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Années fascinantes (1954-1957), à Anières-Genève, à l'Institut ORT. (2ème partie/4)

Années fascinantes (1954-1957), à Anières-Genève, à  l'Institut ORT. (2ème partie/4)

 

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La frontière Suisse-France

L'institut était situé à quelques centaines de mètres de la station de douanes Suisses pour le passage en France.

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Après un no-men-s-land de prés d'un kilomètre on passe la douane française et on entrait dans le village de Veigy.  On traversait cette route en vélo, on y allait souvent, pour économiser quelques sous. On y pour s'y couper les cheveux ou pour poster les lettres aux parents ou amis. Le timbre pour une lettre de Genève vers  l'Afrique du Nord coutait beaucoup plus cher que celle qu'on envoyait par la France.

 

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Alors nous nous arrangions à tour de rôle et un de nous collectait toutes les lettres des amis pour les envoyer de Veigy.

Nous étions bien connus du personnel des deux cotés de la frontière, qui ne nous faisaient aucun problème. Nous étions bien reçus par les habitants du village français et certains de nos amis faisaient partie de l'équipe de football du village, et y allaient souvent s'entrainer.

 

La Direction

 Une très dynamique secrétaire avait servi  trois directeurs durant les années 54 55 et 56, Mme Warm. C'est une Dame qui aidait de tout cœur chaque étudiant qui allait la voir.

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Mr Berlant qui a pris son poste après qu'il fut remplacé, à l'école de Tunis, par son second,  Mr Aberstein. Mr Berlant s'habillait élégamment et portait souvent un papillon.  Le souvenir le plus charmant que je retiens fut quand il prit son dessert à la salle à manger  (le Directeur déjeunait le plus souvent avec nous à sa table spéciale), il avait épluché puis découpé une poire avec un couteau et une fourchette. Je n'avais jamais vu cela auparavant.

Vers la printemps 55, il fut remplacé par celui qui l'avait déjà remplacé à Tunis. Un monsieur sérieux, à qui personnellement je dois beaucoup. J'avais senti, une sympathie spéciale pour ses anciens jeunes élèves qu'il avait connus à Tunis. Il avait arrangé avec la direction centrale de l'ORT, de nous verser une certaine somme mensuelle, comme argent de poche, et plusieurs autres aides qui facilitaient, pour certains, la vie loin de la famille. Vers le milieu de ma deuxième année, il fut promu  au bureau central de l'ORT et remplacé par Mr Wolskyque j'ai eu malheureusement peu de temps de connaitre.

La direction était assistée par Mr Sacerdoté, l'économe, qui devait faire marcher la Maison avec le budget dont il disposait. Il était d'origine italienne. Il était habillé très chic, bien rasé et parfumé. Ce qui m'avait impressionné le plus étaient les soins qu'il donnait à ses ongles, ils étaient toujours impeccables.

 

Le corps enseignant

Ce qui a été nouveau pour nous dans l'enseignement était que les notes allaient de zéro à six, maximum

Comme je l'ai dit, les classes (de dix étudiants au plus) se passaient dans l'Institut même, et nos profs venaient de Genève. A leur tète se trouvait le directeur pédagogique, Mr Dupraz (qu'on appelait Dudu). Il enseignait plusieurs matières de la Physique aux technologies et aux initiations à l'enseignement, la pédagogie. Pour les études qu'il enseignait, on utilisait des livres (plutôt des brochures) qu'il avait rédigés lui-même. Il avait une apparence et une voix qui voulait intimider tout le monde et surtout certains de ses collègues.

Plus tard, en 1956, Mr Dupraz fut arrêté et condamné par le tribunal de Genève pour avoir falsifié les montants des sommes dépensées pour l'achat des timbres, et "il quitta" l'Institut. Contrairement aux autres membres du corps enseignant, je n'ai jamais eu de sympathie pour ce monsieur et c'était mutuel, surtout en deuxième année.

Le prof de math, Mr Wermus était un survivant de la Shoa. Il était souvent chagriné par la conduite de ces jeunes juifs qui "n'avaient pas,    (la plupart venaient d'Afrique du Nord), vécu les horreurs de la guerre" Il était d'une intelligence et d'une sensibilité qui lui donnaient beaucoup de respect.

Le prof de dessin industriel Mr Basset, était un Mr plus agé que les autres, mais plein de gentillesse et d'humour.

 

 Il était officier de réserve dans l'armée Suisse et un jour, il nous apporta son pistolet Parabellum, le démonta et donna à chaque élève, une des pièces à dessiner.

Le prof de Français, Mme Pinot, était une femme jeune, la fille du Dr Syngalowsky. Elle avait un corps fin comme un mannequin  et s'habillait élégamment avec des talons très hauts qui donnaient le vertige au prof de math.

 

Le prof d'Hébreu, Mr Daniély avait une personnalité des plus aimables. Il était israélien d'une famille originaire de Boukhara. En plus de son travail à l'Institut, il était très actif dans la communauté juive de Genève 

 M Danieli entretenait des relations amicales ou plutôt familiales avec plusieurs étudiants.

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Loin de notre famille et des veillées de Shabbat, nous l'aimions, même s'il venait de Genève, le vendredi soir, en voiture après le diner, pour nous organiser un "Oneg Shabbat". Ceci ne plaisait pas à nos amis Israéliens du Bne Akiva, qui lui reprochaient aussi d'avoir quitté Israël pour s'établir en Suisse. Ils ne fréquentaient pas ces soirées qui étaient pleines de chaleur et de Judaïsme.

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En plus de cela et en dehors des heures régulières d'études, il donnait des cours facultatifs d'instruction générale. En première année il m'introduisit dans le monde de la Paléontologie et de la Phrénologie, cette pseudo science qui localisait nos facultés dans les bosses que nous avions sur notre crane. De là nous vient le dicton "il a la bosse des maths". En seconde il nous enseigna une nouvelle science qui devait permettre (autant que possible) de mesurer les niveaux d'intelligence des candidats: la Testologie, cette science qui fut inventée en Amérique durant la 2eme guerre mondiale. L'Armée avait un besoin urgent de créer un barème de sélection des candidats à l'école d'officiers. Barème qui reçut le nom de Quotient d'Intelligence, le QI. Aujourd'hui ces examens de Psychométrie sont une des premières conditions pour être reçu aux hautes études, en tous cas en Israël.

En 2ème année on proposa aux élèves avancés en Hébreu, de passer les examens de la "Téoudda Yéroushalmit" qui avec le diplôme de l'Institut nous permettrait d'être reçu dans une université en Israël. Cette Téouda était organisée par les représentants Israéliens dans la diaspora et comprenait  l'étude de la Littérature Hébraïque et l'histoire du Judaïsme. C'est Mr Daniély qui nous prépara  à ces examens.

Les instructeurs des Ateliers, qui étaient très souvent engagés par Mr Dupraz, faisaient de leur mieux pour nous préparer à l'année de stage dans l'industrie suisse, en 3eme année

Les cours de comptabilité

Ce cours qu'on étudiait en  2eme année, n'a jamais eu trop de popularité   parmi les étudiants et paraissait n'être d'aucun intérêt technique ni pédagogique. Personne ne voulait échouer dans cette matière qui n'exigeait, pensait-on, que "l'usage des 4 opérations d'arithmétiques " Nous n'aimions pas beaucoup trimballer ces feuilles immenses du "Grand Journal".  Alors une tradition s'était établie à l'institut, à la fin de l'année on réunissait toutes les grandes feuilles, de toutes les classes et on en faisait un grand "feu de camp, une sorte d'autodafé", comme pour effacer ces heures qu'on aurait pu remplir de quelque chose de plus intéressant.

 

Les étudiants étaient libres de rentrer à n'importe quelle heure de la nuit. On avait même vu, quelques fois, des étudiants qui ne respectaient pas la consigne de n'inviter aucune personne étrangère à l'Institut. Il y avait un étudiant qui avait poussé le culot jusqu'à prendre de la salle à manger, un dimanche,  un plateau  chargé pour au moins deux personnes, vers sa chambre. Il fut repéré par un employé du personnel et reporté à la direction. On a passé l'éponge sur ce cas et nous fumes avertis que cet abus de confiance serait sévèrement sanctionné si cela se reproduisait.

 

Le personnel d'entretien

Le sous sol comprenait les Ateliers de toutes les sections, mécanique, Froid,  Menuiserie, Electricité et les autres matières qui les accompagnaient comme la Soudure…

L'aile centrale du bâtiment qui a été ajoutée et qui comprenait, juste sous la salle à manger: la Cuisine avec les installations modernes du temps. Un très jeune couple juif Orthodoxe, étaient les Chefs de cuisine de l'Institut. La femme, belle, portait toujours une perruque rousse, le mari était lui-même roux.

Je me souviens très bien de la Patronne de la Blanchisserie qui lavait et repasser tout notre linge et nos draps. Une Dame âgée et très aimable, qu'on appelait Mémé. J’aimais la regarder ‘laminer’ nos draps

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 Elle avait toujours un gentil mot quand on allait chercher nos affaires ou demander une petite faveur, comme repasser une cravate froissée ou autre..

Le nettoyage de tout le" bâtiment était la besogne de 2 ou 3 jeunes italiennes dont la belle Graziella l'autre s'appelait Romilda

Le rez de chaussée

L'entrée principale était au milieu de la façade, et donnait sur un grand hall dont le centre était décoré d'une grande roue, qui représentait le Logo de l'ORT.

Il y avait une table de ping-pong pour nous défouler de temps en temps. Je décrirai ici les lieux dont je me souviens le plus. Le hall dont les murs  étaient décorés de fresques style "socialiste", donnait directement à la salle à manger

 A droite, on trouvait  l'Aula, une sorte de salle de théâtre de taille moyenne, dans laquelle se célébraient toutes les manifestations culturelles et locales: conférences, concerts, Palmarès de fin d'année, Pourim, Hanouca, etc… Je reviendrai plus tard sur quelques uns de ces événements.

Une synagogue était aménagée à coté de l'aula avec deux Sepher Thora et tout le nécessaire. A part le petit groupe de religieux, qui y  priait, très souvent, il y avait affluence les jours des grandes fêtes.

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Les bureaux de la direction étaient à gauche du hall, ainsi que la cabine téléphonique réservée aux étudiants, dont je me rappelle encore le numéro: 8 32 97. Il était, pour moi, le premier numéro de téléphone de ma vie, bien qu'il ne soit pas seulement le mien. 

1er étage

La bibliothèque, au milieu, juste au dessus du hall, entre les grandes chambres de 1ere année (6 étudiants par chambre) de chaque coté. Au fond du couloir, il y avait les classes. On allait à la bibliothèque pour avoir plus de tranquillité pour nos études. Il y avait aussi une salle de billard, les toilettes et les douches.

 

2eme étage

Il y avait les chambres des élèves de 2eme année. Nous disposions aussi d'une "chambre noire" où l'on pouvait développer nos  films et nos photos personnelles, il suffisait d'amener ses propres matières chimiques. Il y avait tout le matériel nécessaire et un appareil d'agrandissements.

Séparé du bâtiment d'une vingtaine de mètres il y avait ce que j'appellerai le Cottage, une petite maison, à moitié détruite, de quelques chambres. Elle nous servait à la pratique de "l'installation électrique". A l'aide d'un marteau et d'un burin on y creusait des sillons dans lesquels on plâtrait des câbles électriques. Je l'aurai facilement oubliée si ce n'était le cerisier qui la surplombait et dont les branches touchaient le toit. Au temps des cerises, il suffisait de grimper sur le toit, de se coucher le dos sur le toit et les cerises vous caressaient le front. Pour un tunisien, les cerises j'en ai vues plutôt, en photos.

Puisqu'on parle de fruits, je me souviens qu'autour de l'institut il y avait plusieurs  champs de pommiers. Jusqu'à Genève, J'ai vu des  palmiers, ainsi que des oliviers, mais des pommiers et des cerisiers je ne me rappelle pas.

                                                                                                         Suite

Avraham Bar-Shay (Ben-Attia)

Absf@netvision.net.il

 

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