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La Tunisie est devenue l'espoir du monde arabe : c'est la start-up de la démocratie

Des Tunisiens participant à une marche contre le terrorisme à Tunis (HAMMI/SIPA)

La Tunisie est devenue l'espoir du monde arabe : c'est la start-up de la démocratie

 

 

 

Par Pascal Boniface
Directeur de l'IRIS

 

 

Plus de trois ans après son "printemps arabe" et à quelques semaines des élections législatives et présidentielles, comment se porte la Tunisie ? Pascal Boniface, directeur de l'Iris, en dresse un portrait favorable et optimiste. Pour lui, le pays tire son épingle du jeu dans la région. 

Édité par Hélène Decommer  Auteur parrainé par Maxime Bellec

La situation générale du monde arabe n’est guère réjouissante. Le chaos est de retour en Irak, la guerre civile fait rage en Syrie où le chiffre de 200.000 morts sera bientôt atteint, la Libye est incontrôlable, l’Égypte est passée du combat politique aux fausses solutions militaires qui n’augurent rien de bon en termes de violences présentes et futures, les pays du Golfe sont inquiets pour leur sécurité.

 

Après l’immense espoir soulevé par ce qui fut qualifié de "printemps arabe", cette partie du monde donne un aspect de désolation, de conflits internes, de perte de puissance et du déclin de la maîtrise de leur propre destin.

 

La Tunisie est l’exception à cette règle quasi générale. Alors que se profilent les électionsprésidentielles et législatives et après de forts soubresauts (dont les assassinats de Chokri Belaïd etMohamed Brahmi), la Tunisie donne l’exemple d’un pays qui règle ses problèmes par la voie politique, et non par la force.

 

La Tunisie, l’espoir du monde arabe

Certes, la situation n’est pas totalement satisfaisante, mais globalement les Tunisiens ont choisi de renoncer à la violence armée pour régler leurs problèmes. Avec sagesse et clairvoyance, les Tunisiens ont refusé de suivre la "voie égyptienne" que préconisaient certains pour faire échec aux islamistes. Cela aurait été un naufrage pour la Tunisie.

 

Les trois premières années de la révolution ont été consacrées à la mise en place d’institutions, l’adoption d’une constitution et la restauration d’un État qui, comme souvent dans ces circonstances, était passé d’une trop grande omnipotence à une faiblesse inquiétante.

 

La Tunisie est devenue l’espoir du monde arabe. Elle ne cherche pas à exporter un modèle, mais elle permet de donner de l’espoir aux autres nations. Il y a un autre choix possible que celui de la dictature ou du chaos. Elle peut être présentée comme la "start-up de la démocratie" dans le monde arabe, par son côté mobile, expérimental et imaginatif.

 

L’héritage de Bourguiba est réévalué

Bien sûr, les 161 partis politiques font de la surenchère, bien sûr, à avoir trop espéré dans des résultats rapides de la révolution il y a eu une déception populaire.

Certains nostalgiques de Ben Ali redressent la tête, mais c’est surtout l’héritage de Bourguiba qui est réévalué. Bourguiba, qui avait permis à la Tunisie d’être en avance en instituant, lors de l’indépendance le premier syndicat, la première association féminine, la première ligue des droits de l’homme du monde arabe et du code du statut personnel, sans parler de l’alphabétisation. La maturité de la société tunisienne, qui lui a permis de ne pas tomber dans les ornières de violents affrontements, est le fruit d’une tradition qui vient de plus loin que les trois dernières années.

La révolution a été faite pour la démocratie, mais avant tout pour la dignité et la lutte contre la corruption.

 

Reste l'étape économique et sociale

La deuxième étape de la révolution, celle qui doit s’ouvrir après les élections, doit être économique et sociale. Le chômage est encore trop important, notamment parmi les jeunes et les jeunes diplômés. Cela dépendra des investissements extérieurs et du tourisme. La Tunisie souffre de la situation en Libye, qui n’est plus l’opportunité économique qu’elle était et pourrait être.

 

Les touristes sont revenus, mais les Français paradoxalement dans une moindre proportion (7 millions cette année). La proximité entre la France et la Tunisie a conduit à une surreprésentation dans l’imaginaire collectif de ce qui n’allait pas. Les tour-opérateurs français ont une part de responsabilité. Au lieu de montrer à leurs clients que les sites touristiques et les plages étaient à l’abri de tous tumultes, ils ont préféré faire pression sur leurs partenaires tunisiens pour faire baisser les prix.

 

Rien ne justifie qu’il n’y ait pas un retour en force des touristes français dès l’an prochain, ce qui permettrait de consolider le processus démocratique. 

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