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Été israélien et printemps arabe : rien à voir !

 

Été israélien et printemps arabe : rien à voir !

 

Des centaines de milliers de manifestants ont défilé ce week-end dans les rues de Tel Aviv. Pas de policiers sur le parcours. Pas de magasins pillés. Juste un rêve : celui du « bel Israël ».

L’action se déroule en Israël, c’est-à-dire nulle part, ce pays ne figurant pas en effet sur les cartes de nombre de ses voisins arabes. Sur l’avenue Rothschild des centaines de tentes. Devant, dedans, des jeunes, garçons et filles mêlés. Au-dessus de certaines tentes, comme sur un petit nuage, flotte l’odeur douçâtre de ce que les connaisseurs appellent le « shit ». Et dans les tentes se passent des choses que la morale réprouve… C’est jeune, c’est gai, c’est festif.

Les tentes sont là pour crier que les loyers sont exorbitants en Israël. Pour dire que la vie est dure, trop dure. Pour réclamer un peu plus de justice sociale. Et régulièrement des dizaines de milliers de manifestants (400 000 samedi dernier !) défilent dans les rues des villes israéliennes avec les mêmes revendications. Des manifestations parfaitement étranges, vues de France. Il n’y a pas un seul policier sur leur parcours : ce n’est pas nécessaire. Et en queue de manif des centaines de jeunes ramassent scrupuleusement canettes, sachets et autres détritus : ils aiment que leurs villes restent propres.

Confrontés à cet évènement singulier, un certain nombre de crétins hexagonaux rouges-verts (le vert de l’Islam) se prennent à espérer. Après le printemps arabe, l’été israélien… Enfin « l’entité sioniste » vacille ! Et d’un trait de plume ils prolongent la place Tahrir jusqu’à l’avenue Rothschild. Il y a de cela quelques dizaines d’années, un doux hurluberlu du nom de Mouna Aguigui, vedette du Quartier Latin, s’était concocté un programme électoral qui se résumait ainsi : prolonger le boulevard St Michel jusqu’à la Méditerranée ! Il était passé maitre dans l’art du canular et c’était drôle. Les adeptes du dictionnaire des idées creuses qui veulent relier la place Tahrir à l’avenue Rothschild sont, eux, tout simplement sinistres. La révolte rend digne. La haine rend bête.

Non, les centaines de milliers de manifestants israéliens ne sont pas sortis des synagogues en hurlant : « Dieu est grand ! ». Nous sommes à Tel Aviv, pas au Caire.

Non, ils n’ont pas pillé les magasins. Nous sommes à Tel Aviv, pas à Tunis.

Non, la police de l’état hébreu n’a pas tiré dans le tas. Nous sommes à Tel Aviv, pas en Syrie.

Non, les avions de l’Otan ne sont pas venus bombarder les forces de répression israéliennes. Nous sommes à Tel Aviv, pas en Libye.

Non les manifestants israéliens ne réclament pas la démocratie : ils l’ont déjà. Nous sommes à Tel Aviv, pas dans une capitale arabe.

Il se passe en Israël quelque chose qui ressemble à une insurrection morale, soutenue par un vieux rêve. Celui qu’on appelle là-bas le « bel Israël ». Du temps de l’état-providence. Du temps des kibboutz quand, image d’Épinal et pourtant bien réelle, les professeurs d’université allaient cueillir des oranges en compagnie des trayeuses de vache. Tous égaux. Quand des jeunes filles en short et en débardeur, conduisaient des tracteurs, la poitrine barrée par un fusil. Bien sûr que ce rêve ne reviendra pas. Mais il s’agit quand même d’un rêve, pas d’un cauchemar.

Et les Palestiniens ? Et la paix israélo-arabe ? En mettant en parallèle les révolutions arabes et les défilés de Tel Aviv certains pourraient, par facilité, par paresse, être tentés de déduire que les Israéliens sont culturellement supérieurs à leurs voisins. Rien de tel. Ils ne sont ni meilleurs ni pires. Ils sont simplement autres. C’est pourquoi il est fortement probable que la paix israélo-arabe ne soit pas pour demain. Elle viendra un jour. Le jour où place Tahrir il y aura, comme sur l’avenue Rothschild, des tentes avec des garçons et des filles, fraternellement mêlés, révoltés et égaux.

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