LES MEMOIRES D’UN GOULETTOIS
L’ENFANT DE LA GOULETTE
PAR ALBERT SIMEONI(BEBERT)

Témoin de mon temps, je me dois de raconter ce que j’ai vu, entendu ….Sans jamais jeter la pierre sur personne car j’estime qu’il serait de ma part indécent de critiquer ou de juger les comportements des autres. D’autre part ‘Cacher les rayons du soleil avec un tamis serait une sorte d’hypocrisie de mauvais aloi…



18/06/89 6/04/2001


Y’avait ceux qui avançaient et ceux qui aimaient reculer. Ceux qui offraient et ceux qui prenaient..bref…..Je veux nommer-les…

‘..PLAISIRS INTERDITS .’


Une société qui se respecte à ses fous, ses simplets, ses sérieux, et ses ‘Touyèbouts’ (Pèdés). Qu’ils soient Juifs, musulmans ou catholiques, ‘ces nominès’ interdits( les Touyibouts) par la morale se cambraient plus pour ‘un bon totem rigide’que devant des icônes pieuses.
Les discrets pratiquaient ‘leurs amours’ en secret. Du moins le croyaient t’ils. ?
Les autres, peu nombreux s’affichaient, étalaient leurs manières efféminées au vu et su de la population goulettoise qui les respectait tout en les critiquant ‘par derrière’.
J…Fillette (tailleur mixte) dit aussi ‘La Banane’, était peu regardant sur la qualité et la nature de ce fruit, de ces attributs en genre et en nombre. Une vraie ‘fourre-tout’-une boite à aiguille à tricoter. Il avait ce vice de ‘dépuceler, les jeunes qui ne pouvaient se payer ‘Abdeleguech ‘ (Bordel tunisois) et aussi rendre service à ses habituès. Entre un coup de ciseaux ou une reprise d’ourlet, notre ami s’offrait ‘une saut-rette ‘ (petite gourmandise ou sauterie) Il se passait des identités et des visages. Il aimait tout le monde. Une machine ‘Singer ‘à coudre, enfiler et refiler’.
Petite sèance de mensuration…..
Il prend des mesures pour la confection d’un pantalon au jeune…Ali Ouaki..
‘Attends…bon…1,m22 …tu le veux évasé ..Charleston..
Pattes d’éléphant. ?’.
‘Comme tu veux… ?’
Lui ‘Serré du côté des fesses... ?
‘Comme tu veux..?’
Il arrive à l’intersection des jambes..A hauteur des ‘pendules.’
‘Ah…elles sont pleines.. Tu ne veux pas…. ?’
‘Comme tu veux..?’
‘La Banane’…lâche tout mètre ; ruban, dès, aiguilles et tout le bazar. Vidange. Comme un pompiste. Dur métier pompiste et ‘tailleur’ de pipe à la fois. Et même si elles étaient vides, il s’arrangeait pour les remplir.

Carioca et Ginette, nos deux gloires nationales, offraient leur service ‘bonniche’ à une certaine Mme Marie, épouse de Kiki Lelouche dit ‘Yagoubè ‘, chevillard et palefrenier du bey, père de Roger Lellouche.
Nos deux ‘folles’ se travestissaient sans honte et pudeur. Bien en avance sur leur temps.
Entre deux repassages..
Ginette……….’ Dis moi touaaah…bèèèch nakit èl rich ..de tes jambes.. ?
(‘...Avec quoi tu a épilé les plumes (duvets) de tes….. ?
Carioca assise, les jambes ouvertes , se limant les ongles ..
’Ma nakitch , elles sont naturellement imberbes ‘
Ginette……..’Naturellement.. ? Aaaah ! ..bon..yalaadaa…le lavabo est plein de hchich… ?’
‘…C’est pour cela …………d’herbes, poils)
Carioca………’Hchich ta zabou...i…élli yakèl èl bouri….. !’
(‘Les poils de ma ch…….qui se nourrit de mulet…’
Ginette………’Tu ne changeras jamais …basse vulgaire…’
Carioca…….’ Jalouse……Môôôôôoôriara…..depuis que tu es maksoufà…’
(‘Jalouse……………………………petite.)
Ginette………’Yèkséf chibek….amin….nous ne sommes pas du même bord..’
‘Que ta vie raccourcisse…Amen…..’)
Carioca……’Touaaah….tu es du bord….elle de la plage…’
Ginette………’Si nous n’étions pas de service …..natik triha ….ya fèchdé…’
(‘Je te donne une raclèe…pourrie’)


Les goulettois, outrés au début, s’habituèrent bien vite à nos ‘Coccinelles’. Il faut reconnaître qu’elles étaient gentilles, aimables…Comme des femmes.’Coccinelle’, s’est faite opérer, à Paris, il y a fort longtemps.
Roger Lelou, son nom d’artiste, étais le plus ‘beau’ de toutes ces ‘pédales douces’. Beaucoup de tenue, rigueur, fierté et surtout professionnalisme dans ses ‘women-show qu’il donnait à l’Hacienda ou dans divers galas. Fils unique, il fût très entouré par les siens et ‘siennes ‘ (les deux tapettes d’en haut).
Son cœur était bien plus fidèle que les fesses de certaines. Il aimait pour aimer et ‘son corps bronzé couleur caramel-gauffrettes’vêtu d’un petit slip sur la plage avait de quoi réveiller les jalousies des femmes.
Bien compréhensible. Sa hantise.. ? Vieillir. Il en étais à son troisième lifting de mon temps. Depuis.. ? Sympathique et généreux quand il était amoureux, mon ami Roger vit à Paris. Intacte. Je l’ai aperçu, lors d’un mariage. Quelques rides sont apparues du côté des yeux et de la commissure des lèvres. Rien de méchant.
Conversations entendues autour d’une piscine à Hamilcar ‘T.Barka.la’.
(Essayer de parler en accentuant les terminaisons, grassement).
‘Ya kahbâââ…tu m’as volé mon Juloôôô ….Hein … ?’
Elle d’un geste de la main, repoussant..
‘Tu n’as pas su le retenir…’
La première………’Je te souhaite la môôôrt....’
‘Tu vas à ma place ..Ameeen.’
La première se lève en se dandinant pour la frapper. Les ‘autresses ‘ s’interposent..
‘Oh ! là..là..là.. Espèces de vulgs que vous êtes, tout le temps à nous faire honte, iiiiciii..en public..’
La première fâchée lève ses affaires…elle les toise.
‘Bon…je ne reste paaas…vous êtes des saaalopes ’
‘ Mèlééééh…c’est ça ..et toi tu es quouahhhhh . ?
Elle revient et pointe le doigt sur l’une d’elle…….
‘ Tu te rappelles, le mois dèrnier quand tu pleurais comme une naynaaa…et bien ce soir là, tu sais avec qui il était ma chèryiiii..ton Hamadi.. ?
Une troisième s’interpose…..’ Euchkètt….(Tais toi.)... ?’
‘Non…louuu…je ne me tais paaas…avec Loulououou…’(Loulou)
Loulou se lève pour fuir..
‘Attends touaaah, espèces de tapeeette…tu couchais avec mon mari …par derrière mouahhhh… ?
Elle se lève aussi pour aller frapper…..Remue ménage général…
La sécurité de l’hôtel arrive….
‘Messieurs…. Ecoutez… !’
‘D’abord..Mesdames ..Un peu de respect…et c’est touaaah qui nous écoutes, sinon on ne revient plus…. Tiens voilà pour toi….’
Elle lui tend deux dinars…le prix de la sécurité, de la tranquillité et du scandale.
Pas cher .

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