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Chez eux en terre promise

Envoyé par lapid 
Chez eux en terre promise
17 mars 2010, 12:04
Chez eux en terre promise - Pour Tribune Juive - 23 août 2009



Qui sont ces Français qui choisissent de revenir vers Eretz Israël ? Qui sont ces hommes et ces femmes qui, délibérément, abandonnent leurs vies bien rangées et acceptent de tout chambouler simplement par amour pour un idéal ?

Une enquête* menée récemment permet de t irer un portrait- robot de la population française établie en Israël. Elle révèle de nombreuses caractéristiques par fois étonnantes, voire paradoxales. Comme le fait que bon nombre des individus appartenant à la population française d’Israël ne parlent pas du tout le français. Ou qu’il y ait 120 000 Français recensés parmi les quelque 7,2 millions d’Israéliens, soit plus de 1,6 % de l’effectif total. Assez pour disposer d’une représentativité sur la scène politique. Ou encore qu’entre 2001 et 2007, le nombre de Juifs français qui décident chaque année de partir s’installer en Terre sainte ait connu une rapide progression. Ainsi en 2002, 2 326 Juifs français avaient choisi d’émigrer en Israël, soit deux fois plus que l’année précédente où ils n’avaient été que 1 156. Cette tendance est allée en s’amplifiant au cours des ans, avec respectivement 2 083, 2 400 puis 3 000 nouveaux arrivants en provenance de l’Hexagone en 2003, 2004 et 2005. Les années 2006 et 2007 virent une stabilisation des nouvelles installations aux alentours des 2 800.

Faire son Alyah



C’est l’illustration d’un phénomène bien connu des sociologues qui étudient les relations qu’a la diaspora juive de France et d’ailleurs avec Israël. En temps de crise, lorsqu’ils sentent qu’une menace pèse sur Israël, ou que l’antisémitisme ambiant se fait trop présent dans leurs pays, nombreux sont ceux qui décident d’effectuer l’Alyah. C’est exactement ce qui s’est produit en 1972 (Guerre des Six-Jours) avec près de 2 356 émigrations, et en 2002 d fait de l’élévation rapide du niveau d’antisémitisme ambiant avec recrudescence des actes de violence. L’émigration de ces dernières années est ainsi largement alimentée par des facteurs semblables (montée de l’antisémitisme en France et tirs de roquettes incessants en provenance de la bande de Gaza).

Bon nombre de ces Franco-Israéliens se sont rendus en Israël principalement pour s’engager chez Tsahal et contribuer directement à la protection de l’État hébreu. Certains s’y sont d’ailleurs brillamment illustrés. Le meilleur exemple est le lieutenant-colonel Yehuda David, un chirurgien réputé, bien installé dans la cinquantaine, et pourtant engagé volontaire dans une unité de commandos parachutistes. La bravoure qu’il a affichée au front dans son rôle de médecin militaire lui a valu l’attribution de la Tsalach, l’équivalent de la très prestigieuse Médaille militaire. Pour couronner le tout, il était l’un des 12 porteurs de flambeau lors des cérémonies de commémoration de l’indépendance sur le mont Herzl en 2007.

L’attachement à la terre, le côté affectif, est aussi l’une des principales motivations des Français qui s’installent en Israël.

La communauté française essaie de s’ouvrir de plus en plus et de jouer un rôle à part entière dans le développement de son nouveau pays.



En témoigne ce fait divers touchant largement relayé par toute la presse israélienne. Un couple de Français, Frédérique et Daniel Israël-Coccolo, a acheté début mars 2008, en toute connaissance de cause, un appartement dans un immeuble d’Ashkelon sur lequel venait de tomber une roquette Grad. L’attrait de la Terre Promise est donc très fort pour les jeunes Juifs français en quête de repères et qui se sentent de plus en plus mal aimés « chez eux ». C’est pourquoi malgré les risques (ils ont pleinement conscience que la menace terroriste peut frapper à tout moment en Israël), ils choisissent une contrée où ils peuvent vivre leur foi sans crainte ni honte.

À l’image de la communauté juive de France, les Juifs français en Israël, pour près de 60 %, sont principalement séfarades. Elle se démarque ainsi facilement du reste de la population israélienne, majoritairement ashkénaze. Ces séfarades originaires d’Afrique du Nord se distinguent aussi par leurs pratiques de la foi. En général, ils n’hésitent pas à se déclarer ouvertement pratiquants et religieux alors que la plupart des « locaux » sont plutôt laïcs.

Des poches de population francophones se sont formées peu à peu dans les grandes villes, Tel-Aviv bien sûr, mais aussi Jérusalem et Haïfa. En 2009, selon les chiffres des services consulaires, la communauté franco-israélienne compterait grosso modo 120 000 âmes. En dehors de ces agglomérations, le gros de cette population réside dans les colonies du sud d’Israël. Elle possède même des places fortes comme Netanya, Ashdod ou Eilat, des communes dans lesquelles elle a réussi à se ménager de véritables petites oasis francophones. Le prix de l’immobilier, beaucoup plus bas que dans les grandes métropoles, est aussi l’une des raisons qui expliquent le succès de ces localités. Il y a aussi la pensée que la taille relativement réduite des communautés francophones de ces petites villes facilitera l’intégration.

Au sein même de la communauté française émergent différentes catégories. Distinction est ainsi faite entre les anciens, ceux qui ont effectué leur Alyah il plus de vingt ans, et les nouveaux qui sont arrivés après. Aujourd’hui, près de la moitié des Français d’Israël y sont nés ou y ont émigré avant l’âge de 8 ans. Les moins de 40 ans représentent le tiers de cette population soit à peu près la même proportion que les plus de 60 ans. La communauté est aussi relativement homogène puisqu’elle est majoritairement composée d’individus éduqués, issus de la classe moyenne, ayant fait des études supérieures.



Réussir son intégration

Malgré la présence parfois très marquée de la communauté française, l’intégration n’est pas toujours une partie de plaisir pour les nouveaux venus. La barrière de la langue est un obstacle réel qu’il est nécessaire de franchir pour se sentir pleinement intégré. En effet, même parmi les Juifs français, c’est l’hébreu que plus de 50 % d’entre eux utilisent pour communiquer avec leurs proches et leur conjoint. Seul un tiers affirme converser principalement en français dans la vie de tous les jours. D’ailleurs, l’écrasante majorité des foyers de la classe moyenne israélienne adoptent l’anglais comme deuxième langue plutôt que le français. Quant aux enfants, c’est bel et bien l’hébreu qui est, pour la plupart, leur véritable langue maternelle ; ce qui explique le paradoxe qu’un nombre croissant des Français d’Israël soit incapable de lire les œuvres de Molière.

Face à cet inévitable pluralisme linguistique, la question identitaire se pose. Quel lien les Français établis en Israël conservent-ils avec l’Hexagone ? Tout d’abord, ils se sentent majoritairement plus chez eux en Terre Promise qu’en France. La liberté d’exercer sa foi au grand jour, sans crainte d’insultes ou d’agressions, n’est pas étrangère à ce phénomène. Comme l’affirmait une jeune femme arrivée en 2002 : « On était fiers d’être français. On ne l’est plus. Maintenant on est fiers d’être juifs ». Il faut préciser que sa décision était principalement motivée par une attaque antisémite dont elle avait été victime l’année précédente.

Un melting pot des cultures

Est-ce à dire qu’ils ont choisi de délaisser leur héritage français pour se fondre dans la société israélienne ? Non. Plutôt que de tomber dans le piège du conflit identitaire, et de se choisir une appartenance exclusive liée à une origine géographique particulière (nord-africaine, française, israélienne), ils optent pour un melting pot de leurs différentes cultures et sont décidés à n’en renier aucune. Pour preuve, le nombre d’immatriculations qui a augmenté de manière spectaculaire. Si autrefois très peu faisaient l’effort de se faire immatriculer, préférant couper définitivement les ponts avec leur pays d’origine, aujourd’hui, c’est l’inverse. Les « olims » fraîchement débarqués veulent continuer à jouer un rôle dans la vie politique française. La France garde ainsi une place privilégiée dans leur cœur et reste, pour ceux qui peuvent se le permettre, leur principale destination de vacances à l’étranger, notamment pour y retrouver la famille et les amis.

Ce mouvement s’est accompagné d’un regain d’intérêt pour la politique israélienne dans laquelle les frenchies s’impliquent de plus en plus comme en témoigne la récente candidature sous la bannière du Likoud de Michel Ben Ami aux municipales à Jérusalem. Ils auraient d’ailleurs tort de se priver de cette représentativité, primordiale pour obtenir une pleine reconnaissance, et ce d’autant plus que la scène politique israélienne est connue pour être un kaléidoscope des différentes communautés qui composent sa société. Alors que les Arabes, les russophones ou les ultra-orthodoxes ont déjà leurs élus, il semble qu’il reste encore un grand vide à combler pour assurer pleinement la défense des intérêts des Français d’Israël à la Knesset. En dehors des mouvements politiques, c’est surtout sur le plan associatif que la communauté franco-israélienne affiche son dynamisme. Les réseaux d’aide humanitaire ou de facilitation à l’intégration se développent de manière très rapide, assistés bien sûr par l’utilisation massive de l’internet. Cette résurgence associative, initiée par la souche la plus récente des immigrés de France, apparaît comme un moyen privilégié pour mieux faire connaître les Franco-Israéliens à leurs concitoyens.



Loin de se recroqueviller totalement sur elle-même, la communauté française essaie donc de s’ouvrir de plus en plus et de jouer un rôle à part entière dans le développement de son nouveau pays. La communauté des Français d’Israël apparaît donc aujourd’hui comme un modèle d’intégration réussi, soucieux de partager les valeurs et le mode de vie de sa terre d’adoption sans toutefois jeter au rebut le patrimoine culturel de ses origines. La situation est ainsi très bien résumée par Colette Le Baron, consul général de France à Tel-Aviv lorsqu’elle déclare : « Nous sommes face à des gens de qualité, qualifiés. Je crois sincèrement qu’ils peuvent être le moteur de la francophonie revitalisée en Israël. J’y crois réellement. » Reste donc à accentuer la mobilisation pour apporter à la société israélienne cette french touch qui ne pourra que l’enrichir.


*Sources : [harissa.com] services culturels de l’ambassade de France en Israël, le consulat général de France à Tel-Aviv et l’université de Tel-Aviv.
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