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TUNISIE. Et la maison Ben Ali tomba : la version de Leïla Ben Ali

 

TUNISIE. Et la maison Ben Ali tomba : la version de Leïla Ben Ali

 

Par Céline Lussato

 

 

L'épouse de l'ex-président tunisien dénonce dans un livre paru cette semaine le "complot" dont elle et sa famille auraient été victimes.

Leïla Trabelsi-Ben Ali a-t-elle été la principale victime de la révolution tunisienne ? C'est à peu près en ces termes que l'épouse de l'ex-président dépeint, dans un ouvrage paru le 21 juin*, sa fuite vers Riyad, le 14 janvier 2011, à bord de l'avion présidentiel.

De sa retraite dorée en Arabie saoudite, l'ex-Première dame de Tunisie soutient dans le premier chapitre de sa version de la chute de la maison Ben Ali, que le président a été victime d'un complot. Jamais il n'avait eu lui-même, à la lire, l'intention de quitter le pays. Et c'est seulement "devant l'insistance" de son chef de la garde présidentielle Ali Seriati que "Ben Ali a fini par plier", embarquant à bord de l'avion présidentiel pour "déposer sa famille" persuadé qu'il pourrait "revenir tout de suite après".

D'ailleurs, toujours désireux de se maintenir au travail, le président et son épouse "transforment le bureau en cellule de crise". "Mon mari et moi essayons à nous seuls, de comprendre la situation", explique Leïla Ben Ali.

Du courage, l'épouse du président ne manque pas de s'en octroyer dans cette affaire. Selon ses dires, c'est elle qui prend le volant de la voiture qui conduit la famille jusqu'à l'aéroport. C'est elle qui fournit quelques vêtements – "le minimum pour le voyage" – "aux uns et aux autres" car "ne s'attendant pas à un départ aussi précipité, ils étaient venus sans bagages, les femmes en tongs, les enfants sans manteau".

"Dure réalité"

Celle qu'on appelle "la régente de Carthage", honnie par les Tunisiens, accusée d'avoir favorisé financièrement sa famille durant ses années au pouvoir, présente sa fuite comme une terrible épreuve. Aurait-elle effectué une traversée de la Méditerranée de deux-trois jours à bord d'une embarcation de fortune que le ton de son propos aurait été moins dramatique. "Nous avons quitté le palais de Sidi Bou Saïd suivis par les gémissements des chiens qui semblaient avoir reniflé l'odeur du drame", écrit-elle théâtralement. Et, un peu plus loin, dans l'avion présidentiel : "Ils avaient faim, mais il n'y avait rien à bord, juste quelques bouteilles d'eau minérale embarquées à la dernière minute. A un moment, c'est mon mari qui est sorti de son bureau pour leur donner une barre de chocolat".

Plus un personnage se hisse aux sommets du pouvoir, plus la chute est durement ressentie. Leïla Ben Ali a la prudence de souligner elle-même dans un avant-propos à son ouvrage : "Je serai subjective, certes". Le lecteur l'aura compris de lui-même.

Leïla Trabelsi et son mari ont été condamnés à 35 ans de prison par contumace ainsi que 45 millions d'euros d'amende pour détournement de fonds publics et malversations. Le 12 août, lors d'un second procès, elle a été condamnée à six ans de prison pour complicité et possession illégale de devises.

Plus de 300 manifestants furent tués par le régime durant le mois de révolution qui mena au départ des Ben Ali. 300 familles endeuillées auxquelles l'ex-Première dame ne consacre pas une ligne.

 

*Ma vérité (éditions du Moment), propos recueillis via Skype par le journaliste Yves Derai

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