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Obésité: face à l'épidémie du siècle, que la France se bouge!

 

Obésité: face à l'épidémie du siècle, que la France se bouge!

 

 

 

Le constat est accablant: selon l'OMS, l'obésité touche 1,4 milliard d'adultes et 43 millions d'enfants dans le monde. 2,8 millions de personnes en meurent chaque année. 3 millions de décès sont également dus au diabète, maladie liée à l'obésité dans 75% des cas, à tel point qu'il convient désormais de parler de "diabésité".

Notre pays, que l'on a longtemps cru épargné par ce fléau, pourrait désormais rattraper le taux d'obésité des États-Unis d'ici 2020. Le nombre de Français en surpoids atteint aujourd'hui 25 millions, dont près de 7 millions d'obèses, soit cinquante fois plus qu'en 1960!

Dans ce contexte, la sixième édition de l'enquête nationale ObEpi (Enquête épidémiologique nationale sur le surpoids et l'obésité, menée par l'Inserm, Kantar Health et Roche) vient de publier des résultats ambivalents.

La progression du nombre d'obèses semble ralentir depuis 2009. Mais 15% de la population française adulte est aujourd'hui obèse, contre 8% en 1997, année de la première enquête ObEpi. Et l'épidémie continue d'augmenter fortement auprès des 18-24 ans, malgré des campagnes publiques de prévention destinées aux jeunes, dans le cadre du PNNS (Plan National Nutrition Santé).

La France, tant réputée pour la qualité de ses mœurs alimentaires et pour son système de santé, doit montrer l'exemple. Notre République a toujours été à l'avant-garde des combats pour une meilleure santé mondiale. Elle porte également dans ses valeurs fondamentales l'égalité et la justice sociale.

Les pouvoirs publics de notre pays ne doivent plus rester timides face cette effroyable réalité. Nous ne pouvons pas nous résoudre à supporter sur le long terme les coûts sociaux et économiques colossaux qu'engendre cette "épidémie du siècle", qui touche avant tout les plus défavorisés.

Par le passé, je n'ai peut-être pas toujours su bien me faire comprendre de tous, mais l'essentiel de mon message est ici: j'alerte nos décideurs sur un problème qui n'a rien à envier en termes d'urgence, de gravité et d'ampleur aux crises économique et écologique qui nous affectent.

Le PNNS lancé en 2006 à grand renfort de publicité était plein de bonnes intentions, mais l'incitation à consommer "5 fruits et légumes par jour" n'a pas suffi. J'ai la faiblesse de penser qu'en politique comme en amour, seules comptent les preuves.

L'une de ces preuves serait l'émergence d'une véritable politique publique, qui permettrait non seulement à notre pays de valoriser son patrimoine culinaire, reconnu par l'Unesco, mais surtout de nous positionner comme leader mondial de ce combat fondamental.

A mes yeux, en tant que médecin nutritionniste à la retraite, aujourd'hui militant d'une cause à laquelle je consacre l'énergie de mes derniers jours, le combat est de trois ordres.

Ce combat doit être une priorité de santé publique. Les effets de l'obésité et du diabète sont effarants: ils représentent 10% des décès dans le monde et sont classés par l'OMS dans les cinq premiers facteurs de mortalité. Un obèse vit en moyenne neuf années de moins que la moyenne et passe les dix dernières années de sa vie en mauvaise santé: diabète, maladies cardiovasculaires, cancer, arthrose... L'ampleur de l'épidémie, qui n'a pourtant rien d'inéluctable, est telle qu'elle est la cause du premier recul de l'espérance de vie de l'histoire moderne des Etats-Unis. L'obésité des enfants, véritable bombe à retardement, entraîne pour sa part des difficultés respiratoires, des risques de fractures, une hypertension artérielle, l'apparition des premiers marqueurs de maladie cardiovasculaire, une résistance à l'insuline et des problèmes psychologiques.

Il s'agit aussi, voire avant tout, d'un combat de nature sociale majeur. Car le problème du surpoids est moins nutritionnel que comportemental et sociétal. L'obésité est apparue avec la société de consommation et ses dérives ; avant la seconde guerre mondiale, on ne recensait nulle part dans le monde de groupes d'obèses constitués. Elle est aujourd'hui à la fois l'un des symptômes et l'un des facteurs d'inégalités et de discrimination les plus frappants de nos sociétés. En dehors des facteurs physiologiques et génétiques, on constate une grande corrélation entre l'obésité et la pauvreté, qui s'explique par la difficulté pour les moins favorisés d'accéder à des produits diversifiés et de qualité. A cela s'ajoutent les discriminations dont sont victimes les personnes en surpoids (embauche, carrière, assurances...) et qui rendent leurs conditions de vie plus pénibles.

Enfin, il s'agit d'un impératif économique. A l'heure où la pression s'accentue plus que jamais sur nos budgets, qui comprendrait qu'on ignore un fléau qui coûte chaque année 15% du budget de la sécurité sociale? Et ce coût pourrait doubler d'ici 15 ans!

Je suis fermement convaincu qu'aucun autre pays n'est mieux placé que le nôtre pour mener ce combat. Mais cela demande une détermination sans faille des pouvoirs publics à engager dans la bataille industrie agro-alimentaire, communautés éducatives et monde médical.

Un homme nous a montré qu'il est possible de tracer une telle voie malgré les pressions phénoménales des industriels. Il s'agit du maire de New York, Mickaël Bloomberg, qui a décidé d'interdire, dans les cinémas, les snacks et les restaurants de la ville, la vente de sodas de plus d'un demi-litre. Même s'il s'agit d'un premier et modeste pas, c'est de décisions claires, de cette nature, dont nous avons besoin.

Je fais pour ma part miens les mots de ce même M. Bloomberg: "J'ai toujours eu beaucoup de respect pour ceux qui ont tenté de changer le monde plutôt que de s'en plaindre". A 71 ans, je reste persuadé que l'on peut encore, toujours, changer les choses.

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