D’abord faut savoir qu’il y a des tunes qui ne sont pas des vrais tunes mais qui sont très forts quand même. Des tunes qui portent un vrai nom breton et qui dans leur récit n’emploient pas une seule fois le mot brick-à-l’œuf ou le mot boukha, parce que finalement à la longue ça peut devenir indigeste. Qui, munis de leur bagage de philosophe et de leur chargement d’études s’engagent sur les chantiers navals, triment comme des fous, se lèvent très tôt le matin, picolent et tirent des tracts biens engagés qui leur valent de passer en jugement et en prison.

Ces tunes-là ils aiment leur père et leurs rêves, ceux qui en leur temps ont épousé la Cause et y sont restés fidèles avec les copains de la chorale et leur voix qui, lorsqu’elle entonnait le chant de Bar-Yohaï faisait vibrer les murs de leur HLM de banlieue.

Faut lire d’une seule traite le récit de Michel Arbatz intitulé « Le maître de l’oubli » publié chez  « Le temps qu’il fait », parce que son vrai nom tune est autre bien que son écriture soit proche de celle d’un Louis-Ferdinand Céline que je n’ai jamais lu parce que mais j’en suis presque sûr bien que lui, Céline, n’ait jamais été poète et musicien et metteur en scène contrairement à.

Temps de lecture environ un à deux jours selon car dès qu’il annonce qu’il a « suivi à la trace » son père ce « vieil Hébreu » jusqu’au moment où il sait qu’il partira en « grandes pompes, même humblement » soit quelques cent quatre vingts pages plus tard, le temps et l’Histoire défilent en grande verve et en immense plaisir pour la plus grande satisfaction du lecteur.

Bernard Sberro