Albert Naccache : Adieu, Jacques
Jacques Benillouche vient de nous quitter après un combat contre la maladie.
Dans son article “L’immunothérapie contre le cancer” publié le 7 mars 2023, il décrit pour ses lecteurs sa lutte et son espoir de l’emporter.
“Pour moi le diagnostic est tombé brutalement alors que l’on s’attend le moins, surtout qu’aucun signe révélateur ne le laissait penser“.
Sa mort a suscité des centaines de réactions unanimes de femmes et d’hommes d’opinions diverses fort attristés par sa disparition, dont de nombreux Tunisiens comme Michel Hafayedh, ami des Juifs.
Tous saluent le grand journaliste, apprécient la qualité de ses analyses et sa connaissance de la politique israélienne, des partis et des hommes, ainsi que de tous les sujets qu’il traitait.
Alors, comment présenter Jacques Benillouche ?
Le Journaliste
Après avoir agi comme journaliste indépendant dans de nombreux organes en France et en Israël, il a fondé en juin 2010 sa revue internet “Temps et Contretemps” dont il assurait la direction et la rédaction en chef.
C’est un site de qualité qui publie des analyses concernant Israël, le judaïsme, la politique franco-israélienne, le Proche-Orient et le Maghreb.
Il dirigeait une équipe d’une quinzaine de journalistes aux opinions très diverses, qui écrivaient des articles exclusifs de qualité.
Il m’avait embauché comme “papy flingueur”, lui qui aimait bien se qualifier de “tonton flingueur”.
Ses journalistes avaient carte blanche sur le choix des sujets et les idées défendues. Les articles envoyés étaient publiés dans la journée. Jacques y rajoutait parfois l’illustration qui manquait et assurait la mise en page.
A chacun de ses voyages à Paris il nous rencontrait dans un resto, tunisien de préférence.
Car Jacques était un fin gourmet qui connaissait toutes les bonnes adresses, le meilleur poissonnier de Netanya, le marchand de Bomboloni qui ravissait les enfants, le meilleur marchand de casse-croutes tunisien de Netanya, le resto de grillades à connaitre à Ramat Aviv…
Le collègue IBM et l’informaticien
Jacques avait été auparavant mon collègue à la Cie IBM France, où avec Jacques Benacin, Roger Zana, Annie Korsia, Marc Bismuth – tous tunes – nous avions participé à la modernisation de la France.
Mais Jacques fut un ingénieur prodigieux, le plus brillant d’entre nous. Il fut le premier spécialiste français du télétraitement et du logiciel CICS qui permettait aux ordinateurs IBM de communiquer entre eux. Il fonda ensuite des sociétés informatiques dont le groupe ANASSY, dont il fut le PDG.
Jacques le Tune
Jacques fut d’abord le jeune juif tunisien fort en maths, fruit de la dernière et plus belle époque du judaïsme tunisien.
Son enfance en Tunisie est pétrie de ce mélange unique de culture juive tunisienne et française que l’on retrouve dans tous les récits nostalgiques de nos enfances tunisiennes. Le sien est intitulé “Les larmes de l’exil“, publié en 2006 chez La Bruyère.
Dans certains de ses articles il raconte ses promenades avec son père, Avenue de Londres, Rue de l’Alfa, jusqu’à l’ancien quartier juif de la Hara et son ancienne grande synagogue détruite depuis. Il raconte aussi ses Pourim tristes à Tunis.
Comme Jean Corcos et Francis Moritz, je suis sous le choc.
Que la terre d’Israël te soit légère, Jacques. Nous t’aimions tous.
© Albert Naccache