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La mémoire qui flanche, par Jean-Pierre Chemla

Envoyé par jero 
Re: La mémoire qui flanche, par Jean-Pierre Chemla
19 février 2008, 11:00
LA MEMOIRE QUI FLANCHE DE MAMILI ,,???
brass omok ou ta vu ARNO ???
Re: La mémoire qui flanche, par Jean-Pierre Chemla
19 février 2008, 11:26
T'es pas assez fine !!!pour faire le rapprochement ???
Serge c'est le papa D'ARNOOOOOO, enfin c'est l'ex bop de Carla !!!!!

je suis fatiguée de tout te déchiffrer !!!


Re: La mémoire qui flanche, par Jean-Pierre Chemla
19 février 2008, 11:53
Heureusement que tu es là, Mamili !


Pièces jointes:
0038.gif
Re: La mémoire qui flanche
19 février 2008, 14:14
Droits des enfants par Jean-Pierre Rosenczveig, juge des enfants


17 février 2008

Surpris, perplexe, finalement choqué comme citoyen

L’annonce par le président lors du diner du CRIF de son souhait de voir des enfants de CM2 parrainer les enfants français victimes de l’Holocauste a surpris. Cest le moins qu’on puisse dire ; le CRIF n’en demandait pas tant ; les responsables israéliens qui entretiennent le mémoire de la Shoah avancent publiquement qu’il s’agit d’une première de la part d’un chef de l’Etat en exercice. Pour susciter une dynamique constructive et l’adhésion, la démarche suivie apparaît donc déjà surprenante mais le politique à ses règles que le bon sens parfois ignore !

Intuitivement, après la surprise le premier reflexe est la réserve mais aussi la prudence. Quel démocrate, quel républicain, ne partage pas le souci de cultiver la mémoire collective surtout quand trop souhaiteraient tourner la page sinon tout simplement nier qu’elle ait existé. Alors devant la proposition présidentielle on s’interroge : n’aurait-on pas loupé quelques marches pour honorer cette ardente obligation de mémoire collective ? Tout simplement si on s’oppose trop vite et trop fort sera-t-on audible ? Ne parlera-t-on pas d’opposition systématique ?

Deux ou trois jours durant certains - dont moi - sont restés choqués debout avant que les arguments cartésiens ne se remettent en place. L’attitude de Simone Veil est ici exemplaire. Elle a pri sun peu de temps mais elle est claire, nette et carrée : cette idée est “inimaginable, insoutenable, et surtout injuste”. Bref, il s’agit d’une une aberration.

Beaucoup d’arguments ont été avancés dans les très nombreuses réactions entendues ou lues.

Personnellement je n’en retiens qu’un : au nom de quoi des enfants de 10 ans supporteraient le poids d’une responsabilité collective ?

Si j’étais enfant de CM2 je demanderais à mon prof de bien vouloir me dire en quoi il a “supporté” lui ces victimes de l’Holocauste dans les années écoulées et ce qu’il envisage de faire personnellement.

Sans compter ce qu’à juste titre avance Antoine Garapon, à savoir qu’on parraine quelqu’un qui est en vie pour qu’il obtienne un résultat auquel il peut légitimement aspirer, mais pas un mort.

On confond tout dans cette proposition.

Bien sûr qu’il faut informer les enfants sur ce qui s’est passé dans cette sinistre période, en France et ailleurs, faisant comme victimes des enfants juifs, mais pas que des enfants juifs : des adultes juifs, des tsiganes ou des homosexuels aussi. Beaucoup est déjà fait sur ce sujet. Des journées y sont dédiées, des documents variés existent, des animations sont faites dans les établissements.

Surtout on mélange enseigner la réalié et l’originalité dans l’abominable de la Shaoah avec le fait de supporter la mémoire des enfants déportés. Le role de l’Education nationale est de’enseinger mais pas plus. Quand on sait - dixit le ministre lui-même - que 50% des élèves ignorent l’Holocauste malgré les efforts que developperait l’institution scolaire, on voit qu’ele doit déjà se consacrer à sa mission première.

Il faudra aussi dire aux élèvesque des français y ont contribué à ces déportations d’enfants tandis que d’autres aidaient modestement, mais dangereusement les persécutés. Il faut leur parler des Justes. Mais il faut aussi leur parler de Sabra et Chatila - qu’a-t-on fait pour éviter le massacre de ces 500 femmes et de ces enfants palestiniens à quelques encablures des militaires israéliens ? -, des victimes de la Commune ou des martyrs de France pour ne prendre que quelques exemples.

Et tout simplement pourquoi les élèves ne porteraient-ils pas la mémoire des enfants qui ont flambé dans les gourbis parisiens voici 3 ans ?

Bien évidemment l’antisémitisme est condamnable, mais tous les racismes le sont, tous les enfants victimes méritent qu’on se souvienne d’eux.

Entendons Simone Veil quand elle dit qu’il y a des choses insupportables à parler et à porter. Il a fallu du temps aux déportés de retour pour parler l’horreur de ce qu’ils ont vécu. Comme d’autres, de la génration suivante, je ne parle pas des camps, mais j’ai des images vues très tôt à la télévision dans la rétine. Je n’ai pas besoin de voir 10 fois “Nuit et Brouillard” ni de prendre le nom d’un de ces enfants.

Et je reviens sur mon argument : au nom de quoi imposerait-on ce poids à des enfants quand des adultes ne l’assument pas eux-mêmes ? On vient nous dire que finalement ce ne sont plus des enfants individuellement mais des classes qui parraineraient. La différence est modeste et on repart dans l’improvisation. Tout cela n’est pas sérieux sur des sujets aussi délicats et passionnés. Il y a de quoi être remonté comme citoyen.

Et même si comparaison n’est pas raison comment ne pas relier ce débat avec le scandale du racisme dansles stades réactualisé hier avec le match Valenciennes-Metz. Quand un arbitre ne reagit pas sauf pour sanctionner le joueur insulté, quand les spectateurs ne réagissent pas devant un “supporter” habitué de ce comportement, quand les autorités sportives laissent faire ce racisme désormais habituer contre les joueurs de couleur on voudrait se donner bonne conscience en mobilisant des momes de CM2 au risque de les écraser ?

En d’autres termes j’ai le vague sentiment d’une réponse simpliste usant de l’art de la défausse des adultes sur les enfants et de la bonne conscience pour répondre à un problème délicat mal posé ; j’ai aussi le sentiment avec d’autres qu’on n’a pas évalué les effets indirects de ce que l’on avance. Bref on improvise dangereusement. Pour rejoindre encore Simone Veil : ” Comment réagira une famille très catholique ou musulmane quand on demandera à leur fils ou à leur fille d’incarner le souvenir d’un petit juif ?”

Le président veut aussi rétablir les cours de morale et que les enfants connaissent la Marseillaise et d’une manière générale les symboles de la République.

Je veux bien qu’on rétablisse les cours de morale, mais avec beaucoup d’autres je serais plus favorable à ce que l’on ait une véritable éducation civique qui montre que la morale est un registre normatif parmi d’autres et que la loi de la République est le registre normatif suprême qui s’impose à tous enfants comme adultes, adultes comme enfants !

Au passage, pour dérider, je vous pose une question issue du jeu “Place de la loi” : quels sont les 7 symboles de la République ?

L'article et les commentaires (à lire, en particulier ceux du pseudo "israël") sur

[jprosen.blog.lemonde.fr] du 17 février 2008
Re: La mémoire qui flanche
20 février 2008, 12:29
MEMOIRE ET SHOAH

Shoah : un appel du Nouvel Obs contre la proposition Sarkozy

NOUVELOBS.COM | 20.02.2008 | 15:00

Voici le texte d'un appel lancé dans le Nouvel Observateur du 21 février à propos de la proposition du chef de l'Etat de confier à de jeunes enfants la mémoire d’autres enfants morts victimes de l'Holocauste.

"L'appel du Nouvel Observateur"

"Les personnalités signataires de cet appel se placent résolument en dehors de toute stratégie politique et de toute spéculation électorale. Elles apprécient diversement, sur tel ou tel point, la façon dont le président et le gouvernement conçoivent leurs responsabilités. Mais il s’agit ici d’une urgence citoyenne. Nous adjurons le président de la République de revenir sans attendre sur une proposition qu’il a cru devoir faire dans un lieu déjà communautaire et juif. Il s’agit du désir du président de confier à de jeunes enfants la mémoire d’autres enfants morts victimes de la Shoah. Nous nous refusons à discuter la noblesse des intentions, la bonne volonté et le niveau de spiritualité qui animent un tel projet. Mais nous en voyons déjà les effets et ils sont catastrophiques. Ils divisent les communautés y compris, et peut-être plus encore que les autres, la communauté juive. Ils suscitent déjà une sordide compétition des victimes, ils empoisonnent toutes les ambitions pédagogiques des professeurs et ils sont désavoués par tous les pédiatres et les psychanalystes. Il faut purement et simplement renoncer à cette proposition. Nous saurions tous gré au président de la République française de faire ce geste indispensable.

Jean Daniel"


Les premières personnalités signataires :

Régis Debray
Jacques Delors
Gabriel Farhi (rabbin, responsable du Mouvement juif libéral de France, MJLF)
Stéphane Hessel
Jacques Julliard
Jacques Le Goff
Mona Ozouf
Alain Touraine
Georges Wajs (président du Cercle Gaston-Crémieux)
Pierre Rosanvallon
Jean Daniel
Re: La mémoire qui flanche
20 février 2008, 14:14
Le CRIF appelle à la mise en œuvre aménagée de la proposition de Nicolas Sarkozy

20/02/08 - - : Shoah

Le CRIF appelle à l'apaisement de la polémique qu'il juge largement artificielle au sujet de la proposition du Président Nicolas Sarkozy, annoncée lors du dîner du CRIF du 13 février, d'instituer un lien de mémoire entre les enfants du CM2 et les enfants juifs déportés de France et envoyés à la mort.

Le CRIF salue cette proposition pour son caractère humaniste et estime que la fin du primaire est un moment opportun pour sensibiliser les enfants aux risques de l'antisémitisme et du racisme.

Le CRIF pense que des aménagements seront nécessaires pour que cette proposition puisse jouer son rôle éducatif effectif d'alerte civique et de stimulant à un travail historique personnel.

Le CRIF pense notamment qu'il vaut mieux élargir cette mémoire à l'ensemble d'une classe et souhaite qu'aux histoires d'enfants déportés s'associent des récits de sauvetage. Ainsi ce travail favorisera l’éducation à la tolérance de l’autre, quel qu’il soit.

Le CRIF estime que les critiques contre cette proposition sont, pour certaines excessives car il n'est pas question d'identification mortifère mais de sensibilisation, et, pour d'autres nauséabondes, dans la mesure où elles refusent d'admettre le caractère universel de la Shoah et accentuent les amalgames et les compétitions victimaires.

[www.crif.org]
Re: La mémoire qui flanche
20 février 2008, 14:19
La Shoah à l'école : David de Rothschild apaise le débat

Propos recueillis par Cécilia Gabizon

20/02/2008

Alors que Xavier Darcos présente ce mercredi sa réforme de l'école primaire et évoquera l'enseignement de l'Holocauste en CM2,le président de la Fondation pour la mémoire de la Shoah donneson sentiment.

Le banquier David de Rothschild n'est pas homme à apparaître dans les médias. Il sort pourtant du silence pour apaiser le climat après la proposition de Nicolas Sarkozy de confier à chaque élève de CM2 la mémoire d'un enfant juif mort en déportation.

LE FIGARO. Des personnalités éminentes comme Simone Veilou Claude Lanzmannse sont prononcés contrele projet du président. À l'inverse, Serge Klarsfeld,qui fait également partiedu bureau de la fondation, soutient l'idée.Qu'en pensez-vous ?

David de ROTHSCHILD. J'apprécie l'intention, généreuse, mais on ne peut pas associer un enfant juif massacré à un enfant vivant. C'est trop lourd à porter. Il faut néanmoins dépolitiser ce dossier. Nicolas Sarkozy n'a pas agi par opportunisme. La Shoah ne rapporte pas de voix. La communauté juive est bien trop diverse politiquement et économiquement pour se ranger derrière un seul leader. Nicolas Sarkozy n'avait rien à gagner avec cette mesure.

Elle a semé la discorde jusqu'au sein des organisations juives. Faut-il l'annuler ?

Je ne crois pas. Il faut travailler encore, affiner, écouter les instituteurs pour trouver comment mieux parler de la Shoah sans exposer les enfants à la morbidité. Les élèves peuvent travailler en groupe sur des destins d'enfants déportés. Il faut parler des Justes, ces Français qui ont sauvé tant d'enfants juifs. C'est un exercice gratifiant. Nous soutiendrons une initiative qui repose sur une consultation large de professeurs, parents, personnalités et éminences ayant un rapport avec la Shoah.

Faut-il vraiment parler plus de la Shoah à l'école ?

Elle est déjà au programme. Néanmoins, il ne faut pas relâcher l'effort, car c'est un enseignement toujours délicat. Nous avons rencontré Xavier Darcos il y a deux semaines pour nous assurer qu'elle faisait toujours partie des fondamentaux en primaire, certains enseignants hésitant, devant les difficultés. Il arrive que des parents protestent. Néanmoins, nous avons constaté qu'au bac 2004, près de 80 % des élèves avaient choisi un texte de Primo Levi sur Auschwitz, signe que c'est un sujet qu'ils connaissent bien.

L'enseignement de l'histoire de la Shoah prévient-il l'antisémitisme ?

Moi qui suis né en 1942, l'année la plus terrible pour les Juifs d'Europe, j'ai grandi dans le silence. Je me souviens du choc lorsque j'ai découvert le film Nuit et brouillard. Alors même que je vivais dans un milieu de Juifs engagés. Il est bon que les enfants soient sensibilisés plus tôt. Pour qu'ils comprennent jusqu'où peut mener la haine du Juif, du Noir, du Blanc, même dans un pays civilisé. Ce n'est pas inutile dans une France qui n'a pas totalement accepté la société multi­ethnique.

Faut-il s'inquiéter de la concurrence mémorielle ?

Non, absolument pas. Si les autres communautés veulent attirer l'attention sur leurs drames, qu'elles le fassent. Comme Juif, il faut assumer son destin et ne pas craindre l'animosité, disons le franchement l'antisémitisme. Certains sont tentés de vivre cachés, de ne pas faire de vagues. On ne se protège pas en se reniant soi-même. Nous devons porter notre histoire collectivement. Nous ne demandons pas aux autres de se repentir, mais de savoir. L'existence d'autres tragédies ne banalise pas la nôtre. Il y a une unicité de la Shoah.

[www.lefigaro.fr]
Re: La mémoire qui flanche
21 février 2008, 11:48
Rebonds

La Résistance n’a pas appelé à sauver les Juifs

Jean-Louis Crémieux-Brilhac historien.

QUOTIDIEN : jeudi 21 février 2008

Comment dire le malaise qu’éprouve l’historien après la diffusion du docu-fiction de mardi soir sur France 2 [la Résistance, «Quand il fallait sauver les Juifs», ndlr] ?

France Télévisions a patronné un film sur le drame des Juifs de France dans les années 1940-1944 et l’a programmé à une heure de grande écoute, alors que la Shoah a été occultée un quart de siècle, bravo !

Les auteurs n’ont pas hésité à souligner l’indignité du gouvernement de Vichy, qui a délibérément mis les Juifs de France hors de la loi commune et qui a participé à la déportation de 76 000 d’entre eux, dont 73 500 allaient être exterminés ; ils ont eu, de surcroît, le mérite de mettre en lumière des héros injustement ignorés : encore bravo !

La réalisation visuelle est remarquable au point de faire passer pour documents d’époque des séquences totalement irréalistes ou dont le tournage aurait été inconcevable dans la clandestinité, comme un long défilé d’enfants juifs cheminant dans la neige vers la frontière suisse. Faut-il dire bravo ? Admettons que ce soit la loi du genre. La méconnaissance de la Résistance dont témoigne ce film est d’autant plus choquante. Non, le salut des Juifs n’était pas un des deux volets majeurs de l’action résistante, comme la programmation de lundi et mardi voudrait le faire croire. Faut-il rappeler que le mot d’ordre «Il faut sauver les Juifs» n’a jamais été lancé ni par le Conseil national de la Résistance, ni par la France libre dans les années 1943-1944, ni par la presse clandestine, mis à part les Cahiers du Témoignage chrétien. Le titre même de l’émission est un faux-semblant.

Certes, c’est grâce au courage de certains Français que la proportion des Juifs qui ont été déportés de France a été moindre qu’aux Pays-Bas, par exemple (grâce aussi à l’existence, jusqu’à 1942, de la zone non occupée et au fait que la France a été le premier pays libéré). La juste perspective eût été de montrer que les initiatives en faveur des Juifs ont été seulement (mais c’était déjà beaucoup) une action de sauvetage dans l’ensemble des actions à l’actif d’une résistance multiforme.

Laisser entendre, comme le fait le commentaire du film durant son dernier quart d’heure, qu’un immense mouvement de solidarité a soulevé la masse des Français, de 1943-1944, en faveur des Juifs, ce qui apparaît comme la leçon à en retenir, est une imposture. C’est vouloir construire une légende. Il va de soi que l’opinion publique n’était plus, en 1944, ce qu’elle avait été au lendemain du désastre : l’approche de la Libération a freiné le zèle répressif et stimulé de beaux dévouements. De là à extrapoler à la nation entière, et même à la Résistance entière, ce qui fut le mérite admirable de quelques mouvements, de quelques groupes ou de quelques individualités, il y a plus qu’une marge.

Un excès de bon vouloir, un désir de bonne conscience patriotique transforment en un film de propagande un film qui devrait s’en tenir aux exigences d’un film d’histoire, dont les noms d’Annette Wieviorka et de Jean-Pierre Azéma figurant au générique semblent cautionner, abusivement, la totale véracité. Dommage.

[www.liberation.fr]
© Libération
Re: La mémoire qui flanche
22 février 2008, 11:53
Mémoire de la Shoah : les institutions juives demandent des aménagements à la proposition de Nicolas Sarkozy
LEMONDE.FR


Le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) "salue pour son caractère humaniste" la proposition du président Sarkozy de confier aux enfants de CM2 la mémoire des onze mille quatre cents enfants juifs déportés de France, mais estime que "des aménagements sont nécessaires". Dans un communiqué, le CRIF "appelle à l'apaisement de la polémique", qu'il juge largement "artificielle".


"Les critiques contre cette proposition sont, pour certaines, excessives car il n'est pas question d'identification mortifère mais de sensibilisation, et, pour d'autres, nauséabondes, dans la mesure où elles refusent d'admettre le caractère universel de la Shoah et accentuent les amalgames et les compétitions victimaires", juge le CRIF. "Pour que cette proposition puisse jouer son rôle éducatif d'alerte civique", le Conseil propose plusieurs aménagements, notamment celui d'"élargir cette mémoire à l'ensemble d'une classe". En outre, le Conseil estime qu'il ne faut pas seulement évoquer le sort des enfants déportés, mais également celui de ceux qui ont été sauvés.

"GÉNÉREUX" MAIS "TROP LOURD À PORTER"


La Fondation pour la mémoire de la Shoah – dont Simone Veil est la présidente d'honneur – a elle aussi émis des réserves quant à la proposition de Nicolas Sarkozy. Le président de la Fondation, David de Rothschild, estime que ce projet est "généreux" mais "trop lourd à porter" et qu'"il faut l'affiner". Dans une interview au Figaro, il explique qu'"on ne peut pas associer un enfant juif massacré à un enfant vivant" et suggère d'"écouter les instituteurs pour trouver comment mieux parler de la Shoah sans exposer les enfants à la morbidité". Le président de la Fondation propose ainsi que "les élèves travaillent en groupe sur des destins d'enfants déportés" ou sur le sort des Justes.


Né en 1942, M. de Rothshild confie également qu'il a "grandi dans le silence" et se souvient du "choc" qu'il a ressenti en découvrant le film Nuit et Brouillard d'Alain Resnais. "Nous ne demandons pas aux autres de se repentir mais de savoir. L'existence d'autres tragédies ne banalise pas la nôtre", explique-t-il.
Re: La mémoire qui flanche
26 février 2008, 07:26
L’émotion contre l’Histoire

Barbara Lefebvre enseignante et Shmuel Trigano professeur des universités.

QUOTIDIEN : mardi 26 février 2008

Après l’injonction faite aux professeurs de lycée d’ouvrir l’année scolaire par la lecture de la lettre de Guy Môquet, que l’Elysée avait présenté comme modèle du jeune héros résistant de la première heure, la méthode, bien que contestée, est reprise avec la proposition du chef de l’Etat de «confier» à chaque élève de CM2 la mémoire d’un des 11 400 enfants juifs déportés et disparus dans la Shoah.

Pour l’élève âgé de 10 ans, l’Elysée lui a choisi un modèle identificatoire du même âge : un enfant, mort lui aussi durant la même période, mais cette fois non pour ce qu’il a fait (résister) mais pour ce qu’il était (juif). C’est là une nuance méritant d’être soulignée si l’on veut comprendre la spécificité d’un génocide et ce qui le distingue des crimes de guerre. Or la façon dont ces figures d’enfants martyrs se télescopent par ces dispositions élyséennes contribue à brouiller les repères qui fondent une vraie compréhension de l’histoire au sens politique du terme.

Le destin des enfants juifs, français et étrangers, ayant disparu dans la Shoah appartient à l’Histoire. Leur mémoire n’appartient qu’à eux, nous voulons dire par là que «l’expérience vécue», que veut faire porter le Président aux générations présentes, n’est en rien saisissable par un enfant de 2008. Aller à Birkenau, visiter la Maison d’Izieu, se confronter au mur du Mémorial de la Shoah où figurent les noms des disparus - sortis par les historiens de l’anonymat dans lequel les nazis espéraient les condamner après les avoir identifiés et assassinés parce que Juifs -, toutes ces démarches n’ont de sens qu’inscrites dans une perspective historique. C’est elle qui analyse, éclaire les antécédents singuliers de l’antisémitisme européen, distingue le génocide du contexte de guerre dans lequel il s’inscrit mais ne se réduit jamais.

Pourtant, force est constater que l’émotion continue d’être le ressort principal de l’enseignement de l’histoire de la Shoah. En dépit des critiques et des efforts de certains enseignants ayant compris que la question exige un travail approfondi avant sa mise en œuvre didactique, la majorité des cours donnés aux élèves de CM2 ou de collège fonctionnent sur le registre de l’identification émotionnelle. Ainsi cette élève de lycée revenant d’un voyage à Birkenau qui retient «que des petits actes par-ci, par-là, une fois regroupés, donnent des choses comme Auschwitz», ou cet élève de CM2 qui évoque ce qu’il a retenu de son cours sur le nazisme : «Ils enfermaient des gens dans des camps et leur jetaient des gaz.» (JT de France 2, le 14 février.) Comment les blâmer de leur ignorance quand une enseignante confie à un sondeur, chargé d’une enquête sur les effets des voyages scolaires de mémoire, qu’elle a pris soin de ne pas «focaliser sur les Juifs, c’est le côté humain qui nous intéresse, qui prévaut». Edifiant et surtout inquiétant, car cela révèle que, sur les lieux mêmes du crime, l’effacement de la victime juive est possible au nom de la bonne conscience universelle.

Par l’identification et la personnalisation, on n’encourage pas la singularisation du fait historique mais bien sa métamorphose en une abstraction. Celle qui permet ensuite d’utiliser la Shoah comme un outil de référence anachronique pour dénoncer un organe de presse révélant l’intimité d’un homme de pouvoir, ou, lors de l’apposition d’une plaque commémorative dans l’école primaire de tel quartier, de comparer le sort des enfants juifs morts en déportation avec celui des enfants de sans-papiers menacés d’expulsion, etc.

Le président de la République et ceux qui lui ont conseillé cette maladroite initiative sont loin des préoccupations des enseignants et ignorent notamment que la question posée presque invariablement par les élèves est «pourquoi les Juifs en particulier ?», avec une variante : «Qu’est-ce qu’ils ont de spécial pour qu’on leur en veuille toujours ?» En quoi assigner à un enfant de 10 ans le nom et l’itinéraire personnel d’un enfant mort dans la Shoah l’aidera à y répondre ? C’est à l’enseignant de répondre à ces interrogations fondamentales par l’Histoire. En confiant à l’émotion la connaissance d’un fait historique, ici la Shoah, on contribue à en fragiliser la «mémoire».

Plus grave, le syndrome psychique que crée cette transmission barre l’accès à la compréhension des Juifs contemporains et des faits majeurs de leur histoire, qui ne se réduit pas à l’extermination quand on cherche à comprendre «pourquoi les Juifs ?».

Or, des Juifs comme peuple acteur de l’Histoire, les élèves français n’en entendent guère parler sinon par des bribes, dignes d’une anthologie, sur les Hébreux de l’Antiquité. Rien sur le judaïsme médiéval en terres d’Europe, rien sur l’émancipation des Juifs, rien sur les figures positives des mondes juifs et leur contribution culturelle et politique à la modernité, rien sur les facteurs de naissance du sionisme. Au regard de la polarité dans laquelle est tenue la figure juive dans notre enseignement, le Juif est soit victime (affaire Dreyfus et Shoah), soit bourreau (le conflit israélo-arabe). On ne peut répondre à la question posée par la Shoah «pourquoi les Juifs en particulier ?» que par des formules lapidaires et absurdes telles que le concept obsolète du Juif «bouc émissaire».

Le président Sarkozy ne voit pas que c’est toute une doctrine pédagogique qui est gravement en question à travers son initiative. Elle s’exprime, par exemple, à travers les écrits de Jean-François Forges dans Eduquer contre Auschwitz (1) qui invite à la mise en comparaison de faits historiques sans rapport : «On ne pourra pas être entendu, lorsque l’on parle de l’histoire de la Shoah, si on continue à faire trop souvent le silence à l’école sur les drames de la décolonisation française.» M. Forges ignore les leçons de Marc Bloch : en histoire, on ne compare que des objets de même nature, un génocide à un autre génocide, pas un génocide à un crime de guerre. Cette pédagogie se reconnaît dans une pensée problématique de Paul Ricœur pour qui «les victimes d’Auschwitz sont, par excellence, les déléguées auprès de notre mémoire de toutes les victimes de l’Histoire».

Voilà qui encourage la concurrence victimaire et fait de la mémoire de la Shoah un enjeu idéologico-politique. Ce n’est pas le rôle dévolu à l’enseignement scolaire. Si les Juifs ont besoin de reconnaissance, ce n’est pas de leur condition de victime de l’Histoire, surtout si son universalité en efface sa singularité, mais de leur condition historique objective et de leur légitimité à exister sans avoir à présenter leurs stigmates victimaires.

(1) Pocket, 2004.

Les auteurs viennent de publier l’Image des Juifs dans l’enseignement scolaire (Editions du Nadir).

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