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Inspirée des "Monologues du vagin", une pièce brise les tabous au Maroc

 

Inspirée des "Monologues du vagin", une pièce brise les tabous au Maroc

 

 

RABAT (AFP) - "Mon vagin, je l'emmène partout (...), et même à la mosquée": présentée à Rabat, une pièce inspirée des célèbres "Monologues du vagin" brise les tabous et préjugés autour du corps de la femme, dans une illustration du débat en cours au Maroc sur le thème de la liberté sexuelle.

Dans un pays musulman où les relations hors mariage restent passibles de prison, l'oeuvre n'a été jouée jusqu'à présent que de manière discrète: deux représentations, en juin et fin novembre.

Mais c'est le première fois au Maroc, société très conservatrice, qu'un spectacle aborde de manière crue l'intimité de la femme à travers le vagin.

Intitulée "Dyali" (à moi) et rédigée en dialecte marocain (darija), elle est librement inspirée des "Monologues du Vagin" (1996), pièce féministe de l'Américaine Eve Ensler qui a connu un immense succès partout dans le monde.

"C'est un texte 100% marocain qui évoque les contradictions de la société marocaine, ses fantasmes et ses violences vis-à-vis de tout ce qui renvoie à l'intimité de la femme, à travers son vagin", explique à l'AFP Maha Sano, l'auteure de la pièce jouée par la troupe "Aquarium".

Tout au long de la seconde interprétation, dans la petite salle archi-comble du centre culturel français de Rabat, flotte un parfum de transgression.

"Mon vagin, je l'emmène partout avec moi: dans ma chambre, au hammam, au marché, partout partout, et même à la mosquée", lancent en choeur les trois jeunes comédiennes marocaines.

"Je serre mes jambes, je les serre parce que personne ne doit le voir. Personne ne doit se dire qu'il est niché là, entre mes jambes. Serre tes jambes!", ordonne aussi une des actrices, sous les applaudissements nourris.

Selon Mme Sano, le manque d'éducation sexuelle et la prédominance des tabous renforcent les préjugés et stéréotypes autour du vagin, "tantôt désiré, tantôt repoussé".

"Terrorisme intellectuel"

La pièce y fait largement allusion: "+Ne l'approche pas, ne le regarde pas, ne le touche pas+, me disait ma mère". "A les écouter, on a l'impression que notre vagin est notre malheur. Qu'il faut l'enfermer. Je dois l'enfermer et ne l'ouvrir que le jour du mariage", est-il proclamé.

"Même le jour du mariage, je n'ai pas osé enlever ma culotte. Mon mari m'a dit +Hé, on est mariés là, c'est bon. Qu'est-ce que tu as? Il faut qu'on fasse les enfants", s'exclame une des comédiennes, devant un public ébahi.

Realisée par Naïma Zitan, Dyali aborde aussi le thème de la violence à l'égard des femmes, dans un pays où six millions de Marocaines en sont victimes, dont plus de la moitié dans le cadre conjugal, selon le gouvernement.

En mars dernier, le suicide d'une adolescente contrainte d'épouser l'homme qui l'avait violée, avait par ailleurs suscité l'émoi dans le royaume.

Après sa première présentation en juin à Rabat, Dyali avait pour sa part entraîné une vive réaction dans les milieux conservateurs.

"Il y a un terrorisme intellectuel exercé contre les islamistes pour les empêcher de communiquer leurs points de vue quant à l'art et la création", écrivait Attajdid, l'organe de presse du Parti justice et développement (PJD, islamiste), dont le leader est le chef du gouvernement Abdelilah Benkirane.

Les courants laïcs "utilisent la provocation et la permissivité (...) afin de porter atteinte aux mouvements islamistes", avançait le journal.

La liberté sexuelle est l'objet de débats récurrents entre partisans d'une dépénalisation des relations intimes entre deux adultes en dehors du mariage, et défenseurs des règles religieuses qui dénoncent de tels actes.

Les défenseurs de la liberté sexuelle appellent ouvertement à l'abrogation de l'article 490 du code pénal marocain, qui prévoit une peine d'un mois à un an de prison ferme pour toute relation hors mariage.

Dans les faits, cet article est quotidiennement transgressé, les relations sexuelles en dehors du mariage étant discrètes mais largement tolérées.

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