Je suis de formation bilingue. Judéo arabe et français.
Je suis judéo-arabe. Juif né en Tunisie. Je ne pense pas que cela gêne quiconque.
Donc je parle et j’écris ces deux langues. Je palabre en judéo selon mes souvenirs.
Je n’ai pas choisi, Meiha m’a appris le judéo arabe du moins oralement.
Bcp d’entre nous le parlent sans aucun complexe.
On pourra toujours traduire le judéo arabe en français, jamais le français ne pourra illustrer le son, l’écho et cette symphonie. Ce n’est pas possible.
Cette langue est belle très belle, riche et surtout très imagée pour celui et celle qui la comprend.
Si je parle la langue des mes aïeux ce n’est pas parce que j’ai envie d’en parler mais c’est surtout pour rappeler à ma mémoire mes disparus à travers cette langue. Je fais revivre surtout leur mémoire.
Dans le premier ADRA….de HARISSA.COM, il était bien spécifié de raconter son vécu en Tunisie.
Les juifs tunes étaient donc en première ligne pour se raconter. Lorsque j’ai mis les pieds pour la première fois là bas, j’ai lu qqs souvenirs mais j’ai lui aussi bcp de politique. Sur le forum, tout tournait autour de la politique, il a eu détournement du sujet au profit du moyen orient.
Or la politique n’a jamais fait rire qui que soit et je me suis rendu compte combien les juifs tunes se sont politisés EN France alors que lorsqu’ils étaient au pays la politique était absente des conversations dans les cafés ou peu vécue en ce temps là.
Bref, on ne rigolait pas sur ADRA, chacun cherchait à quereller l’autre. L’esprit juif tune a fait long feu et c’est un autre esprit qui l’a remplace.
Sur FB, j’ouvre des rubriques bien précises, des sujets circonstanciés qui n’ont rien à voir avec la politique qu’elle soit arabe ou autre…
Ailleurs c’est pareil, tout est bon pour détourner des rubriques au profit des intérêts de ceux et celles qui sont fanatisés par des idées qui leur appartiennent.
Je suis désolé mais je souhaite que l’on respecte le sujet d’une rubrique sinon cela dénature complètement l’idée que je me suis faite à savoir parler de ce qui peut nous faire rire et non se confronter dans des débats stériles qui donnent le sentiment de reculer au lieu d’avancer.
Sur YE HASSRA….Il y a eut un désastre, une hécatombe de mots et de oui dits qui ne sont pas conformes à notre esprit. Le respect est tombé lamentablement et cela est désolant.
Je suis donc judéo arabe.
Après 1967, les juifs ont prit conscience qu’il fallait partir suite aux douloureux événements qui ont suivi . La Goulette se dépeuplait peu à peu de ce qui restait comme familles juives.
Tunis aussi a suivi. Ainsi que les autres villes intérieures du pays.
Entre amis goulettois, on ne parlait pas judéo arabe mais en français, le judéo était permit qu’en famille, à la maison, surtout lorsqu’il y avait la mémé, le pépé le papa ou la maman qui peinait à parler français.
Donc, l’environnement juif ayant disparu à la Goulette peu à peu, je me suis retrouvé avec un environnement arabe, un voisinage arabe dont je n’ai jamais souffert aussi bien pour maman que pour nous même.
Nous étions respectés et appréciés et jamais une mauvaise allusion de la part de ces bonnes familles arabes et musulmanes. Cependant dans mon travail, j’ai du revoir mon parlé judéo que j’abandonnais peu à peu pour discuter dans la langue populaire arabe dite de rue.
Les arabes reconnaissaient le juif à son parlé ou le CHE faisait la différence avec le SSE….Il me fallait donc changer la prononciation pour ne plus apparaitre juif dans ma relation avec les clients.
C’était ma façon de me noyer parmi ma clientèle arabe. Dans le quartier BAB EL KHADRA tout le monde savait que j’étais juif et tout le monde là bas m’appréciait et pour cause papa était connu comme un homme de bien. Il ne faisait aucune distinction entre indigents arabes et juifs et tous avaient leur obole le vendredi matin. Et ca les commerçants arabes du quartier l’ont retenu.
Nous avons donc hérité , après la disparition de papa, de la bonne renommée de DEIDOU et jamais nous n’avons eu à souffrir d’un quelconque mépris. Lors des événements du bombardement de HAMAM-BOURGUIBA contre le QG de ARAFAT, nos voisins ont fait barrage devant notre magasin durant les manifestations hostiles aux israéliens. Un drapeau israélien fut même brulé devant ma marbrerie. Je rappelle cela pour prouver que contrairement aux idées reçues, mes voisins musulmans à leur corps défendant m’ont même conseillés de ne pas baisser le rideau face à une horde prête à tout. ‘…Nous sommes là Albert .. !’ M’ont t’il dit. Idem pour la famille HANANA mes voisins de la Goulette.
Du judéo arabe, je muais ma dialectique au point qu’aucune personne étrangère ne pouvait savoir ce que j’étais. J’étais un citoyen juif à part entière, dans ma tête, comme les autres musulmans qui parlaient l’arabe.
Personne ne pouvait faire la distinction dans mon parlé car du mot….HACHIT….Je disais HASSIT.
‘…..Hassit él ghorba ouel ouach fi FRANSSA….Ouakt khelit Tounes el jamila jéden.. !’
J’ai senti le manque et la nostalgie de mon pays lorsque je suis venu en France….Lorsque j’ai quitté TUNIS LA TRES BELLE… !’ El nââr e’dec bakit …J’ai donc pleuré ce jour là… !’
CHAPITRE 3°.
Enrico Macias dans l’une de ses chansons dit ‘…Je suis un juif-arabe…’ Sans dire algérien. Donc un juif de l’univers arabe puisqu’il a vécu une bonne partie de son enfance là et ses ancêtres sont enterrés là bas.
Je suis donc tout comme lui, un juif arabe, juif de naissance usant du parlé judéo. Ce qui me permet de me faire comprendre dans tous les pays arabes.
Les juifs goulettois partis voilà que mon judéo donc s’éclipse sous le nouvelle environnement au profit de l’arabe parlé dit de rue ou populaire. Mais plus encore, je suis rentré aussi dans la culture arabe tunisienne où le respect est primordial, je suis rentré dans la mentalité arabe alors que je vivais avec la mentalité juive. La différence entre ces deux cultures est assez proche tout premièrement par la langue puisque le parlé judéo et l’arabe sont cousins. L’écriture les différencie mais pas le son.
Un nombre incalculables d’expressions et de mots ne se différencient entre eux que par la prononciation. Secundo notre façon de vivre très sémite. La mloukiye le couscous pour ne citer que ces deux plats ont les mêmes ingrédients et le même gout à qqs exceptions prés.
Autant l’hospitalité chez nous est porté au maximum de sa valeur autant chez les arabes elle vaut autant que la notre. Une différence de taille cependant, notre pensée juive , qui est devenue pour certain , n’a pas la même liberté que celle chez les arabes.
Bien que vivants entre nous, juifs, notre communauté a le privilège d’être libre c'est-à-dire contradictoire alors que chez les arabes, et je l’ai constaté en plusieurs occasions en parlant en groupe, cette pensée est dirigée, elle est fait partie de la HOUMA. Elle ne peut être personnelle. C’est la pensée unique sauf pour une élite d’arabes.
Plus simplement, chez nous si un chainon veut se détacher, s’il pense autrement que l’ensemble de l’assemblée, il ne sera pas pour cela ‘exclu’ de la communauté alors que chez eux si un chainon s’aventure à penser librement il sera mal vu et promu aux hégémonies. Chez nous le sermon est entendu mais pas souvent appliqué chez eux, il fait force de loi. FATWA.
La solidarité chez nous ne prend son sens que si toute la communauté est mise en danger. Sinon c’est la routine. Chez eux la solidarité ne dure que qqs heures, le temps des manifestations. Puis tout retombe comme un soufflet.
Pourquoi judéo arabe en ce qui me concerne… ! Parce que j’ai aussi partagé leurs pâtisseries donc goutés à leur plat traditionnel tout comme eux aussi ont gouté aux nôtres. Partagé des kifs dans la même table sans que cela ne pose soucis.
J’ai donc eu aussi la chance de constater que je me faisais bien comprendre avec les arabes tant que j’usais leur langage en cachant mon CH. CH qui fallait bannir bien que chez eux on dit ‘…Chkoun… !’ Et nous aussi ‘…CHKOUN… !’ Mais pas CHAMAHNI en judéo mais SAMAHNI.’…TOUNCHI….TOUNSSI…’ C’est dire que la prononciation peut trahir un juif tune dans sa façon de parler vis-à-vis d’un arabe.
Le judéo s’écrit comme je l’ai dit BEL TEFCHIR, en langue hébraïque (voir par exemple la haggadah) ou alors la traduction de l’hébreu en judéo.
‘..E’ne ââtit rayi, méni kheyef cen men rabi. Yem’kon ghallét ou rabi i chamah’ni. Col ouhad yegh’leut fél dénie e’di. Oueli mé yegh’lotf ouyé nabi. Mé’nich nabi, rani e’ssen hor ou ménich marbout.
‘…J’ai donné mon avis personnel, je ne crains personne sauf D ieu. Peut être certes que je me trompe et que D ieu me pardonne. Chacun peut se tromper dans cette vie. Celui qui ne se trompe pas est un saint, un messager de D ieu. Je ne suis pas celui là, je suis un humain libre et surement pas emprisonné dans des idées préconçues.
Salem aalikom ou barakat allah. Je vous salut et que la paix soit sur vous tous.
Challom leitraot.
Comme toujours, Breitou, ...avec beaucoup d'esprit et de sentiment tu sais traduire ce que bon nombre d'entre-nous, ont constaté, appris,....
surtout apprendre l'autre, le conquérir et en faire son coéquipier dans le chemin de la vie...
j'aurai aimé, comme toi, connaitre ce judéo-arabe si cher à nos parents.
il en reste bien sur un peu, surtout pour faire rire ma fille, car comme tu dis, "intraduisible".........
continue à etre toi-meme, pour le plus grand bonheur de bon nombre d'entre-nous, heureusement.
à mon tour de dire que mes rubriques restent "muettes" bien longtemps pour avoir constaté qu'elles étaient en dehors de tous les sujets d'Adra...
je pense réellement que mes souvenirs, si communs à tous, doivent restés dans mon coeur et n'en sortir que pour enrichir ceux qui m'entourent.
aussi aujourd'hui cher Breitou, tu es un incontournable de ce site.Que Dieu veille sur toi et ta famille et continue comme tu l'as toujours fait.
je te souhaite un très bon CHABBAT CHALOM et à tous nos amis lecteurs.
cherAlbert braitou je me confie que plus d une fois je relie tes ecrits
tu rememorises quelque chose qui disparait avec la perte d un parent ou d un proche ou meme d un voisin de palier - des tas de souvenirs!
un juif de Tunisie qui ne saurait comprendre ce que tu ecrit est pauvre de cette culture judeo arabe que des parents ont laisse trace dans le quotidien comme pendant les fetes juives
je comparais la communaute juive en Tunisie a un arbre a 1000 branches
et lorsque une branche se cassait ou disparait toute la commaunaute etait dans une profonde tristesse il en ait qui disait : mais oui je le connaissais ! alors qu il avait cotoye qu une fois ou deux
cher Braitou je prend plaisir a lire et relire ton judeo arabe ainsi que celui de tes proches z"al les proverbes et tout ce qui est ecrit avec innocence et beaucoup d humour -
Pourim sameah et shabat shalom ainsi qu a tous les participants d harissa
MERCI A TOI PATRICIA TOI QUI NOUS A CONNU MIEUX QUE QUICONQUE....BONNE FETE DE POURIM...ELI I TRAHOT...RM.
CHAPITRE 4°.
Je suis judéo arabe par ma langue.
J’ai donc partagé mes us et coutumes avec l’habitant durant de nombreuses années.
Question que vais-je faire de mon judéo arabe plus tard… ? 60 ans à le parler, parfois tout seul dans ma tête et 30 ans avec mes parents. Et surtout avec MEIHA. Depuis, je peine à trouver des amis qui le parlent aisément sans que vienne un mot ou plusieurs en français pour combler le vide.
Mes enfants l’ignorent donc aucun échange sinon je m’entends dire ‘…PAPA….On ne comprend rien… !’ Mes petits enfants disent qqs mots en me regardant et surtout en rient en déformant les mots, alors j’en rie aussi. C'est-à-dire que mon judéo est devenu une attraction, une bête de cirque qui fait rire. Que vais-je donc en faire… ? Même si je l’enfermais dans un placard personne n’ira ouvrir ce trésor, il ne vaudra plus rien plus tard. Il sera mité et aura disparu.
L’assaisonner comme des variantes dans un bocal personne n’y goutera et que même le pot sera jeté mis dans la poubelle. Oublié, effacé certes oui personne n’en voudra de ma langue, elle sera donc enterrée avec moi avec l’espoir qu’en haut, je pourrais enfin dialoguer avec mes ancêtres qui sont partis sans le français. Là bas, je parlerai qu’en judéo avec eux laissant mon ancien français sur terre.
J’imagine déjà rencontrer MEIHA, papa maman et tous les autres qui me diront, dans 40 ans,
‘ …Biber ye ouldi, marhaba bik jit bahdénè….? Bébert, mon fils, tu es venu prés de nous…! ‘
‘….Okyod haderna shan bsal ou loubia kif me thabé…. ! ‘…. On t’a préparé un ragout d’haricots comme tu l’aimes… !’
Et là, je m’assoirai sur la hssira, étendue à même le sol noir, autour du bon plat chaud et avec mes doigts, je couperai mon bon pain de misère, je ramasserai mes haricots collées avec mon bout de kobz et je dirais ‘…Yé rabbi cadéch bniné el bsal ou loubia…. ! ‘…Comme elle est délicieuse cette bsal ou bounia… !’Oui lorsque la fin des haricots arrive sur terre, il reste encore l’espoir d’en gouter bcp d’autres ailleurs.
Mais en attendant, je leur dit d’ici, que je préfère encore celle d’ici que je partage avec ma femme, mes enfants et petits enfants, je préfère celle d’ici fade parfois que bien assaisonner là haut parce que comme on dit chez nous ‘…Nerda naïche tacht jouéneh débbèna khir mél gbar… !’ Je préfère encore vivre sous les ailes d’une mouche sur terre que sous une tombe… !’
SHOCHOTTE A ECRIT....
Comme toujours, Breitou, ...avec beaucoup d'esprit et de sentiment tu sais traduire ce que bon nombre d'entre-nous, ont constaté, appris,....
surtout apprendre l'autre, le conquérir et en faire son coéquipier dans le chemin de la vie...
j'aurai aimé, comme toi, connaitre ce judéo-arabe si cher à nos parents.
il en reste bien sur un peu, surtout pour faire rire ma fille, car comme tu dis, "intraduisible".........
continue à etre toi-meme, pour le plus grand bonheur de bon nombre d'entre-nous, heureusement.
à mon tour de dire que mes rubriques restent "muettes" bien longtemps pour avoir constaté qu'elles étaient en dehors de tous les sujets d'Adra...
je pense réellement que mes souvenirs, si communs à tous, doivent restés dans mon coeur et n'en sortir que pour enrichir ceux qui m'entourent.
aussi aujourd'hui cher Breitou, tu es un incontournable de ce site.Que Dieu veille sur toi et ta famille et continue comme tu l'as toujours fait.
je te souhaite un très bon CHABBAT CHALOM et à tous nos amis lecteurs.
MA REPONSE.
Tu as tort de penser ainsi, tes souvenirs t'appartiennent et tu les racontesd très bien qu'importe si on répond ou pas l'essentiel est qu'ils te sortent du coeur, tu écrits pour toi et seulement pour toi...Un plat ne peut être apprécié que s'il est fait par ses propes mains donc....Continues... HAG SAMEAH....
ELLI N'TAYI...TYAKOM...Ce qui est à moi et à vous. Ce qui est en moi et en vous...Eli fi calbi fi kloubkom..
Merci, .....
CHABBAT CHALOM et BONNE FETE DE POURIM.
Ye Breytou Laa'ziz
Le Judéo-arabe ne disparaitra pas de sitôt. Il y a des centaines de livres qui furent imprimés dans cette langue qui nous est très chere.
Les premières imprimeries en Tunisie, au 19e siècle, avaient déjà imprimé des livres traduits du Français.
Personnellement j'ai lu "Les 3 Mousquetaires", pour la première fois, en Judéo-arabe, avant de le relire en Français.
J'ai, dans ma bibliothèque, les 26 tomes du grand Roman local "Seyf-El-Ajjel", qui fut imprimé, il y a plus d'un siècle, comme tous les autres, en caracteres Hebraiques. Tous les vendredis j'achetais, pour mon pere, l'hebdomadaire en Judeo-arabe "El-Nejma"
Même si les futures générations ne la parlent, ni la lisent plus, les pages imprimées seront témoins de la richesse de notre passe, et les savants sauront les apprécier.
Comme d'habitude je prends, à chaque fois, un grand plaisir quand nous parlons au téléphone dans notre langue, même si des fois je sens que parce tu as quitté le pays bien après l'indépendance, tu avais adopté quelques mots de ceux qui nous ont expulsés de nos quartiers.
Ye Bébert h'abibi, je me joins a tout ce qu'ont dit nos amis et te félicite pour tes talents qui font notre bonheur.
Merci Braham pour ce que tu dis....En effet le JUDEO fait partie de notre patrimoine. Mais sera t'il encore parlé dans qqs décennies...???
|