Humour plus que douteux
Dieudonné vomit sa haine au Zénith
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Pour la dernière de son spectacle, devant cinq mille spectateurs
> survoltés, « l'humoriste » a fait d'Israël et des juifs sa principale
> cible.
>
> Dieudonné a réussi son double pari : remplir le Zénith de Paris pour la
> dernière parisienne de son spectacle « mes Excuses » avant de partir en
> tournée en Province et en Belgique. Et transformer la soirée en meeting
> politique anti sioniste durant lequel les noms de nombreuses
> personnalités juives ont été copieusement sifflées et huées par la foule.
> « Je m'excuse, à Peuple élu... ! », c'est sur le ton de l'ironie que
> l'artiste débute son one man show en forme de long plaidoyer. Deux
> heures durant, il revient sur le sketch du juif orthodoxe faisant le
> salut nazi, diffusé sur France 3 en décembre 2003 lors de l'émission «
> On ne peut pas plaire à tout le monde », et qui avait suscité le
> scandale que l'on sait. « J'ai bien senti qu'il y avait comme un
> malaise » raconte-t-il hilare face au public, « Fogiel a fait sa petite
> chatte, il a eu une descente d'organes». Rires dans la salle, les cinq
> mille spectateurs conspuent l'animateur, Dieudonné poursuit : « Dans ce
> pays, dès que tu parles un peu d'Israël, tu as intérêt à t'accrocher. Tu
> mets les pieds dans une zone interdite, parce qu'on est en France, parce
> que il y a eu la guerre, parce qu'il y a eu .... ( Il feint une
> hésitation ) parce qu'il y a eu... la Shoah ! » Il prononce le mot en
> chuchotant et se retourne en jetant des regards inquiets. « Je regarde
> toujours par derrière, car les sionistes c'est toujours dans le dos
> qu'ils t'attaquent ». Toujours ironique, le comique raconte la campagne
> de boycottage dont il a fait l'objet: « j'ai compris que j'avais fait
> une grave erreur. Dans ce pays, si un artiste veut réussir, s'il veut
> être diffusé dans la grande distribution, il doit faire du Bruel... » ( A
> nouveau les cris, les huées ), vous savez, Maurice, celui qui a changé de
> nom. Remarquez, c'est son problème ». Dès qu'une personnalité juive est
> citée, le public démarre au quart de tour. Il faut dire que Dieudonné
> chauffe la salle : « BHL, ce philosophe milliardaire ! Ses milliards, il
> les a gagnés dans le commerce du bois précieux africain. Sur place les
> gens n'ont plus de bois ni de milliards. Il leur a tout volé ». A propos
> de l'ostracisme dont il serait la victime : « Je suis interdit de
> télévision. Ardisson me l'a confirmé. Maintenant, c'est BHL ,
> Finkielkraut et Bénichou qui parlent à ma place ». Les personnages
> imaginaires, qui apparaissent sur scène au fil des sketchs, n'échappent
> pas aux fantasmes de l'humoriste. Ainsi, l'infirmière blanche,
> catholique et raciste terrorisée par l'invasion des noirs dans les
> hôpitaux : « Je n'avais qu'un seul blanc dans mon service,
le Pr Blumenthal, il me comprenait... ». Autre personnage campé par Dieudonné,
> le Pr Goldinekraut ( rires dans la salle) , intellectuel participant à un
> débat télévisé : « Ce soir, je ne m'exprimerai pas en tant que
> juif-pratiquant-laïc-athée ( les rires repartent de plus belle) ..., mais
> en tant que citoyen français traînant derrière lui 100.000 ans, que
> dis-je! 200.000 ans de douleur et de persécutions et de pogroms ( tout le
> Zénith s'esclaffe ). Je tiens à souligner l'ingratitude des nègres
> d'Afrique vis-à -vis du peuple élu. Nous leur avons tout apporté,
> Diderot, Montesquieu, Rousseau qui, comme chacun sait, étaient tous
> juifs à 90%... » On l'a compris, on est très loin du simple spectacle
> comique. On est encore plus loin de la seule critique d'Israël. Tout au
> long du one man show, les dérapages se multiplient. La liste des
> sionistes qui travaillent à la télévision que Dieudonné menace de
> révéler, les insultes proférées pêle-mêle et de manière obsessionnelle
> contre le CRIF, Elie Wiesel, les juifs, le complot juif, la haine des
> juifs à l'égard des noirs, le racisme des juifs... Tout y passe et rien
> ne lasse. Les spectateurs, ravis, en redemandent. A la fin du
> spectacle, Dieudonné appelle trois personnes à venir le rejoindre.
> L'acteur Daniel Prévost qui ne lui a , paraît-il , jamais ménagé son
> soutien. « Dieudo est le plus grand humoriste actuel » s'exclame
> Prévost, « c'est aussi le plus courageux. Il faut protester contre
> l'interdiction qui lui est faite de passer à la télévision ». Deuxième
> vedette a monter sur scène, Djamel Debbouze qui, le visage masqué par
> une écharpe, fait mine de s'en prendre à Dieudonné « T'as failli niquer
> ma carrière. Je tiens à me désolidariser publiquement ». Une fraction de
> seconde, Ã peine, on sent comme un flottement dans la salle. L'acteur
> retire son écharpe et se tourne vers le public : « Mettez-vous à ma
> place. Ce n'est pas vous qui avez été obligés d'aller vous farcir
> Drucker et Enrico Macias ». Rires et applaudissement. Rayonnant Djamel
> conclut : « Dieudonné, c'est le meilleur d'entre nous. Il a les couilles
> de dire tout haut ce qu'on pense tout bas. ». Dernière guest star Ã
> venir témoigner sa solidarité, le judoka Djamel Bouras : « Je tiens Ã
> remercier Dieudo, cet homme libre. J'espère que vous allez continuer Ã
> le soutenir. Il y a certaines puissances qui nous font beaucoup de mal ».
> Le dernier mot est pour Dieudonné. « Il est temps que les gens se
> lèvent et que nous soit rendue notre dignité ». Les lumières se
> rallument. Le public évacue sagement la salle. Trois adolescentes
> enchantées remettent leur manteau et se dirigent vers la sortie. L'une
> d'elles lâche à sa copine : « on a bien fait de ne pas venir avec S...
> Darmon, elle n'aurait pas ri ».
>
> Martin Perez
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