprime aussi bien le caractère ethnique que veut transmettre ce théâtre avec sa musique, que les problèmes humains universels. Seulement, lorsque l’acteur te regarde, tu sais que tout est là, en lui : son pays d’origine, sa culture, ses drames, son immigration, sa joie d’être "à la maison" et sa souffrance : le racisme rencontré trop souvent encore à tous les croisements de sa vie, depuis l’école, les agences d’emploi, le monsieur-tout-le-monde qui le voit "noir".

Comme nous l’avons déjà dit, il y a de plus en plus de Juifs d’Éthiopie ayant un niveau académique. Et, à ce niveau là, les différences ethniques s’estompent et les mariages inter-ethnie sont possibles. Citons simplement cet universitaire éthiopien travaillant au ministère des Affaires Étrangères ayant épousé une Juive d’origine allemande, et qui vient d’être nommé ambassadeur d’Israël en Éthiopie.

Mais la communauté éthiopienne ne se contente pas de la réussite de quelques uns. La presse éthiopienne pousse les parents à chercher du travail avec persévéranceet à inciter leurs enfants à faire des études. Les associations éthiopiennes encouragent toute la communauté, des plus pauvres aux plus riches, à se prendre en main et à devenir autonome. Citons encore une fois Shula Mola : « Nous découvrons de plus en plus que notre misère n’est pas à mettre uniquement sur le compte des organismes gouvernementaux d’intégration. A nous de reprendre espoir et de réaliser que nous pouvons sortir de cette misère en collaborant activement avec les autorités. »

L’armée

Pour ces Éthiopiens, l’armée est le lieu où ils peuvent vivre pleinement leur identité de Juifs israéliens, au coude à coude avec tous, quelle que soit leur origine. 36% des soldats éthiopiens choisissent de servir dans des unités de combat, en première ligne. Parmi eux, des officiers. En octobre 2000, Yossi Tabaya, 27 ans, fut l’une des premières victimes de la seconde Intifada. Il y a quelques semaines, c’est Natan Sandelke qui fut tué à Gaza. Pour la communauté éthiopienne ces morts ou blessés de l’armée sont des signes douloureux leur permettant d’exprimer dans leur chair leur idéal sioniste et leur participation intégrale au destin de leur peuple. Porter l’uniforme, revenir à la maison avec son fusil, quel défi à ceux qui doutent de leur intégration !

C’est sûr, pourtant, que cette période de l’Intifada, (et ce sera pareil pour l’après- guerre du Liban), a été une catastrophe économique pour le pays, pour les pauvres en particulier. Le gouvernement, très préoccupé par les problèmes de sécurité, n’a plus prêté suffisamment attention à cette communauté souvent au bord du désespoir. C’est peut-être le moment de rappeler que des associations non gouvernementales se sont alors mobilisées pour porter de l’aide, ici où là. Sans compter les "amis" que les Éthiopiens ont souvent rencontrés sur leur route.

La politique

Contrairement aux nouveaux immigrants de l’ex-URSS qui ont créé leur parti, les Éthiopiens israéliens se sont simplement joints aux partis existants, en général le Likoud ou les partis religieux. En 1996, Addisu Messale, l’un des leaders du mouvement de protestation contre le racisme, fut élu député à la Knesset dans le parti travailliste. D’autres Éthiopiens occupent des postes comme : conseiller municipal (à Rehovot), conseillers ministériels, employés d’agences gouvernementales, travailleurs sociaux, etc.

Aux dernières élections (2006), aucun candidat éthiopien n’est entré à la Knesset. Plusieurs étaient pourtant sur les listes électorales. Citons le rabbin éthiopien de Be’er Sheva, Mazor Bayana, responsable de la communauté éthiopienne de sa ville (10 000) après avoir étudié dans une école talmudique sépharade. Il était le treizième sur la liste du parti Shass qui n’a obtenu que douze sièges. Dans le parti Kadima, il y avait aussi un candidat éthiopien, qui n’a pas été élu. Comme le disait la presse éthiopienne, ce sera pour la prochaine fois.

Le kes et les anciens En Éthiopie, les kessim (prêtres) avaient une place importante dans la vie de la société. Ils détenaient la sagesse divine. En Israël, les rabbins orthodoxes ont souvent pris leurs places, voulant faire entrer la communauté dans la religion juive orthodoxe pratiquée ici. Actuellement des tensions subsistent entre ces deux autorités religieuses, les kessim étant souvent mis à part. Rien n’est encore vraiment résolu. C’est un sujet de conflit dans la communauté entre les jeunes, soutenant les rabbins, et les plus âgés soutenant les kessim.

La fonction de kes existe pourtant toujours. Un jeune, Samaï Elias, ayant fait des études de sociologie vient d’être ordonné kes. Il est aussi rabbin, par ailleurs. Mais comment poursuivre ? Tout d’abord maintenir l’unité entre les jeunes et les anciens qui, même analphabètes, restent les piliers sans lesquels la communauté risque de basculer. Etant à Rehovot et désirant rencontrer Barouch Tegegne, je m’adresse à des anciens assis près de la poste du quartier Kyriat Moshe, L’un d’entre eux qui semble le connaître me conduit au centre d’intégration. Plusieurs bureaux, un personnel éthiopien, et une porte fermée, celle du directeur. L’ancien parle aux employées, puis au directeur David, et me fait entrer. Dans ce cas, c’était bien l’ancien qui avait l’autorité sur ce jeune directeur professionnel qui, autrement, ne m’aurait jamais fait entrer.

Les kessim, actuellement, se rendent compte de leur responsabilité sociale aussi bien sur les jeunes que sur la vie économique de la communauté. Le kes Yosef Manasse, dans l’une de leurs revues, demande à tous les kessim et aux anciens de "se réveiller". « Il nous faut arrêter d’être passifs, de renoncer à notre rôle dans la société. Ce sont nous, les kessim, qui sommes le plus à même de redresser la situation et d’aider nos jeunes à trouver leur identité et à construire leur avenir. Il nous faut les visiter, les écouter, à l’école, à la maison, à la prison et à l’armée. C’est nous qui pouvons le mieux les comprendre. » Pour la vie économique de la communauté, certains kessim voudraient réduire les frais énormes occasionnés par les nombreuses fêtes, bar-mitzva, mariages, enterrements. - « En Éthiopie, nos fêtes étaient simples, et nous n’invitions que les amis et parents du village. Ici, nous invitons jusqu’à mille personnes venant de tout Israël. Comment réduire les frais sans affaiblir les liens communautaires ? »

L’office du shabbat est souvent un lieu de litige, à l’entrée des synagogues. Les jeunes voudraient des offices orthodoxes en hébreu que leur proposent les rabbins. Les vieux s’en tiennent à leurs traditions éthiopiennes. A Natanya, dans le quartier de Kyriat Nordau où habite une partie de la communauté éthiopienne de cette ville, le kes Amahe Neget a trouvé le moyen de donner à chacun sa place. Le shabbat, il arrive à la synagogue à trois heures et demi du matin. A cinq heures, il célèbre l’office en amharique pour les plus âgés, après avoir lu les textes en guez. Puis, de sept heures à onze heures, la prière est en hébreu, pour les jeunes. Mais, en fait, tous restent jusqu’à la fin.

De plus en plus, à tous les niveaux, l’intégrations des Juifs originaires d’Éthiopie prend un nouveau tournant : les aider à être eux-mêmes et fiers de l’être. Un nouveau projet a été lancé à Rehovot par l’association Tomer créée par des anciens, des hommes de soixante-dix à quatre-vingts ans : construire un musée éthiopien où tout un chacun pourra venir découvrir la civilisation de ce pays, d’où est originaire une partie de la population israélienne. Reconstruire, à côté du musée, un village éthiopien, avec ses cultures, son artisanat... Ce projet a été accepté avec enthousiasme par le conseil municipal de la ville... qui attend simplement les finances pour le réaliser.
Ethiopiens juifs en Israel
18 mars 2009, 14:28
Ethiopiens juifs en Israel



Autres liens :

[www.ina.fr]Noirs et Juifs Reportage d'Alexandre Arcady Pour Envoye Special 14 octobre 1993

[fr.wikipedia.org] Falashas Par Wikipedia

Diaporama Photos Falashas en Israel

L'histoire des Juifs Ethiopiens
Ethiopiens juifs en Israel
19 mai 2009, 07:16
“L’Alya des Juifs d’Ethiopie fait partie de l’histoire d’Israël” - Par Claire Dana-Picard - Pour Actu.co.il - 19 mai 2009

Trente ans après la première alya des Juifs d’Ethiopie, il serait temps que le récit de leur immigration en Israël figure dans les livres d’histoire. C’est ce qu’estiment, à juste titre, les membres influents de cette communauté et c’est pour cette raison qu’ils se sont tournés vers le ministère de l’Education pour présenter une demande en bonne et due forme.

Dans une lettre adressée au nouveau ministre Guideon Saar (Likoud), ils ont écrit notamment: “Les Juifs d’Ethiopie ont payé très cher l’accomplissement de leur idéal sioniste: certains ont été assassinés, dépouillés, enfermés dans des camps alors qu’ils étaient en route pour Israël, et malgré cela, après une trentaine d’années, leur épopée n’est toujours pas relatée dans les ouvrages scolaires”.

Cette demande a été présentée par l’organisation Tebeka à quelques jours de la commémoration officielle en souvenir de 4000 olim d’Ethiopie qui ont péri en chemin vers Israël. Tebeka est une association créée en 1999, dont le nom signifie “rendre justice” en amharique. Elle est dirigée par des juristes et des avocats originaires pour la plupart d’Ethiopie. Elle œuvre notamment pour promouvoir le statut de cette communauté et prodiguer à ses membres une assistance juridique. C’est la seule organisation qui lutte pour faire respecter les droits des Olim d’Ethiopie.

L’association demande également que ce récit douloureux figure sur le site de la Knesset. Elle précise que la montée en Israël de ces immigrants, avec toutes les épreuves qu’ils ont endurées, ne doit pas tomber dans l’oubli. Elle a rappelé que “des jeunes, des adultes, et des personnes âgées ont pris part à ce long voyage plein d’embûches qui a fait de nombreuses victimes dont certaines ont été assassinées alors que d’autres sont décédées, dans des camps de transit du Soudan, de maladies infectieuses après la consommation d’aliments avariés”.

Le président de l’association Tebeka, Itsik Dassa, a précisé que presque chaque famille avait perdu un proche parent lors de ce long voyage vers Israël. Il a remercié le gouvernement israélien pour cette journée du souvenir pour les victimes mais a déploré le fait que jusqu’à présent, il n’ait pas jugé nécessaire d’introduire ces récits dans les livres d’histoire. Une erreur qui sera, on l’espère, bientôt réparée.
Ethiopiens juifs en Israel
24 mai 2009, 09:38
L'opération Moïse dans les programmes scolaires - Par RUTH EGLASH - Pour Jerusalem Post en francais - 22 mai 2009

L'association sociale à but non lucratif Tebeka ("les défenseurs de la justice" en amharique) aimerait que l'histoire des Juifs éthiopiens s'intègre à part entière dans la culture israélienne.



De nouveaux immigrants juifs éthiopiens arrivent en Israël.

Jeudi matin, une cérémonie a eu lieu au cimetière du mont Herzl à Jérusalem pour commémorer les Juifs éthiopiens morts lors leur périple en Israël.

Même si Tebeka apprécie ce geste, l'association regrette le peu d'efforts du gouvernement pour intégrer ce type d'événement dans la conscience nationale.

Plus de 4 000 Juifs éthiopiens auraient péri durant l'opération Moïse qui a eu lieu entre 1984 et 1985.

Itzhak Desse, directeur de Tebeka, se dit très déçu qu'"après 30 ans d'aliya continue depuis l'Ethiopie, les tentatives de raconter notre histoire ou de l'intégrer dans le programme éducatif soient si rares".

La plupart des Israéliens ne savent presque rien de cette communauté de 110 000 âmes, de leur histoire et de la manière dont ils ont dû se battre pour arriver en Israël par le Soudan au début des années 1980 et lors de l'opération Salomon en 1991.

Pourtant, "l'histoire de notre communauté a aidé à enrichir l'Etat d'Israël moderne", estime David Mahret, directeur d'un programme visant à intégrer la culture éthiopienne dans le système éducatif (www.kidum-edu.org.il).

Apprendre l'histoire et les traditions des Juifs d'Ethiopie contribuerait à changer la perception que les Israéliens ont d'eux, d'après Mahret : "Notre communauté est souvent considérée pauvre ou faible par les Israéliens mais plus ils en savent sur notre passé ou nos coutumes, plus ils réalisent que nous avons beaucoup à leur offrir."

Le ministère de l'Education a assuré n'avoir reçu aucune demande de Tebeka. Il a pourtant assuré que dès l'an prochain, des chapitres de l'histoire éthiopienne seraient ajoutés à la section du multiculturalisme et à la contribution des immigrants au melting-pot israélien.

"Nous étudions en particulier l'impact des immigrants de l'ancienne Union soviétique et d'Ethiopie sur la société israélienne", a affirmé le ministère.
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