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Tunisie : un 14 Juillet chez l'ambassadeur de France

 

 

Tunisie : un 14 Juillet chez l'ambassadeur de France

Rituel républicain et petit théâtre binational, la fête nationale se déroulait à la résidence de l'ambassadeur à La Marsa. 3 000 invités y jouaient des coudes.

 

Par notre correspondant à Tunis, 

Ambiance de Festival de Cannes à l'extérieur de la Garden Party marsoise. Une imposante file d'invités patiente sur le pavé avant de passer les contrôles de sécurité. Belles robes, costumes, un air de fête dans cette localité huppée de la banlieue nord de Tunis. Ne manque que le tapis rouge. Attentat de Sousse oblige, état d'urgence faisant loi, les forces de l'ordre tunisiennes ont « bunkerisé » le périmètre. Rues bloquées, multiples filtrages, ninjas avec fusil mitrailleur. En 2014, une petite phrase de François Hollande sur « le droit d'Israël à se défendre » avait valu une sorte de boycott à la réception de l'ambassadeur de France en Tunisie. Certains Tunisiens avaient alors fait savoir, via Facebook, qu'ils avaient déchiré leur carton d'invitation. Hier soir, c'était oublié. Les déchireurs de bristol - en fait une invitation envoyée en « pdf » via diplomatie.fr - se sont pressés autour de la myriade de buffets.

19 heures, c'est parti...

Dès 19 heures, on débouche le champagne dans les vastes jardins de cette résidence à portée de front de mer. Économie budgétaire de rigueur, une solide trentaine de sponsors financent l'opération séduction. Citroën a installé une de ses voitures sur un promontoire, palanquin promotionnel posé sur la verdure. Un viticulteur fait une dégustation de ses blancs, rouges, rosés. Un marchand de macarons (bleu, blanc, rouge) côtoie un chocolatier. C'est Disneyland en république tricolore. Quelques cochonnailles remportent un franc succès. La bourgeoisie tunisoise fraye avec l'internationale diplomatique, du Japon à l'Italie en passant par l'Angleterre. On s'échange des points de vue sur la situation du pays, des cartes de visite, quelques conseils d'hôtels sympas dans le pays. Une gigantesque kermesse pour VIP. Les inimitiés n'ont pas cours. On s'évite, on slalome pour ne pas rencontrer tel ou tel. Si, côté cour, la France reçoit, côté coulisses, on s'entretient en privé. En effet, le 14 Juillet relève à la fois de la représentation stricto sensu, d'un signe lancé aux expatriés français, et d'une diplomatie active.

Un baromètre des relations franco-tunisiennes

Prévu pour 21 heures, le discours de « l'amba », ainsi dit-on dans les chancelleries, a pris du retard. Le pupitre, encadré de drapeaux, est prêt. On attend les invités de prestige, l'exécutif. Au premier rang desquels : Habib Essid. Le chef du gouvernement tunisien accompagne François Gouyette lors de son discours. Les liens « d'amitiés » et de « soutiens » sont soulignés par les deux hommes. Façon de calmer le jeu dans un contexte compliqué à la suite de l'annonce faite par les autorités britanniques demandant à leurs ressortissants de quitter le pays dans les plus brefs délais. La France n'a, elle, en rien modifié ses recommandations sur la destination Tunisie, malgré les 38 morts de l'Imperial Marhaba de Sousse. L'ambassadeur Gouyette rempile pour une quatrième année à Tunis (au lieu de trois années), preuve que le Quai d'Orsay a fait de ce pays une priorité. Et le guette comme le lait sur le feu. Cet arabisant distingué, élégant aux cheveux poivre et sel, est un expert du monde arabe.

L'ambassadeur Gouyette reste, un signal fort

Les crises que traverse la Tunisie (économique, sécuritaire, sociale, identitaire) méritent un spécialiste. L'homme reste donc en poste malgré les rumeurs distillées par de pseudos initiés. Sur la pelouse impeccablement taillée, on croisait d'anciens ministres islamistes, des partisans du président Essebsi, des journalistes, des représentants des chancelleries voisines, l'Union européenne, des jeunes filles en mini-jupes… À minuit, il y avait foule sur le dancefloor improvisé sur les pierres antiques. Malgré un climat pesant lié au terrorisme, chacun fut satisfait. Et ce succès de fréquentation, 3 000 personnes sur 8 000 invitations lancées, est à sa manière un baromètre des relations entre les deux pays. La cuvée 2015 du 14 Juillet a fait plaisir au personnel de la résidence. Ces Tunisiens y voient un signal rassurant. Les services de sécurité respirent. À l'extérieur, retour au monde réel. Klaxons, embouteillages nocturnes liés au rythme ramadanesque, regards interdits de certains Tunisiens sur cette faune en tenue de soirée. Le microcosme réintègre ses foyers. Rendez-vous en 2016. Même heure, même lieu.

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