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L’aide militaire américaine devient-elle un danger pour Israël ?

Une aide qui permet aux USA de profiter à moindre prix des développements réalisés par l’industrie israélienne. Israël obtenant la possibilité d’utiliser les technologies qu’il développe, et l’Amérique, celle de les vendre partout dans le monde pour son seul profit

L’aide militaire américaine devient-elle un danger pour Israël ? (info # 012606/16)[Analyse]

Par Guy Millière ©MetulaNewsAgency

 

Depuis des années, l’une des questions qui m’est le plus souvent posée lors de mes conférences sur le Proche Orient et Barack Obama concerne l’aide militaire que ce dernier a maintenu en faveur d’Israël. Comment un homme qui perpétue cette aide militaire massive pourrait-il être considéré, m’a-t-on mille fois demandé, comme un ennemi d’Israël ?

 

Ma réponse a généralement consisté à souligner que cette aide était votée par le Congrès, et que Barack Obama se contentait de ne pas opposer son veto au vote du Congrès : un veto qui, au vu de l’empathie que le peuple américain n’a cessé de ressentir à l’égard Israël, aurait été inimaginable.

 

J’ai chaque fois ajouté que cette aide ne modifiait en rien l’hostilité de Barack Obama à l’encontre d’Israël, et qu’Obama l’avait plusieurs fois instrumentalisée, ainsi que le fait qu’Israël en soit dépendant, afin d’exercer des pressions sur l’Etat hébreu à des moments cruciaux ; par exemple lors des opérations d’Israël contre le Hamas à Gaza.

 

Un accord d’assistance militaire, concocté par l’Administration Obama, et que le président U.S demande à Israël d’accepter tel qu’il est rédigé (as is), vient présentement illustrer mes propos. Cet accord prévoit une aide renforcée des Etats-Unis à la défense d’Israël, et ce, sur plusieurs années.

 

Mais il a une contrepartie ! Il est porteur d’une exigence vis-à-vis d’Israël : si Israël signe l’accord, il s’engagera à ne rien demander au Congrès et à ne prendre aucune décision en matière de sécurité et de défense qui n’ait préalablement reçu l’aval du pouvoir exécutif, donc du président des Etats Unis, sans quoi l’accord serait rompu. Un tel accord placerait ainsi Israël totalement à la merci du président des Etats Unis, sans aucune possibilité de recours, et exclurait le Congrès de toute décision en la matière.

 

Signer l’accord est séduisant pour Israël, qui, s’il ne considérait que le renforcement de l’aide prodiguée par les Etats Unis pourrait céder à la tentation. Signer l’accord placerait néanmoins Israël dans un piège.

 

Car si le président des Etats Unis dans les années à venir est un ami d’Israël, tout pourra bien se passer. En revanche, si le prochain président ne l’était pas, et entendait lui imposer ses conditions, ce serait très différent.

 

Un homme, ces derniers jours, Michael Oren, ancien ambassadeur d’Israël aux Etats Unis, a tiré le signal d’alarme et a demandé à Binyamin Netanyahou de ne pas signer la proposition d’accord.  Et Michael Oren a raison.

 

Dans un article consacré au sujet, publié par le Jerusalem Post, Caroline Glick explique pourquoi. L’accord, écrit-elle, exacerberait la dépendance d’Israël vis-à-vis de l’aide militaire américaine. Cette aide, ajoute-t-elle, est dangereuse en soi, et en proposant ce qu’il propose, Obama met au jour le danger d’une manière flagrante. Elle place Israël en situation de dépendance.

 

La première victime de cette dépendance est l’industrie de la défense israélienne, qui ne peut se développer de manière optimale car elle est freinée dans son essor par les conditions d’ores et déjà draconiennes inhérentes à l’aide américaine : les trois quarts de celle-ci reviennent dans les caisses d’entreprises de défense américaines [Israël est contractuellement obligé d’utiliser les fonds avancés aux Etats-Unis. Ndlr.], et les nombreuses innovations technologiques militaires israéliennes doivent être cédées gratuitement aux USA.

 

La deuxième victime est la défense d’Israël elle-même, soumise aux conditions susceptibles d’être imposées par l’administration aux affaires à Washington. Israël a déjà dû céder aux pressions de Washington à plusieurs reprises, et pas seulement sous Barack Obama.

 

La troisième victime est le peuple israélien, car le fait de ne pas pouvoir défendre Israël de manière optimale et de devoir céder aux pressions issues de l’insécurité a pour conséquence des morts inutiles.

 

Caroline Glick ajoute que la dépendance a créé des relations malsaines entre les Etats Unis et Israël, qui sont devenues particulièrement flagrantes sous Barack Obama.

 

Un nombre croissant de membres du personnel militaire israélien entretient désormais des relations préférentielles avec l’exécutif américain, et ces relations peuvent conduire à des prises de position davantage dictées par les orientations de l’administration en place à Washington, que par les impératifs intrinsèques de défense et de sécurité d’Israël.

 

L’administration en place à Washington étant ce qu’elle est aujourd’hui, des responsables militaires israéliens prennent actuellement des positions qui sont celles de l’administration Obama et d’Obama lui-même, énoncent et recommandent des orientations délétères, et mènent ce qui peut être décrit comme un véritable travail de sape contre le gouvernement démocratiquement élu d’Israël.

 

Deux textes ont été publiés récemment qui montrent à quel point la situation est devenue préoccupante.

 

L’un, signé par 200 chefs militaires israéliens (essentiellement des généraux à la retraite), et approuvé par Ehud Barak, s’appelle « Sécurité d’abord » (Security First). Il recommande, conformément à ce qu’exigent Obama et son administration, l’abandon total par Israël de la Judée Samarie et de la partie orientale de Jérusalem, et stipule que, pour la « sécurité du pays », les Israéliens vivant en Judée Samarie devraient être transférés au plus vite à l’intérieur des lignes d’armistice de 1949 en échange de compensations financières.

 

Le deuxième texte émane du « Centre pour une Nouvelle Sécurité Américaine » (Center for a New American Security), une institution formée par d’anciens membres de l’administration Obama, et à laquelle coopèrent des ex-responsables de la sécurité israélienne. Il suggère d’exiger d’Israël, conformément aux revendications d’Obama là encore, l’abandon de la vallée du Jourdain à des forces américaines et palestiniennes, et de confier à l’administration américaine au pouvoir la défense d’Israël contre toute menace émanant de la vallée du Jourdain et d’une Judée Samarie sous un « gouvernement palestinien ».

 

Ces deux textes ont été présentés récemment à New York par une organisation appelée l’Israel Policy Forum, et ils ont reçu l’aval de la candidate Hillary Clinton, qui travaille en relation étroite avec cette organisation.

 

Si, ignorant les avertissements de Michael Oren et de Caroline Glick, Binyamin Netanyahou signait l’accord, et si, comme cela reste envisageable, Hillary Clinton était élue présidente des Etats Unis, la dépendance d’Israël vis-à-vis de l’aide américaine deviendrait carrément inquiétante.

 

Les deux textes susdits deviendraient vraisemblablement la « politique israélienne » de la Maison Blanche. Israël se retrouvera pieds et poings liés, avec l’aval de gens susceptibles d’être présentés comme préoccupés par la sécurité du pays. Toute forme de recours deviendrait alors quasiment impossible.

 

L’aide américaine à Israël en viendrait à ressembler à un nœud coulant passé autour du cou de l’Etat hébreu, que quelqu’un de malintentionné à la Maison Blanche aurait la latitude de serrer davantage encore. 

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