Les Juifs d'Afrique du Nord pendant la Seconde Guerre mondiale

« Les Juifs d'Afrique du Nord pendant la Seconde Guerre mondiale » de Claude Santiago et Antoine Casubolo

« Les Juifs d'Afrique du Nord pendant la Seconde Guerre mondiale » est un documentaire passionnant et émouvant de Claude Santiago  (1949-2012), décédé après la réalisation des interviews, et d'Antoine Casubolo Ferro (2013).

Images d’archives et témoignages inédits retracent les persécutions antisémites pendant l’Occupation en Algérie, alors composée de trois départements français, et dans les protectorats du Maroc et de Tunisie - celle-ci ayant été occupée par les Nazis (novembre 1942-mai 1943) -, la contribution héroïque des résistants Juifs à la libération de ces pays, et la persistance dans ces trois Etats de la législation antisémite du régime de Vichy jusqu’en novembre 1943.

Si ce film démontre que la Solution finale visait aussi les Juifs de ces pays, il persiste dans l’« islamiquement correct ». Le pogrom commis par des Arabes à Gabès (Tunisie) est survenu le 20 mai 1941 ; sept Juifs ont été assassinés sur la place de la synagogue. Le 28 novembre 2017, Harif présentera Night of Fools, de Rami Kimchi.

Méconnue, voire occultée, l’histoire des Juifs dans le monde musulman ou/et arabe lors de la Seconde Guerre mondiale, s’avère un enjeu majeur. D’abord en raison du succès de Mein Kampf d’Hitler , du négationnisme et du révisionnisme dans ce vaste espace. Ensuite, parce que de nombreux musulmans délégitiment à tort la recréation de l’Etat Juif en Eretz Israël en prétextant, de manière injustifiée, un prétendu lien de causalité entre d’une part la Shoah, qui serait « une tragédie de l’Europe chrétienne sur son sol », et d’autre part cette refondation qui serait « une compensation offerte par l'Europe aux Juifs-victimes » - des travaux historiques, notamment ceux de Georges Bensoussan ont démontré combien la Shoah a retardé cette renaissance  - ; ce qui constitue donc un refus de reconnaître le bien-fondé de cette recréation légale  et légitime. En outre, la paix entre ce monde et l’Etat d’Israël est conditionnée par l’apurement des différends des Juifs à l’égard de ce monde, donc par la connaissance de l’Histoire et des ses zones d’ombres. Enfin, le « dialogue judéo-musulman » s’englue dans le déni par les deux parties de la responsabilité du monde musulman dans la Shoah, et en particulier de celle du criminel grand mufti de Jérusalem al-Husseini, complice d’Hitler dans le génocide des Juifs qu’il a encouragé et constaté. Last, not least, s’impose un devoir de mémoire à l’égard des victimes Juives dont l’histoire doit être écrite et connue.

Application du statut des Juifs édicté par le régime de Vichy en particulier par des dahirs (décrets du souverain marocain) et des décrets beylicaux tunisiens, persécutions par les représentants de la France et en Tunisie aussi par les autorités allemandes  lors de leurs six mois d’occupation (novembre 1942-mai 1943), dénaturalisation par abolition du décret Crémieux, port de l’étoile jaune, aryanisations et spoliations économiques, rackets (amendes collectives), pillages, viols, retour aux mellahs (ghettos marocains), rafle à Tunis (décembre 1942), internement dans des camps de travaux forcés épouvantables, déportation de Juifs de Tunisie vers le camp d’Auschwitz … La condition des Juifs en Algérie, au Maroc  et en Tunisie sous l’Occupation présente de nombreuses similitudes avec celles de leurs coreligionnaires en France métropolitaine.

Une France aimée
« Peuplée essentiellement de musulmans, l’Afrique du Nord abrite également une communauté Juive d’environ 3% de la population, soit 400 000 personnespour lesquelles le régime de Vichy va donner toute la mesure de son antisémitisme ».

En fait, les documentaristes visent les trois pays d’Afrique du Nord parties de l’empire français : l’Algérie, composée depuis 1848 de trois départements français, et les protectorats de Tunisie depuis le traité du Bardo (1881) et du Maroc depuis 1912. Ils éludent donc les Juifs de Libye et d'Egypte. L'histoireglobale des Juifs en Afrique du Nord durant ce conflit reste donc à écrire. D'autant que des archives récemment rendues publiques informent sur leur triste sort et sur la collaboration de musulmans.

Comme le soulignent les historiens Michel Abitbol et Claude Nataf, Jacques Zermati et André Nahum, ces communautés Juives vivent/ont vécu dans ces pays depuis des siècles avant l’invasion arabo-musulmane. Leurs rangs se sont étoffés par l’arrivée de leurs coreligionnaires provenant de la péninsule ibérique au Moyen-âge, d’Egypte, de la péninsule arabique, de Livourne, de France métropolitaine, de Lybie, etc. 

L’historien Abdelkrim Allagui insiste sur la disproportion entre le faible nombre de Juifs et leurs « poids économique, financier, culturel ».

L’arrivée de la France met fin à la dhimmitude, ce « statut de soumission des indigènes non-musulmans – juifs, chrétiens, sabéens, zoroastriens, hindous, etc. - régis dans leur pays par la loi islamique. [Ce statut] est inhérent au fiqh(jurisprudence) et à la charîa (loi islamique)  » (Bat Ye’or).

La France permet à ces Juifs nord-africains d’accéder à la modernité et à une culture dont les valeurs leur sont proches, voire sont identiques aux leurs, et de s’émanciper.

Fondée le 17 mai 1860 par six jeunes bourgeois Juifs français nourris par les idéaux de la révolution de 1789, l’Alliance israélite universelle (AIU) joue alors un rôle fondamental en dispensant aux élèves Juifs un enseignement en langue française : dès 1863, elle ouvre sa première école à Taitouan (Maroc).

Epousant la culture française – avec les revenus de son négoce de galons et calots auprès de l’Armée française, le grand-père de la dramaturge et poétesse Hélène Cixous, achète l’œuvre complète de Victor Hugo (« C’est comme s’il avait acheté le Panthéon ») - et sa devise républicaine, les Juifs vont briller dans l’ensemble des professions libérales : avocats, médecins, journalistes, pharmaciens, etc. Et, dans une synagogue de Djerba (Tunisie), « les fils d’Israël entonnent la Marseillaise en hébreu en l’honneur du représentant de la France, mandataire du pays de toutes les libertés ».
Préparé sous l’empereur Napoléon III, l’octroi de la nationalité française aux « Israélites indigènes de l’Algérie » est mis en œuvre par un décret du gouvernement provisoire, signé notamment par Benjamin Crémieux et Léon Gambetta, le 24 octobre 1870. Après la défaite française lors de la guerre franco-prussienne (1870) et l’annexion de l’Alsace et de la Lorraine « mosellane » par l’empire allemand en 1871, ce décret Crémieux amène à la France 40 000 nouveaux citoyens français d’Algérie. Un décret qui suscite l’hostilité des chrétiens venus de métropole, d’Italie et d’Espagne, ainsi que des indigènes musulmans.

A la déclaration de guerre en 1939, les Juifs d’Afrique du Nord, dont Elie Ben Soussan né à Oran en 1919, s’engagent pour défendre la France comme leurs pères l’avaient fait en 1914  et leurs grands-pères en 1870.

« Orthodoxie raciale de Vichy » (Michel Abitbol)
22 juin 1940. L’armistice est signée. « Vraisemblablement à la suite de l’intervention de Weygand, généralissime de l’Armée française et ministre de la Défense nationale (juin-septembre 1940), l’un après l’autre, « le rouge au front » comme ils disaient, [les chefs militaires d’Afrique du nord] ont accepté l’armistice proposée par le maréchal Pétain, et de rejoindre Pétain contre de Gaulle », explique l’historien Michel Abitbol.

Combien rejoignent le général Charles de Gaulle à Londres après son appel du 18 juin 1940 à poursuivre la guerre ? Deux mille sur 40 millions de Français.

Première mesure mise en vigueur en Algérie par le nouveau gouvernement : l’abolition du décret Crémieux espérée depuis 70 ans par des non-juifs. « Une initiative exclusive du régime de Vichy », souligne Michel Abitbol.

Le 3 octobre 1940, la première loi de Vichy portant statut des Juifs les exclut de nombreux métiers ou leur impose un numerus clausus. Fonction publique, professions libérales, cinéma, de la presse... Peu d’activités échappent à ces discriminations antisémites. Cette loi s’applique en France métropolitaine, dans ses départements d’Outre-mer, dans ses protectorats et colonies.
En 1940, « mon père descend de notre deuxième étage de la rue Philippe avec un tournevis et il a dévissé sa plaque car il fallait faire ce genre de choses. Et il est entré dans une ancienne boutique d’horloger et il est devenu pédicure », décrit Hélène Cixous, née à Oran (Algérie).

En Algérie, « à la rentrée de janvier, il n’y avait plus un seul professeur Juif ou franc-maçon », se souvient Jacqueline Girerd, née Lévy.

De nombreux camps sont créés en Afrique du Nord, terre d’élection du régime de Vichy. « Y sont expédiés des centaines de Juifs déjà internés dans le Sud de la France ou démobilisés de l’Armée française ou encore expulsés de la Légion étrangère. Ils sont les esclaves du régime. Lequel a de grands projets pour eux ». Le Transsaharien « est entré en fonction. Projeté depuis plus de cinquante ans, le Méditerranée-Niger n’est plus un mythe. Et on n’oubliera pas que c’est au milieu de circonstances dramatiques que le gouvernement du maréchal Pétain l’aura voulu et l’aura créé », affirme la voix off d’archives filmées. « Aujourd’hui perdues dans le désert, les traces de ce projet pharaonique inachevé témoigne encore des souffrances de ces prisonniers victimes d’un encadrement farouchement antisémite ».

Dans les deux protectorats d’Afrique du nord, ce statut antisémite est édicté par des décrets beylicaux tunisiens - le bey Ahmed II règne de 1929 à sa mort en 1942, Moncef bey de 1942 à 1943 et Lamine Bey de 1943 à 1957 -, et dahirs (décrets du sultan du Maroc). Selon Claude Nataf, le statut appliqué en Tunisie est « très en-deçà de celui appliqué en France métropolitaine, ou au Maroc ». L’historien Ariel Danan explique les réticences du bey et du sultan par leur volonté de préserver une partie de leur indépendance. 

Le 29 mars 1941, le Commissariat aux questions juives est créé et dirigé par Xavier Vallat. Il se rend en Afrique du Nord pour « mettre fin au laxisme » dans l’application du statut des Juifs. « Sous son impulsion, le 2 juin 1941, un deuxième statut aggrave la condition des Juifs » : diminution du nombre des professions autorisées, aggravation du numerus clausus, etc. Les Juifs doivent désormais se faire recenser.

« Déchus de leur citoyenneté, privés d’emplois, marginalisés, recensés, les Juifs vont être maintenant spolier de leurs biens au titre de l’aryanisation économique ».

Les Juifs forment « une population que l’on peut brimer sans avoir à encourir de peine. A travers toute l’Afrique du nord, la population environnante, musulmane et/ou européenne, va piller des biens Juifs », explique Ariel Danan. Immeubles, voitures de luxe Rosengart… Rien n’échappe à la cupidité des antisémites.

« Au Maroc, la mesure la plus significative de la discrimination des Juifs fut le retour obligatoire au mellah. A Fez, cette mesure fut appliquée sans aucune dérogation ». Fez était composée de « trois quartiers : la Medina où habitaient les musulmans, le Mellah où habitaient les Juifs et la ville nouvelle. Mais au fur et à mesure où les Juifs avaient une situation économique et financière qui leur permettaient d’aller vivre dans la ville nouvelle, ils vivaient dans le même quartier que les Français », explique un Juif originaire du Maroc. Edmond Elalouf précise que dans le mellah, les appartements ne disposaient pas d’eau courante, les rues n’étaient pas pavées. Cette régression induit un traumatisme qui perdurera chez les Juifs du Maroc.

« En Algérie, pire qu’en métropole, le numerus clausus s’applique jusque dans les écoles primaires. 30 000 enfants en sont frappés ». Et les actes valeureux des parents d’élèves Juifs lors de la Première Guerre mondiale n’atténuent pas ces mesures antisémites.

L’Opération Torch
« Dans la nuit du 8 novembre 1942, les Alliés tentent de débarquer au Maroc et en Algérie pour prendre à revers l’Afrikakorps du maréchal Rommel : c’est l’opération Torch ». 

Dirigée par le maréchal Charles Noguès, résident général de la France au Maroc, l’armée tire sur les Alliés. 

Deux jours plus tard, arrivent les soldats américains triomphant, accueillis par la liesse populaire. 

A Alger, préparé de jeunes étudiants gaullistes, généralement Juifs – Raphaël Aboulker, Bernard Karsenty, Jacques Zermati, André Assus  -, réunis par l’étudiant en médecine José Aboulker, un mouvement permet le succès de cette opération – pratiquement pas de combats pour les soldats américains - en occupant les installations militaires importantes françaises à Alger pendant 24 heures.

Méfiant à l’égard du général de Gaulle, le président Roosevelt choisit l’amiral Darlan, commandant en chef des forces de Vichy. Les « résistants sont pourchassés, et José Aboulker arrêté. Les lois antisémites sont confirmées ». « Survit un régime de Vichy sous protectorat américain », résume Michel Abitbol.

« Darlan, c’est comme Pétain. Mon frère et moi voulons rejoindre de Gaulle. Un pilote américain a bien voulu nous emmener à Gibraltar », se souvient Edgar Bensoussan, alors en Algérie. 

La contribution des résistants Juifs à la libération du Maroc et de l'Algérie - actions héroïques,  combats meurtriers évités - se révèle décisive. A Alger, "la résistance comptait 800 combattants, dont la moitié était Juive. Mais au moment de vérité, 400 de ces combattants se sont dégonflés, et 400 sont demeurés : presque tous ceux qui sont restés étaient Juifs", a déclaré Jacques Zermati, résistant Juif de l'Opération Torch (Ynet, 2 février 2015). Des faits illustrés par le documentaire The Night of Fools, de Rami Kimchi (2014).

Tunisie sous occupation nazie

Réaction de la Wehrmacht à l’Opération Torch : elle envahit la Tunisie à partir de la Libye et occupe ce pays pendant six mois effroyables pour les Juifs.

A Tunis, Hitler a envoyé le SS Walter Rauff. Celui-ci « a été chargé en 1941 du programme technique d’extermination des Juifs par des camions à gaz. Il y a eu plusieurs centaines de milliers de morts par ce moyen de mise à mort. C’est un spécialiste de la mise à mort des Juifs », précise l’historien Serge Klarsfeld. Ayant fui en Amérique latine après la guerre, jamais jugé, Rauff meurt le 14 mai 1984 au Chili. Serge et Beate Klarsfeld n’ont pas obtenu son extradition.
Revenons à la Tunisie lors du conflit mondial. Le 8 décembre 1942, Rauff exige des dirigeants de la communauté Juive « 3 000 hommes munis de pelles, de pioches et de vivres pour le lendemain, 8 h ». Officier de la Légion d’honneur, Maurice Borgel, président de cette communauté, proteste. Agenouillé, ce septuagénaire est cravaché violemment par Rauff.

« Le bey avoue son impuissance. C’est la fatalité. Le résident général informe la communauté que les Allemands lui ont interdit de s’occuper des Juifs. Alors il se lave les mains. Ce jour-là, il a signé la fin du protectorat français en Tunisie, parce que le traité de protectorat imposait à la France de protéger la personne du bey et ses sujets contre toute puissance étrangère », souligne Claude Nataf.

Au matin du 9 décembre 1942, faute de réunir les 3 000 personnes, les Allemands raflent des Juifs à Tunis .

« Afin d’arrêter la rafle, la communauté accepte de prendre en charge le recrutement et fait coller des affiches en appelant les Juifs de 17 à 50 ans à se présenter. C’est la mobilisation générale », observe Claude Nataf. Lieu de réunion : l’école de l’AIU de Tunis. Destination : des camps de « travaux de terrassement et de défense du pays ». Des camps brièvement évoqués dans Le Maghreb sous la croix gammée, documentaire de Bill Cran et Karin Davison.

« Entre le 9 décembre 1942 et début janvier 1943, 5 500 jeunes Juifs partiront vers ces camps de travail. Le pire était celui de Bizerte gardé par des SS. C’était le camp où il y a eu les plus grandes violences commises contre les Juifs, et plusieurs Juifs ont été fusillés par les Allemands sous prétexte de prétendues tentatives d’évasion », rappelle Claude Nataf.

Il faut environ 48 heures à ces milliers de Juifs – dont André Nahum (1921-2015), futur médecin à Sarcelles, Chalom-Charles Perez et Georges Smadja - pour rejoindre, sans manger ni boire, le camp de Bizerte, port maritime majeur situé à 60 km de Tunis et entièrement évacué de sa population civile et par l’Armée française.

A Bizerte, ces jeunes Juifs rejoignent la caserne Philebert. Dans les chambrées : uniquement de la paille. Le travail ? « Creuser des tranchées, combler les trous de bombes, décharger les camions de munitions ». Et ce, sous les bombardements quotidiens des Alliés. En cinq mois, nombre de ces Juifs perdent 20 kg.

Les travailleurs Juifs sont contraints de porter une étoile sur le poitrine et dans le dos pour mieux les repérer en cas de tentatives de fuites. Selon Claude Nataf, « cette mesure est rapidement tombée en désuétude dans presque tous les camps. En revanche, tous les Juifs du Sahel ont été obligés de porter l’étoile jaune, y compris les bébés ». Pour Léon Masliah, alors âgé de huit ans, ce port était « presque un signe de fierté. Je ne pense pas que mes parents partageaient ce point de vue parce qu’ils savaient de quoi on parlait ».

Au Maroc et en Algérie sous l’autorité de l’amiral Darlan, la situation des Juifs est demeurée inchangée.

Dans la nuit du 24 au 25 décembre 1942, l’amiral Darlan est assassiné par un jeune résistant. A de Gaulle, le président Roosevelt préfère le général Giraud, qui reçoit le commandement militaire et civil.

Or, Giraud refuse d’abroger les lois antisémites, mais accepte les Juifs qui s’engagent pour poursuivre, dans cette nouvelle armée française en cours de création, le combat contre les forces de l’Axe. Mais « au lieu de les envoyer sur le front, pour une préparation militaire, il les envoie au camp de travail de Bedeau, où ils portent un uniforme spécial noir pour les distinguer des autres », note Michel Abitbol. Et là, jugés non dignes du combat, faiblement alimentés, les yeux baissés, ils sont astreints à des travaux pénibles : « casser les cailloux, faire les routes, abattre les arbres, etc. » Et ce, sous 35° à 40 °C dans la journée, et un écart thermique d’environ 40°-45° C entre les températures diurnes et celles nocturnes. La nuit, la couverture protège des scorpions. « Les punitions étaient extrêmement sévères », déplore Léon Chouraki. Cet aspect était négligé par l’exposition L'Outre-mer français dans la guerre 39-45. 

« En janvier 1943, les Juifs sont mobilisés dans des compagnies de pionniers Juifs avec des officiers français, puisque nous étions à l’époque encore Juifs indigènes », précise Georges Hadjadj, né en Algérie.

Les Allemands imposent des amendes collectives très lourdes aux Juifs : 23 millions de francs à Tunis, 40 millions de francs à Sousse, 40 millions à Sfax » (Claude Nataf).

« La Résidence générale a demandé à un organisme bancaire de prêter cet argent avec la garantie des bourgeois, des possédants. Et cela a été payé », note André Nahum.

Léon Masliah se souvient : « Avec une hargne, avec une haine que je ne comprenais pas, ils ont raflé les bijoux, le peu de choses précieuses que nous avions, et nous ont laissé dans un état de dénuement total ».

Alors que « les hommes sont dans des camps, les Allemands pénètrent chez eux, terrorisent, frappent, violent leurs femmes et se servent à loisirs ».

Les déportations des Juifs de Tunisie « ont lieu en avril 1943, trois semaines avant la libération du territoire tunisien. Quarante déportés ne sont pas revenus. C’est très peu par rapport aux six millions de Juifs d’Europe continentale tués lors de la Shoah. Mais cela éclaire la nature du projet génocidaire des nazis. Partout où les Allemands ont pris pied, ne serait-ce que 24 heures comme à Rhodes, ou six mois comme en Tunisie, ils ont persécuté la population Juive, dans le but de la détruire » (Claude Nataf).
Parmi les Juifs déportés : Victor Cohen Hadria, ancien Bâtonnier de l’Ordre des avocats de Tunis assassiné à Auschwitz, Edouard Benjamin Dana, pupille de la Nation et résistant, déporté à Auschwitz, envoyé dans le ghetto de Varsovie pour le déblayer où il est abattu alors qu’il tentait de fuir.

Arrêté à Paris, le boxeur Victor Younki, dit « Young » Perez  (1911-1945), champion de France des poids mouches puis champion du monde dans cette catégorie en 1931, est déporté à partir de la France et abattu lors d'une marche de la mort.

Profanée, la synagogue de Tunis est transformée en hangar où sont stockés les biens dont les Juifs ont été spoliés.
Le 7 mai 1943, la Wehrmacht fuit l’avancée des Alliés. Les Anglais libèrent Tunis, les Français libres s’emparent de Bizerte. Les Juifs peuvent enfin enlever les étoiles jaunes de leurs vêtements.

Le 30 mai 1943, en Algérie, les généraux Giraud et de Gaulle coprésident le Comité français de libération nationale.

Ce n’est que six mois plus tard, avec l’éviction de Giraud en novembre 1943, que la législation antisémite de Vichy est annulée. Le décret Crémieux est rétabli, les Juifs d’Algérie retrouvent leur nationalité française, et se voient confier des armes.

Charles Sebban « fait ses classes à Marrakech (Maroc), fait toute l’Italie, Monte Cassino… » Le père de Léon Masliah « s’engage immédiatement dans la IIe DB du maréchal Leclercq pour toute la durée de la guerre ». Né en 1917, Jacques Zermati aide à « créer un bataillon d’infanterie de l’air, devenu un bataillon de parachutistes incorporé dans la brigade anglaise SAS… Après cela, je suis rentré dans la vie civile. J’avais terminé mon boulot. On avait abouti à un résultat finalement formidable. La France avait recouvré son honneur, était assise à la table des généraux à l’armistice. De Gaulle était au pouvoir. Qu’est-ce qu’on pouvait demander de plus ? »

Une « Solution finale » mondiale
Le premier mérite de ce documentaire passionnant, souvent bouleversant, est de révéler des pans historiques méconnus, voire inconnus, pour diverses raisons. Chez les victimes Juives, se sont conjuguées pudeur, conscience de l’ampleur de la Shoah en France métropolitaine, difficultés à parler d’évènements douloureux, obligation de surmonter l’autre traumatisme constitué par leur exode. Chez des dirigeants communautaires, se mêlent ignorance, indifférence voire mépris pour l’histoire de Juifs sépharades sacrifiée par ailleurs sur l’autel du « dialogue judéo-musulman » . Ceci se manifeste aussi par la marginalisation confinant à l’oubli dans la mémoire officielle communautaire de ces faits tragiques concernant ces Juifs sépharades – occultation dans la conférence de lancement du projet Aladin, l’exposition Spoliés ! L’« aryanisation » économique en France 1940-1944, etc. -, l’indemnisation tardive, partielle et faible  des victimes Juives de persécutions en Tunisie et au Maroc, le délabrement de camps en Afrique du Nord  non érigés en lieux de mémoire, etc. Il est révélateur que ce soit le Musée mémorial de l’Holocauste à Washington  qui a récemment enregistré les témoignages de Juifs d’Afrique du nord persécutés lors de la Seconde Guerre mondiale. Combien d’autres témoignages ne seront jamais recueillis faute d’intérêt des instances communautaires ou d’historiens ? Pourquoi les manuels scolaires de France et des trois pays visés éludent-ils ces faits ?

Claude Santiago et Antoine Casubolo rappellent avec raison et clarté l’application sévère, rapide et bien après le débarquement des Alliés en novembre 1942, dans ces trois pays des statuts des Juifs, et surtout que la Solution finale avait une dimension mondiale. Ainsi, lors de la conférence de Wannsee (20 janvier 1942), les « principaux dirigeants allemands de la Solution finale ont comptabilisé le nombre de Juifs par pays », observe Serge Klarsfeld. Et ils ont inclus les Juifs d’Afrique du Nord dans le nombre concernant les Juifs de France.
« Il s’agissait non pas de détruire les Juifs d’Europe, mais l’universalité du judaïsme », selon Claude Nataf. La Shoah, une « tragédie européenne » ? Oui, et non. Certes, six millions de Juifs vivant en Europe continentale ont été assassinés par les Nazis et leurs collaborateurs. Mais, les nations européennes, telle la France, disposaient d’un empire colonial où les Juifs ont subi les persécutions antisémites. 

A ce titre, il conviendrait d’étudier le sort des Juifs vivant dans d’autres espaces des empires français, belge, néerlandais, etc. Agée de 78 ans, Anne-Ruth Wertheim, néerlandaise Juive a témoigné en juillet 2013 sur son enfance en Indonésie, alors dénommée Indes orientales néerlandaises. Pendant l’occupation de cet archipel par le Japon (mars 1942-août 1945) lors de la Seconde Guerre mondiale, Anne-Ruth Wertheim a été internée en 1944 dans un camp spécifique destiné aux Juifs. Ceux-ci y ont été battus, sous-alimentés… L’internement des Juifs a débuté en 1943 : le Japon a interné des Juifs de pays autres que ceux des Alliés – Etats-Unis, Grande-Bretagne, etc. -, par exemple du Moyen-Orient, dont l’Egypte. En 2014, le musée juif historique d’Amsterdam programme une exposition sur les Juifs en Indonésie.

Carences
On peut regretter des fautes historiques dans ce documentaire remarquable : une évocation rapide et minorée de la dhimmitude, l’oubli que l’empire français allait non seulement « de Dunkerque à Tamanrasset, et de Tunis à Rabat », mais aussi de l’Amérique latine – Antilles, Guyane - à l’Indochine, via l’Afrique sub-saharienne, l’omission des controverses sur le rôle des dirigeants de la communauté Juive tunisienne, la réduction de l’Afrique du nord à ces trois seuls pays, donc excluant la Libye et l’Egypte, le rôle des soldats italiens, etc.

Produit par Claude Berda sur une proposition de Serge Klarsfeld, ce film omet aussi d’évoquer les Juifs ayant combattu les forces de l’Axe à Londres, tel Max Guedj (1913-1945) ou le sort de son père Félix, ancien bâtonnier de l’ordre des avocats de Casablanca, résistant mort des suites de ses conditions d’emprisonnement.

Sur Harissa, Avraham Bar-Shay (Benattia) relate le pogrom commis par des Arabes à Gabès (Tunisie), le 20 mai 1941, et dans lequel sept Juifs ont été assassinés sur la place de la synagogue.

Enfin, ce documentaire s’avère « islamiquement correct » : dhimmitude  rapidement évoquée et minorée notamment par l’historien Mohamed Kenbib, propagande arabe vers le monde arabe  ignorée, rôle des musulmans collaborateurs – le grand mufti de Jérusalem al-Husseini, un administrateur judiciaire musulman en Algérie d'après l'historien Jean Laloum  - ou enrôlés par les Forces de l'Axe celé, étendue de la spoliation économique  non évaluée, etc.

Ainsi, les auteurs dissimulent que la tragédie de Joseph Scemla, ancien combattant ayant participé aux combats dans la Somme lors de la Première Guerre mondiale, tunisien naturalisé français dans les années 1920 et qui tenait un « commerce de tissus florissant dans les souks de Tunis », et de ses deux fils brillants, Gilbert, polytechnicien « sorti dans la botte », et Jean, étudiant visant l’X (Ecole Polytechnique), est d’abord imputable à un « ami » de leur père, Hassen ben Hamouda El Ferdjani, qui les a dénoncés auprès des autorités allemandes pour espionnage au profit des Alliés. Et tous trois ont été arrêtés par des soldats allemands. Après leur détention à Tunis, ils ont été envoyés par avion en Allemagne . Après un an d’internement à Dachau, ils ont été jugés à Torgau par un tribunal militaire en mai 1944 et condamnés à mort. Le 17 juillet 1944, le père et ses deux fils étaient guillotinés au Fort de Halle. Ils avaient respectivement 54 ans, 26 ans et 22 ans. A la Libération, Ferjani est « condamné à mort, à l’unanimité par le tribunal militaire français. Sur intervention des autorités indigènes, sa peine – selon l’expression de l’époque – fut commuée en travaux forcés à perpétuité, puis à vingt ans… Peu de temps après l’Indépendance de la Tunisie, Hassen ben Hamouda El Ferjani fut libéré. Il avait purgé dix ans de prison » (Frédéric Gasquet, fils de fils de Gilbert Scemla et de Lila Vilenkine, Juive russe originaire de Tachkent (Ouzbékistan).

Le 7 avril 2015, le quotidien israélien Ynet a résumé la teneur du Journal de Walter Rauff, impliqué dans l'invention des "camions à gaz", préludes aux chambres à gaz, sur l'occupation de la Tunisie par les Allemands nazis : l'enthousiasme de Tunisiens arabes musulmans pour les Nazis, la foi des Français et des Juifs dans la victoire des Alliés, etc. Conservé en Grande-Bretagne, récemment traduit en hébreu par Dr. Haim Saadoun, ce Journal est composé des rapports envoyés par Walter Rauff aux dirigeants nazis à Berlin.

En novembre 1942, les forces de l'Axe commandées par Erwin Rommel ont été vaincues par les Alliés lors de la bataille d'Al Alamein". Ce qui a empêché une deuxième avancée des forces de l'Axe en Egypte. Parallèlement, les forces américaines sont entrées au Maroc et en Algérie (Opération Torch) et ont avancé vers la frontière algéro-tunisienne. Pour empêcher que les forces germano-italiennes soient prises au piège lors de leur retraite de Libye, les Allemands ont envahi la Tunisie pour établir un pont. Pendant six mois, la Tunisie a été un front de la Seconde Guerre mondiale, au sud et au nord.

En décembre 1942, des officiers allemands de hauts rang se sont réunis pour une rencontre crucial portant sur les 24 camps de travail forcé dans le pays, et où des milliers de jeunes Juifs ont été contraints de se rendre.

Rationnel, organisé, Rauff constate le 25 novembre 1942 Français et Juifs "parlent ouvertement de la future conquête du pays par les forces ennemies. Ils sont pleins d'espoir, à la différence des Arabes, très stressés et déprimés".

Chef de la Gestapo, Rauff écrit : "J'ai ordonné de marquer par une étoile jaune tous les Juifs qui viendront pour le travail forcé. Le financement, nourriture et logis, sera assuré par les Juifs eux-mêmes".

Dans son journal, Clément Hori, Juif tunisois, occupe un modeste poste administratif dans l'entreprise d'un Juif italien, Gido Montifiori, écrit dans son journal : " La nuit dernière a été bruyante en raison des bombardements qui ont commencé à 21 h et n'ont pas cessé toute la nuit". Il relate les exigeances de Rauff à l'égard de la communauté Juive pour qu'elle assume le coût des Juifs tunisiens en camp de travaux forcés : " Le montant est de 20 millions par mois, et on demande aux Juifs riches de se réunir et de réunir le montant pour satisfaire les exigences allemandes". Hori relate le récit d'un jeune Juif s'étant échappé d'un de ces camps de travaux forcés et décrivant les conditions horribles dans ce camp.

La deuxième semaine de décembre 1942, les deux journaux évoquent la décision des Allemands d'interdire aux Juifs non italiens de détenir des radios. Rauf évoque l'aide de la police française dans la confiscation des postes de radios. Les Allemands voulaient empêcher les Juifs de se tenir au courant de ce qui se passait en Europe, et de permettre aux Allemands d'être informés sur le front nord-africain via la couverture de la BBC.

Dans son journal, Rauff décrit la population Arabe tunisienne et sa coopération avec les Nazis : " La communauté Arabe est amicale avec les Allemands et volontaire pour l'aider... Les Arabes qui nous ont accompagnés de l'aéroport vers la ville... nous ont donné les adresses de Juifs dont les maisons et voitures combleraient nos besoins. Le recrutement des Juifs pour le travail forcé a eu un impact positif sur l'atmosphère dans le secteur Arabe".

Pour éviter d'être capturé par les Alliés, Rauff a fui, avec des dirigeants nazis de Tunisie vers Milan. Il a été cepndant arrêté par les Alliés, s'est échappé de son camp de prisonniers de guerre et a été caché dans un monastère à Rome. En 1948, il a été recruté par les services de renseignements de la Syrie, et a vécu à Damas pendant un an, avant de rejoindre l'Equateur, et de s'installer au Chili. En 1963, et sur demande du Centre Simon Wiesenthal, la République fédérale d'Allemagne a émis une demande d'extradition de Rauff. La cour suprême du Chili a refusé en alléguant que les lois chiliennes s'appliquaient aux crimes dont étaient accusés Rauff et de la prescription. Rauff est décédé de mort naturelle en 1984.

Avant Yom HaShoah, le 15 avril 2015, la télévision israélienne a diffusé Screaming silence (Un silence hurlant), documentaire de Ronnie Sarnat dans lequel sont évoqués les agressions sexuelles et les viols d'enfants et d'adolescents Juifs et d'adultes Juives commis par les Nazis et leurs collaborateurs, notamment dans les camps de concentration, de travail ou d'extermination -  les garçons Juifs contraints de se prostituer pour survivre étaient appelés piepels - et dans les pays occupés, telle la Tunisie. La documentariste a déclaré avoir consacré six ans à son film en raison des réticences des historiens à évoquer ce thème et de celles des victimes qui avaient gardé le secret sur les sévices subis et l'influence de ces derniers sur leur vie. Parmi les récits poignants de ce documentaire, celui d'un Juif violé, alors qu'il avait 13 ans, en Tunisie par un soldat allemand. Cette victime confie avoir eu ensuite, et toute sa vie, des problèmes d'identité. Yad Vashem a recueilli de nombreux témoignages de victimes..

On pourrait penser que ces persécutions antisémites font partie d’un passé révolu.

Or, en ce début de XXIe siècle, dans la France républicaine des présidences de Nicolas Sarkozy puis de François Hollande, la spoliation, les sanctions injustes et les harcèlements infondés d’institutions publiques ainsi que d’organismes privés visant le Dr Lionel Krief, médecin nucléaire à Creil et à Compiègne (Picardie) originaire d’Afrique du Nord, s’avèrent d’autant plus choquants.

Après la Chaine Toute l’histoire, en lien avec la programmation du Pré Festival et  du Festival Sefarad de Montréal (30 novembre-11 décembre 2014), ALEPH-Centre d’Études Juives Contemporaines de la Communauté sépharade unifiée du Québec (CSUQ) a diffusé gracieusement au Centre Gelber, le 18 novembre 2014, de 19 h 30 à 21 h, « Les Juifs d'Afrique du Nord pendant la Seconde Guerre mondiale », documentaire passionnant et émouvant de Claude Santiago  (1949-2012), décédé après la réalisation des interviews, et d'Antoine Casubolo Ferro (2013). Ce film sera présenté par Ariel Danan, historien, directeur adjoint de la Bibliothèque de l'Alliance israélite Universelle (AIU) et responsable de la médiathèque Alliance Baron Edmond de Rothschild (France). 

Le Centre Darius Milhaud d'Aix-en-Provence a présenté gracieusement le 25 février 2015, à 18 h 30, ce documentaire en présence de Guy Hazzan, historien, et Jacky Ayache, vice-président de la Ciap. Entrée libre, mais réservation indispensable. "En 1940, lorsque la France s'effondre face à l'Allemagne nazie, elle n'a pas les frontières d'aujourd'hui. Elle s'étend de Dunkerque à Tamanrasset et de Tunis à Rabat. Peuplée essentiellement de musulmans, l'Afrique du Nord abrite également une communauté juive, d'environ 3% de la population, soit 400 000 personnes pour lesquelles le régime de Vichy va donner toute la mesure de son antisémitisme. En Algérie, et en Algérie seulement, pire qu'en métropole le numerus clausus s'applique jusque dans les écoles primaires. 30 000 enfants en sont frappés. Au Maroc, la mesure la plus significative de la discrimination des Juifs fut le retour obligatoire au Mellah. A Fès, cette mesure fut appliquée sans aucune dérogation. À Tunis, les Allemands procèdent à la grande rafle du 9 décembre 1942. Mais il faudra attendre le mois de novembre 1943 et l'éviction du général Giraud pour voir l'annulation de toute la législation antisémite de Vichy et le rétablissement du décret Crémieux…"

Le 20 décembre 2015, le Prix de la Liberté “Martin Luther King Jr-Rabbin Abraham Joshua Heschel” a été remis à titre posthume à Feu S.M. le roi Mohammed V, lors d'une cérémonie en la synagogue B’nai Jeshurun, à New York (Etats-Unis). Ce Prix a été décerné par les étudiants et professeurs de KIVUNIM "en reconnaissance de ses actions héroïques pour protéger les Juifs du Maroc de la législation raciste et antisémite du gouvernement de Vichy de la France coloniale. Il s’agit d’une “reconnaissance des convictions profondes et de la démarche morale et politique courageuse de notre vénéré roi Mohammed V, que Dieu ait son âme, qui a pris sous son aile protectrice ses sujets de confession juive durant une phase critique de notre histoire” [la Seconde Guerre mondiale], a indiqué M. Serge Berdugo, ambassadeur itinérant de Sa Majesté le Roi du Maroc Mohammed VI.

Or, le roi Mohammed V n'a pas protégé les Juifs vivant au Maroc. "

Quant aux statuts des Juifs de Vichy d’octobre 1940 et de juin 1941, le Sultan du Maroc les appliquera à la lettre. Il ne s’oppose à aucune mesure prévue par ces deux statuts. Il n’y a que dans le volet économique qu’il tente légèrement de protéger la communauté juive du Maroc. Cette intervention n’est pas désintéressée, car elle sert surtout les intérêts économiques du Makhzen (gouvernement du Sultan). Sur l’essentiel, le Sultan Mohammed n’a pas protégé les Juifs puisqu’il a même promulgué les statuts des Juifs en Dahir (décret) chérifien", a expliqué l'historien Georges Bensoussan, en 2012.

Le 20 décembre 2015, le Prix de la Liberté “Martin Luther King Jr-Rabbin Abraham Joshua Heschel” a été remis à titre posthume à Feu S.M. le roi Mohammed V, lors d'une cérémonie en la synagogue B’nai Jeshurun, à New York (Etats-Unis). Il s’agit d’une “reconnaissance des convictions profondes et de la démarche morale et politique courageuse de notre vénéré roi Mohammed V, que Dieu ait son âme, qui a pris sous son aile protectrice ses sujets de confession juive durant une phase critique de notre histoire” [la Seconde Guerre mondiale], a indiqué M. Serge Berdugo, ambassadeur itinérant de Sa Majesté le Roi du Maroc. Or, le roi Mohammed V n'a pas protégé les Juifs vivant au Maroc.

Le 19 mars 2017 à 14 h 30, le Mémorial de la Shoah organisa, autour de la parution du n° 205 (octobre 2016) de la Revue d’histoire de la Shoah, la conférence Les Juifs d’Orient face au nazisme et à la Shoah (1930-1945). 

"Les communautés juives dispersées de l’Orient arabe sont frontalement frappées par la guerre, de Vichy dans le Maghreb français à la Tunisie occupée, à la menace allemande sur l’Égypte et la Palestine, au pogrom enfin de Bagdad le 1er juin 1941. Ces persécutions, ces désillusions et ce climat de peur expliquent qu’en 1945 les Juifs d’Orient jugent leur avenir moins assuré que jamais". En présence d’Ariel Danan, directeur adjoint de la bibliothèque de l’Alliance israélite universelle, Emmanuel Debono, historien, ENS de Lyon, Haïm Saadoun, directeur du centre de documentation et de recherches sur les Juifs d’Afrique du Nord durant la Seconde Guerre mondiale, Institut Ben Zvi, cette conférence sera animée par Georges Bensoussan, historien, responsable éditorial, Mémorial de la Shoah.

Le 28 novembre 2017, Harif, association de Juifs originaires d'Afrique du nord et du Moyen-Orient, présentera Night of Fools, de Rami Kimchi. "Tuesday 28 November 2017, 7.30 for 8pm. UK Premiere. This documentary film (56 mins)  tells the story of “Operation Torch” – the code name for the American landing in French-ruled North Africa, and the central role in it played by the Algerian underground, which was almost entirely made up of Jews. With only 400 volunteers versus the Vichy garrison of 25,000 troops, the underground succeeded in taking control of Algiers for one night, before handing the city over the Americans, who arrived via an amphibious landing the next morning. Director Rami Kimchi, an Israeli culture critic and filmmaker, will be joining us to take the Q&A afterwards. JW3, 341 – 351 Finchley Road, NW3 6ET. £10." 

Veronique Chemla

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