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Le Liban a perdu Beyrouth

Envoyé par mena 
Le Liban a perdu Beyrouth
10 mai 2008, 21:51
Le Liban a perdu Beyrouth (info # 011005/8) [Analyse]

Par Michaël Béhé à Beyrouth © Metula News Agency


Le Hezbollah a gagné la guerre de Beyrouth au terme de 48 heures de combats seulement. Au milieu des palabres et des menaces d’intervention occidentales, c’est d’abord ce qu’il faut froidement retenir de la situation.

Dans les faits, les miliciens de Nasrallah ont pris d’assaut et enlevé toutes les régions sunnites, situées principalement à l’ouest de la capitale. La plus grande résistance des partisans armés de Saad Hariri a été opposée à Hamra, Al Mazraa et Ras El Nabeh. Ces derniers n’ont toutefois pas fait le poids face aux combattants chiites de l’organisation Amal et du Hezbollah, puissamment armés par la Syrie et l’Iran. Les quelques centaines de miliciens sunnites, uniquement dotés d’armes automatiques, ont été submergés par environ 5 000 ennemis, disposant de grenades antichars, de jeeps surmontées de mitrailleuses lourdes et d’artillerie légère.

Ce samedi matin, en plus de leurs fiefs de la périphérie sud, les prosyriens occupent tout l’ouest de Beyrouth, jusqu’au Grand Sérail, siège du gouvernement, où se sont retranchés le 1er ministre Fouad Siniora ainsi qu’un certain nombre de ses ministres.

Le chef de la communauté druze, Walid Joumblatt, qui a refusé de quitter Beyrouth pour se réfugier dans sa montagne, se trouve encerclé par les miliciens chiites dans le secteur de Clemenceau, de même que le chef de la majorité parlementaire, Saad Hariri, qui est assiégé au château de Koraytem.

L’armée libanaise s’est, en outre, disposée en ordre de défense autour de Tarik Jedideh, la seule poche sunnite de Beyrouth qui n’ait pas été prise par les prosyriens.

De sources proches de l’armée et des ambassades occidentales, nous avons appris que le Sérail et les résidences de Joumblatt et d’Hariri étaient considérés comme des sanctuaires protégés par une "ligne rouge" virtuelle. Dans le désastre ambiant, on ne sait pas exactement ce que cela signifie, ni jusqu’à quel point il s’agit d’une garantie fiable.

Il est important de signaler aux non Libanais que les combats n’ont, jusqu’à maintenant, opposé que les miliciens musulmans – chiites-sunnites – entre eux et que les supplétifs de Damas et de Téhéran ne se sont pas attaqués aux quartiers chrétiens de la capitale, situés à l’est et au nord de celle-ci. Le Hezbollah n’a pas non plus agressé frontalement les miliciens druzes du PSP de M. Joumblatt. Des combats ont cependant été signalés, ce matin encore, dans la région de la ville druze de Aley, entre des combattants du PSP et ceux d’un mouvement druze prosyrien, allié du Hezbollah, aux ordres de l’émir Talal Arslan. Ces affrontements ont fait plusieurs morts dans les deux camps.

Les miliciens chiites ont par ailleurs saccagé, pillé et incendié le siège de la Télévision du Futur de la famille Hariri. Ils se sont également emparés des autres media de la communauté sunnite, enjoignant aux journalistes d’abandonner leurs postes.

A Ramlet El Baïda, les miliciens du Parti Syrien National Social ont pillé et saccagé la Fondation Hariri. Dans toutes les zones qu’ils ont occupées, les combattants chiites ont déchiré les posters du 1er ministre Rafic Hariri, assassiné sur l’ordre de Damas, et ont déployé à leur place des portraits du président syrien Béchar Al Assad et de feu son père Hafez. En fin d’après-midi d’hier (vendredi), les prosyriens ont fêté leur victoire en organisant des défilés militaires improvisés en plusieurs points de Beyrouth. Le plus important a été vu dans l’artère principale de Hamra, où les miliciens ont défilé sur leurs jeeps, à contresens de la circulation habituelle et en tirant en l’air.

La défaite des Haririens est consommée et il convient de tirer rapidement les premières conclusions de la nouvelle situation. L’élément le plus marquant réside en ce que les Libanais non chiites – environ 65% de la population – sont désormais encerclés et coupés du monde extérieur. Le seul moyen de transport qu’il leur reste est constitué par les bateaux faisant la liaison avec Chypre depuis les ports chrétiens.

Quant aux organisations prosyriennes, au contraire, elles disposent désormais de l’aéroport international, pourtant déclaré "zone frontière" dans la résolution 1701 du Conseil de Sécurité, et contrôlent également la route Beyrouth-Damas, ce qui leur assure un approvisionnement illimité en renforts et en armes. D’autre part, Amal et le Hezb trônent sur toute la région s’étendant, par le bord de mer, de la capitale au contingent de l’ONU, à une quinzaine de kilomètres de la frontière israélienne. Dans ce secteur, pour bien faire voir leur domination, ils ont pris d’assaut la résidence du dirigent spirituel chiite de la ville de Tyr, qui s’opposait à la ligne suivie par le Hezbollah, l’ont démis de son autorité et l’ont remplacé par un cheikh acquis à leur cause.

Autre sujet d’inquiétude : l’armée. Au prétexte de ne pas se désintégrer en factions ethniques, elle n’est nulle part intervenue dans les combats, se contentant de marquer sa présence passive dans le sillon du Hezbollah. Plusieurs dirigeants du mouvement du 14 mars, réunis d’urgence chez le chef des Forces Libanaises chrétiennes Samir Geagea, à Maarab, ont dénoncé la collusion évidente entre l’armée et les prosyriens, soulignant que les militaires n’avaient pas rempli leur fonction consistant à préserver la paix intérieure ainsi que les minorités agressées.

Force nous est, ce samedi, de constater de visu que l’état major de l’armée fait très bon ménage avec les miliciens chiites, et qu’ils se partagent harmonieusement l’occupation des zones conquises par les barbus, armés jusqu’aux dents, vêtus de noir, le front ceint d’un turban jaune, de Hassan Nasrallah.

La population libanaise ne peut donc plus compter sur ses soldats pour la défendre et pour protéger son indépendance et sa souveraineté nationale. Elle doit même prendre en compte la possibilité que l’armée serve fidèlement les intérêts du Hezbollah et de la Syrie, au cas où les chiites iraient jusqu’au bout de leur prise de pouvoir.

Il n’existe, en ce moment, aucune force libanaise au Liban capable de remettre les séides des Al Assad à leur place, c’est une autre constatation. Face à l’armement supérieur des prosyriens, tout ce que les miliciens des FL, des Phalanges chrétiennes et du PSP peuvent songer à faire, c’est résister, depuis des positions retranchées, à un éventuel assaut dirigé contre leurs quartiers, leurs villages et leurs régions. Même dans cette situation, s’il ne recevaient pas d’aide étrangère, on voit mal comment ils pourraient s’opposer longtemps à la déferlante chiite.

Qu’en est-il alors d’une éventuelle intervention occidentale ? Beaucoup de bruits stériles jusqu’à l’heure actuelle, avec une Ligue Arabe qui en est – rien de très étonnant - à se demander s’il convient de “condamner” le coup de force du Hezbollah ou juste de le "déplorer".

Aux Etats-Unis, on condamne fermement, on accuse nommément l’Iran et la Syrie, on menace même les "responsables de l’agression" et on a engagé des discussions avec les membres permanents du Conseil de Sécurité. Au Caire, Moubarak juge la nouvelle situation "inacceptable". A Paris, Sarkozy et Kouchner lancent des menaces voilées à l’encontre des mentors de Nasrallah, mais pas de quoi provoquer chez eux de véritables tremblements de peur.

Au sein du 14 mars, on évoque la possibilité d’une intervention conjointe américano-arabe. Quelqu’un a même annoncé que le contingent de l’UNIFIL, stationné à la frontière israélienne, verrait son mandat amendé et serait instruit de fondre sur Beyrouth. S’agit-il des rêves mouillés du camp des défaits, craignant pour son avenir, ou existe-t-il un fond de vérité quant aux intentions de sauvetage des amis traditionnels du Liban ? Personne, à part ceux qui sont dans le secret des dieux à Washington, n’est en mesure de le dire.

Reste que si les Occidentaux interviennent, ce ne sera pas pour nos beaux yeux, mais pour empêcher qu’Ahmadinejad ne puisse, très bientôt, disposer, en toute légalité, ses missiles balistiques, pointés sur l’Europe, sur notre Corniche. Entre-temps, et c’est la seule bonne nouvelle que je peux vous distiller en ce samedi noir pour mon pays, le gouvernement, recroquevillé, menacé physiquement, sans armée qui l’écoute, sans personne pour faire appliquer ses décrets, a décidé de rester ferme et de continuer à exiger le démantèlement du réseau de communications illégal du Hezbollah et la restitution à l’Etat du contrôle de notre aéroport international.
Re: Le Liban a perdu Beyrouth
11 mai 2008, 15:26
Le Hezbollah à Beyrouth
Pièces jointes:
Hezbollah.gif
Re: Le Liban a perdu Beyrouth
12 mai 2008, 04:33
Par notre attaque sur le liban, se pays est foutu.
Re: Le Liban a perdu Beyrouth
12 mai 2008, 12:38
DE MON CORRESPONDANT A BEYROUTH.
Sur place pour l'AGENCE BREITOUNA AND C°.


Un commentaire puise ce soir sur le forum de F2 consacre 0 la situation au Liban (signe d'un pseudonyme).
Bonne soiree.Albert.

Les récents évènements beyrouthins sont une nouvelle preuve de l'instabilité extrême du pays qui jusqu'à présent était accepté par tous. Au Liban, on s'inquiétait de la fermeture des pubs de Gemmayzé, de celle programmée de Monoprix ou des prochains concerts donnés par quelques artistes courageux ou inconscients. Il faut nous comprendre, le Liban n'est pas en ébullition culturelle. La production intellectuelle francophone est indigente, et on a tendance à se concentrer sur ce qu'on a. A l'étranger, le Liban ne faisait plus la Une des journaux et pour cause : pas de morts en nombre comme en Irak ou en Birmanie, pas de glamour comme le mariage d'une speakerine avec le roi du rire banlieusard, pas de scandale comme les retards dans les transports en commun ou la spéculation sur le pétrole. On pensait donc le Liban assagi, et on attendait l'été dans le monde entier, en prenant soin de lire quelques conseils de régime pour la plage entre deux photos de mariage de la speakerine avec le roi du rire banlieusard. Et on avait raison. Si on commence à s'inquiéter de ce qui pourrait arriver de grave, alors qu'on a déjà du mal avec ce qui se passe de dramatique, on aurait même plus assez des yeux pour pleurer.

Le hezb sait tout cela, et a profité de la lassitude de l'opinion publique, ainsi que de sa capacité à accepter la loi du plus fort pour réussir son coup d'Etat. Les chancelleries sont préoccupées, mais surtout par la violence qui pourrait toucher leurs ressortissants. Elles mettront du temps à réaliser qu'un parti fasciste a fait main basse sur le pays en menaçant de créer encore plus de chaos si on ne lui cède pas. Le 14 Mars a fait le dos rond, espérant se poser en victime et désireux d'éviter de remplir un rôle qu'il pourrait laisser à d'autres comme d'habitude. Nettoyer au Karcher le Liban ne sera donc pas la tâche ou la tache de la majorité. On s'en doutait un peu, on le voit maintenant, il va encore falloir que ce soit accompli par l'extérieur. Mais qui ? Chacun propose sa méthode, avec notamment Israël qui feint de ne pas s'en occuper sur l'air de "on vous l'avait bien dit".

Pour ceux qui en doutent, il est bon de le répéter : le hezbollah a fait un coup d'Etat et ses méthodes n'augurent rien de bon même si elles ne surprennent pas. L'attaque de la chaîne de télévision Future TV appartenant au clan Hariri est peut-être un réglement de comptes politique, mais c'est surtout une atteinte à la liberté d'expression qui donnera lieu à de nombreuses répétitions. L'ironie c'est que ceux-là même qui avaient approuvé la fermeture de la chaîne MTV se retrouvent maintenant à geindre sur la disparition (temporaire on espère) de la Future. Mais au Liban, le méchant c'est toujours l'autre. Et à force de crier au loup, je doute qu'on se rende compte de l'importance historique de la prise du pouvoir de la dernière démocratie arabe par l'Iran et la Syrie. Vieille histoire diront certains. Quand ils ont fermé la Future, je n'ai rien dit, je ne suis pas allé à la manif par peur de me faire tirer dessus. Et quand ils fermeront les blogs, je serai parti j'espère depuis longtemps. Après tout, un hezbollahistan au Liban, ce peut être amusant. Tant qu'ils ne ferment pas les pubs de Gemmayzé.

Un mot enfin, en forme d'épitaphe, pour Aoun, qui déclarait hier avec un aplomb digne d'un homme qui refuse la réalité :

Aujourd’hui (hier) est une victoire pour le Liban et non pas (une victoire) d’une partie sur une autre. C’est une victoire dans le sens d’un retour au pacte national, au rééquilibrage entre les composantes de la société libanaise. Cet équilibre était rompu, ce qui avait provoqué des problèmes politiques, des interférences internationales et une atteinte à la stabilité. La crise dure depuis plus de deux ans et demi. Je me suis adressé par le passé aux pays étrangers et au Conseil de sécurité et je les avais prévenus que nous nous orientons vers une situation de confrontation. J’ai adressé une note à Ban Ki-moon et aux membres du Conseil de sécurité. Mais malheureusement, nous n’avons pas trouvé d’échos pour résoudre le problème. Je me suis adressé aux Libanais à plusieurs reprises pour leur dire de ne pas se procurer des armes car elles ne serviraient à rien.

Sans commentaire. Ou plutôt si. Aoun se rêvait De Gaulle, il finira Pétain.
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