Il est étonnant de voir a quel point un petit incident peut réveiller en nous des souvenirs lointains et nous ramener a noter enfance. Voici mon histoire.

     Cela se passa durant mon long séjour en Inde comme directeur des deux écoles de l'ORT à Bombay. Ma femme qui était prof d'hébreu et d'instruction religieuse organisait touts les ans les Sedarimes de  Pessah pour les élèves des deux écoles (filles et garçons). Durant la lecture de la Haggadah, je m'aperçois que plusieurs d'entre eux se mirent à rire tout en pointant du doigt à quelque chose qui se passait derrière mon dos, Me retournant, je vois que mon fils âgé de trois ans poussait d'une main un œuf dur à sa bouche et tenait un deuxième dans l'autre.

     Click, ce tableau me ramena simplement à mon enfance durant les mêmes veilles de Pessah que nous célébrions en commun avec quatre ou cinq familles de déracinés Algériens qui étaient installés à Hammam-lif. Ne pouvant pas attendre pour le Msoki on volait  un ou deux œufs pour tenir le coup.

     Ce petit souvenir ramena un autre qui donna naissance à la légende que voici… En attendant que tout le monde arrive, il était d'usage pour les pères de familles de raconter des souvenirs de leur passé. Moi, je me rappelle bien d'un incident que mon père lui aussi Algérien raconta à l'une de ces veilles. C'était la veille de Pessah 1918 ou 19 attendant sa démobilisation à Tunis. La suite dans un moment. Entretemps, en 1961 je me trouvai moi comme soldat en Algérie. Une semaine avant Pessah un Aumônier Juif était venu me voir et m'informa qu'il avait arrangé pour que je puisse avoir touts mes repas chez la famille Benadi de Mascara à laquelle je réitère ici mes remerciements pour bonté.

     Voilà on arrive à la légende. Tout se déroula comme il le fallait. Le Seder était suivi d'un repas doublement apprécié à comparer avec ce que j'aurais mangé à la caserne. Après le dessert et birkat hamazone, un voisin frappe à la porte et entre. Il se présente et me demande mon nom et d’où je viens. Quant il entendant Guedj de Tunisie, il nous dit tiens ce nom me rappelle quelque chose et il continue… " à la fin de la guerre. J'étais posté à Tunis attendant ma démobilisation et avec moi se trouvé un autre soldat Juif Algérien. Un jour avant Pessah nous deux sommes allés demander de notre commandant la permission d'aller à une synagogue pour essayer de nous faire inviter par une famille Juive… Permission refusée. Après l'avoir maudit, nous avons pris la décision de faire le mur coute que coute. Il continue… a la tombée de la nuit, mon camarade et moi mettons notre plan à exécution. On grimpe le mur et…" là je l'arrête et continue à sa place… "Vous sautez de l'autre coté du mur et aussitôt que vous touchez terre, la garde et le commandant vous sautent dessus et vous jette à la prison ".

     Il fallait voir sa réaction. Il me demande comment savez-vous çà? Je lui réponds… votre camarade s'appelait Bibi?  Et Bien Bibi est mon père et cette histoire il nous l'avait racontée à plusieurs  veilles de Pessah.

     Voilà un récit pour Pessah.  43 ans après, le fils rencontre le deuxième acolyte à la même date du calendrier Israelite jour pour jour et ferme la boucle.