Quelle société pour demain ? Réflexions juives sur la nature et l'environnement, par Jacques Goldberg (*)
Les ouvrages qui traitent de la position du judaïsme par rapport au monde animal et à la nature sont assez rares pour que ne soit pas saluée avec enthousiasme la sortie de ce travail très fouillé de Jacques Goldberg, professeur émérite d'éthologie à la Sorbonne Université René Descartes (Paris V).
Divisé en chapitres courts et d'une lecture agréable, l'ouvrage est assorti d'annexes intéressantes et de glossaires.
Textes fondamentaux à l'appui, l'auteur nous rappelle que le respect de la nature et de l'environnement est une préoccupation constante de la Thora. Dans le domaine de ce qu'on appelle aujourd'hui l'écologie, il nous explique par exemple que la tradition juive fait obligation de maintenir l'intégrité de la terre à l'écart de toute souillure : enterrement des déchets à l'écart des zones habitées, éloignement des granges, des tanneries ou encore des cadavres et des tombes des cités habitées, interdiction de brûler les essences de manière incontrôlée... Un principe de base sous-tend la philosophie juive : il ne faut ni gaspiller, ni détruire inutilement, ni mélanger les espèces. Les cas classiques sont connus : ne pas atteler ensemble un âne et un bœuf, ne pas mélanger fibres de lin et de laine, ne pas greffer des espèces d'arbres différentes, ne pas semer conjointement des graines d'espèces différentes, interdiction d'abattre les arbres fruitiers, sauvegarde des réserves d'eau... sans oublier l'interdiction alimentaire du mélange lacté-carné.
Des pages captivantes sont consacrées à la relation entre l'homme et l'animal. Si l'animal, contrairement à l'homme, n'est pas en mesure, dit l'auteur, d'avoir conscience de la mort, s'il n'est pas capable, non plus, d'avoir un sentiment religieux, il n'en mérite pas moins le respect et la dignité. D'où l'interdiction, dans le judaïsme, de toute souffrance et de tout stress que l'on pourrait infliger aux animaux. L'auteur rappelle le cas classique de la rencontre avec un nid d'oiseaux dont il faut renvoyer la mère avant de se saisir des petits. Le cas des animaux de compagnie et, plus particulièrement des chiens est analysé avec pertinence. Contrairement à une idée répandue, le judaïsme n'est pas « anti-animaux ». Le mot « chien » se dit en hébreu « kélev » ce qui signifie littéralement « comme un cœur ». Le judaïsme, on ne le sait pas toujours, a prévu des paroles spécifiques ( Hamakom yemalei 'Hesronkha, que Dieu remplisse ta perte) pour consoler une personne qui a perdu un animal familier et autorise de donner aux animaux une sépulture, mais pas dans un cimetière d'humains. Les animaux domestiques sont astreints au repos du Shabbat. Mais attention, il ne s'agit pas, prévient Jacques Goldberg, d'aller jusqu'à conférer des droits aux animaux, car ce serait les traiter comme des humains. Or seul l'Homme est à l'image de Dieu !
Un livre vraiment très intéressant.
Jean-Pierre Allali
(*) Éditions Lichma. Janvier 2013. 160 pages. 19,90 euros.
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