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Les dérapages antisémites de la campagne de Chavez au Venezuela

Les dérapages antisémites de la campagne de Chavez au Venezuela

 

Le 7 octobre, le président vénézuélien Hugo Chavez brigue un troisième mandat. L’opposition a choisi comme candidat Henrique Capriles Radonski, ancien gouverneur de l’Etat de Miranda (à l'est de Caracas).

Tous ceux qui ont assisté à ses discours le savent, Chavez a le verbe facile et l’insulte sur le bout de la langue.

Il a rejeté un débat télévisé avec le candidat de l’opposition avec un simple argument : ce dernier serait un « nul ».

La disqualification est une ressource commode pour ceux qui refusent la contradiction et le dialogue.

Chavez traite son adversaire de « jalabola » (lèche cul) de l’impérialisme ou de l’Empire et de candidat « majunche » (falot, médiocre).

Chavez se présente lui-même comme « candidat de la patrie ». Il a donc désigné son opposant comme le « candidat de l’anti-patrie ». C’est un classique du répertoire nationaliste : ainsi, « l’anti-France » désignait pêle-mêle les juifs, les maçons, les communistes...

Mais Chavez ne s’est pas contenté de pointer du doigt Capriles comme « candidat de l’étranger » : il est passé de « candidat anti-patrie » à « candidat apatride ».

Ce glissement est lourd de sens. Dans le premier cas, on est dans le système binaire, pour ou contre, ami ou ennemi. Dans le second cas, on désigne un candidat qui n’a pas de patrie, qui n’a pas sa place dans le concert des nations. Appliqué à Capriles Radonski, catholique d’origine juive, il renvoie implicitement à la figure du juif dépourvu de patrie, le juif de la diaspora, le juif errant.

Une autre limite est franchie lorsque Chavez traite Capriles de « porc ». La bestialisation et la déshumanisation de l’ennemi sont courantes dans la rhétorique des nationalismes. Le péronisme appelait ses opposants des « gorilles », le castrisme désignait les exilés comme des « gusanos » (vermine). Le bestiaire n’est pas indifférent : « porc », « vermine » ou « rat » n’ont pas le même sens qu’« âne ».

Le discours de Chavez libère la parole de ses militants. Le site chaviste Martillo Rojo écrit ainsi le nom de l’opposant : CAPrile$ Raton$ki. CAP évoque l’ancien président social-démocrate Carlos Andrés Pérez, dit CAP, destitué pour corruption. Le changement d’une simple lettre pour écrire Rat-onski se passe d’explications. Le signe du dollar incrusté dans le nom en renforce la connotation antisémite.

CAPrile$ Raton$ki est un « agent nazi-sioniste », affirme le même site chaviste.

Pour d’autres partisans de l’amalgame, l’antisémitisme est une invention du sionisme, « propriétaire de la plupart des institutions financières de la planète, qui contrôle presque 80 % de l’économie mondiale et l’industrie de la communication dans sa presque totalité » (Adal Hernandez, Radio Nationale du Venezuela).

Voilà donc Capriles présenté comme le candidat du « sionisme international » : jadis, on disait la juiverie internationale ; maintenant on préfère l’amalgame entre Israël et les juifs.

Sur les réseaux sociaux, les chavistes se lâchent : « Radonsky se moque du peuple et de sa foi, ce sioniste est étranger même s’il a une carte d’identité et un acte de naissance vénézuéliens » (@BasemTajeldine; l’utilisation de l’Y plutôt que l’I rend le nom plus exotique).

Alors que Chavez invoque sa foi catholique à tout moment, « Radonsky est un hypocrite. Il se déguise en chrétien et prie la Vierge pour chercher le vote. En réalité il est sioniste. Il hait Jésus et la Vierge » (@BasemTajeldine). 

Le négationnisme trouve des suiveurs au Venezuela : « Je ne crois pas à la théorie de l’Holocauste inventée par l’Empire [américain] et ses collaborateurs ».  (@RemlawiEnrique[N33] @N33DOS). 

En 2011, une journaliste avait fait la promotion des Protocoles des sages de Sion, le faux fabriqué en Russie tsariste pour justifier les pogroms, sur l'antenne de Radio Nationale du Venezuela, propriété de l’Etat. Le texte des Protocoles est disponible sur le site chaviste Venezuela Patriota.

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