Le destin est un prenom

Le destin est un prénom

“Le prénom est un destin”, Zemmour dixit. Il aurait raison plus encore qu’il ne croit s’il y incluait la dimension spirituelle. Si j’ai bien compris, son souci c’est plus d’intégrer l’homme dans une culture que de l’ouvrir à une dimension véritablement métaphysique. Mon prénom par exemple vient de l’ancien prénom romain Marcus. C’est aussi le prénom d’un évangéliste. J’aurais donc toutes les raisons d’être satisfait, de me sentir français. Mais c’est aussi dans la langue française le synonyme sonore de “marque” au sens de trace laissée par quelque chose sur autre chose, marque de pneus de voiture sur le sol, marque d’un coup sur la peau ou sur l’âme ? Un Marc est-il marqué ? Jusqu’où irait le double sens de ce monosyllabe dont la brièveté violente n’est suivie d’aucun adoucisseur vocalique comme le Marco italien ou le Markus allemand. Si bien que spontanément, à l’étranger, on m’appelle Marco ou, si c’est l’Allemagne, on allonge la voyelle, ce qui donne le musical [Ma:rk] qui offre une deuxième jambe à la sonorité unijambiste. Le nom serait-il un accord musical qui accorde une personne ? L’Égyptien ancien le pensait.

Ensuite, il faut interroger le choix des parents. En dehors des anciennes traditions qui voulaient impérativement que les prénoms s’héritent pour qu’on y reconnaisse une sorte de lignée (liens du sang), aujourd’hui une culture d’origine, un choix de civilisation (Mohammed/ David/ Kim), ou suivre une mode (Shirley/ Edric), il semble que le prénom est doué d’une force subtile qui ouvre soit aux superstitions, soit au spirituel. Et parfois, ça se vérifie !... Les Suzanne seraient chastes, les Catherine autoritaires, les Pierre solides et honnêtes, marqués ainsi pour la vie !

Ensuite on entre dans une dialectique subtile que Zemmour souligne dans une interview, (*) au sujet de Zebda qui dirige un groupe de musiciens toulousains d’origine algérienne bien intégrés dans la culture française et engagés dans la politique notamment en faveur de la Palestine, avec la chanson Une vie de moins, dont les paroles sont de Jean Pierre Filiu, universitaire et orientaliste bien connu. (video). La mère de Zebda donc, aurait dit à son fils créateur du groupe : “Sois français mais ne le devient jamais”, prenant ainsi à son compte la fameuse “taqîya” qui en arabe signifie dissimulation, prudence, crainte. C’est ainsi qu’on arrive à opposer de la théorie zemmourrienne qui prétend intégrer par le prénom le nouveau venu d’une culture extérieure dans sa culture d’accueil. De fait, Zemmour a aussi les prénoms de Justin et Léon (lien du sang), mais précise (le point.fr, 01.04.2010) : “A la synagogue, je m'appelle Moïse”. Donc, quand on creuse on arrive au paradoxe, pas si difficile à comprendre. S’intégrer en surface oui, en profondeur on reste ce qu’on est, ce qui nous a formés du ventre maternel à sept ans et bien au-delà.

Un certain Jean Luc Mélenchon qui défraye en ce moment l’actualité, se mesurer à cette aune. Arrivé de Tanger en France à 11 ans, il est français par sa brillante culture, son maniement impeccable de la langue française et aussi marocain par son imprégnation maghrébine, son Tanger natal. Mais, n’ayant pas l’heur d’être juif-marocain comme Z l’est berbère, il se veut mondialiste tandis que Z affiche un nationalisme crypto-catholique alors qu’il est national-sioniste. Z et JLM sont au fond deux étranges Français étrangers qui s’excluent et excluent. Quant au prénom, difficile d’être plus helléno-chrétien. Jean, philosophe métaphysicien et Luc le médecin des âmes. JLM du GOF et Eric de la Synagogue étaient faits pour s’entendre. Ils se détestent. Ainsi est filée par les Parques la destinée d’EZ et JLM. Un Mélenchon président ferait de Zemmour le ministre idéal pour “dégraisser le mammouth3, voire l’occire, car, contrairement au pachyderme préhistorique, il est si coriace que seule une solution finale aurait quelque chance de transformer la grande armée zapatiste qu’est devenu l’Éducation Nationale en une armée de métier qui nettoierait mieux les “quartiers” qu’une Tsahal à la française.

Marc Gébelin

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