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La TSF, miroir amplifiant de la guerre

La TSF, miroir amplifiant de la guerre

 

 

Le Hall de la chanson propose un spectacle sur les chansons des années 1939-1945, avec comme vecteur la radiodiffusion.

« On chantait quand même ». Dans le spectacle créé cette semaine par leCentre national du patrimoine de la chanson, tout est dans ce titre, ce« quand même » qui exprime ce qui reste difficile à penser : malgré la guerre et la tragédie, on chantait entre 1939 et 1945 en Europe. La vie continuait « quand même ».

 

DES RADIOS DE BORDS OPPOSÉS

« Radio Paris » commençait à diffuser les pires ignominies (« Il était juif juif juif, avec un grand pif pif pif »). Des talents s’y sont compromis, Arletty ou Tino Rossi. D’autres y ont perdu leur âme : André Dassary, interprète de Maréchal nous voilà, ou André Claveau, qui devint, en 1942, son animateur vedette. « Radio Londres » organisait la résistance des ondes avec Pierre Dac, mais aussi Maurice Druon et Joseph Kessel, dont le Chant des partisans grésille pour la première fois dans les transistors.

« Radio Belgrade » révélait une autre grande chanson, Lili Marlene, « Radio Berlin », faute de Dietrich, élevait au pinacle une pâle égérie suédoise, Zarah Leander. Depuis Alger, « Radio Cité », « entreprise juive »portée par Jacques Canetti, cessait d’émettre, remplacée par la naissante « Radio France ». Depuis Lausanne, « Radio suisse romande » offrait son antenne à une Marie Dubas persécutée, dont l’exil déchirant s’exprime dans Ce soir je pense à mon pays…

 

DES SPECTATEURS AUDITEURS

Comment raconter cette petite histoire qui jouxte la grande, restituer ces chansons en les remettant au plus près de leur contexte, en abolissant le temps qui nous sépare d’elles ? « Nous traitons nos spectateurs en auditeurs de TSF, derrière leur poste ou, même, invités dans le studio ! »commente Serge Hureau, directeur du Hall de la chanson et metteur en scène. 

Sur scène, deux musiciens, Raphaël Sanchez au piano et François Marillier, percussionniste et inventeur de sons, du bruit de bottes au souffle du vent. Et, de part et d’autre d’une table équipée de micros et de la lumière rouge qui indique la prise d’antenne, Serge Hureau et Olivier Hussenet. Leurs « voix marionnettes », suaves ou beuglantes, semblent parfois sortir d’un vieux poste posé là, qui s’allume lorsque les chansons commencent… Tous les quatre portent la blouse grise, à la fois techniciens, speakers et chroniqueurs de l’époque qui défile, de fréquence en fréquence, révélée par des refrains tragiques, amplifiée par la terrible insouciance.

JEAN-YVES DANA

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