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Touristes israéliens - La décision était politique et préméditée, les autorités tunisiennes nient

Touristes israéliens - La décision était politique et préméditée, les autorités tunisiennes nient

 

 

 

L'affaire des croisiéristes israéliensde la Norwegian Jade n'en finit pas. Dimanche 9 mars, 14 passagers israéliens du navire de la Norwegian Cruise Line avaient été interdits de débarquer au port de Tunis.

La ministre du Tourisme Amel Karboul a affirmé hier que la décision n'était "pas politique". Selon la ministre, il est impossible d'obtenir un visa aux frontières et les ressortissants de pays nécessitant un visa doivent l'obtenir au préalable.

Selon les informations du HuffPost Maghreb, ces affirmations sont erronées. Il est non seulement possible pour des passagers israéliens en transit d'obtenir un visa aux frontières, mais la décision de les refouler aurait été prise 24 heures avant leur arrivée.

"Un problème de visa"?

"Ce n'est pas possible, c'est faux", s'est indignée Emira Chamkhia, chef de l'agence Tunisie Maritime, compagnie gérante des escales des bateaux de croisières au port de Tunis depuis 1994. "Ils n'ont pas besoin de visa - en transit, toutes les nationalités peuvent sortir [des bateaux, ndlr] sans aucun problème".

Mme. Chamkhia fait référence à une procédure d'entrée spécifique aux touristes en transit et applicable aux passagers de navires de croisières. Selon le décret 1968-198, un visa de transit, permettant un séjour de 7 jours sur sol tunisien, "est délivré par les représentants diplomatiques ou les consuls de la République tunisienne à l'étranger [...] et en Tunisie par les postes de la "Police Frontière".

"C'est arbitraire", a confirmé la compagnie de croisière MSC Line, dont les bateaux font également escale à Tunis.

Le visa de transit s'applique à toutes les nationalités nécessitant habituellement un visa pour entrer en Tunisie.

Ces dispositions sont publiées encore aujourd'hui sur les sites internet de plusieurs consulats tunisiens à l'étranger, notamment ceux implantés dans des pays dont les ressortissants nécessitent des visas.

La loi tunisienne n'évoque aucune disposition spécifique concernant les ressortissants israéliens. Le décret n'a fait l'objet d'aucune révocation ou complément.

Jusqu'au dimanche 9 mars, les croisiéristes israéliens n'avaient pas rencontré de problèmes pour obtenir le visa de transit, ont confirmé l'agence maritime et une compagnie de croisière habituée du port de Tunis.

Les ministères s'emmêlent

Pour en avoir le coeur net, le HuffPost Maghreb a préféré s'adresser directement aux autorités tunisiennes. Au ministère de l'Intérieur, qui avait pourtant affirmé que les personnes "ne répondaient pas aux conditions légales d'entrée", le porte-parole Mohamed Ali Laroui n'a pas su répondre à nos questions: "Le ministère des Affaires étrangères est censé répondre aux questions de visas".

Direction les Affaires étrangères, où le département des Affaires consulaires renvoie la balle: "On ne s'occupe pas des visas, on transmet au ministère de l'Intérieur".

Retour à la case départ, donc. La Direction des Frontières et des Etrangers, département du ministère de l'Intérieur, est en charge de ces questions et nous confirme les dispositions légales: Pour les nationalités nécessitant un visa, "il est possible d'obtenir un visa de transit, valable 7 jours". Ce visa peut être obtenu directement "à l'aéroport ou au port maritime".

Et finalement: "C'est la police des frontières qui décide".

La ministre du Tourisme Amel Karboul, qui avait affirmé qu'il n'était pas possible d'obtenir un visa "à l'arrivée", semble ne pas avoir été mise au courant par le ministère de l'Intérieur.

Entre l'Intérieur et le Tourisme, la communication semblait déjà brouillée. Alors que le porte-parole de l'Intérieur avait refusé de confirmer la nationalité des passagers refoulés, Amel Karboul faisait hier référence à "14 touristes israéliens".

Une décision préméditée et politique

Ce n'aurait pas été la première fois que des Israéliens se voient refoulés arbitrairement par la police des frontières.

En 2012, six touristes israéliens d'origine tunisienne auraient ainsi été refoulés à l'aéroport de Tunis-Carthage. Six heures après leur départ, les autorités tunisiennes seraient revenues sur leur décision d'interdire le séjour aux ressortissant israéliens.

Mais cette fois-ci , la décision a été prise 24 heures avant l'accostage du bateau. Soit bien avant que la police des frontières n'ait pu examiner les passeports des touristes israéliens et constater qu'ils ne remplissaient pas "les conditions légales".

La chef de l'agence Tunisie Maritime, chargée du débarquement des navires de la Norwegian Cruise Line (NCL), a déclaré au HuffPost Maghreb avoir reçu un appel téléphonique du "chef de la police des frontières" dès samedi matin.

"Il a prévenu que les ressortissants israéliens ne seraient plus autorisés à débarquer jusqu'à nouvel ordre", a rapporté Mme Chamkhia. L'agence a immédiatement prévenu tous les armateurs.

La compagnie de croisières MSC, également cliente de l'agence, a confirmé avoir été prévenue dès samedi par email.

NCL affirme de son côté ne pas avoir reçu d'info à l'avance et fustige une "décision de dernière-minute du gouvernement tunisien". Mais l'agence maritime déclare non seulement leur avoir envoyé le même email qu'à MSC - l'agence a refusé de nous communiquer ce courrier par discrétion professionnelle - mais également que la compagnie de croisières avait répondu, le jour même, pour demander des explications.

Dénonçant une "discrimination", la Norwegian Cruise Line a publiquement annoncé mettre un terme immédiat à ses escales tunisoises.

Pourquoi la compagnie nie-t-elle avoir été prévenue?

A l'annonce de l'incident, plusieurs médias, notamment israéliens, se sont déchaînés sur la compagnie. Des passagers avaient rapporté n'avoir été prévenu qu'au dernier moment par l'équipe du bateau.

Pour la compagnie, avouer avoir été mise au courant 24 heures à l'avance revenait à avouer une erreur de gestion grossière vis-à-vis des passagers. Mettre un terme aux escales à Tunis envoie un message fort à sa clientèle, notamment israélienne.

Dans cette affaire, plusieurs questions restent sans réponses. D'où vient la décision politique, exprimée par le chef de la police des frontières, de refuser "jusqu'à nouvel ordre" l'entrée - en transit - aux ressortissants israéliens?

Le porte-parole du ministère de l'Intérieur affirme: "Nous n'avons prévenu personne". Pourquoi les autorités tunisiennes n'officialisent-elles pas la décision? S'agirait-il d'une nouvelle politique portée uniquement par la Police des Frontières?

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