"Du côté des salafistes en Tunisie" de Jean Fontaine
L’auteur, Jean Fontaine, un prêtre qui vit en Tunisie depuis 60 ans, nous a avertis au début de son livre. Il ne s’agit pas d’une étude exhaustive sur les salafistes tunisiens « car il est trop tôt pour ce type d’enquête», mais d'un travail documentaire où les moindres faits et gestes des salafistes du 26 juin 2011 au 25 juin 2013 sont répertoriés dans un ordre chronologique puis regroupés « selon quelques points de repère et selon leur fréquence (…) à partir de ce qui est accessible à tout citoyen ordinaire » avec pour seule source les médias. Un véritable travail de bénédictin. Pas d'analyses, mais des faits, rien que des faits qui parlent d'eux-mêmes.
Le livre s'intitule "Du côté des salafistes en Tunisie", mais il aurait bien pu s'intituler "Le livre noir du salafisme en Tunisie". En le parcourant, on est pris d'une peur rétrospective. Comment la Tunisie a-t-elle pu résister à ces hordes fanatiques. 2011-2013, c'était hier. Pourtant, peu de Tunisiens se souviennent des évènements qui ont marqué ces deux années. Le 26 juin 2011, des salafistes attaquaient le cinéma Afric'Art pour protester contre la projection du film "Persépolis. Depuis, ils ne cesseront de faire parler d'eux. Pendant deux ans, ils seront les maîtres de la rue, imposant leurs lois, investissant les mosquées, incendiant les mausolées, profanant les tombes, en toute impunité, profitant au maximum du délitement de l'Etat. Après les élections d'octobre 2011 et l'arrivée d'Ennahdha au pouvoir, ils se conduiront comme en pays conquis. En toute impunité, ils feront régner la terreur, s'en prenant aux artistes et aux journalistes, hisseront le drapeau noir au mât de la faculté des sciences humaines de la Manouba, installeront des imams de leur mouvance dans les mosquées, prendont le contrôle de la zitouna, occuperont la Khaldounia, attaqueront l'ambassade des Etats Unis. Les Adel Almi, Khamis Majeri, Habib Ellouz, Béchir Ben Hassen deviendront des figures familières pour les Tunisiens, De plateau en plateau et de studio en studio, ils distilleront leur venin, excommuniant à tour de bras, se faisant épauler parfois pour des prédicateurs du Moyen-orient. Avant de passer à la vitesse supérieure : les camps d'entraînement dans les montagnes, l'envoi de jeunes en Syrie où ils rejoindront daech, la liquidation de leurs adversaires politiques, Chokri Belaïd, Mohamed Brahmi, Lotfi Nagdh, les attentats terroristes (le Bardo, Sousse, Mohamed V) et enfin la guérilla dans le massif du Chaambi.
Ce livre a un grand mérite : nous inciter à la vigilance.
"Jean Fontaine "Du côté des salafistes en Tunisie, 256 pages 15 DT Editions Arabesques Tunis 2016
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