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Tunisie : les mauvaises nouvelles s'accumulent sur le front économique

 

Tunisie : les mauvaises nouvelles s'accumulent sur le front économique

Prenant le contre-pied des dernières prévisions gouvernementales, le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie dit s'attendre à une croissance zéro pour l'année 2011. Le patronat est inquiet lui aussi, alors que le gouvernement issu des élections du 23 octobre n'est toujours pas constitué.

 

L'alerte est venue, ce week-end, du gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT), alors que tout le pays attend avec impatience la nomination du nouveau gouvernement, consécutif aux élections du 23 octobre.

Au cours d'un colloque, samedi, à Tunis, Mustapha Kamel Nabli a dit s'attendre à une croissance zéro à la fin de l'année 2011. Or, les dernières prévisions de croissance du gouvernement faisaient état d'un taux compris entre 0,2 et 1 %. Ce mauvais chiffre aura d'abord des conséquences sur l'emploi, a souligné le gouverneur -baisse du rythme de la création d'emplois et hausse du taux de chômage, qui devrait dépasser les 18 %. « La deuxième année de transition sera difficile », a-t-il prévenu. Des propos prononcés au lendemain de la réunion extraordinaire du conseil d'administration de la BCT qui, jeudi dernier, mettait déjà en garde contre les risques d'aggravation des difficultés économiques, dans un contexte où, de surcroît, la BCT estime sa marge de manoeuvre « très limitée ». Puisque elle a, en 2011, abaissé à deux reprises son taux d'intérêt directeur (de 4,5 % à 4 puis à 3,5 %) et réduit le taux de réserves obligatoires (à 2 %). Le conseil d'administration de la BCT appelait, jeudi, au « démarrage de l'action du gouvernement et (au) retour du fonctionnement normal des rouages de l'Etat et des services publics dans les plus brefs délais » afin de « rétablir la confiance et (de) redynamiser l'activité économique et l'emploi ». A l'issue de la réunion, le conseil d'administration a plaidé pour « l'accélération de l'adoption du budget de l'Etat et de la loi des finances pour l'année 2012 ».

Le patronat souhaite, lui aussi, une telle accélération. Et alimente l'inquiétude. La présidente de l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat (UTICA), Ouided Bouchamaoui [lire son interview dans Les Echosdu 21 octobre 2011 ] parlait ainsi vendredi d'un risque de « paralysie » de nombreuses entreprises tunisiennes à cause des grèves et des revendications sociales. Elle appelle syndicats, acteurs politiques et autres membres de la société civile à se mobiliser pour l'arrêt des sit-in et des grèves qui touchent les entreprises. D'autant que les sociétés les plus directement concernées par les conflits sociaux le sont dans des secteurs « sensibles » tels l'énergie, les mines, le textile et l'habillement ou encore les industries pharmaceutique et alimentaire. Ces entreprises sont « tiraillées » entre les grèves de leurs employés qui veulent des augmentations de salaires et des sit-in de chômeurs qui voudraient être recrutés, expliquait Ouided Bouchamaoui à l'agence tunisienne de presse (TAP) en regrettant que des protestataires coupent les routes et empêchent ainsi les employés d'accéder à leur entreprise et donc d'aller travailler. Elle parle d' « asphyxie » de ces entreprises, à l'heure où l'économie du pays aurait selon elle « besoin d'une trêve sociale d'au moins un an pour surmonter les séquelles et réparer les dégâts de l'après-révolution ».

Le tourisme, 7 % du PIB serait en mesure de reprendre son envolée

On est loin de l'optimisme du ministre des Finances, Jaloul Ayed, qui, sans se prononcer directement sur l'année 2011, voyait en tout cas « un retour à la normale en 2012 » et une croissance d'au moins 4 %. [ son interview dans « Les Echos » du 25 octobre 2011]

La situation économique en Tunisie est-elle pour autant si mauvaise ? « Elle est certes inquiétante mais pas catastrophique », déclarait vendredi 2 décembre l'universitaire Moez Labidi. Pour rassurer les milieux économiques, cet expert préconise de créer des commissions de réflexion sur l'emploi, le développement régional ou encore la restructuration du système financier. Puisque la Banque centrale a désormais une marge de manoeuvre trop limitée pour rassurer. Une note optimiste est venue du ministre du Tourisme et du Commerce Mehdi Houas. Le tourisme, qui représente 7 % du PIB et 700 000 emplois dans le pays, est selon lui en mesure de reprendre son envolée. Il reviendra toutefois à ses successeurs de concrétiser l'objectif. Puisque Mehdi Houas, comme les autres membres du gouvernement de Béji Caïd Essebsi, attend la relève et appartient à un gouvernement qui gère pour l'instant les affaires courantes.

L'Assemblée constituante se réunit d'ailleurs demain, mardi 6 décembre, pour examiner le projet d'organisation des pouvoirs publics. Ce qui devrait déclencher le feu vert à la formation du gouvernement.

 

MARIE-CHRISTINE CORBIER

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