L'auteur-compositeur-interprète tunisien Slim Ben Ammar rend hommage au chanteur Henri Tibi. Son album "Grappe de Jujube" vient de sortir, il reprend des chansons écrites par Henri Tibi, gloire des années 50-60 en Tunisie qui a choisi de finir ses jours dans le dénuement à Besançon.

D'une ville à l'autre, les ambiances ne se ressemblent pas. Ce dimanche soir 29 mai au Kursaal, le public était sagement assis pour écouter les reprises des chansons d'Henri Tibi par le jeune chanteur tunisien Slim Ben Ammar.

À Paris, le 17 mai 2023, la communauté tunisienne de la capitale a enflammé la salle de cinéma lors de l'avant-première du documentaire Je reviendrai là-bas de Yacine Redissi. Juifs et Musulmans, côte à côte, vibraient d'une seule voix en écoutant les chansons d'Henri Tibi interprétées par Slim Ben Ammar. 

À Paris comme à Besançon, les spectateurs étaient venus pour la projection du documentaire Je reviendrai là-bas de Yassine Redissi. Ce film, primé lors de plusieurs festivals, raconte l'histoire d'Henri Tibi et de son "paradis perdu" : la Tunisie d'avant l'indépendance et en particulier de la Goulette, port de Tunis où Musulmans et Juifs faisaient la fête ensemble. 

En partant à la recherche de ce qu'a été la drôle de vie d'Henri Tibi, les jeunes Tunisiens ont entrepris une autre quête, celle d'une Tunisie où Juifs et Musulmans vivaient ensemble.

Cette avant-première a été organisée au débotté par l'association Afrika Besak responsable du festival Lumières d'Afrique. 

Venu le jour même de Tunis, le musicien avait pris sa guitare pour accompagner le réalisateur Yassine Redissi. Après la projection du film, il a interprété des titres de son album qui vient tout juste de sortir sur les plateformes et en CD.

Cet album a tout simplement été fait pour rendre hommage à Henri Tibi mais pas que ! Il est de notre devoir de préserver le patrimoine tunisien. Cette musique en fait partie et c'est pourquoi cet album existe. A tout ceux qui lisent ce message, vous êtes en train de sauver la mémoire d'Henrito et l'effort fourni pour faire briller ses chansons.

Slim Ben Ammar

Les deux amis ont travaillé ensemble sur ce documentaire radieux et optimiste. Dans le film, on voit le jeune auteur-compositeur-interprète découvrir les chansons d'un vieil homme. À travers ces textes et mélodies, c'est une Tunisie disparue qui se dévoile. Une forme de Dolce Vita, d'insouciance et de belle humeur.

L'album de Slim Ben Ammar ne fait pas l'impasse sur les années de galère d'Henri Tibi. Sur les dix titres du CD, la plupart évoquent avec nostalgie ou humour la Tunisie, mais Henri Tibi a aussi raconté son quotidien de la Grande rue à Besançon : faire la manche pour nourrir ses innombrables chats et chiens. 

Besançon Terre promise. Toi qui m'a tant donné. Chasser les heures grises, la morosité. Autant vivre sa vie dans la précarité plutôt que de voler, violer, assassiner. N'ayant rien dans les fouilles, je reste là planté à me geler les douilles pour quelle menue monnaie.

Henri Tibi. La précarité

Sans dévoiler les magnifiques dernières minutes du documentaire, la musique d'Henri Tibi est en train de vivre une seconde jeunesse. Et si les reprises de Slim Ben Ammar diffusaient le délicat parfum du vivre ensemble qui semble s'être évaporé de Tunisie ? C'est en tout cas ce que souhaitent le réalisateur et le musicien.   

Slim Ben Ammar a travaillé les arrangements des chansons écrites par Henri Tibi avec le guitariste Mondher Falleh, le batteur Bilel Ben Mansour , le bassiste Raffet Zoghlami, le clavier Adam Ben Salah, le clarinettiste et saxophoniste Chiheb Baazaoui et le percussionniste Aziz Belhani à la percussion. Une production Wild Tunes Production.

Un album a dégusté comme le jujube, un fruit aux allures de datte rouge apprécié en Tunisie. Henri Tibi évoque avec nostalgie ce fruit. "Finalement, tous ces titres de l'album, explique Slim Ben Ammar. Ce sont comme des jujubes rassemblés dans une grappe. La grappe de jujube n'existe pas, mais l'album en a la saveur".