"Mimétisme revisité" lecture sur le livre de Nathalie Ohana

" Si au fond de notre inconscient, nous sommes devenus capables d' effacer dans une certaine mesure les griefs ressentis contre nos parents, nous pouvons alors être en paix avec nous même et aimer les autres dans le vrai sens du mot " 
Mélanie Klein extrait de " L' Amour et la haine : le besoin de réparation " 1937
 

Mimétisme revisité

Suite à l’appel désemparé de son père, sauter dans l’avion pour se rendre au chevet de sa mère.

Et si nos parents devenaient nos enfants ? Angoisse inversée qui circule au point de rejouer une tendresse incontournable.

Est-ce à dire que la répétition met en relief nos résistances ? Comment aimer sans dessaisir ?

Nathalie Ohana nous livre le récit de sa progéniture en pensant écrire sur son cheminement. Vies enchevêtrées.

Il en résulte un portrait d’une mère exilée dans une estime écornée, qui vivra par procuration l’ascension de sa fille à l’insu de son propre épanouissement.

Sacrifiée, dévouée avec emphase, son statut de Mère de Nathalie comme ultime identité.

Sous l’angle incisif de la coach devenue, l’auteur aborde la filiation avec ses ravages et ses bienfaits. Jamais dupe ni superficielle, elle repasse le film de son adolescence, la course effrénée aux concours laminants.

Elève, domestiquée à devenir une autre, propulsée dans un milieu élitiste d’hypokhâgne.

La marge fut ressentie de façon aigüe : étrangère dans un autre monde où sa mère n’avait pas les codes.

Tenue de défier les rejets subis par son grand-père Tunisien et sa mère travaillant au Crédit Lyonnais. Œuvrer pour leur réparation tel fut son parcours !

Braver l’énoncé abscons du philosophe Althusser, première dissertation qui pointa ce sentiment d’imposture!

La relation asymétrique se réajuste dans la chambre d’hôpital où sa mère passive, réduite au coma entendra pour la première fois sa fille lui dire son amour.

Mère démineuse ‘’ tu voulais retirer tous les objets coupants pour que je puisse marcher pieds nus sur un tapis de fleurs ’’.

Mère rempart, bileuse du bien être de sa fille ….

’’ J’ai été l’enfant qui gomme, qui comble, qui répare, qui rattrape….pour apaiser tes peurs, je m’abstiens de jouer, d’écrire, de faire du bruit ….te confirmer que je restais de ton côté…sans embûche, je n’avais rien vécu…..Alors je descendais avec les personnages de mes lectures tout au fond de leur intimité pour trouver l’intensité qui manquait à mon existence ‘’.

Devenir déraisonnable, un défi à transgresser, une fois adulte, loin du foyer qui l’a confisquée !

Parcimonieuse par pudeur, l’auteur parle peu de sa coulisse de femme advenue.

Page 106, 107 elle nous livre un parallèle sur le lien impossible vécu dans ses précédentes relations amoureuses, sa nécessité d’être veillée par eux, maintenue par une relation calquée sur celle vécue avec sa mère.

Est-ce la disparition de son regard, de sa voix qui la prend au dépourvu ?

Née sous césarienne, le cri premier de naissance semble lui avoir manqué, elle en fera sa maïeutique pour accoucher les êtres qui ont oublié de se réaliser au plus près de leur vérité, sans porte-à faux.

Un livre poignant qui réveille de beaux émois.

Vanessa De Loya Stauber - Psychanalyste

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